Progrès et inégalités sont-ils incompatibles ?

L’économie de marché n’est pas un jeu à somme nulle, où le gain des uns est obtenu forcément aux dépens des autres. Ce n’est pas parce que les riches deviennent plus riches que les pauvres s’appauvrissent.

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Progrès et inégalités sont-ils incompatibles ?

Publié le 25 mai 2018
- A +

Par Marian Tupy.
Un article de Libre Afrique

Après la grande crise financière de 2008, l’inégalité des revenus est devenue une obsession pour tous ceux qui se sont sentis abandonnés par l’économie de marché. En 2011, le slogan « Nous sommes les 99 % » (entendons les 99% de la population qui ne supportent plus que la richesse soit entre les mains de 1%) était scandé à l’unisson par le groupe « Occupy Wall Street ».

En 2013, Barack Obama à son tour considérait les inégalités de revenus comme le « défi déterminant de notre époque ». Un an plus tard, le Pape François a réclamé une « redistribution légitime des bénéfices économiques par l’État », tandis que l’économiste Thomas Piketty prône une plus grande égalité des revenus dans son livre Le Capital au 21ème siècle.

Non, tout le monde n’est pas d’accord avec Marx

Tout le monde n’est pas d’accord avec la thèse de Marx, selon laquelle le capitalisme est une lutte de classe où la minorité de la classe dirigeante s’approprie le profit du travail de la majorité ouvrière. Par exemple, un psychologue de l’Université d’Harvard, Steven Pinker, affirme que l’inégalité des revenus n’est pas le « défi déterminant de notre époque » et que « l’égalité des revenus n’est pas une composante fondamentale du bien-être ». Pour comprendre une telle assertion, il est crucial de ne pas confondre les inégalités de revenus et la pauvreté. Les niveaux de vie augmentent, quoique de manière inégale, dans la majeure partie du monde. Les pays en développement, en particulier, ont largement bénéficié de la diminution des obstacles au commerce et à la circulation des capitaux. C’est pourquoi les inégalités entre les pays diminuent. Quant à l’inégalité au sein des pays, l’enrichissement au sommet n’a pas provoqué d’appauvrissement massif.

L’économie de marché n’est pas un jeu à somme nulle, où le gain des uns est obtenu forcément aux dépens des autres. Ce n’est pas parce que les riches deviennent plus riches que les pauvres s’appauvrissent.

Des preuves introuvables

Selon d’autres arguments avancés par ceux qui s’inquiètent de l’inégalité des revenus : le bonheur d’une personne dépendrait de sa position relative par rapport aux autres membres de la communauté. Cette critique de l’inégalité des revenus comprend des préoccupations au sujet des « comparaisons sociales », des « groupes de référence », de « l’anxiété liée au statut » et « la privation relative ».

Encore une fois, les preuves à l’appui des arguments des critiques sont rares. Selon Pinker :

Contrairement à une croyance selon laquelle les gens sont tellement conscients de l’écart par rapport à leurs compatriotes plus riches qu’ils continuent à redéfinir leur niveau de bonheur interne par rapport à cette base et cela peu importe leur niveau de vie absolu, les plus riches et les gens des pays riches sont en moyenne plus heureux que les plus pauvres et les populations des pays les plus pauvres.

Ensuite, il y a la soi-disant « théorie du Spirit level », selon laquelle la plupart des problèmes sociaux, y compris les homicides, la toxicomanie et le suicide, proviennent du ressentiment provoqué par les inégalités des revenus. Encore une fois, la critique ne tient pas beaucoup.

  • Premièrement, il n’y a aucune raison de croire que l’existence d’un individu riche entraîne une plus grande détresse psychologique pour un individu pauvre que la compétition avec d’autres individus pauvres.
  • Deuxièmement, des études sur la « théorie du spirit level » ont été remises en cause par de nouvelles études plus approfondies, qui ont révélé qu’il n’y avait en fait aucune causalité entre l’inégalité des revenus et le malheur.
  • Troisièmement, l’inégalité croissante des revenus est en fait perçue comme une preuve de mobilité sociale dans les pays en développement, augmentant ainsi le bonheur.
  • Enfin, Pinker aborde la confusion entre l’inégalité des revenus et l’injustice. Contrairement à ce que certains chercheurs ont appelé « l’aversion pour l’iniquité », de nouvelles études ont montré qu’il n’y a pas de préférence innée parmi les êtres humains pour des distributions égales.

Pas de marché sans inégalités

En fait, les inégalités peuvent être appréciées, à condition qu’elles soient perçues comme méritocratiques. Et cela nous ramène à la grande récession de 2008. Je soupçonne que peu de membres du mouvement Occupy Wall Street ont entendu parler de Pinker ou tenté de se familiariser en profondeur avec une telle littérature reposant sur des analyses psychologiques. Leur répulsion face aux renflouements des banques a été provoquée, semble-t-il, par un profond sentiment d’injustice : les personnes mêmes qui ont provoqué la chute du marché ont été sauvées grâce à l’utilisation de l’argent public.

Les membres du mouvement Occupy Wall Street avaient certes raison, mais ils devraient s’efforcer de ne pas confondre la responsabilité du gouvernement américain avec le fonctionnement inné d’une économie de marché. « Le capitalisme sans échec est comme une religion sans péché », comme l’a dit un jour l’économiste américain Alan H. Meltzer. « Ça ne marche pas. » Les banques qui ont fait de mauvais investissements il y a dix ans auraient dû être autorisées à faire faillite. Les renflouements ont empêché le marché de fonctionner. En renflouant les banques, l’État américain pensait protéger de l’effondrement du marché. Au lieu de cela, les politiciens ont créé un véritable grief qui persiste encore aujourd’hui. La liberté est la sœur jumelle de la responsabilité et les deux ne peuvent pas être dissociées.

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  • visiblement ces vidéos, perteson, pinker rubin ont du succès …
    la question que je me pose est celle de l’éducation et des valeurs transmises aux enfants..
    sinon…c’est quand même un foutue question où des gens s’autorisent à jouer avec des vies..
    IL faut aussi rappeler une chose, nous avons l’habitude de penser qu’il existe des valeurs communes aux gens que des principes comme na pas voler tuer violer autrui va de soi pour tout le monde…est ce vrai?
    Il me semble que non….c’est un fait culturel , ce sont des valeurs qu’on enseigne parfois aux enfants.

    donc on a pas de valeur commune universelle.. du moins je crois..

    Pourtant la majeure des constructions sociales que des certaines personnes veulent mettre en place repose pleinement sur un jeu de valeurs , ce qui exclut de fait un certain nombre de gens qui seront toujours asociaux car ne partageant pas ces valeurs..

    Il n’y a pas de « nous ».

    vous pourrez donc démontrer aux égalitaristes , qui est toujours une voie vers l’autoritarisme, combien il est nuisible à la liberté des individus , vous verrez des gens s’en ficher..
    ce sont souvent les même , selon ma perspective, qui pensent que la loi sert à punir « l’autre » que la loi doit s’appliquer aux « autres ».

    les partisans de l’égalitarisme savent un chose une société complexe ne sera jamais égalitaire, il faudra toujours une caste « dirigeante »…où croyez vous que melenchon se voie dans un pays socialiste? dans la mine?
    Non le socialisme de mélenchon est « méritocratique » et mélenchon est un champion des valeurs du socialisme donc…il sera chef. les socialistes sont proches des prolétaires à deux conditions ne pas en être un et leur servir de cerveau.
    On a crée un point godwin…supposé tourner en dérision les accusations de nazisme ou autr,e mais il me semble que un très grand nombre de personne penchent vers les idéologie qui bafouent ce qui nous semble être les valeurs essentielles de liberté de l’individu.

    On ne se promène pas avec un tee shirt de che guevarra sur le dos sans raison.
    On ne prétend pas combattre le fascisme en tapant sur les « fascistes » sans raison…
    On ne se gare pas sur un place pour handicapés sans raison..
    On ne participe pas à des lynchages sans raison.

    • Une grande partie de notre base morale est fondée sur le calcul et la prudence : agis envers les autres comme tu voudrais qu’on agisse envers toi. L’avantage : cela permet une pédagogie rapide de l’acquisition des valeurs communes à une société donnée. L’inconvénient : ces valeurs restent très superficielles ; et à la première occasion, les petits malins s’efforceront de les bafouer impunément. C’est une fausse morale, les gens ne sont honnêtes que par peur (de la sanction, du regard des autres).
      La seule vraie morale qui devrait être enseignée n’en est pas une : être maître de soi-même, de sa colère, de ses désirs, de ses peurs, lutter en permanence contre son inclination au renoncement, à la paresse, à la facilité.

      • Les gens ne sont pas plus honnêtes par peur que par désir. La distinction est entre les gens qu’on continuera à côtoyer, et avec lesquels on comprend que les relations bâties sur la réciprocité sont bénéfiques pour les deux parties, et ceux qu’on imagine qu’on ne reverra pas, et vis-à-vis desquels on aurait tort de se gêner…
        Ceux qui dénoncent les inégalités n’ont jamais rencontré ceux qu’ils trouvent indécemment riches et trop inégaux avec eux, et quand ils en rencontrent des indécemment pauvres et trop inégaux avec eux, ils rejettent même le « devoir » de les aider vers les plus riches qu’eux. Bien rares sont ceux qui se contentent de leur apprendre à s’enrichir, les autres saisissent l’occasion pour être un plus grand nombre à appauvrir ceux dont ils sont jaloux.

  • À ceux qui se plaignent de l’augmentation des inégalités et qui disent que c’est un véritable problème, j’aime à rappeler que la Chine des années 70 était un des pays les plus égalitaires du monde. Bizarrement les chinois se sont empressés de quitter ce « paradis » dès qu’ils en ont eu l’occasion. Oh, il se trouve quelques anciens pour regretter la solidarité et l’insouscience de cet sorte « d’âge d’or », mais si on leur proposait d’y retourner aucun ne le voudrait.

  • Un article pour rappeler que la manière dont le prigrès résoud les inégalité c’est en rendant plein de truc de riche accessible aux pauvres.

    https://humanprogress.org/article.php?p=167

    cet article montre par exemple qu si la stagnation des petits salaire est réelle aux USA
    ce que l’on peut acheter avec est beaucoup moins cher et que donc on s’enrichi.

    c’est une déflation que l’on nous cache
    https://humanprogress.org/article.php?p=698

  • Il ne faut pas confondre l’égalité en droits, celle de notre devise nationale, avec l’égalité des conditions qui ne peut être obtenue que par la contrainte étatique. Autrement dit l’égalité en droits est conforme à la liberté, l’égalité des conditions détruit la liberté.

  • « les personnes mêmes qui ont provoqué la chute du marché ont été sauvées grâce à l’utilisation de l’argent public »

    Phrase qu’il convient de compléter en rappelant que les personnes ayant provoqué la chute des marchés ont obtenu de l’Etat lui-même les moyens monétaires et réglementaires d’agir ainsi.

    Les subprimes n’auraient jamais existé sans les lois imposées par Clinton dans les années 90 ni sans les manipulations monétaires de la Fed au même moment. Dans cette affaire, il n’y a pas eu une mais bien plusieurs fautes successives de l’Etat, chaque intervention désordonnée portant ses effets négatifs nécessitant une nouvelle intervention aux effets à nouveaux délétères.

    C’est un cercle vicieux de décisions publiques qui conduira à terme non seulement à l’effondrement des marchés (après plusieurs phases de bulle successives) mais également à la faillite de l’Etat, sous le poids de sa propre impéritie.

  • Les commentaires sont fermés.

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