Si le solaire et l’éolien sont si bon marché, pourquoi rendent-ils l’électricité si chère ?

Entre 2009 et 2017, le prix des panneaux solaires a diminué de 75% alors que le prix des éoliennes a diminué de 50%. Et pourtant, pendant la même période, le prix de l’électricité dans les pays a augmenté de façon spectaculaire.

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Si le solaire et l’éolien sont si bon marché, pourquoi rendent-ils l’électricité si chère ?

Publié le 27 avril 2018
- A +

Par Michael Shellenberger.

L’année dernière, les médias ont publié de belles histoires sur la baisse du prix des panneaux solaires et des éoliennes. Ceux qui lisent ces histoires ont naturellement l’impression que plus nous produisons d’énergie solaire et éolienne, plus les prix de l’électricité baisseront.

Et pourtant ce n’est pas ce qui se passe.

En fait, c’est le contraire.

Entre 2009 et 2017, le prix des panneaux solaires (par watt installé) a diminué de 75% alors que le prix des éoliennes (par watt installé) a diminué de 50%.

Et pourtant, pendant la même période, le prix de l’électricité dans les pays ou régions qui ont déployé des quantités importantes d’énergies renouvelables a augmenté de façon spectaculaire.

Si les panneaux solaires et les éoliennes sont devenus tellement moins chers, pourquoi le prix de l’électricité a-t-il augmenté au lieu de diminuer ?

Les prix de l’électricité ont augmenté de :

  • 51% en Allemagne lors de l’expansion de l’énergie solaire et éolienne de 2006 à 2016
  • 24% en Californie pendant la construction de son énergie solaire de 2011 à 2017
  • plus de 100% au Danemark depuis 1995, date à laquelle ce pays a commencé à déployer des énergies renouvelables (principalement issues du vent).

Une hypothèse pourrait être que au fur et à mesure que l’électricité solaire et éolienne devenait moins chère, d’autres sources d’énergie comme le charbon, le nucléaire et le gaz naturel devenaient plus chères, éliminant ainsi toute économie et augmentant le prix global de l’électricité.

Mais, encore une fois, ce n’est pas ce qui est arrivé.

Le prix du gaz naturel a baissé de 72% aux États-Unis entre 2009 et 2016 en raison de la révolution des gaz de schiste.

En Europe, les prix du gaz naturel ont baissé d’un peu moins de la moitié au cours de la même période.

Le prix du nucléaire et du charbon dans ces régions durant la même période était globalement stables.

Les prix de l’électricité ont augmenté de 24% en Californie au cours de la construction de l’énergie solaire de 2011 à 2017.

Une hypothèse pourrait être que la fermeture des centrales nucléaires a entraîné une hausse des prix de l’énergie. En effet, les leaders de l’énergie nucléaire (Illinois, France, Suède et Corée du Sud) bénéficient de l’électricité la moins chère au monde.

L’électricité en Illinois est 42% moins chère que l’électricité en Californie tandis que l’électricité en France est 45% moins chère que l’électricité en Allemagne alors que le prix des principaux carburants de remplacement, le gaz naturel et le charbon, est resté bas, malgré une demande accrue pour ces deux carburants en Californie et en Allemagne.

Le solaire et le vent restent les principaux suspects derrière les prix élevés de l’électricité.

Mais pourquoi des panneaux solaires et des éoliennes moins chers rendraient l’électricité plus chère ?

La raison principale semble avoir été prédite par un jeune économiste allemand en 2013. Dans un document sur la politique énergétique, Lion Hirth a estimé que la valeur économique de l’énergie éolienne et de l’énergie solaire diminuerait de manière significative à mesure que leur production augmenterait.

La raison ? Leur nature fondamentalement peu fiable. Le solaire et le vent produisent trop d’énergie quand les sociétés n’en ont pas besoin, et pas assez quand elles en ont besoin.

Le solaire et le vent exigent donc que des centrales au gaz naturel, des barrages hydroélectriques, des batteries, ou toute autre forme d’énergie fiable soient prêts à un moment donné pour commencer à produire de l’électricité lorsque le vent cesse de souffler et que le soleil cesse de briller.

Et le manque de fiabilité exige que des pays comme l’Allemagne, la Californie et le Danemark payent des États voisins pour qu’ils prennent leur énergie solaire et éolienne lorsqu’ils en produisent trop.

Lion Hirth a prédit que la valeur économique du vent sur le réseau européen diminuerait de 40% une fois qu’il atteindrait 30% de l’électricité, tandis que la valeur de l’énergie solaire baisserait de 50% si elle atteignait seulement 15%.

En 2017, la part de l’énergie éolienne et solaire dans l’électricité était de 53% au Danemark, de 26% en Allemagne et de 23% en Californie.

Le Danemark et l’Allemagne ont la première et la deuxième électricité la plus chère en Europe.

Le coût des « ingrédients » baisse mais le prix du « service » augmente

En signalant la baisse des coûts des panneaux solaires et des éoliennes, mais pas la façon dont ils augmentent les prix de l’électricité, les journalistes trompent – intentionnellement ou non – les décideurs politiques et le public à propos de ces deux technologies.

Le Los Angeles Times a rapporté l’année dernière que les prix de l’électricité en Californie étaient en hausse, mais n’a pas réussi à relier la hausse des prix aux énergies renouvelables, provoquant une forte réfutation de l’économiste James Bushnell : « L’histoire de l’état actuel du système électrique californien est longue et sanglante« , et « le principal responsable dans le secteur de l’électricité est sans conteste le développement de sources renouvelables de production d’électricité« .

Une partie du problème est que de nombreux journalistes ne comprennent pas l’électricité. Ils la  considèrent comme une marchandise alors qu’il s’agit, en fait, d’un service – comme manger dans un restaurant. Le prix que nous payons n’est pas seulement le coût des ingrédients dont la plupart, comme les panneaux solaires et les éoliennes, ont diminué pendant des décennies.

Au contraire, le prix des services comme les repas et l’électricité reflète le coût non seulement de quelques ingrédients mais aussi de leur préparation et de leur livraison.

Mais c’est aussi un problème de partialité, et pas seulement d’analphabétisme énergétique. Les journalistes sceptiques accordent systématiquement un blanc-seing aux énergies renouvelables. Ils savent pourtant comment faire un rapport critique sur l’énergie – ils le font régulièrement quand il s’agit de sources d’énergie non renouvelables – mais ils ne le veulent pas.

Cela pourrait – et devrait – changer.

Les journalistes ont l’obligation de rendre compte avec exactitude et équité de toutes les questions qu’ils traitent, en particulier celles qui sont aussi importantes que l’énergie et l’environnement.

Un bon départ serait pour eux d’étudier pourquoi, si le soleil et le vent sont si bon marché, ils rendent l’électricité si chère.

Traduction par Michel Gay d’un article de Michael Shellenberger, »Héros de l’environnement » selon Time Magazine, Président de « Environnemental Progress ».

 

 

Voir les commentaires (29)

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  • Le solaire et l’éolien sont des énergies d’appoint, à mettre de préférence sur son toit. La meilleure électricité est celle que l’on ne consomme pas, commençons par rendre les maisons à la limite du passif, le nombre de centrales nécessaires sera alors ridicule.

    • La meilleure énergie est celle que l’on produit au moindre coût et dont on tire le maximum de satisfactions de la consommation, point barre. Si vous voulez faire voeu de pauvreté, soyez logique, enfermez-vous dans un monastère et laissez le reste du monde s’enrichir à son gré.

    • Si d’un coté rendre les maisons à la limite du passif est un objectif pas déconnant du tout, ça ne suffira pas pour diminuer drastiquement le nombre de centrales nécessaires.
      Vous oubliez qui consomme beaucoup d’électricité : les entreprises.

    • Le voisin qui osera mettre une éolienne sur son toit ou dans son jardin va finir dans le goudron et les plumes.

      Les maison passives n’existent pas et encore moins celles à énergie positive. Ces propositions sont de l’ordre du fantasme ou de l’escroquerie, pas du réel. La place disponible (toitures, jardins) ne correspond pas, et de loin, au besoin de consommation normale d’une famille.

      La meilleure électricité est celle que je consomme selon mon bon plaisir au meilleur prix. Tout le reste n’est que littérature. Si vous ne voulez pas consommer d’électricité, c’est votre droit. Pour le reste, à savoir la consommation des autres, ne vous mêlez pas de ce qui ne vous regarde pas.

    • Qui paye pour le réseau qui par ailleurs est essentiel?

      • L’ensemble des abonnés au réseau en fonction de la puissance demandée, comme aujourd’hui, peu importe qu’ils produisent une partie de leur électricité à des fins d’auto-consommation, activité purement privée que le réseau n’a pas à connaître, ni en subventions, ni en taxes.

  • « Les journalistes ont l’obligation de rendre compte avec exactitude et équité de toutes les questions qu’ils traitent »

    Ah Ah Ah, merci pour ce moment de franche rigolade !

    • “Pour un journaliste de gauche, le devoir suprême est de servir non pas la vérité, mais la révolution.”

      Salvador Allende.

  • Et encore, La France est un des pays au monde ou les panneaux photovoltaïques sont les plus coûteux. Je ne parle même pas du matraquage pour leur installation souvent mal faite.

    • Il ne faut jamais oublier qu’en France, dans le prix d’un produit ou d’un service, il y a 57 % de dépenses publiques.

  • Nous sommes bien d’accord, ce sont des technologies qui remplacent un peu les jeux du cirque des Romains, elles sont mises en exergue pour amuser et occuper la populace. c’est l’exemple même de mauvais choix faits pour des raisons politiques et électoralistes, et contraires à l’intérêt commun.
    Sans parler du fait que le jour où il faudra tout démonter et recycler, qui va payer ?

  • L’article aurait gagné en clarté s’il donnait le prix au kwh de l’éolien, du solaire, du charbon, et du nucléaire.
    Car même si le prix de l’éolien et solaire diminue, s’il reste tout de même plus cher que le nucléaire, alors le fait d’augmenter sa proportion augmentera mécaniquement le prix global.

    Pas besoin d’être économiste.

    • Il est très compliquer de comparer objectivement les coûts au kWh des différentes sources. Par exemple, pour le nucléaire, la majeure partie du prix de revient est fixe: investissements et salaires ne dépendent aucunement de la quantité de kWh produits. Qu’une centrale tourne à 100% ou 80%, ca ne change pas grand chose. Donc, en ajoutant des éoliennes, on réduit le ratio d’utilisation des centrales, et donc, cela fait mécaniquement augmenter le prix du kWh nucléaire.

      De plus, les prix de revient on tendance à enfler si les marges sont importantes dans des marchés pas vraiment concurrentiels.

      Hier, vous consommiez 1000 kWh nucléaire à 10 cents, soit 100 euros. Demain, vous consommerez 800 kWh nucléaire à 12.5 cents + 200 kWh éoliens, aussi facturés à 12.5 cents, soit 100 euros « nucléaire » et 25 euros « éolien ».

      Bref, on est les didons de la farce.

  • Deux questions :
    Dans une nuit d’hiver bien froide mais sans vent, qui fournit l’électricité nécessaire ?
    Pourquoi l’État, qui se dit écolo, maintient-il des abonnements si onéreux (chez moi conso = abonnement) au lieu d’augmenter le prix du kilowatt (et réduire de moitié, au moins, le prix des abonnements) pour faire payer les gros consommateurs ?

    • En gros, vous voudriez que l’état fixe le prix de l’électricité arbitrairement haut pour pénaliser ceux qui en consomment. Pourquoi tant de haine ? Moi, je veux la payer au prix du marché, mais vous pouvez, en cohérence avec vos idées, faire un don à l’état correspondant à la différence entre le tarif réel et celui que vous souhaiteriez. Quant à l’abonnement, il correspond à ce que vous demandez au réseau en matière de lignes et de disponibilité, bien entendu, et plus votre demande survient à des moments farfelus, plus vous coûtez à ce réseau…

    • Pourquoi l’État, qui se dit écolo, maintient-il des abonnements si onéreux

      Devinez d’où vient le pognon des retraites d’EDF ?

  • je croyais que ça faisait comme le tri des déchets..plus on trie et plus on paie..la France a l’art de tout faire à l’envers et de faire payer les pollués plutôt que les pollueurs…

    • et oui…ils valorisent les déchets…mais plus ils les « valorisent » plus ils font payer leur collecte…comme c’est curieux…le moindre ferrailleur ne fait pas comme ça…

  • L’Ecologie est a la politique ce que l’Inquisition fut au Catholicisme.

  • Les répercutions du prix du démantèlement des vieilles centrales à fission nous offrira de beaux articles de contrepoints sur la gabégie financière de cet état socialiste balourd.

  • Bizarre…les privilèges de L’EDF pas mal..le C.E ,le prix qu’ils payent l’électricité. ..et en bout de course qui est marron !!! le CLIENT c’est lui qui payent….là. .pas un mot !!!!

  • Parmi les facteurs qui ont contribué à l’augmentation des prix :
    – les subsides accordés pour l’installation des énergies gratuites ( de manière à avoir une pay-back period de quelques années ), subsides qu’il faut bien récupérer quelque part
    – le rapport catastrophique puissance installée – puissance produite : 15-20% pour les « renouvelables, 75-80% pour le thermique et nucléaire
    – la multiplication des « autoroutes de l’électricité », pour amener l’électricité renouvelable à son point de consommation
    – la complexification inouïe de la gestion des réseaux, avec un nombre élevé de sources aléatoires de production, indépendantes de la demande en électricité

    • et sachent que la meilleure électricité est celle qu’on ne consomme pas comme on nous t…quelle est le prix d’un bidule qu’on achète pas??? ce que je sous entends maladroitement c’est que pour parler prix on doit avoir un marché un peu libre… tarifs…

      • Si la meilleure est celle qu’on ne consomme pas, les éoliennes et le solaire, qui en produisent surtout quand on n’en a pas besoin, en font de la bonne !

  • Les commentaires sont fermés.

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