À Davos, Macron persiste sur le modèle étatiste à la française

Le discours prononcé en anglais et en français à Davos par Emmanuel Macron en dit long sur le fossé qui sépare la France et le reste du monde sur le rôle de l’État. Il en dit aussi très long sur ce qui sépare Emmanuel Macron du libéralisme.

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À Davos, Macron persiste sur le modèle étatiste à la française

Publié le 26 janvier 2018
- A +

Par Éric Verhaeghe.

Le discours prononcé par Emmanuel Macron à Davos, mi-anglais mi-français, mérite d’être lu avec attention dans la mesure où il détaille la conception présidentielle de la mondialisation et de la prospérité.

En ce sens, il établit bien les distances entre la vision française d’un avenir proche et la conception du même avenir en vigueur dans le reste du monde. Ceux qui imaginent Macron en chantre du libéralisme en seront pour leur frais.

 

Ne faites pas l’Europe comme je pense le monde

On relèvera d’abord cette phrase emblématique d’Emmanuel Macron sur l’Europe :

« Ceux qui ne veulent pas avancer ne doivent pas bloquer ceux qui sont ambitieux. »

Voilà une phrase qui pourrait être taxée de libéralisme. Les derniers de cordée ne doivent pas retarder les premiers de cordée. Il n’y a pas de raison pour que les meilleurs perdent du temps à attendre les moins bons.

On connaît l’intention paradoxale et incohérente de cette phrase : l’Europe doit accélérer son intégration pour réduire le différentiel de compétitivité entre la France et l’Allemagne. « Ceux qui veulent avancer », « ceux qui sont ambitieux » doivent pouvoir distancer les plus lents, c’est-à-dire accélérer l’intégration de l’Europe pour réduire le différentiel de compétitivité avec nous.

 

Les Européens priés d’attendre

Sur ce point, Macron a l’illusion que Merkel le suivra. Mais on voit mal quelle majorité elle pourrait rassembler pour copier la France.

Ce que ne dit pas clairement Macron ici, c’est que les « ambitieux » Français demandent en réalité à leurs voisins d’aller moins vite, de les attendre. Le baudet français est à la traîne et ce serait tellement mieux que les autres s’arrêtent pour lui.

On voit ici poindre l’équivoque de la novlangue macronienne. On a rebaptisé les personnages de la pièce européenne : la France alourdie par ses charges délirantes devient l’ambitieuse. La Pologne et son taux de croissance de 5 % en 2017 est classée parmi ceux qui ne veulent pas avancer. Quand la Pologne ne veut pas attendre la France au bord de la route, quand la Pologne refuse des mécanismes de redistribution de sa prospérité à une France dépensière et incapable de maigrir pour la rattraper, on dit : la Pologne qui ne veut pas avancer et la France qui a de l’ambition.

Ainsi Macron sert-il la soupe populiste à des Français heureux de pouvoir le croire. Il suffit de subvertir la réalité pour avoir soudain raison.

 

Le mythe macronien du passager clandestin

Dans cette grande entreprise de piratage de la réalité, Emmanuel Macron pratique la logique bien connue de Chirac : plus c’est gros, mieux ça passe.

La France a fait le choix de faire peser sur le travail des prélèvements d’environ 80 % pour financer des millions de chômeurs, d’inactifs, de retraités, chapeautés par une épaisse couche de bureaucrates improductifs. Dans le monde industrialisé, elle est la seule à aller aussi loin dans la protection. Dans le langage macronien, elle est donc entourée de « passagers clandestins » qui déploient des « stratégies non-coopératives ».

Tel est le grand renversement macronien. Est coopératif celui qui imite le modèle français, quand bien même ce modèle ne fonctionne pas et condamne toute croissance. Est passager clandestin celui qui demande à ses citoyens de se retrousser les manches et de se mettre au travail.

 

Le « cœur du nouveau contrat social »

On se délectera de cette phrase digne des annales de l’histoire :

« Le cœur du nouveau contrat social est qu’il doit impliquer tous les acteurs, lutter contre les stratégies de passagers clandestins et être cohérent, au regard de l’objectif de défense des biens communs. Cela ne se fera pas du jour au lendemain, mais au moins, nous devons être transparents sur nos incohérences. »

La France, c’est bien connu, est le pays de la cohérence. Elle crée un modèle ubuesque, avec une Sécurité sociale coûteuse et inefficace, des tombereaux de fonctionnaires dont la plupart sont affectés à des missions inutiles (en pleine crise terroriste, nous trouvons par exemple utile d’affecter des milliers de policiers au contrôle de la vitesse sur des routes nationales), des hyperréglementations dans tous les domaines, mais ce sont les autres qui sont incohérents et qui sont des passagers clandestins. S’ils ont davantage de croissance que nous, c’est évidemment parce qu’ils trichent et qu’ils sont déloyaux.

La France, c’est aussi très connu, est le pays où le bien commun est le mieux défendu. Ce n’est pas notre genre de compter un fonctionnaire pour cinq actifs, dont on ne mesure pas le temps de travail et auquel on offre une retraite délirante payée à 80 % par le contribuable.

Ce n’est pas non plus notre genre d’entendre par bien commun une expansion continue de règles incompréhensibles et destructrices de croissance dont l’utilité première est de justifier l’emploi de ces fonctionnaires envers et contre tout.

 

Macron chante les mérites de l’État à Davos

En chantre de la subversion des mots, Macron a expliqué avec beaucoup d’enthousiasme les vertus du modèle étatiste français. Son rêve est de l’étendre au reste du monde, au nom de la coopération et du bien commun, bien entendu.

Alors que, depuis des années, le système français de formation professionnelle est incapable de former les chômeurs aux nouveaux métiers, le président Macron en a vanté les mérites. Il faudrait, paraît-il, que les startups financent la formation des chômeurs qu’elles produisent en numérisant les métiers.

Ce faisant, Emmanuel Macron a dénoncé les distorsions fiscales dont les startups françaises sont victimes de la part de leurs concurrentes américaines. Car, c’est bien connu, ce sont les Américains qui décident de la délirante fiscalité française.

Là encore, le président Macron a prôné davantage de fiscalité, d’État, d’actions publiques. Il appelle ça un « nouveau contrat social ». Celui-ci doit servir, paraît-il, à mieux partager les richesses et à mieux protéger. Tous ces slogans utilisés en France pour justifier une pression fiscale dont on peine à voir les réalisations sociales effectives méritent bien d’être exportés partout dans le monde. Au nom d’une libre concurrence loyale, bien entendu.

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  • c’est un excellent article informatif qui revele Macron et son ambition dans le monde: L’etat, L’etat, L’etat.. partout.

    • « Tout par l’État, rien hors de l’État, rien contre l’État ! »

      Mussolini

      La sociale-démocratie est le jumeau du fascisme.

  • A quoi avoir renvoyé FH pour avoir l’illusion de changer
    Pendant ce temps le monde avance. La Russie se desovietise

  • Pas grave c’est ̶l̶’̶é̶t̶a̶t̶ les enfants qui vont payer. Allant jusqu’au bout de la logique, Macron n’en a pas fait.

  • « en pleine crise terroriste, nous trouvons par exemple utile d’affecter des milliers de policiers au contrôle de la vitesse sur des routes nationales »

    Oui mais non:
    La lutte contre le terrorisme coûte très cher et comme on a dépensé tout l’argent des con-tribuables à arroser des parasites, il n’y en a plus pour la sécurité,
    Donc …
    Il ne reste plus qu’à attaquer les diligences qui roulent à 91 au lieu de 90 km/h, je suis bien placé pour en témoigner.

  • Macron se prend vraiment pour le messie : voilà maintenant qu’il invente un nouveau contrat social, comme si le délire de Jean Jacques Rousseau ne nous avait pas suffisamment détruit jusqu’ici.

    L’ouverture de son discours commence par « heureusement, vous n’avez invité aucun climato-sceptique cette année ! » – on dirait un discours de Brejnev se félicitant des 100% d’approbation de la population. La suite est à l’avenant : insupportable d’hypocrisie et d’arrogance.

    Ce pays est foutu.

    • « heureusement, vous n’avez invité aucun climato-sceptique cette année ! »

      Hé c’était juste une boutade contre Trump!

      Ceci étant, je ne suis pas aussi sûr que vous que M. Macron soit un étatiste forcené.
      Il n’a pas fait une carrière de fonctionnaire.
      Il est entouré d’un édifice formidablement inerte et n’est pas Samson qui veut: quand on n’a pas les épaules larges il faut finasser.
      Il a même laissé quelques indices positifs (la jalousie des français, il fallait l’oser).
      Je n’ai pas trop confiance mais je continue à scruter les signes subtils qu’il sème avec prudence avant de juger de ses intentions.
      Et ce que vous appelez arrogance n’est peut-être que l’inévitable composante hyper-théatrale de la politique.

      • @mc2

        C’est cela, oui. Scrutons un quinquennat de plus. Puis continuons d’en tirer des conclusions dans ceux qui suivront.
        Au passage, j’ai remarqué quelques traces d’étatisme forcené dans le gouvernement qu’il a formé (en plus de divers discours comme celui sur les travailleurs détachés, le climat, le business…), et en effet, je trouve qu’il finasse plutôt bien en se déchargeant du manteau étatique néfaste à son image.

        • « Scrutons un quinquennat de plus »

          Vous pensez qu’en cinq ans on peut rééduquer une population aliénée par un demi-siècle de socialisme?

          • @mc2

            la rééducation en France sous Macron :

            – limitation de vitesse
            – égalité des sexes
            – hommages en grandes pompes divers pour le moindre événement
            – sauver la planète
            – enregistrer l’état d’urgence dans la constitution pour retirer la charge de la sécurité, et la responsabilité qui va avec, aux citoyens
            – faire croire que l’état n’est pas le premier à jouer du pipot
            – instauration de la dénonciation citoyenne
            – encourager l’engagement syndical

            Pourquoi prendre autant de mesures menant à l’aliénation de la population s’il veut vraiment l’en sortir ?

          • Ramener une population au sens des réalités, ça peut être largement commencé en moins de 5 ans. La Suède entre 1993 et 1998, la Chine entre 1989 et 1994, et il y a d’autres exemples. C’est simple, il suffit de montrer que la majorité gagne plus et vit mieux en sortant du carcan étatique.
            Macron aurait dû dire : « Moi, Président des riches ? Je l’espère bien, parce que quand je partirai, les riches seront la majorité en France, et même ceux qui seront encore pauvres le seront bien moins qu’aujourd’hui ! ». Et faire ce qu’il faut pour, tout le monde sait à peu près en quoi ça consiste, mais il y a quelques intérêts personnels qui souffriraient.

      • Vous ne savez pas lire, il est pourtant assez clair dans son bouquin tout comme dans ses discours et ses actes! Ce type est un grand malade.

        • « Vous ne savez pas lire »

          Vous me l’avez déjà dit mais, promis, je vais apprendre …
          Et vous pourrez apprendre à lire entre les lignes, décrypter des auteurs qui ne sont pas trop primaires, ça peut aussi servir dans la vie.

        • « il est pourtant assez clair »

          Sans vouloir tomber dans la psychanalyse de bazar, ce qu’on cache est plus révélateur que ce qu’on montre.
          Et pour interpréter il faut savoir creuser.
          Je ne suis pas très doué pour cela non plus mais au moins j’essaye.

      • Ah bon, et la fusion du RSI dans la Sécu au lieu de le réformer c’est pas de l’étatisme forcené ?
        Et le pédagogisme forcené dans l’EdNat non plus ?
        Et la réforme de l’assurance chômage qui se prépare non plus ?
        Et l’augmentation du budget de l’Etat non plus ?

        Le « libéralisme » de Macron est un montage médiatique, entretenu par les ahuris des Insoumis pour qui tout ce qui est moins totalitaire que la Corée du Nord est la porte ouverte au turbo-libéralisme et au grand complot des Illuminatis de la finance mondiale.

        Ça lui permet juste de museler la droite qui n’ayant rien compris au libéralisme, s’en va chasser sur les plates-bandes populistes.

        • Je vois au moins une belle résistance au pédagogisme, au moins chez Blanquer.
          Pour le reste je suis comme vous très gêné par l’omerta sur le problème du surendettement de l’Etat qui risque de nous sauter à la figure rapidement. Je doute qu’il y ait d’autre solution que de prier St Jude.

          • Réduire les dépenses de l’État et de la protection sociale seraient à mon humble avis pus efficace que l’intercession de St Jude.

      • Il a été banquier, dans les faits les banquiers sont des fonctionnaires et sans doute le plus grands percepteurs du systèmes.

  • La maladie remonte très loin et touche pratiquement tous les politiciens de droite et de gauche. Ils ont une allergie profonde à l’idée que l’état pourrait être moins interventionniste. Seules les « élites » savent ce qui est bon pour le peuple. Il ne faut surtout pas laisser fonctionner librement des mécanismes de marché qui pourraient conduire à des choix différents.
    Et malheureusement une grande partie de la population attend tout de l’état. La situation est bloquée pour longtemps.

  • les nombreux très riches de Davos doivent bien rigoler du nouveau contrat social français proposé.
    plus encore de fonctionnaires et de parasites .
    Eux avancent et nous creusons notre faillitte

    • Extrait du discours du Pr. Trump au WEF:

      …This is especially true because we have undertaken the most extensive regulatory reduction EVER CONCEIVED. Regulation is stealth taxation. In the United States, like in many countries, unelected bureaucrats have imposed crushing anti-business and anti-worker regulations on our citizens with no vote, no legislative debate, and no real accountability.

      Peu de chance que ceci soit relevé (ni commenté hélas). C’est pourtant le fond du problème.

  • Très bon article, bravo.

  • Comment soigne-t-on la paranoïa?

  • Le problème que ce socialo ne voit pas, c’est que la France est dans le peloton de queue, et qu’avec lui elle de bonne chance de devenir la lanterne rouge!

  • ……Est il totalement crétin….? Ou totalement démago….?
    J’ai bien peur qu’il soit les deux.

    • J’ai bien peur qu’il ne soit pas crétin. Au contraire, c’est un apparatchik de la nomenklatura qui va tout mettre en œuvre pour pérenniser les privilèges de sa caste étatique.

      • GN, je partage votre avis que le Figaro de ce jour tend à confirmer avec 2 articles: l’un où Christian Saint Etienne explique que la politique de Macron profitera aux grandes entreprises mais pas aux ETI et PME et l’autre où Bernard Arnault se félicite de la politique de Macron…

  • Macron, le nouveau Mussolini en pantoufle

  • Pas étonnant que les les grands patrons l’applaudissent, la plupart bénéficie des largesses des états, capitalisme de connivence, clientélisme, nous voici!

  • Il faut lire « La France injuste : 1975-2006 : pourquoi le modèle social français ne fonctionne plus » de Timothy Smith qui est un économiste social démocrate (donc on ne peut pas l’accuser de biais idéologique), celui ci démontre comment le modèle social francais loin d’être redistributif envers les plus pauvres sert à certaines catégories de personnes (notamment les fonctionnaires). Cet ouvrage démontre, dans une perspective de centre gauche, que le modèle français est : premièrement, de manière générale, non redistributif envers les pauvres ; deuxièmement, il est lui-même la cause principale du chômage ; troisièmement, il est injuste pour les jeunes, les femmes, les immigrés et leurs descendants ; enfin, quatrièmement, il est intenable financièrement.

    Et rappelons que notre modèle social ne vient pas du CNR mais du régime de Vichy. Sur le sujet, lisez « L’héritage de Vichy: Ces 100 mesures toujours en vigueur » de l’historienne Cécile Desprairies. Comme le montre les travaux de l’historien Robert Paxton, “l’interventionnisme à la française” ne date pas de Colbert, mais de Pétain. http://eric-verhaeghe.entreprise.news/2015/08/09/les-racines-vichystes-de-la-securite-sociale/

    • Oui enfin le CNR n’a rien fait pour changer ce qu’avait fait Vichy bien au contraire…

    • Le problème de l’auteur de ce livre est qu’il propose encore plus de sociale-démocratie. En tout cas, le rêve des eugénistes socialistes est partiellement réalisé : exclure les femmes et les immigrés du marché du travail.

  • créer de l’emploi avez des sudventions !!!!
    des advantages fiscaux pour embaucher,donner de l’argent pour les entreprises…et le chômage..
    augmentations de la dette publique année après année. .augmenter la dépense publique. .
    je suis le meilleur..triste individu…le bal des élites ….

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