PSA, Pimkie : les ordonnances Macron facilitent-elles vraiment les licenciements ?

Les groupes PSA et Pimkie viennent d’annoncer leur intention de supprimer des emplois en utilisant la rupture conventionnelle collective prévue par les ordonnances Macron. Il n’en fallait pas plus pour nourrir les fantasmes sur la facilitation des licenciements par les nouvelles dispositions législatives.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Emmanuel Macron by EU2017EE(CC BY 2.0) (2)

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

PSA, Pimkie : les ordonnances Macron facilitent-elles vraiment les licenciements ?

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 31 décembre 2017
- A +

Par Eric Verhaeghe.

Coup sur coup, PSA et Pimkie viennent d’annoncer leur intention de mettre en oeuvre une rupture collective conventionnelle telle qu’elle est prévue par les ordonnances Macron. Ces annonces sont l’occasion d’un déferlement de hargne sur les réseaux sociaux, condamnant la facilitation des licenciements que cette loi permettrait.

Une fois de plus, la bien-pensance (qui va de l’extrême gauche à l’extrême droite et rappelle une fois de plus que le Front National ne comprend pas mieux l’économie de marché que la France Insoumise), nourrie par son mépris de l’entreprise et des réalités économiques, produit des raccourcis d’une impressionnante inexactitude.

PSA et Pimkie ne licencieront pas

Premier point à rappeler : la procédure de rupture conventionnelle collective ne passe pas par des licenciements.

Elle permet seulement à l’entreprise de négocier un accord majoritaire avec les organisations syndicales autorisant des départs volontaires. Ne quitteront donc PSA et Pimkie que les salariés qui le demandent.

Dans l’imaginaire collectif, le plan social est forcément une opération brutale qui se termine par des licenciements secs. Or, les plans de départs volontaires, loin d’être vécus comme des traumatismes, sont plutôt des opérations que les salariés accueillent avec soulagement. Ils leur permettent en effet de partir dans de bonnes conditions financières et de commencer un nouveau projet de vie.

Quelques idées reçues

Certains se souviennent avec amusement de l’effroi de la direction de la Société Générale en 2012, lorsque des vagues de salariés avaient demandé à bénéficier du plan de départ. Il avait à l’époque fallu en retenir une partie.

Pourtant, le plan portait sur 880 départs, ce qui n’était pas rien.

À l’époque, les conditions financières offertes par l’entreprise avaient convaincu bon nombre de salariés de prendre le chèque et de partir, parfois sans aucune promesse d’embauche ailleurs. On retrouve ici les mêmes motifs que ceux qui poussent Macron à proposer le chômage pour les démissionnaires : loin des idées reçues, les entreprises françaises ne licencient pas assez…

Des syndicats pragmatiques

Au passage, on n’a probablement pas assez martelé que la rupture collective conventionnelle fonctionne avec un accord d’entreprise majoritaire. Autrement dit, il faut que les syndicats qui le signent représentent une majorité de salariés lors des élections professionnelles. On est donc très loin d’une décision unilatérale prise par un exploiteur qui impose la misère à de pauvres salariés.

Si Pimkie et PSA comptent sur un accord majoritaire, c’est bien parce que leur projet de rupture conventionnelle est favorable à l’intérêt des salariés et n’a rien à voir avec les caricatures qu’on en dresse. Les syndicats d’entreprise, qui sont beaucoup plus pragmatiques que la bureaucratie qui les représente au niveau national l’ont très bien compris.

L’intérêt économique de la rupture conventionnelle collective

Au demeurant, la rupture conventionnelle collective obéit à une vraie logique économique, même dans les entreprises qui dégagent des profits comme PSA. En économie de marché, les entreprises sont contraintes à une adaptation permanente de leur processus de production. Seules les économies administrées peuvent (temporairement) rester figées, jusqu’à ce qu’un effondrement brutal se produise.

PSA l’a très bien compris et fonctionne depuis des années avec une sorte d’accord de compétitivité permanent qui prévoit des départs réguliers sur la base du volontariat. Au sein de l’entreprise, le seul syndicat qui s’oppose à cette logique de bon sens est la CGT de Jean-Pierre Mercier, par ailleurs militant de Lutte Ouvrière.

En réalité, l’opposition aux accords de compétitivité dont la rupture conventionnelle collective est une résurgence contemporaine traduit une nostalgie pour les économies monopolistiques.

Rupture entre le syndicalisme d’entreprise et la bureaucratie syndicale

Alors qu’une majorité de syndicats devrait signer la rupture conventionnelle collective de PSA, on a entendu des bureaucrates syndicaux dire tout le mal qu’ils pensaient de cet accord. On retiendra en particulier les propos de Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO, qui appelle au licenciement des intérimaires avant le départ des titulaires d’un CDI chez PSA.

On ne relèvera même pas ici la logique de rentier qui sous-tend les propos de Mailly (virons les outsiders avant les insiders) et qui rappelle une fois de plus que le syndicalisme français est avant tout un outil de défense au service des mieux intégrés sur le marché du travail. On notera juste que, malgré l’opposition de la bureaucratie de FO, la section d’entreprise devrait souscrire au projet de la direction de PSA.

Il serait peut-être temps que les bureaucrates (souvent issus de l’appareil ou de la fonction publique) qui tiennent le syndicalisme français cèdent la main à des personnalités un peu mieux représentatives de l’économie française et des salariés du secteur privé.

Sur le web

Voir les commentaires (3)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (3)
  • Bah, avant on licenciait après on licencie toujours avec les mêmes difficultés ou facilités selon l’intérêt politico- mediatique du moment. …quand une industrie fait l’essentiel des emplois d’une région, évidemment , cela ne se passera pas bien , lois ou pas.

  • Vous ne changerez pas l’imbécillité française, cause du déclin total du pays!

  • Là est la limite de ma compréhension de l’économie : pourquoi liciencier des employés quand ceux-ci permettent des profits ?
    Sans employés, une entreprise, comme PSA, ou Pimkie, ne peut pas fonctionner. Un licenciement pour raison économique, ou parce que l’entreprise n’est plus viable, je le conçois et le comprends. Mais qu’elle licencie alors qu’elle est rentable, je ne comprends pas.
    Je ne nie pas la pression fiscale qui est un frein à l’emploi tout court.

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don
7
Sauvegarder cet article

Notre nouveau et brillant Premier ministre se trouve propulsé à la tête d’un gouvernement chargé de gérer un pays qui s’est habitué à vivre au-dessus de ses moyens. Depuis une quarantaine d’années notre économie est à la peine et elle ne produit pas suffisamment de richesses pour satisfaire les besoins de la population : le pays, en conséquence, vit à crédit. Aussi, notre dette extérieure ne cesse-t-elle de croître et elle atteint maintenant un niveau qui inquiète les agences de notation. La tâche de notre Premier ministre est donc loin d’êtr... Poursuivre la lecture

Le fait pour un gouvernement de solliciter et d’obtenir la confiance de l'Assemblée contribue à la prévisibilité, la stabilité et la sincérité de l’action publique, et cela devrait être reconnu comme indispensable.

Le 30 janvier dernier, Gabriel Attal a prononcé son discours de politique générale, sans solliciter la confiance de l’Assemblée, avant qu’une motion de censure soit soumise, puis rejetée le 5 février. Le gouvernement Attal, comme le gouvernement Borne avant lui, a donc le droit d’exister, mais sans soutien de la chambre.

... Poursuivre la lecture
8
Sauvegarder cet article
« Je déteste tous les Français »

Le 3 février dernier, un immigré malien de 32 ans, Sagou Gouno Kassogue, a attaqué au couteau et blessé grièvement des passagers de la Gare de Lyon. Finalement maîtrisé par l’action conjuguée des passants, des agents de sécurité et des membres de la police ferroviaire, l’homme en garde à vue a été mis en examen pour tentative d’assassinat aggravée et violence avec armes aggravée.

Les premiers éléments de l’enquête dévoilés par le préfet de police de Paris révèlent les discours conspirationnistes d’un in... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles