Les aventures gênantes de Captain Euroringard et des Eurolapins crétins

La campagne pour les élections européennes est lancée, et avec elle, des messages bizarres et ambigus qui ne donnent pas envie d'aller voter...
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Les aventures gênantes de Captain Euroringard et des Eurolapins crétins

Publié le 3 mars 2019
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Ça y est, je crois qu’on peut l’affirmer avec force : la campagne pour les élections européennes vient de commencer. Certes, en France, elle a débuté à la minute où Emmanuel Macron a lancé son Grand débat qui n’est rien d’autre qu’une campagne traditionnelle sous amphétamines camouflée dans la collecte de questions calculées. Certes. Mais pour le reste des Européens, on peut le dire, c’est bon, ça vient de commencer.

Qu’est-ce qui me fait dire ça ?

Il y a des signes qui ne trompent pas : on voit apparaître des petits articulets sur le sujet, on commence à voir se pointer de nouveaux prétendants et de nouvelles têtes de liste un peu partout dans la presse. Mais surtout, on sait qu’elle a commencé dès lors que les institutions de l’Union Européenne tentent de rappeler au citoyen les enjeux de ces élections, ainsi que, dans la foulée, de redorer leur image passablement écornée par les derniers rebondissements européens, depuis le Brexit jusqu’aux tensions internes liées aux migrations plus ou moins contrôlées en passant par le terrorisme et certains tiraillements économiques entre pays membres.

Bref, tout ceci donne d’excellentes raisons à de fiévreux départements de communication et à des think-tanks ou autres lobbies pro-européens pour lancer, illico presto, des communications par différents moyens dont la pertinence est parfois sujette à caution pour le dire gentiment.

Concrètement, on se retrouve par exemple avec l’initiative – certes privée, et certes payée par de l’argent privé, c’est toujours une consolation – de Pulse of Europe qui nous fait découvrir ses Lapins Crétins Eurolapins dont l’humour qu’on qualifiera pudiquement de décalé a déjà provoqué quelques petits remous dans les internets et auprès d’un public jeune particulièrement prompt à voir le décalage entre le message qu’on souhaite faire passer (« L’Europe, c’est trop cool ») et le message perçu (« Vous êtes des enfants de 5 ans »).

Malaisation et doutage, gênitude et ambiguïté, impression persistance d’un second degré difficile à capter, ces Eurolapins vraiment pas très malins ont atteint un but : faire parler d’eux. L’autre but, celui d’intéresser les gens à l’Europe, a probablement été raté puisque la tentation du moquage de visage est particulièrement difficile à réfréner.

Un autre niveau est atteint lorsqu’on (re)découvre la communication du Parlement Européen et son Captain Europe, tout de spandex bleu vêtu et arborant fièrement, sous un tricorne furieusement tendance au XIXe siècle, un magnifique moule-burnes doré qui laisse un peu perplexe sur le message qu’on a ainsi souhaité faire passer.

Au départ, l’idée est semble-t-il d’inciter les gens à voter. C’est compréhensible : l’abstention érode clairement la crédibilité des députés qui, si elle devenait trop forte, ne leur permettrait plus de se targuer de représenter quiconque pour réguler la taille des cornichons ou imposer une nouvelle taxe sur (au hasard) les sociétés de streaming cinématographique…

Concrètement, cela donne ça :

C’est assez consternant, on en conviendra, mais notons tout de même que ces efforts traduisent une belle continuité de la tendance générale entamée il y a quelques décennies d’incursion des institutions et des lobbies de l’Union Européenne dans la communication grand public, de façon à la fois extrêmement maladroite et franchement en bordure avec le malaise social gênant.

On se rappellera par exemple d’une précédente vidéo visant à montrer l’importance de l’Europe et de son union face à la montée en puissance des pays émergents, et qui avait été retirée en urgence devant le malaise provoqué. Vidéo qu’on retrouvera ci-dessous. Ce n’est pas charitable mais c’est rigolo et c’est avec vos sous.

Dans la même veine, on pourra évoquer les tentatives consternantes de certains entrepreneurs qui, on ne sait trop sur quels fonds, parviennent à produire des avatars comme Captain Euro (c’est globalement les mêmes idées que notre cycliste à tricorne ci-dessus, mais en version bande-dessinée). Le pauvre super-héros, d’une ringardise presque touchante, avait quelque peu défrayé la chronique il y a quelques années lorsqu’on découvrait que son principal adversaire répondait à certains stéréotypes que l’Union Européenne tente pourtant de gommer ; le billet que j’avais produit à l’époque explique bien le contexte.

Là encore, l’épluchage des productions « vantant » l’Union Européenne laisse perplexe avec cette question lancinante : s’agit-il d’une critique acide et particulièrement second degré de l’Union Européenne ou est-ce d’un premier degré si mal fichu qu’on croirait voir l’acharnement d’un spécialiste du tuning sur un Fiat Multipla ?

Difficile à dire.

Reste qu’entre Captain Europe et les Eurolapins, tout ceci peine à donner un peu de crédibilité à la machine européenne dont le stock a été pas mal épuisé dernièrement, nonobstant la performance olympique de son président.

Ceci posé, il ne faudrait surtout pas croire que cette critique de ces institutions, infoutues de communiquer de façon idoine avec ses citoyens, est spécifique à l’Union Européenne. En pratique, elle s’applique tout autant à la bureaucratie française.

De façon fort générale, c’est une constante navrante mais facile à documenter : les expertocraties françaises et européennes s’adressent aux populations comme à des abrutis finis.

Et si on peut (on doit) effectivement se moquer grassement de l’Union Européenne et ses thinks-tanks maladroits qui communiquent avec des crétins en costumes de Prisunic et des dessins animés caricaturaux d’animaux à l’intelligence manifestement contrariée, on ne doit pas oublier que, côté gouvernement français, on s’appuie sans hésiter sur un cador comme Cyril Hanouna ou une séance particulièrement pénible de ministres sur Twitch pour tenter de parler « directement » aux djeunes et aux Gilets jaunes.

En fait, pour l’Europe et la France, c’est un combat similaire : l’électeur n’est pas réellement un adulte (après tout, il vote ce qui veut dire qu’il n’est jamais complètement sorti de cette phase où l’on croit au Père Noël), ce qui semble justifier avec décontraction une infantilisation constante, une déresponsabilisation au maximum et un esprit de débat démocratique résolument à zéro.


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  • Le dernier paragraphe est terrifiant de justesse

  • Un nouveau billet de h16 un Dimanche, et qui n’est pas sur son blog en plus ! Miam !

  • Oo n’attend plus que Captain H16 se fasse élire et nous mette tout ca en ordre…
    yapukafokon 🙂

    • Le concept de libéralisme, prêché par beaucoup de lecteurs de ce site et par H16 aussi, est que l’état, n’importe lequel, n’a que comme mission le régalien. Or la communication politique est totalement hors du champ régalien. C’est du gaspillage d’argent public, couplé à du foutage de gueule et un fort manque de respect.
      Donc ou vous n’avez rien compris au libéralisme, et vous avez de longues soirées de lecture devant vous, ou vous avez exactement l’âge mental du public cible des campagnes que vous semblez défendre….

  • Ils auraient peut-être du s’appeler « Eurocrétins » et « Captaine Déroute ».

    Goebbels doit se retourner dans sa tombe devant tant de nullité.

    De fin 1998 à début 2002, une émission de Christine Bravo faisait la promotion de l’Europe. Elle ciblait l’affectif, la découverte, la fête. Les producteurs, présentateurs, intervenants étaient plutôt bon. Tout le contraire des demeurés qui nous pondent les campagnes de Juste-Pensance actuelle.

    De toutes façons, ils ont bien essayé (en vain) de relancer l’émission mais les lapins technocrates crétins de Bruxelles ont totalement sabordé l’enthousiasme européen.

  • Parfois et de plus en plus souvent, je me demande si les lapins crétins sont plus intelligents que les polytocards, français ou européens!
    Après tout, ce n’est probablement pas si difficile face à des irresponsables…

  • Derrière ces niaiseries, un projet qui n’a rien de réjouissant, sauf si l’on se résout à passer de la bienfaisance (proclamée) de l’Etat français à celle de la Commission européenne….
    Pour ceux qui ont le temps, la lecture de « cet étrange mondieur Monnet » permet de prendre le recil de l’histoire et de comprendre ce qu’est en réalité le projet européen.

  • Perso j’aime bien les lapins crétins. Les comparer à des pourritures politique m’attriste. Il y a des choses à faire en Europe (légalement), mais si vous le faites alors le Fisc vous tombera dessus un samedi à 4h du matin. Au départ l’EU était une bonne idée (un poil licornesque et utopique), mais le sentiment était bien. Maintenant ça vire au bolchevisme gras. Ça va exploser un de ces jours. C’est inévitable. Des pays comme la Hollande ou la Pologne n’ont rien à y faire. Le reste suivra.

  • Le titre fait déjà saliver…
    L’article confirme le teasing.

    Comment peut on encore croire à l’Europe ??
    Nous avons perdu l’illusion d’être une Démocratie en France…et on veut nous faire croire que l’Europe est un ersatz présentable, nécessaire et utile compte tenu des obstacles à franchir lors de la mondialisation débridée.
    Je ne parle pas des aspects de sécurité où sa meilleure métaphore s’approche mathématiquement de l’ensemble vide.

    Qui peut se sentir protéger, d’une quelconque façon, et dans quel domaine, par l’Europe ?

    Quant au « débat démocratique » européen de l’épilogue…
    « Nous on s’en fout on a le grand débat » ! »

    N’y aurait il pas une ou plusieurs autres solutions ?

    • « croire à l’Europe ?? »
      L’idée européenne et ce qui en est fait ou la façon dont sont gérées les institutions, ce sont trois choses bien distinctes.

    • Protégé par l’Europe ? Quand on se souvient qu’Europe fut violée par Zeus, forme grecque de Jupiter, déguisé en taureau blanc, on peut avoir des doutes sur ses capacités de protection…

      • Je dirais qu’Europe s’est faite baiser par Jupiter.
        Était-elle consentante ?
        Par analogie avec les électeurs de notre Jupiter.

        • Il s’est déguisé en taureau pour ne pas l’effrayer, l’a enlevée, baisée, lui faisant 3 enfants, mais l’aurait offerte au roi Astérion avant même qu’elle n’accouche des trumeaux en question. Comme on raconte l’histoire aux enfants, on ne dit pas ouvertement qu’il l’a violée, mais ça fait quand même un faisceau de présomptions.

  • Je n’arrive même plus à rire tant je suis affligé : je me doutais que le ridicule Capitain Europa n’était pas une « malheureuse initiative personnelle » (comme a ensuite dit Bruxelles) mais bien un élément cohérent dans la stratégie de com de nos institutions européenne, mais je ne me doutais pas que c’était à ce point….
    Bref, je n’arrive même plus à rire, devant autant de nullité bruxelloise, avec notre argent et penser pouvoir décider pour nous…

  • Je ne sais plus si je dois en rire ou en pleurer de toutes leurs c..ies.

    Affligeant à ce point , on peut se rassurer en se disant que ça sent la fin de règne.

  • Les commentaires sont fermés.

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