Journalistes politiciens et politiciens chroniqueurs : la porosité néfaste

Les transferts de politiciens vers les radios et télés et de chroniqueurs vers la politique montrent une porosité finalement malsaine entre ces milieux.
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Journalistes politiciens et politiciens chroniqueurs : la porosité néfaste

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 30 août 2017
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Ces dernières semaines s’est illustrée une tendance, déjà présente mais qui grossit à vue d’œil : la reconversion feutrée et rapide de certains ténors de la politique dans la chronique journalistique, à tel point que le paysage audiovisuel français commence à ressembler à une maison de retraite pour politiciens.

On se souvient ainsi de Roselyne Bachelot qui, après avoir démontré toute l’ampleur de sa cuistrerie au ministère de la Santé pendant le douloureux quinquennat Sarkozy, s’était retrouvée à en faire la démonstration sur les plateaux de D8, i-Télé, TF1 ou France2. L’expérience, toujours en cours, continue de choquer discrètement une partie des Français dont les troubles de stress post-traumatique apparaîtront probablement dans la prochaine décennie, achevant de mettre le pays à terre.

Dans la même veine, Laurence Parisot nous a fait bénéficier de son robinet à platitudes lorsqu’elle s’est commise comme chroniqueuse sur les plateaux de RTL et d’Europe1.

Mais avec l’arrivée au pouvoir de Macron et de toute sa nouvelle garde de trottineurs, c’est un véritable tsunami de politiciens désœuvrés qui se retrouvent à suivre le même parcours que ces deux exemples précédents.

Et c’est finalement sans grande surprise qu’on apprend qu’Orélifilipeti, l’onomatopée un moment en charge de la Culture, se retrouve à chroniquer sur RTL, bientôt rejointe par Gaspard Panzer Gantzer, le petit futé en charge de l’extraordinaire communication de François Hollande. Henri Guaino, démis de son mandat par « des électeurs à vomir », nous assommera d’un billet quotidien sur Sud Radio. Autre député sorti en juin, l’ex député PS de Seine-et-Marne Rihan Cypel va officier sur Nova. Julien Dray, lui, interviendra sur LCI, probablement pas pour parler de montres ou de cartes de crédits pendant que Raquel Garrido, porte-parlote de la France Mélenchoumise, devient chroniqueuse sur C8, sans oublier Jean-Pierre Raffarin qui sera sur France 2 le dimanche soir pour nous jouer un petit air de flûtiau certainement palpitant.

Quel déferlement ! Encore peut-on s’estimer heureux d’avoir su éviter la présence de la Reine des Neiges, Ségolène Royal, qui se voyait bien devenir chroniqueuse politique mais que les radios ou les télés se sont fort judicieusement empressées de ne pas contacter. Golène et les Glaçons devra se contenter de son job d’ambassadrice. Ouf.

Une telle vague s’explique cependant assez bien : apparemment, retrouver un travail rémunéré après être passé par la vie publique et l’exposition médiatique correspondante, ce n’est pas toujours simple comme en témoignent abondamment les ex-élus dont les sanglots et difficultés s’épandent dans une presse tendrement à l’écoute, comme par exemple pour Emmanuelle Cosse dont la recherche d’emploi va s’en trouver singulièrement boostée grâce aux nombreuses pleines pages que ces médias lui offrent ainsi.

En effet, si, pour les ténors, le carnet d’adresses peut suffire à les recaser, pour beaucoup d’autres politiciens en revanche, les aptitudes démontrées lors de l’exercice de leurs mandats ne suffisent pas à motiver les entreprises à les salarier (et parfois, c’est même plutôt l’inverse, tant les performances et raisonnements de nos élus indiquent assez clairement à quel point ils sont à côté de leurs pompes). Difficile pour certains d’apprendre un métier alors que la politique représente tout (et un peu trop) pour eux…

Conséquemment, cette rentrée de septembre sera terrible : on va donc avoir droit à un déferlement continu de leurs pensées profondes, à un véritable Niagara ininterrompu de leurs petites phrases, de leurs opinions, ou pire, de leurs conseils à la télé, à la radio et dans certains journaux trop complaisants… alors que ces gens n’ont jamais été foutus ni de diriger correctement leurs cabinets en particulier, ni la France en général (il suffit pour s’en convaincre de voir l’état dans lequel la France a été rendue après 5 ans de Sarkozy puis 5 ans de Hollande en double-coup dur), et que leurs avis, opinions et conseils ont été largement proférés urbi & orbi.

Et au-delà de cette triste perspective, force est de constater qu’un paquet de ces politiciens, dont on croyait s’être débarrassés à la faveur des dernières élections, va donc continuer de téter aux mamelles bien trop nourricières des contribuables puisqu’on va les retrouver dans des radios ou des télévisions subventionnées voire carrément du service public : France Culture, France Inter, France-2 ou tous ces autres médias qui s’abreuvent aux subventions culturelles vont bel et bien perpétuer, pour ces nouveaux chroniqueurs, le paiement de ces encombrants et coûteux incompétents aux frais du contribuable.

Plus triste, cette vague de politiciens débarquant dans les officines journalistiques montre à quel point est grande la porosité entre le monde médiatique et le monde politique. C’est, véritablement, une belle histoire d’amour qui se joue devant nous entre les journalistes et les politiciens, avec toutes les dérives possibles auxquelles on assiste maintenant depuis plus de 10 ans avec une consternation croissante : off, potins et confidences (à la Trierweiler, par exemple), rumeurs, fake news– avec le quinquennat hollandesque en point d’orgue.

Porosité telle qu’on ne compte plus les journalistes ou chroniqueurs qui sont passés de l’autre côté du miroir (on pourra se souvenir de Mamère, typiquement), et dont le dernier exemple, avec la nomination de Bruno Roger-Petit comme porte-parlote du gouvernement, démontre à quel point est mince la différence entre les clowns qui nous gouvernent n’importe comment et les clowns qui nous abreuvent de propagande débile.

Au passage, avec cette nomination désastreuse qui ajoute un caniche au nouveau labrador présidentiel, Macron – qui prétendait il y a encore trois mois dicter son agenda médiatique – montre à quel point il est victime de son propre hybris et de sa volonté farouche d’être aimé de tous et tout le temps. Ne comprenant pas que diriger, c’est faire des choix et donc discriminer, c’est-à-dire obligatoirement déplaire à une partie des Français, il est condamné à se vautrer dans les mêmes erreurs que ses prédécesseurs.

Sans doute peut-on voir dans cette déferlante de politiciens devenus chroniqueurs la démonstration qu’ils ne peuvent absolument pas se satisfaire d’un retour à l’anonymat, à la vie du commun des mortels. En pratique, ceux qu’on retrouve sur les ondes sont, très concrètement, infoutus de simplement se taire et nous laisser supporter en silence la vague de politiciens suivants. François Hollande y a évidemment renoncé, incapable de rester dans le néant dont il est pourtant issu.

Et compte-tenu de l’écosystème particulièrement méphitique dans lequel ces individus ont évolué avant de nous tympaniser avec leurs opinions néfastes, il n’y a aucune chance qu’un discours nouveau puisse émerger avec eux.

Tout ceci va encore nourrir le pire de l’ochlocratie à laquelle nous sommes maintenant soumis puisqu’on va continuer à abreuver le peuple des discours de ces tribuns médiocres, toujours plus paresseux intellectuellement, qui, au lieu de se contenter d’haranguer les foules avec un mégaphone à la faveur d’une manif, vont utiliser la puissance de la diffusion de leurs âneries dans des millions de foyers plus ou moins captifs.

Dans une espèce d’auto-allumage avec emballement catastrophique, ces nouveaux chroniqueurs, aux idées paresseusement collectivistes et incultes économiquement, vont alimenter les pulsions faciles des foules. À leur tour, ces foules, paresseusement collectivistes et de plus en plus incultes économiquement, nourriront les pensées idiotes des politiciens de demain qui seront aussi paresseusement collectivistes et incultes économiquement que les raisons électorales le leur permettront. Quand, enfin, ces politiciens seront recyclés comme chroniqueurs, la boucle vicieuse sera fermée.

Pas de doute : voilà qui va nous faire un joli zéphyr de changement intellectuel, ça, mon bon monsieur.


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  • Ce pays est foutu.

    • Exact, mais pas par hasard. C’est l’imbécillité de ses électeurs qui est en cause. Incapables de comprendre que plus de lois et de règlements bloquent complètement le pays, et donc leur prospérité.

  • Bah, tout le monde veut une vie d’artiste et vivre de son art au crochet des autres sans aucune responsabilité..bcp de petits artistes amateurs et quelques grands professionnels…surtout dans le teleachat !
    M’enfin, une Bachelot , ex ministre des vaccins à gogos a un sacré humour …pour les journalistes ,bof ,aucun n’arrive a la cheville d’un Mamers ou d’un Drucker ,notre époque est vouée à la mediocrite et aux médiocres comme sont devenus la plupart des francais .

  • George Orwell s’est trompé de 10 ans. Son livre aurait dû se nommer « 1974 ». L’abrutissement de la masse, et la diffusion de la propagande par ceux qui la créent… On y est !

  • On le savait avec l’affaire Fillon, et maintenant, ils se découvrent sans aucune honte. Lisez contrepoint, et ne n’écoutez plus les autres médias, vous resterez saint d’esprit et surtout moins idiots.

  • j’aime bien « Golène et les glaçons ». Plus sérieusement j’espère que les audiences vont continuer de couler pour mettre le nez de nos chers me(r?)dias dans leur caca

  • J’y vois un beau message d’espoir que délivre notre pays à tous ceux qui ne savent rien faire et qu’on a viré.

  • « on pourra se rappeler de Mamère »?… Non, H16, pas vous!
    Se souvenir DE lui sûrement ou se LE rappeler. C’est tout ce qui nous reste pour nous distinguer des médiocrates incultes que vous dénoncez avec tant de brio.

  • pas de solutions ,
    Les têtes sont vides
    La pauvreté est notre avenir

  • Eh oui c’est dur d’avoir connu la »gloire » et retomber dans l’anonymat.
    Comme c’est « vedettes » de la téléréalité qui finissent par se suicider une fois leur heure de gloire passée.
    Mes comme le disaient justement les Chevaliers du Fiel ce matin:  » On a de la chance parce que pour le moment Brigitte ne chante pas » pourvu que l’idée d’écrire ne lui vienne pas non plus!!!!!!!!!!

  • – Tout ce que vous dites est vrai : nous sommes conditionnés par 1 bande de requins dans les médias privés et même France-Télévsions, malgré la redevance que nous payons pour eux, se fait le réceptacle du Pouvoir en cours en se faisant l’avocat du Libéralisme depuis que leur PDG est nommé par l’Elysée :
    http://www.lepoint.fr/actualites-medias/2008-06-25/le-president-de-france-televisions-nomme-par-le-gouvernement/1253/0/255669
    -NB : mieux encore.. d’après le TimesLe Times, qui fait écho à l’indignation des partisans du Brexit, montre que les dirigeants européistes jettent le masque puisqu’ils lancent ce programme « ouvertement politique », dont on devine que le montant, fixé à 2.876.500 € cette année.. Ces dépenses font partie d’un trésor de guerre s’élevant cette année à quelque 3 millions d’euros, qui va financer 84 projets, en Grande-Bretagne et dans l’UE, dans le but de « canaliser la critique dans une démarche utile, constructive et positive pour l’intégration européenne à long terme . Les documents de la Commission européenne révèlent que les projets sont financés s’ils « permettent aux participants de contrer l’euroscepticisme et de suggérer des actions possibles que l’UE pourrait entreprendre, afin de favoriser un sentiment d’appartenance à l’Europe, de comprendre les avantages de l’UE et de renforcer la cohésion sociale et politique de l’UE (sic)

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