Custer, la déchéance d’une figure de western

Découvrez l’évolution au cinéma du Général Custer, vaincu par les Indiens à Little Big Horn. La légende se perpétue sur le grand écran.

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George Armstrong Custer by Insomnia Cured Here(CC BY-SA 2.0)

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Custer, la déchéance d’une figure de western

Publié le 3 décembre 2017
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Par Gérard-Michel Thermeau.

Personnage complexe et controversé, George Armstrong Custer (1839-1876) a inspiré directement ou indirectement un grand nombre de westerns. Brillant officier de la guerre civile américaine devenu le plus jeune général de division de l’armée US, il eut très vite le souci de mettre en scène son personnage et sa carrière.

La fin de la guerre de Sécession réduisant à une petite force l’armée américaine, il doit se contenter d’un modeste grade de capitaine avant d’obtenir le commandement du 7e régiment de cavalerie comme lieutenant-colonel. Voilà qui explique pourquoi il est appelé indifféremment colonel ou général dans les films.

Mais il doit avant tout sa célébrité posthume à sa mort à Little Big Horn (25 juin 1876). Cette victoire indienne sur l’armée américaine n’a-t-elle pas lieu à quelques jours de la célébration du centenaire de l’indépendance américaine ?

Les circonstances du combat ont suscité de nombreuses controverses. Une thèse est devenue majoritaire dans l’esprit du public : Custer s’est montré imprudent, a divisé inconsidérément ses forces et a été rapidement écrasé avec ses soldats par des Indiens beaucoup trop nombreux.

Cette thèse a été propagée par le major Reno et surtout le capitaine Benteen lors de la commission d’enquête pour se dédouaner de n’avoir pas tenté de se porter au secours de leur supérieur1. Elle s’est peu à peu imposée dans les westerns et Custer, héros national, a connu une dégradation irréversible de son image au point d’être caricaturé en « tueur d’Indiens ».

Un monument à la gloire de Custer

Il apparait précocement au cinéma. Custer’s Last Fight (1912) le montre avec sa femme (une robuste actrice du temps) et son frère Tom (ce qui est rare au cinéma). La bataille est reconstituée avec un respect apparent des faits, les sous-titres adoptant un ton documentaire.

Ce premier film montre, ce que l’on a rarement fait au cinéma, la division en trois groupes du régiment, décision très controversée. Le major Reno, présenté comme « inexpérimenté » dans la lutte contre les Indiens, submergé sous le nombre, prend la tête pour retraverser la rivière. Le capitaine Benteen, avec le deuxième groupe, arrive à temps pour sauver Reno. Il veut continuer pour rejoindre Custer mais Reno estime qu’il est trop dangereux de quitter la position. Encerclés, Custer et ses hommes, qui ont abandonné leurs montures, luttent jusqu’au bout. Le général tombe le dernier, fidèle à la légende.

Le lendemain, l’arrivée du général Terry permet la reconnaissance du champ de bataille : les cadavres ont été dépouillés de leurs vêtements et mutilés, à l’exception de Custer. Le fameux cheval du capitaine Keogh, Comanche, est présenté comme le seul survivant du groupe. De retour au fort, les survivants se jettent dans les bras de leurs femmes. Après l’évocation du destin de Sitting Bull, le film s’achève par l’inauguration du monument à Custer en présence de sa veuve éplorée.

Si Custer est rarement le personnage principal, il figure dans de très nombreux westerns comme Wyoming de Frank Borzage, The Plainsman de Cecil B de Mille, Bad Man of Wyoming de Richard Thorpe, etc. Il existe même un serial en 15 épisodes de 1936 sous le titre Custer’s Last Stand2.

Trois films sont néanmoins centrés sur sa personne. Ils témoignent de l’évolution du western : Raoul Walsh en 1941, Robert Siodmak en 1967 et Arthur Penn en 1970 ont peint trois figures bien différentes.

Custer héros suicidaire

Dans They Died with their boots on (La charge fantastique, 1941), Errol Flynn incarne l’image héroïque d’un cavalier suicidaire qui succombe avec panache. Premier d’une fructueuse collaboration entre Errol Flynn et Raoul Walsh, deux joyeux vivants communiant dans le culte de la dive bouteille, il offre à son interprète un rôle en or.

Si le film prend beaucoup de libertés avec les faits historiques, comme c’est généralement le cas au cinéma, il est le seul sans doute à saisir l’esprit et l’âme du personnage. Soldat d’élite mais indiscipliné, Custer ne vit que par et pour la guerre. Tête brûlée, il ne connaît qu’une défense, l’attaque. Jeune élève à West Point, il rêve de devenir le prince des cavaliers à l’image de son idole, Joachim Murat.

Envoyé dans l’Ouest pour réformer un régiment médiocre et indiscipliné, ramassis d’ivrognes, il combat les Indiens tout en les comprenant et en les admirant. Héros individualiste refusant les compromis, il défend la cause des Sioux victimes d’affairistes malhonnêtes qui veulent s’emparer des Blacks Hills.

Une question de point de vue

Pour sauver les hommes du général Terry, il décide de se sacrifier avec son régiment. Une (imaginaire) charge sabre au clair est filmée magnifiquement par Walsh qui, pourtant, souligne l’aveuglement de son héros, homme d’action et non de réflexion. Un plan en plongée dévoile comment le régiment fonce droit dans le traquenard tendu par Crazy Horse.

Fidèle aux conventions de l’époque, les divers personnages meurent en fonction de l’importance de leur rôle. Le fidèle second anglais succombe sans un mot, le guide California Joe a droit à quelques mots, et l’ancien adversaire, le trafiquant Sharp a sa tirade finale. Il donne finalement raison à Custer qui reste, seul debout à la fin. Les colts vides, le lieutenant-colonel saisit son sabre et attend la mort, dressé sur le champ de bataille à côté du fanion du régiment.

Au petit matin précédant la bataille, Sharpe avait demandé à Custer : « Où va le régiment ? ». Ce dernier avait répondu d’un ton très doux : « En enfer… ou vers la gloire, c’est une question de point de vue. »

Les morts sont de meilleures légendes

À l’Australien Errol Flynn devait succéder le britannique Robert Shaw dans un effort désespéré d’interpréter un Custer hamletien.

Custer, l’homme de l’ouest (Custer of the West 1967) de Robert Siodmak s’inspire visiblement du film de Walsh. De nombreuses scènes se répondent : les retrouvailles de Custer et de son épouse après la fin de la guerre civile, sa déchéance marquée par l’alcoolisme, la protection du général Sheridan, la dénonciation des affairistes devant le Congrès, sa relation particulière avec un chef indien. Même la bataille finale s’inspire du film de Walsh mais Custer brise son sabre en tentant de l’utiliser. Le temps des héros est terminé. Personnage anachronique, il n’a plus sa place dans la guerre moderne.

Le film s’ouvre sur les charges menées par Custer pendant la Guerre civile évoquée en quelques plans. Mais que peut devenir le Boy General la guerre terminée se demande le général Philip Sheridan. Un Boy Farmer ? un Boy Banker ? un Cow Boy ? Il y a une autre guerre à mener : non plus une guerre sainte contre l’esclavage mais une guerre sale pour voler aux Indiens leurs terres. Sheridan lui propose des postes à l’Est mais Custer veut de l’action. « Les morts sont de meilleures légendes » prophétise le chef de l’armée du Potomac.

Sheridan, venu tancer un peu plus tard Custer, prononce la fameuse phrase qui lui est si souvent attribué : « Un bon Indien est un indien mort ». Mais il avoue à son protégé : « ils font ce que je ferais à leur place, se battre jusqu’à la mort ».

Un ton devenu amer

À peine arrivé à son nouveau poste, Custer se heurte à ses deux subordonnés. Le major Reno (Ty Hardin) prétend descendre d’une longue lignée de soldats professionnels. Custer lui demande s’il ne descend pas plutôt d’une lignée d’ivrognes professionnels. Si Reno est un opportuniste, Benteen (Jeffrey Hunter) est présenté comme un défenseur des droits des Indiens victimes des ruptures de traités successives.

Le ton est devenu amer. Custer note après l’épisode de la Washita : « Notre succès repose sur trois facteurs : les Indiens dormaient, femmes et enfants offrent peu de résistance et les Indiens ont été surpris du changement de notre politique. » Convoqué à Washington il déclare d’ailleurs devant la commission d’enquête : « Il n’y a pas de problème indien, il n’y a qu’un problème blanc. » Il dénonce aussi la corruption au sein du gouvernement.

Pourtant le film n’a guère de consistance historique. L’épisode de l’attaque des Cheyennes sur les bords de la Washita se déroule sous un soleil éclatant et estival. Les paysages désertiques espagnols choisis offrent peu de ressemblances avec le Montana. Les péripéties concernant le chef cheyenne sont fantaisistes et les Sioux curieusement absents de cette histoire.

Custer déclare au chef cheyenne qu’il comprend son point de vue,  mais il est un soldat. Les Cheyennes ont pris des territoires à d’autres peuples plus faibles. Maintenant c’est leur tour d’être les plus faibles. Le temps des combats à cheval est terminé, le règne de l’acier et des mitrailleuses arrive.

Aussi Custer veut-il, une dernière fois, se battre à l’ancienne. Si Walsh prenait beaucoup de libertés avec les faits, les qualités cinématographiques compensaient largement ce défaut. En revanche, Robert Siodmak n’avait pas la tête épique. Sa bataille, aussi peu réaliste que possible, est l’une des plus ridicules que l’on puisse imaginer.

Disney vs Custer

Entre 1941 et 1967, les temps avaient changé. Dès 1958, une production Disney, Tonka, avait donné un nouveau ton. Nous sommes chez Disney, le héros du film est donc un animal. Le cheval du capitaine Keogh, Tonka rebaptisé Comanche, établit un lien amical entre le sympathique officier et un jeune indien (Sal Mineo).

Custer n’est guère flatté : « Il n’y a pas de bon Indien, ils sont tous mauvais. » Et pour cause, il est joué par Britt Lomond, le méchant commandant Monastario de la série Zorro. Cette nouvelle image de Custer devait peu à peu s’imposer. À la différence des autres versions cinématographiques, Little Big Horn y est filmé avec un souci de reconstitution assez rare pour l’époque. Custer n’étant pas le héros ne meurt pas le dernier, selon l’image d’Épinal.

Pour la première fois, l’attaque contre le personnage était frontale. En effet, d’autres westerns avaient préféré mettre en scène des officiers qui s’inspiraient de Custer pour ne pas s’en prendre trop directement à un héros national.

Une certaine ressemblance avec Custer

Le plus fameux de ces officiers imaginaires est le colonel Thursday (Henry Fonda, excellent) dans Fort Apache de John Ford (1947). Ancien général pendant la guerre civile, ambitieux, raide et méprisant, il se montre prêt à sacrifier son régiment pour assouvir ses rêves de gloire et réussit trop bien dans ses projets. Le capitaine York (John Wayne) offre en contraste l’image d’un officier soucieux de la vie de ses hommes.

La bataille contre les Indiens, séquence rare chez Ford, qui préfère ne pas montrer la guerre, se veut anti-héroïque au possible. Thursday décide de charger contre un ennemi dont il ne connaît pas la position. Les Indiens n’apparaissent qu’après le lancement de la charge. Ils entrainent la colonne dans un étroit défilé où les cavaliers se font tirer comme des lapins. Les derniers survivants sont ensuite balayés par la vague des Apaches.

Dans Les Compagnons de la Gloire (The Glory Guys, 1965), de Arnold Laven, sur un scénario de Sam Peckinpah, le général Frederick McCabe est un décalque très évident de Custer. Son interprète, l’insignifiant Andrew Duggan, ne dépare malheureusement guère une très terne distribution.

Il n’est pas difficile de voir en la personne du capitaine Demas Harrod (Tom Tryon), officier pourvu de toutes les vertus (militaires), une flatteuse incarnation de Benteen. Pour sa part, l’ambitieux général est présenté comme une sinistre ganache qui a pour habitude de sacrifier volontairement une partie de ses hommes dans le but d’obtenir la victoire. L’opposition McCabe/Harrod reprend donc le schéma Thursday/York de Fort Apache, suivant l’interprétation benteenienne de la bataille.

Nous passerons sous silence les calamiteux films de Sidney Salkow (Sitting Bull et The Great Sioux Massacre) dont les bonnes intentions pro-indiennes ne sauraient masquer la médiocrité de la réalisation.

Une image héroïque qui persiste

Pourtant l’image héroïque de Custer devait persister dans une série TV en 17 épisodes exactement contemporaine du film de Siodmak (1967). Wayne Maunder joue le rôle titre, Michael Dante, Crazy Horse, et Rodolfo Acosta, Satanta. Dans le premier épisode, Custer, monté sur un mulet tel le Christ, arrive sous une pluie battante à Fort Hays où personne ne semble à son poste.

Il affronte, à coups de poing, Bustard, un colosse vindicatif, sous le regard ironique de Keogh qui lui souhaite la bienvenue. « Ne contredisez jamais votre commandant » déclare Custer au grand benêt qu’il vient de battre avant d’en faire un sergent.

Avec ses deux grands chiens blancs, son fidèle éclaireur California Joe (Slim Pickens), ses échanges aigre-doux avec Reno et Terry, Maunder campe un Custer insubordonné, séduisant et juvénile dans la lignée d’Errol Flynn.

Autour du 7e de cavalerie

Il faudrait également signaler divers films qui mettent en scène le 7e de cavalerie. Warpath (1951) de Byron Haskin, se veut un film hommage au régiment, selon son prologue, ce qui est d’autant plus curieux que la plupart des combats montrés mettent l’accent sur des défaites ou des échecs de la cavalerie américaine.

Edmond O’Brien campe un héros teigneux et mal embouché même avec ceux qui lui veulent du bien. Ancien officier yankee pendant la guerre civile, cet avocat recherche depuis de longues années ceux qui sont responsables de la mort de sa fiancée. Il s’engage pour cela comme simple soldat dans le 7e à Fort Lincoln. Custer (James Millican) fait une brève apparition, avec perruque et moustache visiblement postiches, la veste frangée et le foulard rouge. Il se plaint d’être réduit à lutter contre de minables Indiens, lui qui avait eu pour adversaire les meilleurs généraux de la Confédération. Le spectateur  le plus obtus comprend que notre brillant général va sans doute sous-estimer ses adversaires.

Buggles in the Afternoon (1952) de Roy Rowland bénéficie sans doute d’un meilleur scénario tiré d’un roman réputé de Ernest Haycock, d’un meilleur casting avec Ray Milland, mais souffre d’un manque de moyens un peu visible. Custer conduit ainsi une poignée de cavaliers et tout un tas de chariots bâchés en guise de régiment en campagne. Le général n’est guère plus qu’une silhouette dans cette histoire. La chute du fanion du régiment, renversé par un coup de vent, annonce la catastrophe finale.

Une remise en cause de la thèse benteenienne

Le terne mais curieux 7th Cavalry (La mission du capitaine Benson) de Joseph H. Lewis met en scène le capitaine Benson (Randolph Scott) accusé de lâcheté en raison de son absence lors de Little Big Horn. Il se porte volontaire pour aller en territoire indien récupérer le corps de Custer.

Le film montre une commission d’enquête mise en place par le colonel Kellog, visant à rechercher les responsabilités du désastre. Pourquoi Custer est-il mort avec ses hommes alors que d’autres officiers et leurs troupes ont survécu sans lui porter secours ?

Reno (Frank Wilcox) accuse Custer d’avoir désobéi aux ordres en refusant d’attendre l’arrivée de Gibbons et de ses fantassins, puis d’avoir commis des imprudences en divisant ses forces, ce qui indigne le brave Benson. Benteen, incarné par Michael Pate, qui échappe pour une fois au rôle d’Indien, souligne qu’il s’est porté au secours de Reno. Il aurait été suicidaire d’essayer de joindre Custer en raison des pertes subies et de l’importance des forces ennemies.

Par les réactions de Benson, les justifications des deux officiers paraissent bien spécieuses. Le colonel, dans ses conclusions, souligne le manque de ténacité des deux officiers pour exécuter les ordres qu’ils avaient reçu. Une rare remise en question au cinéma de la version benteenienne.

À la fin du film, le petit détachement cerné par les Indiens est sauvé par l’apparition sur la crête du cheval de Custer ! Mais le film, assez mal écrit, souffre de nombreuses invraisemblances et d’un manque d’action, toujours préjudiciable dans un western.

En marge de la bataille

Little Big Horn (en français, La rivière de la mort ! 1951) de Charles Marquis Warren, en dépit de son titre, n’est pas une description de la célèbre bataille mais brode sur un épisode prétendument historique. Un petit détachement s’efforce d’arriver à Little Big Horn avant le 7e de cavalerie pour prévenir Custer et l’empêcher de tomber dans une embuscade.

Les deux officiers sont en conflit. Le capitaine Doolin (Lloyd Bridges) soupçonne à juste titre le lieutenant Haywood (John Ireland) de courtiser sa femme. Prêt à sacrifier un petit nombre pour sauver le régiment (« il est simplement difficile de faire partie du petit nombre sacrifié »), Doolin s’enfonce dans le territoire sioux. Tous les membres de la patrouille vont mourir l’un après l’autre, parfois de façon atroce.

Tourné avec très peu de moyens, le film témoigne d’une certaine efficacité et d’un réalisme rare dans la représentation de la guerre : tous finissent par faire leur devoir mais en vain.

Le moment Little Big Man

L’image de Custer, qui n’a cessé de se dégrader au cinéma, se voit infliger le coup de grâce dans Little Big Man d’Arthur Penn (1970). Cette œuvre clé ouvre l’ère du western révisionniste. Au travers de la conquête de l’ouest, il s’agissait de dénoncer l’impérialisme américain et la guerre du Vietnam.

Le choix d’un acteur comique venu de la télévision, Richard Mulligan, pour figurer le fameux général, indiquait clairement la volonté du réalisateur. Dandy grotesque et sanguinaire, rongé par l’ambition, Custer rêve d’accéder à la présidence en marchant sur les cadavres des Indiens. Sa première apparition à cheval et à contre-jour, éblouissant Jack Crabb (Dustin Hoffman), se veut fidèle à une légende qu’il s’agit de détruire.

L’épisode de la Washita est ainsi filmé comme un massacre impitoyable. Les soldats tirent sciemment sur les femmes et les enfants au son des fifres et des tambours jouant Garry Owen. Le général, ivre de carnage, fait abattre les poneys et dénonce la tendance des Indiens à se reproduire comme des lapins.

À Little Big Horn, le foulard rouge sur une chemise d’une blancheur impeccable, Custer refuse d’écouter tous les avis, montrant une totale incompétence militaire. Encerclé par les Indiens, il tient des discours insensés avant de tomber, frappé, dans le dos, par deux flèches. La reconstitution de la bataille est tout aussi fantaisiste que chez Walsh. Au combat désespéré mais héroïque peint par Walsh succède une mêlée confuse. Les soldats sont submergés et annihilés sans pouvoir vraiment se battre.

Custer tueur d’indiens

Custer ne devait plus trop se relever de ce coup de massue. Un film italo-français de Marco Ferreri, Touche pas la femme blanche (1974), achevait la décomposition. Marcello Mastroianni y campait un Custer de pacotille affrontant les Indiens dans le Trou des Halles ! Le film se voulait une impitoyable dénonciation du capitalisme et du colonialisme. Il est pourtant difficile d’y voir autre chose qu’une grosse farce excellemment jouée d’ailleurs par Deneuve, Piccoli, Noiret, Tognazzi, Reggiani, etc.

L’image négative du « tueur d’Indiens » devait poursuivre Custer dans les séries TV « politiquement correctes » : Dr Quinn ou Into the West. Sans parler de la pitoyable caricature qui hante les Aventures de Lucky Luke : un Custer minuscule aussi détraqué que ridiculisé.

Une exception à la règle

Pourtant un téléfilm en deux parties, Son of the Morning Star (1991) s’était efforcé d’offrir un portrait plus nuancé du personnage. La deuxième partie, consacrée entièrement à Little Big Horn, donnait, pour la première fois, une représentation réaliste du fameux affrontement. Ainsi, l’incompétence et l’affolement de l’alcoolique Reno était particulièrement mis en valeur ainsi que l’hostilité profonde de Benteen à l’égard de son supérieur.

Néanmoins, l’interprétation un peu molle de Gary Cole ne faisait pas oublier les précédents interprètes du rôle.

Au final, seules deux interprétations totalement opposées demeurent : l’héroïque et flamboyant Errol Flynn et le grotesque et cabotin Richard Mulligan. Ainsi le Boy General, qui n’a cessé d’inspirer sujet de thèses, romans, films et productions télévisées, fait encore parler de lui, plus de 140 ans après sa disparition.

Une seule chose est sûre : George Armstrong Custer en aurait été ravi.

Les stèles du 7e de cavalerie, colline de Custer, wikipedia
  1. Si Benteen était un officier valeureux, respecté de ses hommes, Reno était un incapable et un alcoolique et son comportement a été particulièrement lamentable ce 25 juin 1876.
  2. L’histoire mêle événements abracadabrants typiques du genre avec des personnages historiques. Reno y est décrit comme une poule mouillée. Cette très modeste production s’offre même le luxe d’une reconstitution de la bataille où Custer avec 20 soldats affrontent un nombre guère plus nombreux d’Indiens.
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  • hamletien, pourquoi « hamlethien » ?

  • Bonjour,

    Pour une vision très complète de Custer et de la « frontière », un seul livre, indépassable :
    « Little Big Horn » de David Cornut.

    Où l’on apprend que Custer est bon tacticien, et qu’un autre général aurait sûrement appliqué la même tactique à little big horn.

    Où l’on (ré) apprends que les indiens sont des sauvages sanguinaires que l’on aurait détesté si on avait vécu à cette époque.
    Où l’on apprends qu’il n’y a jamais eu de génocide indien, fable antiaméricaniste socialo boboide.

    Enfin, sur « le vol » des terres des amérindiens, encore une hérésie véhiculée par l’antiaméricanisme ambiant, il suffit d’étudier le principe d’appropriation initale de John Locke pour réfuter point par point cette assertion.

    Lisez ce livre !!!!

    • Ah oui? Il suffit de constater qu’il ne restait que 300.000 indiens pour confirmer le génocide. Le massacre de 300 indiens, femmes et enfants, à Wounded Knee et l’assassinat de Sitting Bull démontrent le contraire de ce que votre assertion. Quand à la justification de John Locke elle ne tient pas juridiquement.

  • Très juste votre article. Car on sait de nos jours, ce qui fut longtemps occulté, que Custer était en fait un massacreur d’indiens.

  • Les commentaires sont fermés.

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