Non, l’intelligence artificielle ne nous mettra pas tous au chômage

Des personnes ne connaissant pas grand chose à l’histoire de l’économie mondiale se lancent dans de grandes théories plus ou moins bien argumentées pour nous faire peur en nous laissant penser que l’intelligence artificielle nous fera perdre nos emplois.

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Non, l’intelligence artificielle ne nous mettra pas tous au chômage

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 4 mars 2018
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Par Gaël Chatelain.

Depuis des mois, je lis des article à propos de l’intelligence artificielle : des sérieux, des moins sérieux mais, pour la plupart d’entre eux, il s’agit de faire peur… de NOUS faire peur. Et c’est bien connu, quel que soit le média, la peur a toujours été plus vendeuse que l’espoir et l’optimisme : peur de l’autre, peur de l’étranger, peur du migrant, peur du changement, peur des banlieues etc etc.

Mais là, c’est encore autre chose. Des personnes ne connaissant visiblement pas grand chose à l’histoire de l’économie mondiale se lancent dans de grandes théories plus ou moins bien argumentées pour nous expliquer, en gros, que nous allons toutes et tous perdre notre travail, que nous nous dirigeons tout droit vers un monde dirigé par les robots. Et là… et bien, c’est là que je suis énervé.

En effet, avant de se faire une opinion à propos de l’Intelligence Artificielle,  il me semble fondamental de faire un petit retour en arrière avec la première révolution industrielle car quand nous parlons d’Intelligence Artificielle, c’est bien de révolution dont nous parlons.

Avant l’intelligence artificielle, la révolution industrielle

Au début du XIXème siècle, ce qui allait finir par s’appeler la première révolution industrielle a commencé. Dans le textile, les machines ont commencé à remplacer les hommes. Et certains d’entre eux n’étaient pas, mais alors pas du tout contents. De fait, ils allaient perdre leur emploi.

Ils étaient à ce point mécontents qu’un mouvement de protestation est né en Angleterre :  le luddisme. Ce mouvement est un conflit industriel violent qui a opposé (de 1811 à 1812) des artisans, tondeurs et tricoteurs, aux employeurs et manufacturiers qui commençaient tout juste à utiliser les machines, des métiers à tisser surtout. Le mode de protestation était simple : les machines prenaient leur emploi… ils casseraient donc ces machines !

Les arguments des luddistes, comme on les nommaient, étaient simples : les machines allaient appauvrir le pays ! Ce sont exactement les mêmes arguments que ceux utilisés par certains opposants à l’Intelligence Artificielle. Et, franchement, si je me mets à la place des tisseurs ou des tondeurs, je les comprends à 100%. La transition est violente pour eux.

L’amélioration des conditions de vie

Et pourtant, si l’on observe la période qui va de 1820 à 1870, le PIB mondial a augmenté de 58% et celui du Royaume Unis de 176% ! Alors oui, sans aucun doute, les tisseurs et les tondeurs ont perdu leurs emplois et personne ne peut s’en réjouir.

Mais qui sur cette Terre regrettera ces métiers usants que la machine peut remplacer en augmentant la productivité, la richesse et au final le bien-être. Car derrière cette croissance, il y a l’amélioration des conditions de vie de toutes et tous. Pour rappel, l’espérance de vie moyenne en France au début du XIXème siècle était de 28 ans !

Alors, qu’il faille être attentif aux utilisations de l’Intelligence Artificielle, cela ne fait aucun doute mais il me semble un tantinet exagéré de jeter le bébé avec l’eau du bain. Pour la première fois, à Davos, le cabinet Accenture a montré que  les entreprises utilisant l’Intelligence Artificielle pourraient augmenter leur chiffre d’affaires de 38% et leurs effectifs de 10% d’ici à 2022 . Dans une autre étude, Accenture montre que les entreprises utilisant l’Intelligence Artificielle pourraient augmenter leur rentabilité de 38% d’ici à 2035.

Par ailleurs, si nous réfléchissons à ce qu’est véritablement l’Intelligence Artificielle, ce n’est qu’une technologie qui analyse de grandes quantités de données pour en déduire le comportement approprié. En gros, elle analyse le passé pour envisager l’avenir. Or, le génie de l’homme, c’est justement d’inventer parfois le futur sans prendre en compte le passé… c’est comme cela que les grandes inventions sont nées. Le génie humain n’est pas remplaçable en tout.

L’intelligence artificielle : une opportunité économique

Alors oui, il est certain, par exemple, que le métier de chauffeur de taxi va disparaître mais la question n’est pas de savoir si c’est un bien ou un mal. La question, comme en Angleterre au début du XIXème siècle, est de savoir comment nous allons gérer cette transition afin que cela ne soit pas trop violent : formations, nouveaux métiers, nouveaux marchés… ne laisser personne sur le bord de la route pour ne pas générer de mouvements violents contre ce qui semble bien être la plus grande opportunité économique depuis des décennies.

N’écoutez pas les Cassandre qui jouent avec nos peurs pour nous faire croire qu’il n’y a rien de bon dans l’Intelligence Artificielle ; ce sont les héritiers de celles et ceux qui préféraient avoir une espérance de vie de 28 ans en tondant leurs moutons.

Comme dans toute nouvelle technologie (industrialisation, électricité, informatique et maintenant IA), il faut garder un esprit ouvert ET critique afin de mettre ces technologies au service de l’humanité. Il y aura des abus, c’est certain, mais je suis de ceux qui pensent que si quelque chose est bon pour 90% des gens et mauvais pour 10% d’entre eux, un seul choix s’impose : la majorité.

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  • les machines en général nous font malgré tout perdre du temps de travail ou gagner du temps libre…pour un niveau de vie similaire. Le problème est ailleurs..dans la fluidité et l’adaptabilité des personnes au monde qui change.

    Mais ce qui m’étonne davantage est la revendication paradoxale…on veut du boulot mais le moins possible…
    la majeure partie des gens se contenterait d’un revenu…car pour beaucoup le travail n’est pas une source de plaisir.

    • lorsque des innovations techniques, et le niveau de l’éducation s’accroissent, les productivités des deux facteurs de production sont directement impactées. Parmi les grandes innovations qui ont fortement marqué l’histoire économique citons, la roue, l’imprimerie, la navette textile, la machine à vapeur, le rail, le tout à l’égout, l’électricité, le téléphone, … Ces grandes innovations ont engendré de longues périodes de croissance accompagnées par des grandes modifications de la société. Pour décrire les changements au niveau de l’emploi l’économiste Schumpeter utilise l’expression « destruction créatrice » qui signifie que les innovations technologiques se traduisent par des suppressions et par des créations d’emplois de profils différents. On le sait, ces variations opposées se produisent malheureusement avec des décalages mais sur le long terme, les gains de productivité engendrés par des innovations technologiques n’ont jamais créé de chômage de longue durée.

      Fin de la croissance ?

      Depuis quelque temps, notamment aux Etats-Unis, on fait l’hypothèse d’un ralentissement de la croissance de la productivité des facteurs de production et donc du PIB. L’économiste Robert Gordon estimait en 2012 que « l’on a toutes les raisons de penser que la croissance moyenne à 2 % c’est définitivement fini » et que nous serions au début d’une stagnation séculaire. La croissance élevée des 250 dernières années n’était en fait qu’une exception dans l’histoire de l’humanité. Les révolutions industrielles puissantes comme, la machine à vapeur le rail, l’électricité, l’eau courante, le moteur à explosion, la chimie et les télécommunications ont eu des effets considérables sur la productivité du capital et du travail. Les travaux de Gordon constituent un constat sérieux qui n’a pas fait l’objet de contestations véritablement fondées.
      suite sur : http://www.theoreco.com/macroeconomie-mondialisation/croissance-economique-numerique-416.html

  • Je suis assez énervé par cet espèce de buzz auquel même les articles sensés comme celui-ci contribuent. La question elle-même de savoir si l’intelligence artificielle pourrait détruire des emplois ne se pose que chez les déficients du bulbe, obsédés par un certain conservatisme et une vision socialiste qui confond création de richesses et création d’emplois. L’intelligence artificielle est mal nommée, c’est d’abord une béquille ou un levier pour l’intelligence naturelle. Il en résulte qu’elle ne peut que favoriser la création de richesses et la diminution des efforts nécessaires à ce faire. Où est le problème ?

    • La theorie economique dit que le progres technique permet de reduire les prix. Et une fois ce prix reduit, il reste de l’argent au client pour le depenser ailleurs. Y’a pas un endroit dans la théorie economique où la création d’emplois est d’une quelconque manière formalisée. C’est une interpretation fallacieuse que vous faites entre création de richesse et emploi. Un peu comme la puissance en chevaux des voitures. Vous savez peut etre que l’humanité n’a pas vocation à travailler.

  • Globalement d’accord avec cet article, cependant, deux remarques:
    1- Quand le PIB du 19ème augmente, il faudrait le rapporter à l’augmentation de la population dans la même période (il est normal que le PIB augmente quand la population augmente).
    2- S’agissant des innovations: elles naissent soit du résultat d’associations d’idées existantes (donc du passé), soit, plus rarement, du hasard, deux aspects dont on peut très bien doter l’IA.
    Bon, il n’en reste pas moins que toujours, l’emploi s’est, bon an mal an, à peu près maintenu, et cela malgré l’explosion démographique des deux derniers siècles, et la généralisation de l’automation.

    • Les associations d’idées et le hasard ne sont pas tout. Comme le fait remarquer l’article, le génie est autre chose. En fait, associer des notions existantes donne lieu à une explosion combinatoire dans le nombre des possibilités à examiner. Pour le hasard, c’est encore pire. Et votre problème sera alors celui des faux-positifs, que nulle méthode simple ne permettra d’éliminer : vous aurez parmi les milliards possibles des millions de possibilités vraisemblables d’innovation qui satisferont les tests, mais qui n’auront aucun intérêt au final.
      C’est comme pour les signaux boursiers, où vous aurez beau avoir trouvé des signaux d’achat « qui marchent » sur vos historiques et rétrosimulations, la théorie et le bon sens vous montrent que la confiance statistique que vous leur attribuez à 95% ou 99% est évidemment obtenue par pur hasard et sans signification pour 5% ou 1% de vos cas d’étude. Si vous testez des millions ou des milliards de possibilités, ces 5% ou 1% de faux-positifs représentent bien plus que vous ne pouvez éliminer par d’autres méthodes plus poussées (David Aronson — Evidence-Based Technical Analysis — Wiley 2007)

  • l’ia va détruire enormement de boulots, qualifiés et non qualifiés. Ensuite sera le tour de l’imprimante 3d de detruire des pans entier de l’industrie.

    • Et comme les humains sont absolument idiots et sans imagination, il n’y aura plus aucun travail. Les machines feront tout, et les humains, rien. Ce sera horrible.

      Forcément.

  • L’intelligence artificielle…si elle est intelligente se fera discrète pour ne pas se faire interdire….je me demande si le gens parlant d’intelligence de façon négative n’ont pas peur d’être découverts !

  • . . . et puis sans intelligence artificielle point de conquête des étoiles

  • pourquoi employerle futur?

    l’embrion d’intelligence artificielle deja en place a détruit de nombreux emplois non qualifiés ….

    or regardez le statistiques nous avons plétore de gens non qualifies au chomage

    dans ma jeunesse il y avait des personnes dont le seul travail etait de prendre une piece sur le tapis roulant A pour la placer dans une autre position sur le tapis B

    maintenant c’est fait par des robots et les OS (ouvriers spécialisés dans le politiquement correct de l’époque, categorie crée pour les gens qui n’avaient aucune formation) sont et RESTENT au chomage

    • Faux,ex: mon frère os chez Renault à finit sa carrière comme contrôleur qualité à l’exportation, il a une retraite confortable et il est en plaine forme .
      Et ses collègues de sa génération ont eu des évolutions semblables voir meilleures .
      Ils ont été formés!

    • vous évoquez ici la question du coût du travail. Qui est prêt à payer 2000€ par mois pour une personne qui prendra des pièces dans une position A et les mettra dans une position B pendant 8h par jour, avec des risques de maladies, un « complte pénibilité », des remplacements à assurer pour les congés, etc, alors qu’un robot (sans aucune intelligence artificielle, pour le coup) fera ça très bien, pendant des années et sans se plaindre pour 20000€ ?

  • L’intelligence artificielle va créer de l’emploi comme jamais une innovation ne l’a fait.
    Pourvu qu’on laisse libre les personnes s’en servir pour fabriquer les richesses que l’imagination humaine débordante réalisera.
    C’est ce qui s’est passer avec les précédentes révolutions technologiques. Voir déjà Alfred Sauvy 1980 « La machine et le chômage ».
    Quant au tôt de croissance faible cité par un post, il tient pour l’essentiel aux freins, réglementaires , »taxatoires » , étatiques, mais aussi que n’interviennent pas dans les calculs toutes la richesse virtuelle dont nous nous servons tous les jours pour être efficaces, ou confortables grace à nos smartphones etc…
    Il y a déjà cité plus haut la part de richesse dont les prix sont en déflations malgré des valorisations techniques, donc qui apparaissent moins en comptable, ce qui est le cas de toute l’histoire économique depuis la révolution industrielle…
    Rien ne vaut pour les chiffres qu’une bonne catastrophe naturelle .
    Juste pour sourire, une personne disant ses inquietudes à ce sujet, passait son temps rivée à son portable en alternance avec sa tablette …

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