Budget : Macron sous la coupe des hauts fonctionnaires

Les annonces d’Édouard Philippe concernant les arbitrages budgétaires pour 2019 confirment qu’Emmanuel Macron est le président des fonctionnaires avant d’être le président des riches.

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Budget : Macron sous la coupe des hauts fonctionnaires

Publié le 27 août 2018
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Par Éric Verhaeghe.

Les annonces sont froides et sans ambages. Le gouvernement, dixit Édouard Philippe, supprimera progressivement la taxe d’habitation, et progressivement seulement. Il s’apprête à désindexer fortement les retraites et certains minima sociaux (0,3% d’augmentation pour une inflation qui s’approche de 2%). En contrepartie, il préserve la fonction publique en ne supprimant que 4.500 postes, là où il en faudrait 12.000 par an jusqu’à la fin du quinquennat pour tenir l’engagement de 50.000 suppressions en 2022.

Le président des fonctionnaires rend un arbitrage de l’ancien monde

À chaque arbitrage budgétaire, la même chanson revient : faut-il ou non éviter des coupes sombres dans la fonction publique pour préserver la paix sociale ? Car les fonctionnaires sont ceux qui préparent les dossiers au jour le jour, qui préservent la sérénité des ministres et qui, d’une façon ou d’une autre, tiennent le système. Les affronter en leur demandant de travailler plus et mieux suppose toujours une bonne dose de courage.

Le gouvernement Philippe n’a pas échappé au dilemme. Entre un Emmanuel Macron, inspecteur général des finances, et un Édouard Philippe, conseiller d’État, sans surprise, la balance a penché en faveur des fonctionnaires : ils subiront peu de suppressions de postes. La police verra même augmenter ses effectifs pour la énième fois.

Les efforts seront pour les autres. En particulier pour les pauvres. Les pensions de retraite seront partiellement désindexées. Comme les allocations logement. Comme les allocations familiales.

Les mauvais arguments d’Édouard Philippe

4.500 postes supprimés, ce n’est même pas une goutte d’eau dans le million de fonctionnaires que l’État appointe. Pour justifier ce faible chiffre de suppressions, Édouard Philippe a utilisé les arguments de la base syndicale dans la fonction publique : il faut attendre des gains de productivité pour supprimer des emplois.

Tous ceux qui ont pratiqué les gains de productivité ont entendu cette mauvaise rengaine : on améliore d’abord avec le personnel existant, puis on supprime les postes. Autant demander à des salariés de creuser leur propre tombe professionnelle. Comme si les fonctionnaires allaient faire différemment des autres, et mettre au point méthodiquement des réorganisations qui permettent de se passer d’eux.

Il existe une loi éternelle dans le monde du travail : ceux qui ont un travail ne choisissent jamais de le perdre en prouvant à leur encadrement qu’ils sont inutiles. La logique des organisations veut qu’un salarié préserve son emploi en expliquant à qui veut bien l’entendre qu’il est indispensable.

Bref, Édouard Philippe vient d’expliquer que Macron ne supprimerait pas les emplois qu’il a promis de supprimer.

La police augmente ses effectifs

De façon très révélatrice, Édouard Philippe a d’ailleurs annoncé qu’il créerait 2.000 emplois dans la police et la gendarmerie, DGSI incluse. Après l’affaire Benalla, on comprend bien le sens de cet arbitrage.

Cet été, l’exécutif a pu mesurer l’immense pouvoir de nuisance de la hiérarchie policière. Et encore, l’enquête n’a-t-elle pas cherché à savoir ce que contenait la fameuse armoire forte de Benalla, déménagée juste avant la perquisition. On ne peut s’empêcher de penser qu’un rapport de force s’est installé entre la police et le gouvernement, à l’abri des microphones et des télévisions. Tous ceux qui aujourd’hui entendent reprendre la police en main s’exposent-ils à des manoeuvres de déstabilisation ?

L’histoire le dira peut-être un jour. Mais il est curieux de mettre en résonance les chiffres de 10.000 suppressions de poste qui circulaient avant l’été, et ces soudaines créations d’emplois dans la police après l’affaire Benalla.

CAP 2022 bientôt enterré ?

Au passage, on peine à voir quelles seront les mesures préconisées dans le fameux rapport CAP 2022 qui seront mises en pratique dans la fonction publique.

Il s’agissait de réformer l’État et de diminuer la dépense publique. Toutes ces idées ont-elles volé en éclats ? Sont-elles abandonnées en rase campagne ? Après avoir hésité à publier le rapport, le gouvernement pourrait tout simplement décider de ne rien en faire. Et de considérer que la fonction publique n’a plus d’effort à faire.

L’affaire Benalla intimide-t-elle le gouvernement ?

Pourquoi la fonction publique est-elle si bien protégée par Emmanuel Macron ? Répétons-le, avant les vacances, c’est-à-dire avant l’affaire Benalla, il était question de 10.000 suppressions de postes, ce qui était déjà modeste. On est comme par magie tombé à 4.500 suppressions, ce qui est à peine le minimum syndical.

Faut-il voir dans ce revirement estival une conséquence immédiate de l’affaire Benalla ? Macron a-t-il mesuré en juillet son extrême faiblesse face à ses fonctionnaires ? L’affaire Benalla a-t-elle sonné comme un avertissement de l’État profond, de la technostructure, lancé à un exécutif qui voulait se montrer trop entreprenant ?

Cette version est d’autant moins à exclure que l’exécutif affiche son optimisme sur les suites de l’affaire. Visiblement, tout porte à croire qu’après ces arbitrages budgétaires, les choses devraient rentrer dans l’ordre. Pour Emmanuel Macron, pas pour le pays.

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  • Question naïve, mais quand même : Quelle est la part de contribution de Macron, et quelle est celle de Phillipe dans ces mesures ?
    A quel point les deux sont raccords, à quel point qui décide de quoi ?

  • Pourquoi chercher une excuse à l’incompétence. C’est perdre son temps.

  • « il faut attendre des gains de productivité pour supprimer des emplois »
    Travaillant dans le privé et en tant que manager d’une petite équipe j’avais essayé de faire valoir cet argument face à ma hiérarchie qui réclamait des coupes… la réponse a été cinglante.
    Mais là on parle de la fonction publique, c’est pas pareil.

    • Le problème vient peut être du « attendre ».
      -> et s’ils ne viennent jamais ?

      Les fonctionnaires n’ont – structurellement – aucune raison de chercher à s’améliorer, à être plus productifs.
      Et pour une raison simple : l’administration n’a pas pour but d’être rentable. Si elle a besoin de plus d’argent, elle le prend (impôts, etc.).

      Donc dire qu’il faut attendre une augmentation de productivité de leur part… Autant dire « jamais »

  • « Mais il est curieux de mettre en résonance les chiffres de 10.000 suppressions de poste qui circulaient avant l’été, et ces soudaines créations d’emplois dans la police après l’affaire Benalla. »
    10.000 postes supprimés, contre 10.000 postes créés pour faire appliquer la loi sur le harcèlement de rue. ‘sont forts en maths ces énarques !

  • en plus leur politique financière, c’est du n’importe quoi..il devait sois disant supprimer 10 000 fonctionnaires par an,dans quelle fonction ?ensuite il doive embaucher pour l’intérieur :police,gendarmerie,DGSE…alors pour que le chômage baisse les entreprises doit embaucher ,il faut une reprise économique, un coup de baguette là voilà !!!
    qu’il decide où pas, aucune maîtrise de la dépense publique ,bref du baratin,si,si…
    une partie de la population aura une restriction de pouvoir d’achat…déjà des associations se plaint de la diminution de dons !!! difficile d’avoir une comptabilité saine ,montant dons…frais de fonctionnement…masse salariale pour certains conséquente…c »est un peu n’importe quoi !!! une politique autrement !!! Supprimer les cotisations pour les heures supplémentaires, cela ne va pas créer de l’emploi !!! ça se saurait depuis longtemps !!!
    Pas de reprise économique , Pas de pouvoir d’achat !!! où l’inverse comme vous vouler…
    si ils ont exemple : RECETTE 100 milliards pour gérer un budget D’ÉTAT ,nous savons tous qu’ils sont incapable de le faire !!!
    Tout le Reste pipeau…AUTREMENT dans la CONTINUITÉ !!!

  • Macron, c’est Hollande déguisé . . .

  • Macron le gourou d’hollande ..la politique du brassage d’air !!!

  • le parasitisme dans toute sa splendeur : cela fait quelques décennies que les gouvernements ne contrôlent plus leurs administrations.

    • C’est surtout qu’il faut soigner les clientèles électorales. Nanobite a déjà perdu le vote des cocus retraités. Restent à acheter les fonx, les muzz et les mecs des DOM-TOM.

  • Conclusion : Nanobite prépare déjà les prochaines élections.

  • C’est oublier un peu vite que Macron est un fonctionnaire lui-même, qu’il a une formation de fonctionnaire et qu’il est entouré principalement de fonctionnaires.
    Les chiens ne font pas de chats, que Diable !

  • Le « deep state » aux manettes.

  • « Emmanuel Macron, inspecteur général des finances »

    Non, il n’est jamais devenu inspecteur « général » des Finances.
    Il a démissionné du corps (IGF) avant les dix ans qu’il devait à l’Etat et payé sa pantoufle en conséquence.

    • Vu le personnage, je ne serais pas étonné d’avoir contribué sans le savoir ni le vouloir à payer sa pantoufle…

  • Il faut détruire l’ENA.
    Delenda est ENA.

  • Du pays ils n’en ont que faire. N’est-ce pas Macron qui était chargé de vendre Alstom et d’autres ?
    Crise du lait et du beurre alors que dans certaines régions productrices cela à été vendu aux Chinois qui envoient notre nourriture directement chez eux !
    Il faut prendre tous les politiques quels qu’ils soient, leur enlever tous les avantages les mettre au SMIC et leur administrer tous les matins quelques coups de battes, s’ils n’en connaissent pas les raisons, beaucoup d’autres dans la société le savent.

  • Pratiquant déjà le Racolage Politique avec les Chasseurs, Macron n’en est pas à un écart près. Et gouverner avec les Élites des hauts fonctionnaires à 20.000 euros mensuels chacun ça fait parti du tableau de contradictions de Macron. Pressurer les retraités et d’un autre coté distribuer à profusion l’Argent public c’est son principe.

    • « Et gouverner avec les Élites des hauts fonctionnaires à 20.000 euros mensuels chacun ça fait parti du tableau de contradictions de Macron. »

      En quoi c’est une contradiction là ? Il me semble qu’il n’a jamais prétendu l’inverse.

  • Les élus sont supposés contrôler l’Etat pour qu’il remplisse ses missions régaliennes sans devenir abusif. Or depuis des dizaines d’année, en France, les élus se sont servis de leurs mandats pour en rajouter dans la dépense publique. Ceci au profit de leurs partis politiques pour garder le pouvoir et du capitalisme de connivence pour siphonner la dépense publique et la transférer à des intérêts privés. Tous les moyens étaient bons pour exclure les élus récalcitrants qui refusaient de respecter les règles de ce jeu mafieux.

    La France a ainsi donné la preuve que sa démocratie représentative a été mise en échec au profit d’un système de corruption passé maitre en l’art de créer des pompes à finances. Un pays ainsi ruiné finit par passer sous tutelle de l’Etat, autrement dit sous un régime de dictature où les élus n’ont plus qu’un rôle factice.

    Donc oui, avec Macron, la France est passé clairement sous la tutelle des fonctionnaires. Cependant ce n’est pas à l’Etat et à la fonction publique que la responsabilité en incombe. Les coupables et responsables de cette situation, ce sont les électeurs et les élus qui ont soutenu une démocratie représentative tellement corrompue qu’elle a ruiné le pays pour disparaître aujourd’hui dans les poubelles de notre histoire.

    La démocratie se mérite, elle demande des électeurs et des élus qui résistent à la corruption.

    Quand une population ne s’arme pas contre la corruption, elle choisit d’être ruinée et de perdre sa liberté. Comme l’Etat est un prédateur qui se nourrit des proies qu’ils maintient vivantes en captivité, autant dire qu’une population corruptible fait le bonheur des étatistes. Elle fait ainsi son propre malheur en nourrissant un Etat auquel elle se sera offerte pieds et mains liés et qui pourra désormais l’opprimer sans partage… un certain temps.

    Je me souviens de la dernière campagne électorale de Chirac. Il était largement débattu de la question de savoir si la France était un pays corrompu. La réponse était : « oui, mais les Français ne veulent pas le savoir ». Ils avaient tort ; comme ils ont tort aujourd’hui de toujours refuser de voir cette réalité en face, (comme de ne pas vouloir savoir comment se finance la dépense publique supposée gratuite) pour comprendre pourquoi nous perdons notre liberté.

    Les étatistes sont conditionnés à mépriser la population. C’est logique et il ne peut en être autrement, car leur existence même découle de la faiblesse de cette population dont il profite.

  • Les commentaires sont fermés.

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