Comment déraciner la pauvreté en Afrique ?

La principale cause de la pauvreté chronique en Afrique a été une chaîne sans fin de mauvaises décisions prises par ses dirigeants au cours des cinquante dernières années.

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Comment déraciner la pauvreté en Afrique ?

Publié le 10 janvier 2019
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Par Jorge C. Carasco.
Un article de Libre Afrique

En mars 1957, Kwame Nkrumah proclama l’indépendance de la Gold Coast britannique et changea son nom en Ghana. Nkrumah avait un profil particulier, formé dans les universités britanniques et américaines, il était convaincu de deux choses : la première était que seule l’indépendance permettrait aux peuples africains de surmonter leur retard séculaire ; la seconde était que pour y parvenir, la voie idéale à suivre était une sorte de socialisme africain qu’il appelait le consciencisme.

En Occident, Nkrumah était très populaire. Les Rois et les Présidents l’ont célébré lors de réceptions et ont apprécié sa compagnie. Il ne pourrait en être autrement avec un homme si charismatique qui, dans ses discours, prétendait avoir le remède infaillible « contre la pauvreté et la maladie ». Il n’a réussi à éradiquer aucune des deux.

À la place, Nkrumah devint un dictateur brutal qui, soutenu par les Soviétiques, planifiait avec autorité l’économie de son pays avec des résultats désastreux. Dix ans après l’indépendance du Ghana, l’une des colonies britanniques d’outre-mer les plus prospères s’est visiblement appauvrie et militarisée.

Les fausses raisons de la pauvreté de l’Afrique

La triste histoire du Ghana a été similaire dans presque tous les pays au sud du Sahara. À quelques exceptions près, comme le Botswana, aucune des anciennes colonies européennes n’a réussi à se développer. Tandis que des pays d’autres régions du monde, notamment d’Extrême-Orient, ont connu une croissance significative et ont même rejoint le groupe des pays les plus riches au monde, l’Afrique noire reste aussi pauvre voire plus pauvre que lorsqu’elle a accédé à l’indépendance.

Les données brutes laissent peu de place à l’interprétation. Le PIB de l’Afrique est inférieur de 70 % à celui de l’Asie et de 80 % à celui de l’Amérique latine. De nombreuses raisons ont été données pour expliquer le retard des pays d’Afrique. On a dit qu’ils ne pouvaient pas se développer parce qu’ils étaient des colonies et que le néocolonialisme les en empêchait. Mais le Vietnam était aussi une colonie, par exemple, et a dû subir vingt ans de guerre civile. Aujourd’hui, c’est un pays dont l’économie a une croissance soutenue, et à qui l’avenir sourit.

La pauvreté a été attribuée au manque d’infrastructures et de capital humain. Aucun pays pauvre n’a de bonnes infrastructures avant qu’il ne sorte de la pauvreté. L’infrastructure est financée par la prospérité et, en ce qui concerne le capital humain, l’Occident a affecté des milliards de dollars à des programmes de formation professionnelle pour préparer les travailleurs locaux.

Pourtant, les gouvernements africains se sont obstinés dans leurs politiques de développement généralement peu judicieuses et toujours opaques. Ils ont fait exactement le contraire de ce qui aurait dû être fait. Bien que les Africains travaillent très dur, ils restent très improductifs, ce qui n’est pas surprenant compte tenu de la faible capitalisation de leurs économies et de la série de réglementations avec lesquelles leurs gouvernements les étouffent.

Quand l’État joue le barreur de route

Entreprendre au sud du Sahara est héroïque. Ouvrir une entreprise dans presque tous les pays africains est un processus incertain, long et coûteux, qui aboutit souvent à d’innombrables pots-de-vin. Quiconque traverse l’Afrique le sait. Voyager à travers le continent signifie rencontrer tous les quelques kilomètres des postes de police qui vérifient les visas et réclament des pourboires dans des pays pratiquement sans état de droit.

Tous ces obstacles à la création de richesses n’ont pas été imposés par les anciennes puissances coloniales mais par les gouvernements arrivés plus tard. La principale cause de la pauvreté chronique en Afrique a été une chaîne sans fin de mauvaises décisions prises par ses dirigeants au cours des cinquante dernières années.

Le continent champion de la pauvreté

La richesse naturelle légendaire du continent n’a été d’aucune utilité. Tout a été dilapidé. Par exemple, depuis son accession à l’indépendance en 1961, le Nigeria a tiré plus de 500 milliards de dollars de la vente de pétrole. Une richesse naturelle qui aurait permis à ce pays de décoller comme tant d’autres pays qui ont commencé à vendre des produits de base. Mais malheureusement, ce n’est pas le cas. Selon un rapport de la Brookings Institution, le Nigeria a déjà dépassé l’Inde en ce qui concerne le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté (avec au moins 87 millions de personnes dans ces circonstances, contre 70,6 millions en Inde).

Dans son livre intitulé Resource Abundance and Economic Development, Richard M. Auty, professeur de géographie économique à l’Université de Lancaster, souligne que la présence de ressources naturelles en grande quantité ne prédestine pas un pays à la prospérité. Auty explique que l’abondance des revenus tirés de ces activités dans les pays non développés tend même à aider les politiciens et l’administration à les gaspiller plus facilement en investissements non rentables et en dépenses ostentatoires, sur fond de corruption.

Cet « effet de voracité », comme le nomme Auty, finit presque toujours par provoquer une stagnation de la croissance par le biais d’une utilisation abusive des fonds publics. Ceci dit, le continent est en train de changer radicalement. La pauvreté en Afrique est un problème mondial qui devra être résolu au cours des prochaines décennies.

Malheureusement, il reste encore beaucoup à faire. Le socialisme africain à la Nkrumah a lamentablement échoué, tout comme le mercantilisme parrainé par les dictateurs et les bureaucrates de la région au cours des vingt dernières années, qui n’a fait qu’enrichir les élites et a attisé la corruption, le népotisme et les guerres pour le contrôle de l’appareil d’État sur tout le continent.

Bien entendu, les racines de la pauvreté africaine sont probablement plus profondes que ce qui est traité succinctement dans cet article. Cependant, il reste encore à comprendre comment certains pays pauvres dans les années 1950, comme la Corée du Sud ou Taïwan, ont été propulsés dans le groupe des plus riches. La question non résolue pour les Africains consiste peut-être déjà à regarder leurs trajectoires et à s’inspirer des bonnes pratiques, par exemple : à ouvrir leurs économies et à entrer dans la mondialisation plus activement au lieu de la subir, à sécuriser leur cadre juridique protégeant l’investissement et à instaurer un véritable état de droit dans lequel le droit régit, et non le populisme.

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  • Comment déraciner la pauvreté en Afrique ?
    En la re-colonisant.
    Ou alors, en regardant les choses en face: les Africains, dans leur contexte africain, sont ils capable de quoi que ce soit ?
    Toujours plus facile d’accuser ces salauds de blancs coloniaux et autres boers (les chinois qui viennent vont être bien pire que nous…) que de se remettre en question.
    A suivre, l’histoire du retour en Afrique des trésors africains, actuellement détenus dans des musées occidentaux. Si c’est le cas, dépêchez vous d’aller les voir, parce que je crains qu’en Afrique, ces trésors ne soient laissés a l’abandon.

    • « les Africains, dans leur contexte africain, sont ils capable de quoi que ce soit ?


      @Cernu : La réponse est oui. Il existe en Afrique (Afrique noire) un pays dont les médias ne parlent pas assez, précisemment parce que ce pays fait voler en éclat la plupart des clichés que nous avons au sujet du continent africain. Ce pays est très peu corrompu, il est doté d’une incroyable croissance économique, et ses habitants sont presque aussi riches que les habitants d’un pays européen comme la Grèce.

      Fort heureusement, vu que contrepoints.org est un média de qualité (comparativement à ses concurrents), l’article ici présent n’a pas commis l’erreur d’oublier de mentionner ce pays, il s’agit du voisin du Zimbabwe : le Botswana.

      Tout comme les succès de la Corée du Sud prouvent que les échecs de son voisin la Corée du Nord sont liés à l’ absence de liberté et non pas au fait que « les asiatiques sont incapables de quoi que ce soit » , les succès du Botswana prouvent que les échecs de son voisin le Zimbabwe sont liés à l’ absence de liberté et non pas au fait que « les africains sont incapables de quoi que ce soit. »

      Outre le Botswana, il semble qu’un pays comme le Rwanda se porte lui aussi de mieux en mieux, malgré les séquelles laissées par le génocide…

      • Merci. Je ne connaissais pas outre mesure ce pays. J’ai personnellement une tendresse particulière pour le Bénin, étant parrain d’un officier béninois, et ayant servi dans ce pays. Bref, osef de ma vie.
        Cependant, une lecture rapide de la description du Bostwana sur wikipédia ne me fera pas forcément changer d’avis, en effet, je vous oppose, à cette « perle », exception qui confirme la règle, l’Afrique du sud, prospère il y a encore quelques années, et qui va bientôt mourir de faim, vu la politique actuelle de confiscation et redistribution des terres des fermiers boers à des africains « de souche ». J’espère vraiment me tromper, car contrairement à ce que mes propos peuvent laisser croire, je rève d’un monde riche, ou tous les hommes vivent heureux dans leurs pays, mais je pense qu’on va avoir une belle catastrophe, « zimbabwéenne »
        http://afrique.lepoint.fr/economie/zimbabwe-les-fermiers-blancs-une-epine-dans-le-pied-de-mnangagwa-11-02-2018-2193989_2258.php

        • «l’Afrique du sud, prospère il y a encore quelques années, et qui va bientôt mourir de faim, vu la politique actuelle de confiscation et redistribution des terres des fermiers boers à des africains « de souche ». »


          @Cernu : le problème actuellement avec les gens qui parlent de l’Afrique du sud est le suivant : généralement, les gens qui comprennent que l’Apartheid (c’est-à-dire la ségrégation forcée, c’est-à-dire l’absence de liberté, c’est-à-dire l’étatisme ) était une période horrible refusent d’admettre que l’Afrique du Sud d’aujourd’hui (l’Afrique du Sud post-Apartheid) est un échec.
          Inversement, les gens qui admettent que l’Afrique du Sud d’aujourd’hui est un échec tombent dans le piège de croire que l’Apartheid (l’étatisme ) c’était le bon vieux temps. La vérité c’est que, premièrement : l’Afrique du Sud a été prospère malgré l’Apartheid et non pas grâce à l’Apartheid. Ce qui signifie que ce pays aurait été ENCORE PLUS PROSPÈRE s’il n’y avait pas eu l’Apartheid (l’étatisme .) Deuxièmement, la vérité c’est que : l’Afrique du Sud d’aujourd’hui est un échec (pauvreté, corruption, violence, crimes racistes anti-blanc.) à cause de ces dirigeants politiques, non pas du fait de leur couleur de peau mais parce qu’ils sont socialistes.

          L’échec actuel de l’Afrique du Sud va-t-il s’aggraver ? Les fermiers blancs vont-ils disparaitre ? Vont-ils se faire massacrer ? Vont-ils encore plus se barrer à l’étranger ? J’ignore quelle est la réponse, mais une chose est sûre : il est urgent que les médias mainstreams occidentaux se réveillent. Ce n’est pas en occultant les crimes racistes anti-blanc et en produisant 50 000 docus sur Nelson Mandela comme si c’était un Dieu infaillible que la situation va s’améliorer.

          • Deux affirmations et « vérités » qui me semblent pour le moins préremptoire:
            1/ »Ce qui signifie que ce pays aurait été ENCORE PLUS PROSPÈRE s’il n’y avait pas eu l’Apartheid (l’étatisme .) »
            2/Deuxièmement, la vérité c’est que : l’Afrique du Sud d’aujourd’hui est un échec (pauvreté, corruption, violence, crimes racistes anti-blanc.) à cause de ces dirigeants politiques, non pas du fait de leur couleur de peau mais parce qu’ils sont socialistes.
            Crimes racistes anti-blancs parce qu’ils sont socialistes ? Ca ne fait aucun sens.

            Globalement d’accord avec vous pour le reste. Surtout le socialisme, et le fait que les « dirigeants » africains, tribaux, sont certainement une des plus importantes causes des problèmes des pays africains.

            Enfin, vu la vitesse à laquelle la France se transforme en pays africain, a tous les niveaux, de moins en moins de leçons à leur donner…

            • @Cernu : On s’est mal compris. Je vais reformer ma phrase pour qu’elle soit plus facile à comprendre : « l’Afrique du Sud d’aujourd’hui est un échec à cause de ces dirigeants politiques, non pas [parce que ces dirigeants politiques sont noirs] mais parce qu’ils sont socialistes. »

            • @Cernu : Pourquoi ai-je dit que l’Afrique du Sud aurait été encore plus prospère s’il n’y avait pas eu l’Apartheid ? Parce que l’Apartheid nuisait aux intérêts des capitalistes/créateurs de richesses. Par exemple, sous la pression des syndicats l’Etat mettait en place tout un tas de mesures parfois très subtiles (ex : réduction de la liberté de circuler ou d’habiter près du lieu de son emploi) qui avaient tendance à avoir pour effet de contraindre les capitalistes à embaucher des travailleurs blancs à la place de travailleurs noirs pourtant moins exigeants en terme de salaire et conditions de travail.

      • « Absence de liberté » ??? Du peu que j’en ai vu, il ne me semble pas que les africains étaient écrasés par les règlements et l’état de droit.
        Vous ne m’enlevez pas de l’idée que les africains, en généralisant, ne sont pas capables de développer et entretenir des sociétés de type occidental.

        • Le déficit d’Etat de droit (chronique dans beaucoup de pays africains) fait que des mafias, milices armées… remplacent l’Etat dans ses prérogative d’usage de la force.
          C’est au final encore pire pour les libertés et la propriété privée. Sans cela, aucun développement économique n’est possible. Sans espoir d’une amélioration de son sort, je peux comprendre le découragement des populations. D’où, à mon avis, les stéréotypes que l’on connait.

      • Le Rwanda n’est pas le seul pays a avoir subit un génocide, ou une situation de guerre intense, même récemment.

  • « l’abondance des revenus tirés de ces activités dans les pays non développés tend même à aider les politiciens et l’administration à les gaspiller plus facilement »
    un peu comme chez nous en France, mais vous remplacez les matières premières par l’argent des contribuables, pour un résultat qui va dans le même sens.

  • « … rencontrer tous les quelques kilomètres des postes de police qui vérifient les visas et réclament des pourboires dans des pays pratiquement sans état de droit. »

    J’ai passé 2 ans en Afrique, c’est vous dire le nombre de « péage » de police, gendarmerie, douane, eaux et forêts que j’ai passé …

    Comme vous le dites, le manque de liberté économique, l’abus de règlements, le manque d’infrastructures et la corruption sont probablement les principales causes de la stagnation.

    J’ai retiré de mon séjour en Afrique une sainte horreur de la corruption que je ne semble pas partager avec le reste des Français (voir le maréchal Ferrand qui n’a pas l’air de gêner grand monde). Pourtant je ne vois pas comment un pays pourrait être économiquement efficace avec des crapules à tous les niveaux de l’administration ?

  • Ce matin, sur France Culture, dans « culture monde », un éclairage intéressant sur une partie de l’Afrique, le Sahel (l’interminable lutte contre le terrorisme, le Sahel pris en otage), avec comme invité, Marc-Antoine Pérouse de Montclos
    Je vous le conseille:

    https://www.franceculture.fr/emissions/cultures-monde/culturesmonde-du-jeudi-10-janvier-2019

  • Ce n’est pas l’illustration de l’article original.

    L’auteur ne parle pas de la famine (dont l’image habituel est un enfant qui a faim), mais l’impossibilité pour une nation de se développer, de pouvoir capitaliser ses efforts et progresser, de constituer un bien commun qu’elle peut protéger par un sentiment fort unissant les citoyens.
    Soit ce que l’auteur semble vouloir démontrer par ses exemples asiatiques rapportés aux pays africains.

    Votre choix montre une vision simpliste et misérabiliste de l’article.

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