Finances publiques : la France a-t-elle vraiment assaini ses comptes ?

Si l’Union européenne tient à coordonner efficacement les politiques budgétaires, elle devrait donc ajouter aux critères de convergence l’obligation de ne pas dépasser un certain niveau de dépense publique et de fiscalité acceptable.

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Finances publiques : la France a-t-elle vraiment assaini ses comptes ?

Publié le 15 juin 2018
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Par Ferghane Azihari.
Un article de l’Iref-Europe

La Commission a officiellement recommandé de mettre fin à la procédure pour déficit excessif déclenchée contre l’État français en 2009. L’État français aurait assaini ses finances publiques en réduisant enfin ses déficits en-dessous de 3 % du PIB, conformément aux prescriptions du Pacte de stabilité et de croissance (PSC).

Il est vrai que de nombreuses mesures ont été prises ces dernières années pour réduire le déficit de l’ensemble des administrations publiques. Même s’il faut rappeler qu’il reste encore beaucoup à faire pour s’aligner sur les nombreux pays européens qui présentent une comptabilité plus équilibrée.

Évolution du déficit des administrations publiques pour certains pays sélectionnés en Europe % du PIB, 2009 – 2017
Source : OCDE

 

Cependant, la réduction des déficits ne saurait à elle seule être interprétée comme un assainissement des finances et de l’économie d’un pays. Rappelons tout d’abord qu’au regard de l’analyse économique, l’improductivité des déficits publics tient à ce qu’ils impliquent de détourner l’épargne des citoyens pour renflouer les administrations déficitaires… au détriment des investissements réellement productifs.

 

Une manne financière considérable

Le secteur marchand se voit ainsi privé d’une manne financière considérable. Ce qu’on appelle dans le vocabulaire économique effet d’éviction. Le détournement de l’épargne par les administrations réduit les financements des entreprises productives, tout en les rendant plus coûteux (en raison de la pression que les gouvernements font peser sur la demande d’épargne).

Selon Eurostat, le PIB de l’Union européenne s’élevait à 15 326 milliards d’euros environ en 2017. Le déficit moyen des pays de l’Union européenne s’étant établi à 0,96 % du PIB en 2017, ce sont au moins 147 milliards qui ont été détournés par les gouvernements européens en 2017 au détriment d’un usage plus productif.

Le résultat de ce détournement est une accumulation de capital productif ralentie, et donc des gains de productivité globaux plus faibles que si les sommes détournées par les gouvernements avaient été directement investies dans le secteur productif. La croissance de la production globale de richesses étant ralentie, c’est la lutte contre la pauvreté qui est in fine retardée.

Pour connaître la totalité des sommes détournées par les gouvernements, la dépense publique et la fiscalité sont des indicateurs plus pertinents que les déficits publics. En effet, chaque euro prélevé et dépensé par l’État est un euro en moins à la disposition des citoyens-producteurs, éventuellement pour épargner ou investir.

Or; en France, la dépense publique n’a pas diminué de manière significative ces dernières années, Autrement dit, à la différence de nombreux pays européens, la réduction des déficits en France s’est faite principalement à travers une augmentation de la pression fiscale, ce qui est de nature à affaiblir les incitations à créer de la richesse dans l’Hexagone.

Source : Eurostat, calculs de l’auteur

 

Assainir une économie, c’est réduire la sphère publique au profit du secteur productif

Au-delà de la simple question des déficits, une véritable entreprise d’assainissement des finances publiques et de l’économie consisterait à faire reculer la sphère publique au profit du secteur productif. Entre 2009 et 2016, 22 des 28 pays qui composent l’Union européenne l’ont sensiblement fait. On trouve parmi les mauvais élèves la France, la Belgique, ou encore la Grèce mais dont les habitants ne payaient pas vraiment leurs impôts et commencent seulement à le faire.

Si l’Union européenne tient à coordonner efficacement les politiques budgétaires, elle devrait donc ajouter aux critères de convergence l’obligation de ne pas dépasser un certain niveau de dépense publique et de fiscalité acceptable, c’est-à-dire suffisant pour assurer l’ordre et la sécurité au sein d’un État membre. Ce serait la seule forme d’harmonisation budgétaire acceptable.

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  • Les budgets de l’Elysée, de l’Etat, des parlementaires et des collectivités locales ont explosé une fois de plus ! comment assainir les comptes ? en pillant tous les pays es Français, en augmentant tous les prélèvements, en empruntant toujours plus, et en manipulant les chiffres, domaines de grandes compétences pour Macron et sa bande de voleurs. J’oubliais, demain, enfin tout de suite la mise en vente des biens de l’Etat à Vinci, Suez et Cie qui détiennent déjà une grande partie des biens publics, peut-être déjà plus de 50 % ! Drôle de pays la France

  • On rappellera que la limite des 3% avait été balancée sur un coin de table à une époque où on estimait crédible une croissance annuelle du PIB de 3%. ce qui donnait une dette stable en % du PIB …Mais aujourd’hui même avec les 2% de croissance 2017 qui ne sont pas appelés à durer, la dette française continue d’enfler et est en passe de dépasser les 100% du PIB alors que Maastricht avait fixé la limite à 60% … On n’est pas tiré d’affaire contrairement aux cocoricos macronniens

  • Excellent article qui conclue ce que tout le monde sait, y compris les vautours qui croient nous diriger: si on ne réduit pas les dépenses publiques au profit de dépenses productives qui alimentent la croissance, ce pays continuera à aller vers le gouffre, du style de la Grèce, mais en beaucoup plus gros.

    • @ Gerald555
      Comme vous savez, le premier geste fort d’E.Macron fut de toucher au statut des fonctionnaires et à celui de la SNCF, ensuite, la promesse d’effacer 30% de députés de l’assemblée nationale, en attendant logiquement la prochaine échéance électorale.
      Je ne suis donc pas sûr que les critiques sévères d’E.Macron, des lecteurs de Contrepoints soient si justifiées, par comparaison avec les actions efficaces de ses quelques prédécesseurs!
      O.K. E.Macron n’est pas Fr.Fillon! (la faute à qui?)
      Mais la France commence très doucement à suivre ses pays partenaires de l’U.E. sur la voie des critères de Maastricht (et de simple bon sens!) décidés depuis les années 1991 à 1993: ce n’est donc pas trop tôt!!!
      (Se la jouer « co-leader européen » avec l’Allemagne, vous comprendrez comme moi, pas Français, que c’est un rôle de composition pour faire plaisir aux Français!)
      (Il reste à découvrir si LREM ringardisera durablement le schisme national d’opposition gauche-droite au profit d’un gouvernement d’un centre élargi.)

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