Non, la Belgique ne sera pas « sortie » du nucléaire en 2025

En 2025, la Belgique ne sera pas sortie du nucléaire, car même en Europe occidentale l’extrémisme écologiste finira par se fracasser sur les récifs de la réalité.

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Centrale nucléaire du Tricastin (Crédits : Sancio83, Image libre de droits)

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Non, la Belgique ne sera pas « sortie » du nucléaire en 2025

Publié le 16 novembre 2017
- A +

Par Drieu Godefridi.

Pour un politique, il est toujours intéressant d’aller dans le sens de la majorité : après tout, c’est la définition de la démocratie que d’être favorable aux idées majoritaires !

Pour un intellectuel, en revanche, comme l’écrivait Friedrich Hayek, aller dans le sens de la majorité du moment est rarement bon signe. Disons simplement qu’il faut être capable de penser en dehors des slogans et des lieux communs, fussent-ils portés par l’écrasante majorité des experts et autres leaders d’opinion.

De ce point de vue, la sortie du nucléaire par la Belgique en 2025 offre un intéressant cas de figure. Voici un objectif présenté comme tout à la fois parfaitement acquis, possible, rationnel, noble, scientifique et ambitieux.

Noble car il s’agit de « sauver la planète », ambitieux parce que la Belgique a tout de même à l’heure actuelle sept réacteurs nucléaires en fonctionnement, rationnel parce que « le renouvelable, c’est l’avenir », et parfaitement acquis parce que le gouvernement belge en a décidé ainsi.

Une voix discordante

Me permettra-t-on d’exprimer une voix discordante ?

D’abord, quant à la science. Le tout-au-renouvelable repose sur la science du groupe d’experts de l’ONU sur le climat, le GIEC, qui établit un lien de causalité entre les émissions humaines de CO2 et le réchauffement de la planète.

Il a été démontré dès 2010 que le GIEC est, en réalité, un organisme intégralement politique, non scientifique (« Le GIEC est mort, vive la science »), et ses modèles informatiques sont en effet constamment battus en brèche par la réalité. Ainsi les émissions humaines de CO2 n’ont-elles jamais tant crû que durant les 20 dernières années, dans le même temps que la température globale restait d’une remarquable stabilité.

Ensuite, il faut contextualiser. Le tout-au-renouvelable que l’on nous présente en Europe de l’Ouest comme une évidence n’est « évident » que pour la seule Europe de l’Ouest.

L’idéologie du tout au renouvelable

Car l’Europe centrale s’inscrit radicalement en faux contre cette idéologie, de même que nos alliés Américains — pas le seul président, la majorité du Congrès aussi bien, et depuis de longues années — et en fait le reste du monde, qui n’entend participer au renouvelable qu’aussi longtemps que c’est l’Occident qui en payera les frais (c’est tout le sens de l’Accord de Paris).

Le renouvelable dans ses différentes figures n’offre aux autres sources d’énergie (nucléaire, fossile) qu’une alternative extrêmement coûteuse. Dit autrement, sans la subvention publique, l’industrie du renouvelable n’existerait tout simplement pas. Les entrepreneurs qui ne jurent que par le renouvelable sont d’abord et avant tout des entrepreneurs en subventions publiques, du reste les subventions les plus massives de l’histoire économique.

Si le renouvelable était rentable, nous n’aurions pas ce débat, car le monde entier se serait précipité sur le renouvelable. L’une des difficultés rencontrées par le renouvelable est l’incapacité technique de stocker l’énergie à grande échelle, ce qui ne pose aucune difficulté s’agissant de sources d’énergie permanentes (fossile ou nucléaire) qui émettent en continu, mais qui devient rédhibitoire s’agissant de sources d’énergie aussi capricieuses et intermittentes que le soleil ou le vent.

L’exigence de l’économie mondialisée

Par ailleurs, nous vivons dans une économie mondialisée. Les entreprises belges sont en concurrence avec les entreprises françaises, allemandes, britanniques, aussi bien américaines ou chinoises.

Or, l’énergie est l’un des paramètres de coût de toutes les entreprises :  pas seulement des entreprises qui en consomment beaucoup, de toutes les entreprises sans la moindre exception, depuis le comptable qui travaille seul jusqu’à la multinationale de type GSK (pour prendre un exemple de multinationale encore sise en Belgique).

Le tout-au-renouvelable n’augmente pas le coût de l’énergie à la marge : il le multiplie par deux ou trois, ainsi que le constatent les entreprises belges — wallonnes en particulier, par la grâce des certificats verts de MM. A. Antoine et J.-M. Nollet — dont la facture d’électricité augmente depuis 10 ans de façon exponentielle.

Ce n’est qu’un début, car cette explosion a lieu alors que sept réacteurs sont encore en activité : nous laissons au lecteur le soin d’imaginer ce qu’il en sera quand ces centrales amorties qui produisent aujourd’hui l’énergie la moins chère auront été fermées d’autorité.

Aucune simulation chiffrée

Nous disons bien « deviner » car c’est l’une des particularités du décret gouvernemental de sortie du nucléaire de ne reposer sur aucune simulation chiffrée pour le consommateur final : personne, aujourd’hui, n’est en mesure de dire si l’électricité belge sera deux, trois ou quatre fois plus chère qu’elle ne l’est aujourd’hui ou chez nos partenaires.

Étonnant, n’est-il pas ? Ce qui paraît probable, en revanche, est que le seul coût annuel de production d’électricité sera multiplié par 2,3, selon une étude du lobby pro-renouvelable « EnergyVille », confirmée par les projections « prix final » du Bureau du plan.

Ce qu’à court terme une puissance économique comme l’Allemagne peut se permettre — multiplier le coût de l’énergie par deux ou trois — un petit pays partiellement en souffrance (économie wallonne) ne le pourrait qu’au prix d’un appauvrissement massif de ses entreprises et de sa population.

Le chemin des Allemands

Cela est d’autant plus vrai pour les ménages belges que, si les Belges prennent le chemin des Allemands, ils tenteront de préserver leurs grandes entreprises en faisant supporter l’intégralité du surcoût aux ménages : c’est en effet le petit secret de l’Energiewende allemande que ce sont les ménages qui la financent !

Votre facture annuelle d’électricité est de 1000 euros ? Que diriez-vous si on la portait à 2000 ou 3000 euros ? Eh bien, c’est fort simple, là encore il suffit de regarder la situation allemande : des millions de ménages allemands connaissent ce que l’on appelle la « précarité énergétique » — seuil déterminé par un taux d’effort des dépenses en énergie supérieur à 10% des revenus d’un ménage — c’est-à-dire qu’ils préfèrent vivre partiellement dans le froid et l’obscurité que de régler des factures dont le montant ne leur est plus accessible (ce que les écologistes appellent, pour s’en féliciter, « la décroissance »). Balayés, les maigres bénéfices récoltés par les Belges à la faveur du « tax shift »

Ce qui est tenable, à très court terme, dans l’économie allemande, la plus prospère de la planète, ne le serait bien sûr pas en Belgique. Quittons la sphère de l’idéologie et redevenons sérieux. L’auteur du Cygne noir et dAntifragile, Nassim Nicholas Taleb, a coutume de dire qu’il ne faut jamais écouter un expert ou un politique qui n’a pas de « skin in the game », c’est-à-dire qui ne risque pas de pâtir personnellement des conseils qu’il prodigue à autrui.

La Belgique sans nucléaire ? Vraiment ?

Alors prenons les paris : Monsieur Bart De Wever — je m’adresse naturellement au président du premier parti de la majorité parlementaire — je suis prêt à parier avec vous la somme (raisonnable !) de votre choix qu’en 2025 la Belgique ne sera pas sortie du nucléaire.

Voilà assurément un pari dont les conditions vous sont favorables, puisque vous êtes l’un des principaux décideurs ! En 2025, la Belgique ne sera pas sortie du nucléaire, car même en Europe occidentale l’extrémisme écologiste finira par se fracasser sur les récifs de la réalité.

Dernière parution : La Passion de l’égalité. Essai sur la civilisation socialiste

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  • « l’économie allemande, la plus prospère de la planète »
    Pas autant que celle de la Suisse, mais il est vrai que l’Allemagne bénéficie d’une monnaie plutôt sous-évaluée par rapport à la force de son économie. Elle bénéficie en quelque sorte des économies voisines moins performantes que la sienne et qui partagent la même monnaie.
    Au contraire la Suisse souffre un peu de sa monnaie qui a fortement monté depuis quelques années.

    « même en Europe occidentale l’extrémisme écologiste finira par se fracasser sur les récifs de la réalité »
    Mais il aura malheureusement eu le temps de faire beaucoup de dégâts…

    • @ Hug
      Oui, sauf que la Suisse AUSSI est résolument décidée à sortir du nucléaire définitivement, en laissant à la France ses croyances en nucléaire, ses démantèlements de centrales et ses déchets radioactifs!

  • Il est vrai que cette décision absurde de combattre le nucléaire est justifiée par la peur de l’accident nucléaire et par la peur de la contamination par des déchets nucléaires mal traités. Mais, si l’objectif écologiste est de faire baisser le CO2 atmosphérique, il est justement très utile de faire appel au nucléaire. La « pensée » écologiste n’est donc pas à une contradiction près. Quant au réchauffement climatique, il n’est pas du au CO2 puisque celui-ci augmente régulièrement depuis 20 ans comme vous le rappelez ; la très petite partie d’effet de serre due au CO2 résulte de son absorption à seulement deux petits pics de longueur d’onde en infrarouges qui sont déjà absorbés à 50 m du sol. Tout le CO2 ajouté ne joue donc aucun rôle si ce n’est de réduire cette épaisseur d’atmosphère. Le réchauffement climatique résulte de l’activité solaire et l’océan largue son CO2 comme une bouteille de limonade que l’on vient d’ouvrir. Ceci ne veut pas dire qu’il ne faut pas économiser les ressources non-renouvelables, en produisant notamment nos propres biocarburants ou en isolant les bâtiments. Il faut laisser ces ressources fossiles précieuses à nos descendants ; c’est ce que disait déjà le Professeur de chimie Bruylants en 1953-54. Quant au nucléaire, il faut continuer à le perfectionner et à rechercher les moyens techniques pour réaliser au mieux la fusion nucléaire, dont plus personne ne parle.

  • « Dit autrement, sans la subvention publique, l’industrie du renouvelable n’existerait tout simplement pas. »

    Alors que le nucléaire, lui, n’a jamais été subventionné, et n’est pas aujourd’hui, subventionné, n’est-ce-pas ?…
    Comme dit l’autre : quittons la sphère de l’idéologie et redevenons sérieux.
    On peut être partisan du nucléaire, ce qui est un choix tout à fait respectable – il présente d’ailleurs un avantage non négligeable dans un domaine qui est ici quotidiennement nié, le réchauffement climatique, c’est assez piquant d’en faire la remarque – mais de grâce, évitons de raconter n’importe quoi.

    • en Belgique et chez les teutons, ils ont inventé la subvention taxe, c’est très imaginatif, oh une broutille.. rien qu’en Belgique c’est 250 millions,
      Faut arrêter avec ce genre de fake, si vous avez un kw à 15 c c’est bien grâce au nucléaire, qui d’ailleurs jusqu’il y a peu(la venue obligée sur les réseaux des renouvelables) faisait des bénéf directement reversés à l’état actionnaire, tout en ménageant une ambiance sociale inégalée.

    • Alors que le nucléaire, lui, n’a jamais été subventionné, et n’est pas aujourd’hui, subventionné, n’est-ce-pas ?…

      Le nucléaire a bénéficié du financement de la recherche a ses débuts. Comme beaucoup d’autres technologies.

      Aujourd’hui le nucléaire ne bénéficie plus d’aucune subvention. D’ailleurs EDF verse de confortables dividendes chaque année à son principal actionnaire, l’Etat.

      • La R&D sur le nucléaire continue d’être financée publiquement (CEA…). On peut y ajouter aussi les dépenses de l’autorité de contrôle, le soutien aux constructeurs nucléaires, le coût du retraitement, la recapitalisation d’AREVA, le prix du KW/nucléaire en dessous de la réalité, etc.
        L’Etat, le CEA, AREVA, EDF sont tellement liés qu’il est à la fois difficile d’y reconnaître ses petits (d’où cette idée fausse que le nucléaire français ne coute rien de plus au client que le prix du kW/h) et de nier que l’Etat, donc le contribuable est un soutien actif de la filière nucléaire française.

        • @ Jean Roule Du Cable
          Oui mais non! Vous êtes en train de saboter toute l’oeuvre de M.Gay (et de Contrepoints): « nucléaire français: parfait! Renouvlable: beurk! »

          Le danger français (pas plus intelligent qu’un Américain (Three Miles island), un Russe (Tchernobyl) ou un Japonais (Fukushima)!), avec Cattenom, à 8km de mon pays (la France a tout fait pour ne pas assumer tous les dégâts) mais en cas de gros problème, mon pays sera rayé de la carte: ces Français de vrais sa…!

        • L’Etat français se mèle de tout. Il finance le CEA mais aussi les innombrables projets de recherche sur le photovoltaïque, l’éolien, les batteries, la filière hydrogène, la méthanisation, le bois… et j’en oublie. Il y en a tellement que même le CEA et EDF travaillent dessus!

          le contribuable est un soutien actif de la filière nucléaire française

          Regardez votre facture d’électricité. Avec la ligne CSPE c’est surtout le consommateur qui est un soutien actif des autres énergies.

          • J’espère que l’argumentaire des opposants aux renouvelables ne repose pas sur la seule existence de cette ligne CSPE sur nos factures. Car il serait un peu naïf de croire que le consommateur ne finance pas tout le reste (cad tout ce qui n’est pas ENR) qui est noyé dans un chiffre global…

    • @ Jean Roule Du Cable

      Le nucléaire français (Areva et EDF) qui n’a jamais eu d’aide de l’état: n’importe quoi!!! Vous nous prenez pour des benêts! Pas de chance!

  • C’est bien, bon article, un de plus qui ne servira strictement à rien, la cause est entendue depuis longtemps, on ne peut démolir un dogme, même avec les meilleurs arguments.
    Comme le temps passe hein.
    Cela fait 20ans que les « sachants » exposaient déjà les petits problèmes.
    Je me souviens d’un article d’un ancien ingénieur d EDF qui expliquait les arcanes de la régulation d’un réseau, chiffres à l’appui, et l’impossibilité d’intégrer sur le dit réseau un puissance supérieure à 15 % d’énergie « fatale ».
    Et on va y aller de plus belle, il y a pas de raison.
    Le mur des réalités?
    Mais il y bien longtemps que la réalité n’intéresse plus personne,dans ce domaine comme dans bien d’autres.
    Il faut du rêve, retrouver cet eden perdu( à cause du capitalisme), cette nature bienveillante, généreuse, où l’on crevait à 40 ans, usé par la rudesse de la vie.

    • Si vous préférez vous taire et subir le désastre, libre à vous…

      L’Etat d’Australie du Sud est en grande difficulté énergétique à cause de son développement frénétique (et dogmatique) de l’éolien et du solaire qui déséquilibrent le réseau. Peut-être qu’à force de voir ce genre d’expérience pitoyable, certains vont finir par réfléchir.

      • @ fm06
        À force de répéter: « on a raison », on finit par le croire, on rate le photovoltaïque, l’éolien (en mer), et surtout la conservation d’énergie par batteries (en progrès constant) etla France se retrouvera toute nue avec ses déchets du nucléaires et ses démantèlements longs et pénibles!

        • Quand il s’agit de pertes financières et de technologies coûteuses et peu rentables, il vaut mieux manquer l’occasion que réussir la dépense.

    • Ces articles ne servent,t pas à rien ils mobilisent ..mais en effet ils ne convainquent pas les opposants au nucleaire.
      Mais est ce bien la question?
      On a une question en filigrane qui est l’existence même d’une politique énergétique..

      • @ jacques lemiere

        Sauf que quand on se pense (!) co-« leader »(???) de l’Union Européenne, on ne décide plus tout seul!

        Les conséquences, on verra!

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