Le Seasteading, qu’est-ce que c’est ?

Le seasteading a pour objectif de bâtir des villes flottantes autonomes disposant de modalités de gouvernance innovantes. Ces cités flottantes seraient modulaires, et permettraient à chacun de choisir sa communauté d’appartenance.

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Peter Thiel By: Luc Van Braekel - CC BY 2.0

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Le Seasteading, qu’est-ce que c’est ?

Publié le 20 décembre 2017
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Par Johan Honnet.

Ces derniers mois, vous avez peut-être eu l’occasion de voir passer une ou deux informations relatives à un projet au nom peu évocateur : le seasteading.

Avant de songer à questionner la faisabilité de ce projet ou son idéologie sous-jacente, que j’explorerai dans deux articles ultérieurs, il me paraît essentiel d’avoir l’esprit clair sur ce qu’est ou n’est pas le seasteading. Ce sera l’objet du présent article.

Le seasteading a pour objectif de bâtir des villes flottantes autonomes disposant de modalités de gouvernance innovantes. Ces cités flottantes seraient modulaires, et permettraient à chacun de choisir sa communauté d’appartenance.

L’idée, en soi assez simple à résumer, paraît pourtant relever de l’aimable utopie d’un rêveur invétéré.

Ce projet est animé par le Seasteading Institute, fondé par Peter Thiel -un riche entrepreneur américain ayant fondé Paypal avec un certain Elon Musk et, plus récemment, ayant soutenu Trump en 2016- et Patri Friedman -activiste libertarien, fils de David Friedman et petit-fils de Milton Friedman, excusez du peu-.

Un protocole d’entente en Polynésie Française

Pour tout vous dire, ce projet me paraissait condamné à rester lettre morte, faute de soutiens financiers et d’options politiques -à supposer, même, que le problème de la faisabilité technique soit surmontée-.

Visiblement, j’ai eu tort. En effet, en janvier 2017, la Polynésie Française et le Seasteading Institute ont signé un « protocole d’entente ». Au terme de ce protocole, le Seasteading Institute va avoir la possibilité de bâtir un prototype flottant de 7500 m². Le problème politique, qui me paraissait insurmontable, peut donc être désormais sérieusement relativisé, même si tout n’est pas encore réglé. Le choix ne paraît, a priori, pas être mauvais : la Polynésie Française bénéficie du haut débit et n’est pas excessivement éloigné des États-Unis.

À l’occasion de la signature de ce protocole d’accord, une société commerciale a été constituée : Blue Frontiers.

De la théorie à la pratique

À ce stade, donc, le Seasteading passe à une nouvelle phase et va devoir négocier le passage délicat de la pure théorie à la mise en oeuvre.

Les défis à relever vont être nombreux, et le chemin va encore être long avant de pouvoir passer ses vacances sur une ville flottante au large des îles polynésiennes.

À cette fin, Blue Frontiers aura pour rôle (i) de proposer un modèle économique viable, (ii) de négocier des accords juridiques permettant un développement harmonieux du seasteading et (iii) de trouver des solutions techniques aux problèmes soulevés par l’idée d’un habitat humain permanent sur l’océan.

Les premiers concepts ont paru dans dans la presse ces derniers jours. Il semblerait qu’il s’agirait de bâtir un habitat pour 250 personnes environ à un kilomètre environ des côtes. Le coût du projet, à ce stade, est estimé à environ 60 millions de dollars, millions qui seraient réunis grâce à une ICO (Initial Coin Offering, une méthode de levée de fonds fonctionnant via l’émission d’actifs numériques échangeables contre des cryptomonnaies ; de ce que j’en comprends, cela revient à une forme de crowdfunding avec des cryptomonnaies utilisables uniquement dans le cadre dudit projet).

Les trois composantes du seasteading

Pour en revenir à l’objet de ce billet, à savoir la définition du seasteading, on peut dire qu’à l’heure où j’écris ces lignes, le seasteading a trois composantes :

  • une composante matérielle, qu’on peut résumer de la façon suivante : habitat humain permanent sur l’océan ;
  • une composante politique, à savoir offrir la possibilité aux gens de vivre à un endroit conforme à leurs idéaux, et d’y expérimenter de nouvelles formes de gouvernance. L’objectif : mettre fin au monopole de l’État sur la gouvernance, questionner le concept même de citoyenneté et ainsi mettre les États en concurrence pour attirer lesdits citoyens ;
  • une composante scientifique : le seasteading est bien parti pour devenir un avant-poste des océanographes, biologistes marins, architectes, spécialistes en matériaux innovants ou en énergie marémotrice…

Il convient de relever que la composante politique est en train d’évoluer. Dans l’esprit des fondateurs de ce projet, il s’agissait d’une utopie libertarienne permettant de libérer les individus des régulations pesantes. Ce n’est plus cette composante-là qui est désormais mise en avant, mais bien le fait de répondre de façon « pragmatique » au « changement climatique » et à la montée des eaux catastrophique qui en serait le corollaire. S’agit-il d’une stratégie de communication, ou d’un revirement idéologique ? S’il s’agit d’une stratégie de communication, il s’agit probablement de se positionner par rapport aux divers États, sans doute plus hostiles à une utopie libertarienne qu’à une station de recherche flottante écolo-compatible.

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  • Un concept intellectuellement séduisant du point de vue de la liberté et des valeurs humanistes fondamentales, et complètement pollué par des considérations écolo-bobo-médiatiques. Au risque de vous décevoir, la science n’a pas besoin de plus de doux rêveurs « occupés » à faire des mesures de tout et n’importe quoi en Polynésie ou aux Tonga, il y a déjà le compte de partouzes et de beuveries flottantes avec les missions océanographiques gouvernementales dans ces eaux. En revanche, quelques mesures sérieuses supplémentaires en période hivernale en mer de Beaufort, de Pechora, de Ross ou de Weddell seraient sans nul doute utiles.
    Ne mélangeons pas les choses, des habitats flottants correspondant aux choix de vie de leurs promoteurs-habitants et vivant en bonne entente avec le reste du monde sont hautement souhaitables. En revanche, ce reste du monde n’a que faire de la verroterie pseudo-scientifique avec laquelle ils prétendraient acheter leur liberté, et c’est dangereux, s’agissant de liberté, de croire le contraire.

  • Et l’avantage de ces villes flottantes est…….le même que d’habiter une île aux ressources limitées et avec un coût d’infrastructure gigantesque..on pourra sans doute y caser quelques milliardaires et un héliport pour allez faire la fête en ville .

  • « Ces cités flottantes seraient modulaires, et permettraient à chacun de choisir sa communauté d’appartenance. »

    Super. On va pouvoir faire des villes flottantes ou ceux qui sont trop bronzé seront exclus. Idem pour ceux de la jacquette. Ou ceux qui ne pensent pas comme nous.

    • Parce que vous ne croyez pas qu’il est parfaitement contreproductif d’obliger les gens à accepter chez eux ceux qui ne pensent pas comme eux ? Pour vivre en bonne intelligence, la règle d’or est « charbonnier est maître chez lui ». Sa signification est que le charbonnier, c’est à dire le membre de la classe sociale la plus défavorisée qui soit, doit pouvoir refuser qu’on empiète sur sa propriété, aussi maigre soit-elle. Cette propriété comprend toutefois ses opinions. La réciproque fait que si les opinions en question sont pour vous ou moi immorales ou peu recommandables, tant qu’elles ne se hasardent pas dans la propriété d’autrui, c’est son affaire.

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