15 idées pour réformer l’université

Comment donner aux universités les moyens de remplir leur mission ? Une proposition.

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15 idées pour réformer l’université

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 4 juillet 2018
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Par Thierry Foucart.

L’Université, comme tout le système éducatif français (et l’ensemble de la fonction publique), est en difficulté depuis de nombreuses années. Elle est chargée de missions de service public : c’est l’État qui doit lui donner les moyens nécessaires de les remplir de façon efficace.

Après quelques rappels et commentaires, je propose des mesures concrètes pour mettre fin à une situation préjudiciable à tous1.

 

Les missions de l’enseignement supérieur

L’enseignement supérieur et la recherche sont des enjeux importants pour le fonctionnement et l’avenir de notre société : il y a unanimité sur ce point qu’il n’est donc pas nécessaire de développer. L’État définit des missions pour répondre à ces enjeux et en confie la réalisation à différents établissements publics ou privés.

L’Université est l’un de ces établissements publics, le plus important par le nombre d’étudiants qui y sont inscrits (plus d’un million cinq cent mille étudiants). Les missions qui lui sont confiées ont été adaptées au fur et à mesure de l’évolution économique et sociale et sont actuellement les suivantes.

 

La formation des cadres supérieurs de la nation

Chargé initialement de la formation des enseignants du second degré, des chercheurs et des cadres supérieurs de la fonction publique, l’enseignement universitaire est resté longtemps limité aux disciplines classiques telles que le droit, les lettres, les sciences humaines  et les sciences fondamentales. Les sciences sociales et médicales y ont été intégrées peu à peu, puis des disciplines technologiques et des sciences appliquées (par exemple, les Instituts universitaires de technologie ont été créés en 1966) : il existe maintenant toute une filière universitaire, du bac + 2 au bac + 5, dont la vocation est de répondre aux besoins des entreprises et non plus seulement des administrations publiques.

 

La diffusion des connaissances

Les philosophes de la Révolution française de 1789 ont voulu développer la rationalité et l’esprit critique pour lutter contre l’obscurantisme, la superstition, l’embrigadement. Le succès actuel de certaines sectes religieuses, d’idéologies irrationnelles et de croyances dangereuses montre que cet objectif reste indispensable. C’est par le travail, l’acquisition de connaissance, la dialectique que ces facultés s’acquièrent. L’accès à l’Université doit être possible à tous ceux qui ont les capacités de faire des études supérieures, indépendamment de leur situation personnelle.

 

La recherche scientifique

Elle a pour but de faire progresser les connaissances de l’humanité sur le monde physique, social, humain. La démarche générale consiste à mettre à la disposition de tous les chercheurs les résultats nouveaux au fur et à mesure qu’ils sont établis, pour en générer d’autres. Sa finalité n’est pas économique, ni financière ni matérielle, et l’importance d’une découverte ne peut être mesurée que par l’accroissement des connaissances qu’elle génère et par toutes les nouvelles découvertes qui en résultent, immédiatement parfois, souvent longtemps après dans le cas de la recherche fondamentale. Elle suppose la gratuité de la publication des nouveaux résultats et de leur consultation.

 

L’enseignement supérieur est aussi présent dans les lycées. Les sections de techniciens supérieurs qui préparent leurs élèves à un Brevet de technicien supérieur, regroupent 250 000 étudiants. Les classes préparatoires aux grandes écoles (866 000 étudiants) forment les futurs élèves des écoles d’ingénieurs, de commerce et gestion, des écoles normales supérieures… Comme dans les universités, l’enseignement y est gratuit. Il n’y a aucune activité de recherche dans ces classes : c’est un prolongement du lycée.

Contrairement à l’Université, les écoles assurant un enseignement supérieur sont en général payantes, même celles qui dépendent de l’État puisque leurs élèves s’engagent à travailler dans la fonction publique pendant dix ans. L’accès est sélectif, et la sélection se fait par concours. Elles délivrent une formation destinée à l’entreprise et aux services techniques et administratifs de l’État, et certaines offrent une perspective de recherche par une collaboration avec un laboratoire universitaire ou le CNRS.

Les écoles normales supérieures constituent un cas à part. Leurs élèves, qui se sont engagés à travailler dans la fonction publique pendant dix ans, bénéficient de conditions particulières pour obtenir un poste à l’université et forment une grande partie de l’élite des universitaires. Un certain nombre de leurs élèves intègrent ensuite l’école nationale d’administration.

 

La gestion des universités

Les enseignants-chercheurs consultés sur les difficultés de l’enseignement universitaire dénoncent immédiatement le manque de moyens financiers. Les locaux sont effectivement parfois très dégradés, non chauffés, le manque de personnel et de matériel est criant : le besoin d’argent semble évident. Mais s’agit-il réellement d’un manque de moyens, ou d’une mauvaise gestion ?

Les dépenses publiques2 pour l’enseignement supérieur (universités, classes préparatoires aux grandes écoles, classes de techniciens supérieurs) ont été multipliées par 2,6 depuis 1980. Le nombre d’étudiants ayant doublé depuis 1980, la dépense moyenne par étudiant a augmenté de 40 % (de 8 330 euros en 1980 à près de 12 000 euros en 2010) et reste au même niveau depuis 2010. L’État assure 71 % des dépenses, les collectivités territoriales 11 %, les entreprises 9 % et les ménages 9 %.

La part de l’enseignement supérieur dans les dépenses du ministère de l’Éducation nationale est passée de 15 % en 1980 à 20 % en 2015 : cette augmentation a donc été faite au détriment relatif des enseignements primaires et secondaires, qui protestent eux aussi contre l’insuffisance des crédits. La proportion d’étudiants percevant une aide sociale est passée de 29 % en 2000-2001 à 36 % en 2015-2016 et cette aide sociale annuelle de 2320 euros est maintenant de 2908 euros.

L’effort national financier des vingt dernières années, important et indiscutable, concerne tous les établissements publics d’enseignement supérieur. Il y a une forte disparité des dépenses publiques moyennes par étudiant entre les classes préparatoires aux grandes écoles (15 000 euros en 2015) et les universités (10 300 euros). Certaines universités semblent très défavorisées aux plan financier et  effectif des personnels par rapport à d’autres : c’est vraisemblable, mais je n’ai pas trouvé d’information permettant de confirmer cette impression.

Les effectifs d’enseignants (toutes catégories) ont augmenté de 29 % au cours des vingt dernières années. De 2006 à 2016, ils n’ont augmenté que de 2 % alors que les effectifs d’étudiants ont augmenté de 15 %.  Il y a en France 17,3 étudiants par enseignant et 15,8 dans l’OCDE.

La dépense moyenne par étudiant en France est proche de la moyenne des pays de l’OCDE, l’effort national consacré à l’enseignement supérieur étant légèrement inférieur (1,5 % du PIB contre 1,6 %). Les difficultés ne s’expliquent donc pas, ou pas seulement, par l’insuffisance des budgets, même si l’Université est le parent pauvre des établissements d’enseignement supérieur, mais aussi par leur utilisation. Le manque d’argent n’empêche pas la mauvaise gestion.

Depuis la loi LRU de 2007, les universités disposent d’une autonomie budgétaire et de gestion des ressources humaines. Cette loi a été très contestée par les organisations syndicales d’étudiants et des personnels, mais soutenue par la conférence des présidents d’université. Elle donne une liberté d’action aux nouveaux conseils d’administration et aux présidents, mais c’est une liberté très limitée par rapport à celle d’un chef d’entreprise :

  • Les ressources propres des universités (donations, fonds, contrats) ne représentent qu’une faible partie des ressources totales. Les recettes sont constituées des droits d’inscription relativement minimes, des subventions de l’État et de la prise en charge des frais de personnel de la fonction publique (75 % des personnels enseignants et chercheurs). L’autonomie financière des universités se limite en pratique aux dépenses financées sur leurs ressources propres.
  • La gestion des établissements des universités est en principe du ressort de leur conseil d’administration, théoriquement libre de créer ou de fermer des filières universitaires. Cette liberté est dans la pratique limitée : la fermeture du centre universitaire du Guesclin de Béziers, votée par le C.A. de l’université Paul Valéry de Montpellier, a été empêchée par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche. L’autonomie de gestion des universités accordée par la loi LRU n’est pas encore reconnue complètement.
  • La modulation des services des personnels par le président de l’université prévue dans le projet initial de la loi LRU a été abandonnée. Les personnels, très attachés à leur statut de fonctionnaires, à leur indépendance, et inquiets des missions que le président aurait pu leur imposer, s’y sont complètement opposés.
  • Cette autonomie de gestion est très limitée aussi par l’absence de contrôle à l’accès aux études supérieures. Certaines spécialités attirent un nombre très important d’étudiants, comme la psychologie (la France forme un quart des psychologues de l’Union européenne !) ou les Sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS). Cela ne facilite pas la gestion des effectifs des enseignants-chercheurs, dont les spécialités ne correspondent pas nécessairement aux formations les plus demandées ou dont les enseignements sont de moins en moins suivis, ni des équipements souvent insuffisants (c’est pour cette raison que des universités ont dû tirer au sort leurs étudiants en STAPS parmi les candidats).

 

Les étudiants

Les classes préparatoires aux grandes écoles, enviées parce qu’elles bénéficient d’un budget annuel par étudiant largement supérieur à celui des universités, rassemblent des élèves sélectionnés par le mérite et qui se présentent à des concours d’entrée dans des écoles d’ingénieurs, de commerce ou autres. Il y a une sélection des candidats à ces classes, parfois très forte (dans certains lycées parisiens par exemple). Cette première sélection est suivie d’une autre puisque les écoles recrutent toutes par concours. Ce sont en général des élèves motivés, très travailleurs, qui ont bien réussi leur scolarité. Il n’y a jamais de grève d’élèves dans ces classes préparatoires, ni de professeurs (sauf une exception).

Les classes de techniciens supérieurs et les filières technologiques et professionnelles des universités forment des jeunes destinés à travailler en entreprise. Les étudiants sont sélectionnés sur dossiers, mais plutôt dans le but d’éviter le recrutement de ceux dont l’échec est quasi certain. Il y a peu de sélection à l’issue de ces filières, avec un taux de réussite parfois de 100 %. Ce taux ne donne aucune indication sur la qualité des études puisque les contrôles de connaissance sont sous la responsabilité complète des enseignants qui ont eu les candidats comme élèves (sauf en BTS). L’originalité des filières technologiques – et la raison de leur succès – est l’obligation d’un stage long (douze semaines, parfois plus) en entreprise.

Les conditions de travail dans les filières universitaires classiques sont très différentes. L’absence de sélection à l’entrée a eu pour effet d’augmenter considérablement le taux d’échec dans les premières années et de baisser les niveaux de connaissances dans les suivantes. Les pourcentages de reçus en licence sont environ de 27 % en trois ans (sans redoublement), et de 45% en cinq ans : cela augmente considérablement les coûts.

Les étudiants travaillent en général peu, pas plus qu’au lycée : les jeunes passent en moyenne plus de deux heures trente par jour devant les écrans de télévision, de téléphones etc. ! L’assiduité au travail est souvent inexistante (absentéisme fréquent, travail non fait…)3. Il y a parfois des raisons justifiées, comme un emploi à temps partiel donnant une ressource financière d’appoint.

Les grèves sont fréquentes, souvent longues, particulièrement dans les filières des sciences humaines (psychologie, sociologie), et ne pénalisent pas les étudiants pour l’obtention des diplômes (au contraire). Les examens étant sous la responsabilité totale des enseignants, les contestations des résultats sont nombreuses, ou inversement les taux d’échecs sont très faibles (surtout dans certaines filières technologiques courtes). Les exigences sont très différentes d’une université à l’autre, d’une filière à l’autre. La filière médicale est complètement à part : la première année (PACES) prépare aux concours d’entrée aux écoles de médecine, pharmacie, kinésithérapie, odontologie etc., dont les nombres de places sont fixés par l’État (système des quotas).

 

Les universitaires

Les universitaires sont confrontés directement aux problèmes sociaux, en particulier au chômage des jeunes, et à l’échec éducatif des étudiants. La volonté de faciliter systématiquement toutes les tâches qui incombent à ces derniers est une manifestation de leur bonne volonté, mais aboutit à l’effet inverse de celui qui est recherché.

Leur perception de la réalité économique et sociale est liée à la spécificité de leurs fonctions. Ce ne sont pas des producteurs de richesses, mais de savoirs. La plupart des professeurs d’université et des maîtres de conférences sont passés du statut de lycéen à celui d’étudiant puis d’enseignant sans jamais avoir quitté l’enseignement. Ils ont une culture livresque, surtout dans les sciences de l’homme et de la société, et la recherche est une activité très intuitive, très passionnée (qu’il serait vain d’encadrer : il serait tout autant ridicule de mettre un chercheur devant une feuille et de lui dire trouve, qu’un artiste peintre devant une toile et de lui dire peins).

Au plan financier, leur niveau culturel et intellectuel est très dévalorisé par rapport à d’autres fonctions comparables (les primes sont très faibles). Ils trouvent un poste permanent tardivement, parfois à plus de 35 ans, et difficilement : beaucoup de docteurs se retrouvent dans l’enseignement du second degré, ou à un poste administratif subalterne, et les entreprises françaises n’en recrutent guère contrairement aux autres pays européens.

Cette dévalorisation n’est pas seulement financière. La considération qu’on leur accorde disparaît peu à peu, sauf dans des cas particuliers (Nobel, médaille Fields, etc.), et pourtant, le rayonnement intellectuel de la France dépend des chercheurs qui publient des articles dans des revues internationales, participent à des colloques dans tous les pays du monde, encadrent des doctorants.

Les chercheurs ne sont pas rémunérés sur leurs publications, et d’ailleurs la plupart le refuseraient. La gratuité de la recherche nécessite de la passion, qui se transforme parfois en aigreur lorsqu’ils constatent leurs conditions de travail et le mépris dans lequel, à tort ou à raison, ils se sentent tenus, même par leur propre administration4.

Leur refus de la loi LRU, en particulier de la modulation de leurs services, s’explique par leur volonté d’indépendance qu’ils considèrent à juste titre comme indispensable à leur recherche et à leur fonction. Cette modulation concernait surtout les enseignants-chercheurs qui ne font pas de recherche, environ 25 %. Il y a effectivement des abus. Certains abandonnent la recherche et perçoivent la rémunération des heures supplémentaires, parfois même de tâches administratives. C’est une injustice vis-à-vis des autres enseignants-chercheurs. Mais inversement, c’est parfois aussi faute de crédit ou de moyens matériels que des chercheurs abandonnent la recherche.

Cette contestation est aggravée par les idéologies marxisantes qui perdurent dans certains milieux étudiants et universitaires. Des chercheurs refusent un financement de leurs travaux par le secteur privé qu’ils veulent tenir à l’écart : ils n’ont pas compris que l’argent public vient toujours du secteur privé. Les représentants syndicaux défendent des personnels incompétents et revendiquent des crédits supplémentaires sans voir la contradiction de ces deux exigences.

L’engagement politique est relativement fréquent, fondé sur un idéalisme parfois surprenant qui s’explique par l’isolement économique et financier. Les protestations contre l’état des locaux, l’absence de personnel administratif, etc. prennent souvent la forme d’une contestation politique : le ministère est considéré comme responsable de toutes les difficultés et l’entreprise privée est accusée de ne penser qu’au profit et de ne pas participer à l’effort national.

Cette politisation des esprits s’explique par la démarche intellectuelle des chercheurs : ils veulent comprendre ce qui se passe, participer à l’évolution de la société, mais restent dans l’utopie par suite de la nature de leurs travaux et de leurs connaissances essentiellement livresques et relationnelles. Elle se retourne contre la mission même de l’université : pour certains enseignants-chercheurs, il ne s’agit plus de diffuser des connaissances, de développer l’esprit critique, de débattre en confrontant des arguments rationnels, mais d’imposer une idéologie aux étudiants. L’Université n’a pas totalement fait le deuil du mouvement de mai 68.

 

Quelques propositions

Les propositions ci-dessous ont pour objectifs de faciliter la gestion effective des universités par les présidents et les conseils d’administrations, de responsabiliser les universitaires et les étudiants, d’assurer le libre choix des étudiants et la libre sélection des établissements d’enseignement supérieur, d’utiliser les moyens financiers accordés par l’État et les collectivités de façon efficace, et de dégager des ressources supplémentaires.

1. Le ministère, les collectivités territoriales et l’ensemble des acteurs économiques et sociaux ne peuvent remettre en cause une décision de gestion du président d’une université approuvée par le conseil d’administration. L’autonomie de gestion doit être respectée.

2. L’État conserve l’autorité de tutelle. Son intervention dans le fonctionnement d’une université peut être demandée par le conseil d’administration ou les syndicats représentatifs des personnels, ou décidée par le ministère en cas de déficit budgétaire. Elle peut aboutir à la dissolution du C.A. et à la nomination d’un administrateur provisoire. L’autonomie de gestion suppose la responsabilité.

3. Les recours au tribunal administratif contre les décisions des présidents, conseils d’administration et jurys sont conditionnés par le versement d’une somme placée sous séquestre, non remboursée en cas d’échec des poursuites. Il faut régler le temps administratif sur le temps humain, pour éviter les situation kafkaïennes.

4. Les grèves d’étudiants et d’enseignants ne doivent pas empêcher la poursuite des cours ni modifier les exigences des examens. Toute violence, occupation de locaux, dégradation et vol de matériel, entraînent l’exclusion immédiate de son auteur, étudiant ou salarié, de l’université. Le débat démocratique exclut la violence et le fanatisme.

5. La répartition du budget de l’État destiné aux universités et des créations de postes d’enseignants et d’enseignants-chercheurs est proportionnelle aux effectifs d’étudiants, avec des aménagements suivant les filières et les besoins d’investissement et de fonctionnement exprimés par les présidents d’université. C’est une conséquence du principe d’égalité.

6. Chaque universitaire dispose d’un budget personnel de recherche dont il justifie l’utilisation dans un rapport d’activité annuel. Le Conseil scientifique de l’université contrôle l’existence des travaux présentés dans ce rapport. L’indépendance des chercheurs est assurée.

7. Le service d’un enseignant-chercheur peut être modulé par rapport à ses charges statutaires en augmentant ou diminuant la part de chaque mission d’enseignement supérieur dans sa charge de travail, avec son accord, par le président de l’université. La modulation est réversible. Il s’agit ici d’adapter les services d’enseignement aux besoins des universités.

8. En cas de refus de modulation, le fonctionnaire ne peut percevoir aucune rémunération supplémentaire publique ou privée.

9. Les laboratoires de recherche fondamentale conservent un financement public pour rester indépendants des intérêts économiques et financiers privés ainsi que des intérêts politiques.

10. Les laboratoires de recherche appliquée sont libres de signer des conventions avec le secteur privé sous la responsabilité du Conseil scientifique.

11. Les études supérieures sont financées par ceux qui en bénéficient. Un étudiant inscrit dans tout établissement d’enseignement supérieur public reçoit chaque année un « chèque étudiant » couvrant le coût des études calculé au niveau national de la filière choisie. Les sommes perçues constituent une dette de l’étudiant, remboursable après l’entrée dans la vie active.

12. La création d’établissements d’enseignement supérieur privés est libre. Les enseignants doivent être titulaires d’un doctorat pour avoir un CDI, d’un master 2 pour avoir un CDD. Ces établissements peuvent délivrer des doctorats communs avec une université.

13. Afin de respecter le principe d’égalité, une convention entre une école d’enseignement supérieur privée et l’État peut être établie pour que ses étudiants puissent bénéficier du « chèque étudiant ».

14. Les concours de recrutement dans les administrations publiques sont transformés en diplômes reconnus par l’État. Les diplômes universitaires (licence, master) sont délivrés par chaque université et en portent le nom. Ils peuvent être communs à plusieurs universités.

15. Les employeurs privés peuvent financer, sur la taxe d’apprentissage versée par l’entreprise, les études d’étudiants en échange de leur engagement professionnel d’une durée négociée.

Toutes ces propositions sont liées les unes aux autres par un objectif général commun : donner aux universités les moyens de remplir leurs missions de service public dans les meilleures conditions possibles, en respectant les valeurs démocratiques fondamentales. Elles s’inspirent de la démarche générale proposée dans mon livre Un projet social-libéral pour la France (éditions Libréchange).

  1. Les statistiques présentées dans cet article sont extraites pour la plupart de la note du ministère de l’Éducation nationale sur « l’état de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en France ». Les autres sont référencées au fur et à mesure.
  2. Tous les calculs ont été effectués en euros constants.
  3.  Foucart T., 2004, Scènes ordinaires de la vie universitaire,  Fabert, Paris.
  4. Foucart T., op. cité, 2004.
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  • On voit que l auteur a une connaissance pratique de l université. L article est instructif.
    Je ferai juste une remarque. L auteur critique les grandes ecoles car elles ont un budget par etudiant superieur a celui de l universite. Mais n est il pas logique de mettre plus d argent dans une formation qui marche que dans un systeme peu efficace ?
    C est d ailleurs pour ca que les jeunes qui ont de bon Resultats scolaires vont là plutot qu a l université.

    Sur le point 15, j ai pas tres bien compris ce que vous voulez. Je
    suppose que c est un Systeme similaire a celui de l Etat: je finance tes etudes en echange tu dois travailler X annees pour moi. L idee n est pas forcement mauvaise et pourrait etre experimentee. Par contre, vu les montants en jeu et la dureee (quelle PME peut savoir qu elle aura besoin de 3 ans d un inge supplementaire pendant 5 ans), ca va surement etre reservee aux grosses entreprises

    • Je ne critique pas les grandes écoles : je constate la différence des budgets. Et j’aurais bien aimé que mes étudiants travaillent autant que ceux des classes préparatoires. Certaines universités ont tenté de créer des filières analogues, mais le travail, c’est mal vu ! Oui, bien sûr, le point 15 n’est envisageable qu’avec les grosses entreprises.

  • «  » »Les chercheurs ne sont pas rémunérés sur leurs publications, et d’ailleurs la plupart le refuseraient. «  » »
    Je me gausse, vous êtes bien loin de la réalité si c’est ce que vous pensez.
    Le chercheur aujourd’hui n’est plus là que pour encadré les thésards qui cherche et apposé sa signature sur la publication.

    Observez comment le budget est utilisé.
    Est’il vraiment nécessaire de faire un appel d’offre traiteur pour une petite université?
    Des palettes de champagne!?
    Certain directeur de composante ont’ils vraiment besoin de véhicule de fonction?
    Alors que les salles sont vétustes et que la pression sur le redéploiement de personnel atteint son apogée, est’il vraiment nécessaire de réaliser une piste de footing autour d’un campus pour une somme proche du million d’euro?

    Comment se fait’il que les ressources humaine sont alloués à des travaux de communication plutôt qu’aux travaux pédagogique.
    Probablement car les enseignants qui ont une responsabilité administrative sont des carriéristes qui veulent faire parler d’eux durant un mandat de 5ans.
    Peu importe que ça se fasse au détriment du service, car les problèmes arriveront après leur départ.

  • L’université n’est pas une mission de service public. Par quel étrange miracle, par la grâce de quelle compétence aussi mystérieuse qu’insoupçonnée, l’Etat pourrait-il être en mesure de définir ou même seulement orienter la recherche et l’enseignement universitaires ? C’est absurde et risible.

    En dehors de la formation des cadres civils et militaires de l’Etat qu’une petite poignée d’écoles publiques peut assurer sans problème, l’université est une affaire strictement privée qui se nourrit d’une concurrence bienfaisante, loin, très loin de l’Etat. On ne relèvera pas le niveau des universités française, plutôt lamentable dans son ensemble, sans couper définitivement le cordon. Le temps est venu de mettre en terme à ce monumental gâchis d’argent public.

    La tutelle étatique entre frontalement en contradiction avec l’exigence d’autonomie des universités. Ce sera l’une ou l’autre car on ne peut avoir les deux en même temps. D’ailleurs, c’est précisément parce que la tutelle étatique néfaste s’impose encore pleinement que de faux étudiants peuvent saccager les universités et saboter l’enseignement dispensé aux vrais étudiants, en toute impunité.

    Il est à noter que les casseurs se sont systématiquement attaqués aux sanitaires, ce qui en dit long sur leurs priorités mentales (pipi, caca).

    • Ce n’est pas ce que j’ai écrit. Le service public ne consiste pas à orienter la recherche ou l’enseignement, mais à en permettre l’existence. L’orienter serait contradictoire avec la nature même de la recherche (Le savant et le politique, de Max Weber). .

      La tutelle est nécessaire uniquement pour le contrôle administratif et financier. Il y a déjà de nombreux abus.

      Non, parmi les vrais étudiants aussi, il y a des casseurs, comme en 1968.

  • L’article commence mal:les élèves en prépas sont 83 000 et non le chiffre indiqué. Sans doute une erreur de frappe. Le point faible est l’ignorance de comment fonctionnent les universités étrangères, celles vers lesquelles se tournent les étudiants ambitieux (intellectuellement) et dynamiques: aucun concours dans le recrutement des enseignants-chercheurs, mais des recrutements sur dossiers puis composition de short-lists, puis passage devant des jurys internationaux avec cours d’amphi et séminaire de recherche, avec évaluation combinée par les profs et les étudiants (avec pondérateur). Les profs sont recrutés sur tenure-track, avec mise à l’épreuve pendant 4-6 ans, rythmée par des évaluations en cours de mandat. Il faut supprimer le statut de maître-de conférence à vie: soit la personne fait l’affaire et est normalement promue prof, soit elle ne répond pas au besoin de l’établissement et elle alors remerciée. Ce qui se fait dans toutes les grandes universités étrangères (Zurich, Oxford, etc.) Les contrats qui lient le prof à son établissement sont de droit public, mais peuvent être rompus par l’une ou l’autre partie. Les profs doivent être régulièrement évalués sur leurs publications, sur leurs participations dans l’établissements et sur leurs enseignements. L’auteur ne dit pas un mot sur le localisme, mal français qu’il faut proscrire, comme le font les universités américaines. Et imposer un séjour post-doc dans un autre établissement que celui où le thèsard a soutenu son doctorat. Il faut encore favoriser le recrutement de profs qui ont un parcours non linéaire, i.e. passé par le privé, considéré comme une verrue dans un cv français. Donc, je récapitule tout ce qui ne figure pas dans le texte de Foucart: suppression des concours, des CPGE, des « grandes écoles » qui font rire tous les étrangers par la stérilité des diplômés qui en sortent et leur conformisme. Bref, oui à un grand chantier mais fondé sur un bench-marking préalable. Inutile de réinventer la roue carrée.

    • Pour l’effectif des élèves en CPGE, j’ai pris le chiffre indiqué dans la note référencée.
      Quasiment tout ce que vous dites est faisable dans le cadre de l’autonomie. Vous voudriez que cela se fasse en un jour ?
      Croyez-vous que les universités américaines fonctionnent mieux ? Pas sûr : quand on en arrive à trier les auteurs étudiés suivant leur sexe (pardon, leur genre), quand leurs étudiants se déclarent homosexuels pour éviter d’être accusés de harcèlement (lisez Une amérique qui fait peur, de Edward Behr), que leurs thésards viennent de l’étranger , et que les coûts (pas seulement aux Etats-unis) sont parfois exorbitants au point de créer un risque de crise financière.
      Un post doc ailleurs que dans l’université du thésard : oui, bien sûr, et c’est déjà souvent le cas. Et d’ailleurs, les post doc à l’étranger sont mieux rémunérés que les maîtres de conférence français ! Recruter un prof qui a fait du privé : cela se fait déjà (prof. associé). Le localisme : c’est une conséquence du blocage complet du système actuel.
      Supprimer les CPCGE : on ne supprime pas quelque chose qui marche, on l’imite. J’aurais bien aimé que mes étudiants travaillent autant qu’en classe de CPGE !
      La stérilité des diplômés des grandes écoles : vous voulez parlez des prix Nobel français et des médaillés Field, tous sortis de normale sup ou polytechnique ?

  • Bonjour

    En premier, restaurer un baccalauréat digne de ce nom, faire une sélection normale qui permettrait de diviser pas deux le nombre d’étudiant et donc de doubler le budget par étudiant et de fermer des filières idiotes (suivez mon regard).

    • On se dirige plutôt vers un bac résiduel réduit au contrôle continu, prélude à sa suppression définitive, avantageusement remplacé par des examens et entretiens sélectifs à l’entrée de chaque université, ce qui ne posera aucun problème dès lors qu’elles auront été privatisées.

      • @gillib Oui, mais c’est la réforme de l’enseignement du second degré qu’il faut faire
        @Cavaignac
        Privatisées ou réellement autonomes.

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