Femmes enceintes et exposition aux métaux : encore une communication indigente

A propos des métaux et des femmes enceintes : encore un alarmisme qui n’a pas lieu d’être.

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Femmes enceintes et exposition aux métaux : encore une communication indigente

Publié le 28 décembre 2017
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Par Wackes Seppi.

Santé Publique France a publié le 19 décembre 2017 le tome 2 du « volet périnatal de biosurveillance » intitulé « Exposition des femmes enceintes aux métaux et métalloïdes ».

Encore un communiqué de presse indigent

Comme il se doit, il y a une annonce sur le site, à partir de laquelle vous pouvez sauter sur une page thématique « Biosurveillance » et sur un communiqué de presse. Les textes de l’annonce et du communiqué de presse sont quasiment identiques. Les communicants ont bien travaillé et sont fatigués.

La substantifique moelle, enfin…, la voici :

Des métaux présents dans l’environnement retrouvés chez toutes les femmes enceintes

13 métaux et métalloïdes ont été dosés : l’aluminium, l’antimoine, l’arsenic total, le cadmium, le césium, le chrome, le cobalt, l’étain, le mercure, le nickel, le plomb, l’uranium et le vanadium.

À l’exception de l’uranium, l’ensemble des polluants mesuré était présent dans l’organisme des femmes enceintes étudiées :

  • Le plomb et le mercure sont mesurés à des niveaux moindres que ceux mesurés dans le passé en France
  • Comparé aux autres pays, les femmes enceintes en France sont plus imprégnées au mercure et à l’arsenic. Cela pourrait en partie s’expliquer par des différences de comportements (consommation de produits de la mer)
  • Les niveaux d’imprégnation observés par les autres métaux sont du même ordre de grandeur que ceux observés dans des études antérieures.
  • Les sources d’imprégnation les plus courantes sont : le tabac et l’alimentation

Des indicateurs indispensables en santé environnement

L’exposition pendant la grossesse à ces polluants pourrait avoir des répercussions sur la santé de l’enfant et de la mère. C’est pourquoi ces données sont importantes afin d’apporter des indicateurs aidant les pouvoirs publics à limiter l’exposition des femmes à ces substances, à mesurer dans le temps l’efficacité des mesures mises en place et à bien comprendre les modes d’imprégnation. Ces données permettent d’établir des valeurs de référence utiles pour caractériser les expositions en cas de pollution locale ou d’événement de surexposition. L’ensemble des résultats du volet périnatal de biosurveillance montrent qu’il est possible d’agir et que l’action est d’autant plus efficace que des seuils sanitaires existent.

Résumons : une communication centrée sur les fréquences de détections ; avec des mises en perspective d’intérêt secondaire (des comparaisons avec les études antérieures et les autres pays), sans la mise en perspective qui importe (les comparaisons avec les doses journalières ou les seuils sanitaires) ; une mise en cause, au conditionnel, des produits de la mer.

Donc, la communication telle que nous la détestons.

Pour le contexte, il faut chercher…

Qu’est-ce que la cohorte Elfe mentionnée sur/dans la page web/le communiqué de presse ?

En cliquant sur le bon lien, les dégourdis sauteront vers une page qui propose un résumé en français, avec un onglet qui permet d’accéder à l’anglais. Très général, mais on y apprend ceci :

Le programme national de biosurveillance, mis en oeuvre par Santé publique France (anciennement l’Institut de veille sanitaire), comporte un volet périnatal s’appuyant sur un sous-échantillon de femmes enceintes incluses dans le volet biologique de la cohorte Elfe (Etude Longitudinale Française depuis l’Enfance).

Il y aussi l’inévitable cocorico :

Le volet périnatal du programme national de biosurveillance fournit pour la première fois en France des indicateurs nationaux fiables et pertinents sur l’imprégnation des femmes enceintes par les métaux et métalloïdes.

Mais le paragraphe précédent se conclut par :

Les éventuelles variations temporelle et géographique des niveaux d’imprégnation par ces métaux et métalloïdes ont été étudiées par une comparaison avec les résultats d’études antérieures menées en France et à l’étranger.

Faut-il comprendre que les « études antérieures menées en France » n’étaient pas fiables et pertinentes ?

Notons aussi que la page web/le communiqué de presse fait état de « 4 145 femmes enceintes ayant accouché en 2011 en France continentale (hors Corse) ». En réalité, les dosages ont été faits sur 990 femmes, sauf pour le mercure (1.799) et le plomb (1.968)… La com’ enjolive… et trompe !

La page de résumé propose aussi deux liens, vers le rapport complet et une synthèse. Ceux-ci sont téléchargés et viendront donc encombrer votre disque dur.

Notons encore que la page web/le communiqué de presse ne comportent pas ces liens… pas la peine d’aguicher, notamment, les journalistes. Mais les communicants ont peut-être compris que ça n’intéresse pas vraiment les journalistes…

Les résultats complets sur les métaux : il faut les chercher

Qu’apprend-on par exemple sur l’antimoine dans la synthèse ? Qu’il a été dosé chez 990 femmes enceintes ; qu’il a été quantifié chez 70 % des femmes ; que la concentration urinaire moyenne (moyenne géométrique) est égale à 0,04 µg/L (0,06 µg/g de créatinine) ; qu’elle est proche des concentrations observées dans les études antérieures conduites en France et à l’étranger auprès des femmes enceintes et des femmes adultes.

Il faut aller dans le document complet pour trouver ceci :

Dans le cadre de l’étude ENNS [Étude nationale nutrition-santé mise en œuvre par Santé Publique France en 2007], une valeur biologique de référence en population générale a été établie pour l’antimoine urinaire, en France : cette valeur s’élève à 0,30 µg/g de créatinine et concerne à la fois les hommes et les femmes âgés de 18 à 74 ans. Les concentrations urinaires en antimoine semblent peu influencées par le sexe et l’âge du sujet.

La présence d’une quantité mesurable d’antimoine dans les urines est un indicateur d’exposition à l’antimoine, mais ne signifie pas qu’il en résultera nécessairement des effets nocifs pour la santé. Le niveau de connaissances actuel ne permet pas d’interpréter, en termes d’effets sanitaires, les niveaux biologiques d’antimoine mesurés dans l’organisme.

La moyenne géométrique mesurée représente donc un cinquième de la valeur biologique de référence. Voilà qui est moins impressionnant – et anxiogène – que le fait que l’antimoine a été quantifié chez 70 % des femmes.

Les résultats sont aussi très majoritairement en dessous de la valeur biologique de référence de 0,30 µg/g de créatinine. Elle est dépassée de peu (0,306 µg/g) par le 95e percentile de femmes d’au plus 24 ans, soit… 3 femmes (ou peut-être 2, l’effectif étant de 144).

On aurait aimé voir quelques valeurs de référence…

Mais un document plutôt bien fait

Cependant, le document complet est très bien fait et fourmille de renseignements.

Il manque juste ce petit peu devenu indispensable dans ce monde moderne où une publication scientifique est exploitée par des médias et dans les réseaux sociaux à des fins – disons – discutables.

De fait, le paysage médiatique est une morne plaine. Il ressort de notre brève exploration qu’il n’y a guère que le Figaro, avec « Mercure, arsenic…Des traces de métaux retrouvées chez des femmes enceintes », qui présente un tableau aussi détaillé que possible pour un article de journal avec une description objective de la situation. Sinon, la « surexposition » – dont on rappellera que, selon le communiqué de presse de Santé Publique France, c’est « [c]omparé aux autres pays » – et les produits de la mer sont en première ligne dans les titres et les contenus d’articles foncièrement alarmistes.

Et cet alarmisme n’a pas lieu d’être.

Sur le web

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  • Et le sulfate de cuivre dans les cultures bios ils n’en parlent pas bien sûr!

    • Le cuivre est un métal bénéfique pour la santé, à certaines doses, on le donne, comme oligo-élément, dans certaines affections…
      Par contre, je n’ai rien entendu de tel pour le cadmium, le mercure ou le plomb…

  • « On aurait aimé voir quelques valeurs de référence… »
    Certes… Et si Wackes Seppi pouvait nous les fournir, nous pourrions être pleinement rassuré sur l’innocuité, pour le corps humain, du mercure, du cadmium, de l’aluminium, du plomb… que nous ingérons…

    • l’innocuité absolue ….
      Ce qu’on considère pour des tas de raisons dont on pourrait débattre c’est le surrisque significatif.

      Entrer dans un débat sur l’absence de risque total ou de danger est une impasse pratique.

      Je ne peux pas vous prouver qu’un truc est dans danger… Dès lors poser comme principe que je ne dois pas faire un truc ( en général nouveau) pour la raison de l’existence possible d’un danger permet de TOUT interdire.
      Et tout interdire c’est excessif.

      Il faut donc trouver un moyen de régler le sort de nouveautés proposées par des gens..
      on a choisi une façon de faire qui notamment repose sur un rapport dose/effet qui est bien entendu faux de façon générale, mais qui est aussi la seule façon simple de faire. Voire la seule façon pratique de faire du moins de façon empirique…
      ( et quand on regarde l’évolution de l’espérance de vue historique ça a marché assez bien)…

      Maintenant imaginons que par souci de vérité » , nous abordions chaque substance comme d’une part susceptible d’effet conjugué avec d’autres et en outre de façon non monotone dose effet….
      DU point de vue épidémiologique vous ne pourrez jamais rien prouvé…
      Aucune donnée épidémiologique ne vous permet de conclure à l’absence de risque….

      En PRATIQUE, on goûte un petit morceau si on n’est pas malade on gobe le truc….
      C’est la seule façon de vivre .
      SI tu commence à penser que le petit morceau est plus dangereux que le gros…. si tu commence à penser que tu dois vérifier que si c’est sans danger quand tu as mangé quelconque chose auparavant..
      Tu peux m^me ajouter la variabilité des individus…
      Ce n’est pas parque que gérard peut le manger sans danger que moi je peux…

      Le fait est que c’est peut être vrai…mais invivable.

      Sauf à vouloir se placer dans une situation où on peut toujours crier au loup…l’approche dose effet en premier permet de dégrossir de façon acceptable le risque…

  • Et quel est l’intérêt de ce genre d’étude sachant que mère nature n’est pas avare dans sa dispersion de métaux et autres molécules.
    Une simple pomme , bio pour vous faire plaisir ,contient combien de métaux différents ?
    Un thon ou une huître vivent très bien en leur présence comme toutes es bestioles de la création.
    Y a t il moins de malades après la disparition du plomb de nos voiture de nos peintures de nos conduites d’eau ? J’en ai pas l’impression malgré la folie gagnant du terrain dans toutes nos société..peut être que le plomb avait quelques avantages comme les conduite de cuivres remplacées par du plastique ou les poignees de porte chromées……

    • En effet, malgré toutes les substances toxiques utilisés dans le passé (désormais interdites pour la plupart), nous vivons toujours plus longtemps et en meilleure santé. La réalité est là et on peut débattre sans fin sur la nocivité de nombreuses substances au gré des idéologies à la mode. Cela ne fait pas avancer les choses.

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