Réforme des institutions : moins de députés pour plus d’évaluation ? Chiche !

Plus qu’une bonne intention, la réforme des institutions est en fait d’une nécessité absolue, indispensable à l’optimisation des politiques publiques.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Emmanuel Macron by EU2017EE Estonian Presidence (CC BY 2.0)

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Réforme des institutions : moins de députés pour plus d’évaluation ? Chiche !

Publié le 7 avril 2018
- A +

Par Valéry Denis.

Dans un pays en proie au doute, la réforme des institutions est devenue le Graal d’une élite politique impuissante. En réponse au désenchantement des Français, d’aucuns pensent que des évolutions constitutionnelles suffiront pour combler le fossé qui se creuse entre une population inquiète sur l’avenir du pays et des responsables politiques ayant renoncé à affronter les causes structurelles du malaise : déficit, perte de compétitivité économique, politique migratoire.

Macron ne déroge pas à ce travers à la fois très intellectuel et si naïf : changeons la règle constitutionnelle et tout ira mieux. Bien évidemment, personne n’y croit, surtout les Français, et chacun perçoit que cette nouvelle réformette permet avant tout de renvoyer la balle à l’allié Bayrou et de flatter une opinion publique qui doute, en pratiquant un populisme soft fondé sur l’antiparlementarisme ; le tout se drapant dans la vertu d’une doxa progressiste et émancipatrice consistant à « assurer une meilleure représentation aux minorités ».

Proportionnelle intégrale

Si Macron avait opté pour une proportionnelle intégrale qui contraigne les partis politiques à bâtir des coalitions de projet, on pourrait évoquer un véritable big-bang. Mais c’est loin d’être le cas puisque le quota de 15 % réservé à la proportionnelle permettra de faire entrer au parlement une poignée de députés frontistes supplémentaires et une pincée de députés écologistes en plus.

Conscients du faible impact politique de cette réforme constitutionnelle, certains se réjouissent des substantielles économies réalisées par le « dégraissage » parlementaire. Imaginez : 160 indemnités parlementaires à ne plus verser chaque mois ! Au risque de décevoir ceux qui pensent que la dette française trouve son origine dans les petits fours et les voitures de fonction, l’impact est homéopathique d’un point de vue financier : d’un côté une économie d’une trentaine de millions d’euros, de l’autre un déficit budgétaire de 67 Md€ et une dette de 2 280 Md€.

Par ailleurs, les députés En Marche ont déjà annoncé que cette réforme n’entraînerait pas d’économie puisqu’un des objectifs de la réforme consiste à donner plus de moyens aux parlementaires afin qu’ils exercent leur mission de contrôle et d’évaluation des politiques publiques.

Donc pas d’économie, mais une bonne intention tout de même : faire en sorte que le parlement exerce enfin des prérogatives jusqu’alors en jachère.

Nécessité absolue

Plus qu’une bonne intention, il s’agit en fait d’une nécessité absolue, indispensable à l’optimisation des politiques publiques. Combien de mesures mises en œuvre sans évaluer leurs effets ? Combien de dispositifs maintenus sans évaluer leurs effets ? Combien de millards dépensés sans évaluer leurs effets ?

Ce n’est pas un hasard si la France cumule un déficit public record et une absence d’évaluation des politiques publiques. Si elle se pratique, c’est de façon embryonnaire et surtout peu orthodoxe car partiale, qu’il s’agisse de France Stratégie qui est directement relié au Premier ministre (!) ou l’administration qui est son propre évaluateur dans le cadre de la LOLF.

La Cour des comptes s’interroge régulièrement sur le bien-fondé ou l’efficacité de certaines politiques publiques, mais ses magistrats n’ont ni la vocation, ni les compétences de mener des évaluations rigoureuses selon des méthodes éprouvées.

Si l’Assemblée nationale souhaite exercer un contrôle des politiques publiques, il conviendra néanmoins de s’interroger sur deux points essentiels : les moyens qui y seront consacrés et l’impartialité des évaluations.
Concernant les moyens, 30 M€ sont bien peu pour évaluer 1280 Md€ de dépenses annuelles. Pour mémoire, le GAO (Global Accountability Office) qui, depuis 1921 évalue les politiques publiques américaines, dispose d’un budget de 560 M$ et d’un effectif de 3350 fonctionnaires.

Une intention louable

Quant à l’impartialité, condition indispensable à toute évaluation sérieuse, il faut rappeler au lecteur français peu habitué à cette vertu publique, que le GAO est indépendant et présidé par un Contrôleur général non partisan, tout comme ses homologues britannique (le Institute for Fiscal Studies) ou australien (l’Australian National Audit Office).

Justifier la baisse du nombre de députés par une volonté de donner à une assemblée ramassée les moyens d’exercer un contrôle sur l’administration relève d’une intention louable. En revanche, considérer que cela suffira à rendre la dépense publique française plus efficace et plus efficiente est une promesse qui n’engage que ceux qui y croient.

Puisque la France semble découvrir les vertus de l’évaluation des politiques publiques, profitons de l’économie réalisée par la réduction du nombre de députés pour doter un organisme indépendant d’un budget qui lui permette de mener, en toute objectivité, sans esprit partisan et selon des méthodes ayant démontré leur pertinence dans d’autres pays, des évaluations utiles à la prise de décision de l’exécutif et du Parlement. Ajoutons à ce budget ceux d’organismes spécialisés dans « l’évaluation partisane » et nous aurons construit un outil utile au pays.

Voir les commentaires (10)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (10)
  • il faut aller plus loin …2 députés et sénateurs par département.cela suffit…largement…
    tout fonctionnaire qui se présente doit démissionner,tout élu condamné par là justice pour::(( conflit d’intérêts,abus bien sociaux,enrichissement personnel et ouï proxénétisme )) inéligible à vie….marre de ces délinquant qui donne des leçons de moralité. …Suppression du Conseil Économique et Social pour placer dés élus battus où qui laisse leur place en remerciement obtienne une place,ancien syndicats,fonctionnaire et civil…..
    il faut arrêter de prendre les gens pour dés imbeciles..3 mandants consécutif ouï maïs pas après 3 mandats Européen et ensuite 3 mandats sénateur …pipeau le changement dans la continuité. …ensuite le rapport de là cour des comptes ,les disfonctionnements constatée doit être rectifié. ..si c’est oour un avis consultatif à supprimer …ce serait le commencement du changement ..l’espoir fait vivre…

  • Que dire de plus de ce pays ? C’est terminé, il n’y a rien à espérer. Profitions du calme pour fuir de l’interieur ou mieux à l’exterieur. Bientôt ce pays ne sera que violence et souffrance.

  • bah , on va endormir un peu les français ….les élections européennes ne sont pas loin et les élections municipales c’est demain …..

  • Un « contrôleur général impartial » ? C’est une sorte de super héros ça ? Il n’y a que dans les films Marvel que ces surhommes existent. Par contre l’autre partie du conseil, décupler les budgets et embaucher plein de fonctionnaires, ça c’est possible.

  • Il y a 3 ou 4 ans les lecteurs de Contrepoints avaient des conseils survivalistes. Je pense qu’ils sont déjà loin avec le confort nécessaire. Ce constat est assez alarmant. Même si le contenu de Contrepoints reste très bien, je pense que ceux qui pouvaient/voulaient changer les choses sont ailleurs et ne lisent même plus les news (fake ou pas). Ce pays est à l’image de l’Euro: un bateau fantôme qui va entrainer des millions d’innocents dans les profondeurs de la misère humaine. Et cela uniquement pour que des technocrates puissent profiter encore un peu de leurs privilèges. Alors seriously? Les trucs cosmétiques de Macron il peut se les fourrer bien comme il faut.

  • il manque à cette réforme outre son caractère marginal l’obligation pour les fonctionnaires de démissionner avant de postuler à une élection, comme cela se pratique au RU ou aux USA, mais n’allez pas demander aux Enarques de se tirer une balle dans le pied ….

  • il peut faire dés réforme où reformette;tant qu’il n’aura pas mis sur là table ::les recettes et les dépenses sur une feuille blanche !!!
    il est pas normal de dépenser sur là depense public 57%….c’est çà, là première réforme …
    comme ses prédécesseurs auraient dû faire.!!!et comme ils sont de passage …rien à foutre…c’est comme les lois Européennes ils ont 10 ans environ en moyenne pour les mettre en application …il y aura 2 présidents et quelques ministre qui passeront et aux dernier moment ce sera le bordel !!!!
    si tout les patrons d’entreprises gèrent comme L’ÉTAT les finances de celle ci bonjour les dégâts !!!!

  • – plus de députés = plus de cacophonie
    – chaque député doit être aidé/contrôlé par des retraités de la société civile issus de sa circonscription (3 fois 8 ?)désignés par le sort (de l’ex-PDG au cantonnier en passant par l’ex-prof, l’ingénieur ou le garçon boucher)

  • Bof, les parlementaires et les sénateurs peuvent être avantageusement remplacés par….Google analytics.a quoi bon demander l’avis de gens ne représentant qu’eux même sur des sujets qui les dépassent et n’intéressant que le peuple. On n’a plus besoin d’élus de bas niveau , un sondage d’opinions est bien meilleurs pour satisfaire les francais dans leur vie quotidienne.ainsi il n’y aurait pas des lois débiles comme le 80 sur routes départementales des campagnes anti tabac destinée uniquement à faire entrer de l’argent dans les caisses de l’état etc , des cadeaux fait aux amis des gens au pouvoir , seul le peuple a le droit de décider et sans intermédiaires douteux !.

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don
7
Sauvegarder cet article

Notre nouveau et brillant Premier ministre se trouve propulsé à la tête d’un gouvernement chargé de gérer un pays qui s’est habitué à vivre au-dessus de ses moyens. Depuis une quarantaine d’années notre économie est à la peine et elle ne produit pas suffisamment de richesses pour satisfaire les besoins de la population : le pays, en conséquence, vit à crédit. Aussi, notre dette extérieure ne cesse-t-elle de croître et elle atteint maintenant un niveau qui inquiète les agences de notation. La tâche de notre Premier ministre est donc loin d’êtr... Poursuivre la lecture

Le fait pour un gouvernement de solliciter et d’obtenir la confiance de l'Assemblée contribue à la prévisibilité, la stabilité et la sincérité de l’action publique, et cela devrait être reconnu comme indispensable.

Le 30 janvier dernier, Gabriel Attal a prononcé son discours de politique générale, sans solliciter la confiance de l’Assemblée, avant qu’une motion de censure soit soumise, puis rejetée le 5 février. Le gouvernement Attal, comme le gouvernement Borne avant lui, a donc le droit d’exister, mais sans soutien de la chambre.

... Poursuivre la lecture
8
Sauvegarder cet article
« Je déteste tous les Français »

Le 3 février dernier, un immigré malien de 32 ans, Sagou Gouno Kassogue, a attaqué au couteau et blessé grièvement des passagers de la Gare de Lyon. Finalement maîtrisé par l’action conjuguée des passants, des agents de sécurité et des membres de la police ferroviaire, l’homme en garde à vue a été mis en examen pour tentative d’assassinat aggravée et violence avec armes aggravée.

Les premiers éléments de l’enquête dévoilés par le préfet de police de Paris révèlent les discours conspirationnistes d’un in... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles