François Hollande : « Les Leçons du pouvoir »

Que retenir du livre de François Hollande ? Beaucoup de poncifs et peu de clairvoyance…

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Meeting François Hollande by Jean-Marc Ayrault(CC BY 2.0)

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François Hollande : « Les Leçons du pouvoir »

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 3 mai 2018
- A +

Par Philippe Bilger.

François Hollande, ancien président de la République qui a décidé de ne pas se représenter en l’annonçant aux Français le 1er décembre 2017, a publié trop vite un livre intitulé Les leçons du pouvoir.

Il est long, si long.

Hollande
Les Leçons du pouvoir

Je ne suis pas étonné qu’il se vende bien et j’ai la certitude que la cause essentielle de ce succès tient aux passages consacrés à Emmanuel Macron et à l’analyse s’efforçant d’être objective, même si profondément amère, de la conquête du pouvoir par le président de la République.

Je dois être l’un des rares ayant lu intégralement cet ouvrage parce que, comme dans un film sans rythme, il y a des tunnels et des remplissages pour faire « sérieux » et « de poids ». Le nombre conséquent de pages a visé, par l’écrit, à donner à son quinquennat une ampleur et une consistance que de fait il n’a jamais eues.

On ne peut pas dénier à François Hollande une vive intelligence dont on a le droit de regretter qu’en l’occurrence elle lui ait surtout servi à masquer, à éluder, à ne pas répondre et à s’autocongratuler. Quel dommage que cet esprit empli d’alacrité, de finesse et capable, paraît-il, de d’ironie et de dérision se soit penché avec infiniment de complaisance, trop de contentement sur son quinquennat raté et sur les fautes et transgressions choquantes qui l’ont émaillé !

Dans son livre, on peut distinguer trois parties.

Autosatisfaction, naïveté et poncifs

La première, interminable, vise à un inventaire un zeste ennuyeux ne vous faisant grâce d’aucune des péripéties politiques et actions de son quinquennat. L’autosatisfaction dans laquelle il baigne lui enlève beaucoup d’intérêt et je ne sais pas si on n’en veut pas davantage à François Hollande de nous rappeler ses échecs que de les avoir fait subir à la France ! Il y a des limites au ton de fierté cocardière et à la longue il gêne, lasse et irrite plus qu’il n’émeut.

La deuxième – sur laquelle je reviendrai – traite d’Emmanuel Macron, de ses manoeuvres, de sa stratégie, de sa tactique et de sa victoire avec le constat que François Hollande qui avait la réputation d’être clairvoyant en politique a été complètement berné et qu’il n’a pas eu la modestie de l’admettre.

La dernière nous offre une multitude de considérations sur le monde d’aujourd’hui, ses dangers et ses défis, sur le risque du populisme, sur le caractère toujours irremplaçable de la social-démocratie, sur les bienfaits de l’égalité et, en définitive, de la gestion à la Hollande qu’on ne lui a pas permis de mener à son terme.

Des poncifs avec lesquels, même avec un antagonisme idéologique, il est difficile de ne pas être en accord tant ils sont vagues, globalement généreux et si pleins de cet humanisme « correct » qui a pour vocation de se substituer à l’action ou de fantasmer sur elle, en l’imaginant rose quand elle est noire. Rien qui fasse de François Hollande un visionnaire, tout au plus le gestionnaire peu inspiré d’un passé et l’éclaireur assez banal du futur.

Il faut lui reconnaître du talent et une vraie qualité de narration et d’exposition quand à un certain moment il ne peut plus laisser entre parenthèses le destin d’Emmanuel Macron. Deux éléments éclatants apparaissent à la suite de cette relation qui probablement est la cause essentielle, voire exclusive de la curiosité lucrative que suscite son ouvrage.

François Hollande et Emmanuel Macron

À la fois François Hollande énonce qu’ « il fait confiance » et qu’il n’a pas été « naïf », ce qui semble contradictoire tant les données factuelles qu’il offre lui-même, ses interrogations et les répliques vagues d’Emmanuel Macron manifestent sans équivoque que l’ancien président a été floué et qu’il n’a rien senti venir, sauf sur le tard. Donc il a été « naïf » et sa « confiance » a été à l’évidence mal placée. Il semble d’ailleurs le concéder puisqu’en définitive le reproche fondamental qu’il adresse à Emmanuel Macron est d’avoir avancé masqué. Ce qui démontre la confusion qui a été la sienne. Il ne se pardonne pas d’avoir permis l’édification d’une destinée qui a eu pour finalité de se dégager de la sienne.

J’avoue m’être trompé dans mon livre où je fais monologuer Emmanuel Macron, en n’ayant pas prêté d’emblée à ce dernier un dessein mûrement organisé, une constance entêtée et exclusive en vue de sa victoire présidentielle et d’une si surprenante relève. Une démarche toujours obsédée, donc, par son rêve de fin glorieuse et non pas seulement un cabotage brillant au jour le jour profitant des opportunités successives d’une existence richement pourvue à l’évidence.

En effet François Hollande – sur ce plan, très crédible – tend à démontrer le contraire tant chacune des séquences, équivoques pour le président, étaient pourtant parcourues par le fil directeur d’une trajectoire certaine d’aller au bout et désireuse de tout mettre au service de cette ambition, même du flou le plus longtemps possible.

Se rattraper dans un livre

Évoquer l’autosatisfaction de François Hollande est trop court, trop aimable. Ce qui m’a profondément désolé de la part d’un président qui a supporté courageusement tant d’avanies tragiques et politiques durant son mandat est son incapacité absolue à s’examiner, à se mettre en cause, à se blâmer s’il y a lieu, à accepter une part importante de responsabilité dans ce qui a affecté pour le pire sa conduite des affaires nationales et internationales.

Juste un petit mot sur le vaudeville Leonarda, où sa présidence s’est ridiculisée, et une repentance, à mon sens inutile, sur la déchéance de nationalité où son dessein premier était le bon.

Trop peu sur le Feydeau présidentiel – avec Valérie Trierweiler et Julie Gayet -, trop peu sur sa gabegie médiatique et ses commentaires profus l’ayant conduit notamment à transgresser, face à Gérard Davet et à Fabrice Lhomme, des secrets d’État et à révéler ce qui aurait dû demeurer indicible de la part d’un chef d’État.

Je pourrais sans doute continuer sur ce registre mais il me semblerait indécent de poursuivre ces procès à l’égard d’un homme qui pourtant n’a de loin pas abandonné toute ambition politique.

Il ne se remet pas de n’avoir pas été battu en 2017 ! Il donne des leçons de plus en plus aigres à Emmanuel Macron qui s’en soucie de moins en moins. J’entends bien que se poser en conseiller peut laisser croire qu’on en a la légitimité mais la majorité des Français et le pouvoir lui-même la lui dénient.

Je prends les devants. Oui, j’ai voté en 2012 pour François Hollande parce que je ne voulais plus de Nicolas Sarkozy. Sur ce second point j’ai eu raison mais sur le premier, François Hollande n’a pas servi ma cause.

Et son livre n’aura été qu’une piètre et décevante séance de rattrapage.

Sur le web

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  • pari réussi..ou raté…ça ne m’a pas donné envie d’acheter le livre..qui plus est, l’acheter c’est donner à Hollande le sentiment qu’il est pas fini et qu’il plaît aux français..je ne voulais pas de sarko mais je n’ai pas voté pour Hollande (l’abstention ça a du sens et ça c’est un vrai choix)

    • Sauf que vous ne vous en rendez pas compte, mais vous avez aidé à l’élection de Hollande, car votre voix a manqué! Entre 2 maux il faut choisir le moindre. Car on a pu constater la catastrophe! Surtout que Macron lui a succédé, suite à son naufrage. Et c’est la France qui coule, et nous tous avec qui sommes dans le bateau!

      • « entre deux maux il faut choisir le moindre »? bravo pour votre courage,quand on a des idées on les défend…..et puis voter c’est valider le système en place,désolé …

        • Vous osez parler de courage alors que vous vous abstenez? C’est de la fuite pure et simple! Et je ne vous remercie pas pour les désagréments que j’ai enduré 5 ans à cause de gens comme vous! De plus on est reparti pour 5 années supplémentaires, Macron n’aurait pas pu émerger.

          • je suis en accord avec mes idées..le problème en France c’est que ceux qui votent pensent que tous leurs maux viennent des abstentionnistes..je pense que c’est à tort..et vu que les libéraux qui sont sur liborg semblent intelligents j’ai du mal à comprendre cet argument..l’Etat a crée une république bananière, a bloqué tous les systèmes qui permettent aux gens de voter démocratiquement..si vous trouvez que Macron est légitime avec même pas 20% de suffrages exprimés bah c’est que vous êtes pas si libéral que ça.

            • @ dekkard
              Non! Je suis né dans un pays et ai choisi de devenir citoyen dans un autre! Les 2 pratiquent le vote obligatoire, règle spontanée considérée comme normale dans un pays démocratique où rien ne vous interdit de voter « blanc »!
              Oui, un pays vous donne des droits mais peut vous imposer quelques devoirs! Et il est logique de ne prendre en compte que les votes exprimés, hors blancs ou nuls! Donc une majorité de 3 contre 4 suffirait! Les règles existent avant le vote! Vous êtes censés les connaitre! En France, vous n’êtes même pas contraints d’aller voter, donc les votes exprimés peuvent choisir leur candidat: ce n’est pas votre logique mais celle de la république qui fait loi et rien ne vous oblige à rester dans votre pays, ni ses lois et règlements! Maintenant, il faut accepter, en démocratie, que vous ne fassiez pas la loi à vous tout seul! Ce
              la, c’est votre liberté « libérale »!
              Tout le monde a le droit d’être individualiste sauf quand un pouvoir démocratique s’oppose à vos conceptions personnelles! Sinon, c’est le bor …del!

              • @mikylux
                Bonsoir,
                « Et il est logique de ne prendre en compte que les votes exprimés, hors blancs ou nuls ! Donc une majorité de 3 contre 4 suffirait ! »
                Du coup, les votes blancs et nuls sont considérés comme de la me#*e. Les citoyens ont fait l’effort de participer et d’exprimer leur voix, mais elles sont lettres mortes et ne comptent pas. C’est le modèle de la France. Ce qui fait que c’est un jeu truqué.
                Majorité de 3 votes sur 4, avec les seuls votent exprimés, donc sans les blans et les nuls, ça fait 3 votes sur 6. (Ca doit être d’une ambiance fabuleuse dans une assemblée quelconque, où six personnes doivent voter d’un truc, de dire aux deux personnes qui auront voté blanc ou nul, que leurs voix ne comptent pas au final. C’est sûr que c’est plus clinquant de dire « Voté à la majorité de 3 votes sur 4 », que 3 votes sur 6.) Avec un peu de mauvais esprit, on pourrait aller jusqu’à annoncer que les votes contraires au principe édictés par quelque entité ne seront pas comptés. Ainsi Emmanuel Macron a été élu avec 100% des voix (des citoyens qui auront voté pour lui.). Mais cela est du mauvais esprit. C’est pour cela que Macron est très mal élu, avec 44% de voix de ceux qui se sont inscrits, sachant que leurs votes seraient mis à la poubelle.
                Un vote obligatoire n’est plus un droit, c’est un devoir. Je voudrais bien connaître la sanction pour ceux qui ne votent pas délibérément.
                Je souhaiterais aussi connaître les droits que vous octroie le devoir de vote, je vous prie.

                • Edit :
                  La non prise en compte des voix des inscrits ainsi que la mise au ban des blancs et nuls dans les comptages montrent clairement qu’il n’y a pas de démocratie. Officiellement, E. Macron été élu avec 66% des voix. En réalité, c’est 66% du total des voix de ceux qui ont voté pour lui ou par M.L.P. La démocratie n’est même plus bancale, elle est tout simplement mise aux fers et exibée de temps en temps pour rendre plus crédibles des crapules. Cette hypocrisie a été aussi appliquée lors des élections des députés dont même les conditions d’élection étaient limites.
                  La démocratie en France est un zombie.

                  • entièrement d’accord avec vous..à partir du moment ou le vote blanc ou nul n’est pas pris en compte c’est un simulacre de démocratie..@mikylux: et je me demande bien de que droit vous mettez hors du décompte ces voix ? ah parce que vous êtes libéral? n’importe quoi,dans le genre argument bien foireux vous êtes le roi.

      • En 2012, les français ont surtout rejeté Sarkozy, l’élection de Hollande est une élection par défaut. Ce n’est pas la faute de Macron si votre poulain Fillon a été le cheval perdant de la droite…

        • @ Lou _Papet
          François Fillon n’y était pas pour rien non plus! On met ses « papiers » en ordre avant de se présenter comme futur président de la république, c’est la moindre des choses si on ne veut pas être suspecté!

      • En 2012, les français ont surtout rejeté Sarkozy, l’élection de Hollande est une élection par défaut. Ce n’est pas la faute de Macron si votre poulain Fillon a été le cheval perdant de la droite…

      • @Virgile
        Entre deux maux, il faut renverser la table ou refuser de choisir. En choisissant le moindre, vous vous mettez dans les mains de ce dernier qui a parfaitement théorisé le fait qu’une part de l’électorat suit ce raisonnement, et qui n’a besoin de rien proposer de positif, simplement faire croire que son concurrent est pire. En vous abstenant, vous gardez la possibilité de rappeler à celui qui serait élu par défaut qu’il n’a pas votre soutien, et qu’il doit prendre garde où il met les pieds.

  • Faut pas trop lui demander, on ne devient pas intelligent d’un coup, surtout à son âge. Il en faut pour faire une analyse correcte!

  • Quand on vote contre quelqu’un, alors que son adversaire est pire, on a une lourde responsabilité sur le naufrage de son pays et les malheurs que cela apporte aux français. Pas étonnant qu’il trouve Hollande intelligent, alors que son quinquennat a démontré le contraire!

  • FH est un personnage stéréotypique, pervers narcissique (je sais « narcissique », cela fait rigoler!), ce qui lui a permis de naviguer au sein des synthèses du PS, trompant les uns et les autres sans en avoir l’air. Personnellement, dès Septembre 2012, avec la tournure que prenaient les choses et au vu du personnage, j’avais analysé ce qui pouvait/devait arriver et tout est arrivé… Tout était prévisible. Vous utiliser d’ailleurs le mot « poncif ».

  • Quelle erreur de votre part de voter socialiste ❗

  • Ce pantin se permet une tournée de dédicaces dans les librairie…
    Mon supermarché a des tartes à la crème en solde….
    Fiat lux!!!
    Ça n’arrangera pas nos problèmes ….Mais quel bonheur de remettre cette ordure à sa place….

    • @ kansas beat
      C’est bien vous et vos congénères qui avez élu le « pantin »?

      • Seuls ceux qui ont voté pour quelqu’un peuvent ensuite être accusés de l’avoir élu, ça me paraît un principe de base…

        • @ MichelO
          Non, vous faites partie d’un pays, volens-nolens, vous êtes solidaire de votre scrutin accepté! C’est facile de se désolidariser « à la carte »! Si votre champion n’a pas été élu, vous voyez bien ce qui vous reste à faire! Mais ne pas râler sur les autres qui n’y peuvent rien, c’est ridicule!

  • Cet article de Philippe Bilger est intéressant en ce qu’il relate la perception d’un haut magistrat sur les personnages formatés au bonapartisme de l’ENA.
    Un article mi figue mi raisin sur un François Hollande qui a éludé dans son ouvrage toute la problématique du surendettement de la France et de l’immigration massive et incontrôlée que nous subissons.
    François Hollande n’est que l’un des barons de cette 5ème république ayant toujours bien vécu de prébendes diverses en dehors et au mépris du monde de l’entreprise.
    Au fond, l’échec de la politique de ce quinquennat passé réside dans le fait que l’on attendait une relance de l’activité industrielle, seule créatrice de richesses et de création d’emplois, en s’évertuant à générer une fiscalité dévastatrice aux dépens des entreprises et de leurs dirigeants.
    Actuellement, le secteur industriel étant en pleine décadence, on s’en prend également aux classes moyennes pour financer le mille feuilles administratif français qui ne cesse de s’alourdir et de complexifier…

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