Le président Macron : pour l’Europe ou contre le RN ?

Emmanuel Macron s’implique activement dans une campagne morne. Mais se bat-il pour l’idéal européen ou pour tenter d’éviter une victoire du Rassemblement national ? OPINION

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Conférence de presse d'Emmanuel Macron - 25 avril 2019

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Le président Macron : pour l’Europe ou contre le RN ?

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 12 mai 2019
- A +
Par Philippe Bilger.
Mon alternative n’est pas de pure forme.

Après avoir entendu Nathalie Loiseau se vanter d’être un barrage contre l’extrême-droite puis se taire après la polémique sur son affiliation étudiante, le président de la République a décidé de reprendre le flambeau mais il le fait d’une manière qui surprend comme s’il avait lui-même intégré la probabilité d’une défaite de la liste de LREM.

En effet, sinon, à quoi rimerait ce volontarisme affiché qui l’a conduit à déclarer : « Je mettrai toute mon énergie pour que le RN ne soit pas en tête » ? Ajoutant que lui était « patriote français et européen » quand le RN était « nationaliste ».

On avait bien compris que s’il ne joue pas absolument son avenir politique avec l’élection européenne du 26 mai, il y attache toutefois une importance considérable puisqu’elle sera un marqueur officiel de l’estime et de la confiance démocratiques qu’on lui porte, au-delà de la fronde durable des Gilets jaunes, qui peut laisser croire à une désaffection profonde alors qu’elle est seulement indicative et fragmentaire.

S’investissant dans la campagne européenne avec une implication qui n’a jamais été celle de ses prédécesseurs, quels qu’aient été les enjeux, il va naturellement être comptable d’une issue défavorable et, dans sa logique d’opposante principale et exclusivement ciblée, Marine Le Pen en tire cette conclusion gaulliste quand elle affirme que le président qualifié de « chef de parti », devra partir s’il est défait .

Peut-on à la fois s’approprier une élection et ne pas assumer ses conséquences ? Cette question est une clause de style puisqu’on sait évidemment qu’Emmanuel Macron demeurera, sans s’attarder sur sa légitimité qui sera encore davantage mise à mal au cas où sa liste serait à la deuxième place.

Je rejoins le président Larcher qui s’est étonné du véritable meeting qu’Emmanuel Macron a tenu en Roumanie. Comme si le président, perdant ses repères et gangrené par le doute, avait des comportements qui dérogeaient à ce que son esprit républicain lui aurait fait refuser hier.

Après avoir changé de ton sur la « lèpre » qu’auraient été certains populismes — autre nom pour des démocraties sans doute autoritaires mais validées par leur peuple — parce que le président s’était rendu compte qu’en ne cessant de les accabler, il leur donnait du lustre, Emmanuel Macron semble s’être rabattu sur notre « populisme » national que serait le RN.

Cette manœuvre et cette insistance risquent d’être contre-productives.

D’abord l’élection européenne, avec son abstention probablement importante, est sans doute celle qui correspond le mieux à la dénonciation que le RN se plaît à formuler et à ressasser contre tous les dévoiements de l’esprit européen, selon lui, et à la dépossession qui en résulterait pour notre pays.

Ensuite nous ne sommes plus au second tour de l’élection présidentielle en 2017 et l’aura que diffusait alors le candidat Macron a été largement dégradée par le parcours contrasté du président durant ces deux premières années.

Enfin — c’est le plus important —, le président accentue ainsi une tendance fâcheuse de la politique française qui, tout en traitant avec un grand mépris républicain le RN et en tenant pour excessives ou indignes ses solutions, ne cesse de se situer par rapport à lui. Le RN n’a même plus besoin de prouver qu’il est le centre du débat public puisque ses adversaires le font pour lui. Il est dispensé d’avoir à imposer sa vision européenne puisque le président, s’il la récuse absolument, ne se fixe pour objectif que de la battre en brèche. Cette obsession, qui se souhaite belle et démocratique, a pour finalité perverse de projeter un encens paradoxal sur ce qu’on prétend combattre au premier chef.

Surtout Emmanuel Macron est-il si peu assuré de la cohérence et de la qualité de son propre projet, si peu confiant dans le soutien qu’il espère de ses alliés européens, qu’il se sente contraint, dans la campagne qui peine sur sa fin, de le reléguer au profit d’un combat singulier contre le RN ?

D’autant plus que le passé récent a été loin de démontrer une influence française déterminante sur ses partenaires européens, notamment l’Allemagne.

Cette étrange attitude n’autorise-t-elle pas cette interrogation provocatrice ?

Le président se bat-il plus contre le RN que pour l’Europe ?

Avec sa tactique il risque de perdre sur les deux fronts.

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  •  » toute son énergie  » , on souhaiterai qu’il l’a mette  » dans un autre moteur  » …..la baisse de la dépense publique par exemple….

  • si il voulait pousser le RN , il aurait pas pu faire mieux..
    serais ce une stratégie? pour pouvoir dire a l’europe , et aux fonctionnaires « si vous me tannez avec les déficits , vous aurez MLP a ma place dans 2 ans? »

    Chiche!

    • Bien vu, depuis quelques jours je me dis comme vous que cette attitude est pleine d’ arrières pensées politiques, il aura tout de même retenu pas mal du cynisme hollandais.

    • Oui, cette stratégie a l’avantage de préserver, et son pouvoir, et l’UE dont il se rêve le premier président. Or le premier obstacle n’est pas le vote des Français, mais plutôt l’opinion allemande.

  • Avec les droits rognés des français de l’étranger, en ne tenant pas compte du séjour dans l’UE, une forme de nationalisme masqué, en fait il fait le travail du RN.

  • Si il agit de cette facon sans doute qu’il a ses raisons.
    Je constate que la qualite du choix des tetes de listes est tres importante, quand on choisit des gens ineligibles c’est volontaire.
    Par exemple, lors des dernieres elections le ps choisit le plus mauvais des leurs hamon ,le ps est mort.la droite choisit fillon , la droite est morte.
    Aujourd’hui ,l’oiseau..pas serieux pour lerm, lr choisit un inconnu au mauvais profile , echec assuré…pour lepen on sait qu’il s’agit d’un vote protestataire pas de conviction ,et la contestation est dans l’air
    !
    Jupiter a besoin de faire peur sur autre chose que lui meme et ses amis ont peur..et puis , un depute europeen,ca ne faut pas grand chose noyé dans la masse ,ils ne servent pas la politique en france, ils ne servent a rien.

  • Macron ne se bat pas pour l’Europe, mais pour l’UE, ce qui est différent.
    Et cette UE s’est construite dans le dos des peuples, et parfois contre eux, comme une entité politique supranationale qui évince les prérogatives des Etats. Cet objectif est emboîté dans une idéologie analogue au niveau mondial, portée par une élite transnationale coalisée autour des milieux financiers.
    Le péché originel du FN devenu RN est d’être « national », c’est-à-dire de considérer la nation comme socle de la décision à travers des processus démocratiques (qui donc consacrent le pouvoir du peuple). Cela n’implique pas, de soi, une quelconque fermeture ou repli sur soi, contrairement aux caricatures de Macron (nationalisme, populisme…).

  • Le problème est que le souci de sauver ses miches lui occupe tellement l’esprit, que cela se ressent pour l’auditoire quel que soit le thème du discours.
    Il transpire tellement la trouille que nous la sentons à chaque intervention.
    Il pourrait en cela nous sembler plus humain que l’autre andouille de Hollande, tellement déconnecté qu’il n’avait même pas peur.

    Mais il est là où il voulait être, alors qu’il encaisse ou dégage…

    Comme on dit chez nous,
     » Steigerung: Dumm, Soïdumm, Freiwìllig ! »

    ( Progression: bête, très bête, volontaire ! )

    • Micron est un gros narcissique. Une défaite aux élection et son ego va prendre un gros coup. Je plains ces proches : ils vont ramasser grave. On ne peut pas injurier les gens du matin au soir comme il le fait et leur demander de l’aimer en retour. Si ça pouvait l’aider à prendre conscience qu’il ne devra pas se présenter pour un second mandat, ce sera un grand pas en avant.

  • Au départ, le FN à été poussé par les socialiste (Mitterrand) pour gêner la ‘droite’. Aujourd’hui, la PME LePen grossit, grossit, au point de faire peur à ceux (et leurs successeurs) qui en avaient besoin. Le seul rempart contre les extrêmes, ce serait des hommes politiques et un état honnête, efficace (économiquement), et modeste financièrement parlant.

  • Monsieur Bilger, vous avez raison. Je n’ai pas toujours partagé vos interprétations, mais cette fois je suis entièrement d’accord avec ce que vous dénoncez et regrettez.

  • Uniquement pour lui, car ce con se voit comme le leader de l’Europe, alors qu’elle se fout de sa tronche de petit incompétent vaniteux!

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