Macron promet une administration plus à l’écoute

Selon les dernières informations transmises, le droit à l’erreur devrait être intégré dans le projet de loi « relatif à la transformation des relations entre l’administration et le public » : s’agit-il d’une révolution des relations entre administration et usagers ?

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Emmanuel Macron by Mutualité française(CC BY-NC 2.0)

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Macron promet une administration plus à l’écoute

Publié le 5 juillet 2017
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Par Virginie Pradel.
Un article de l’Iref-Europe

Lors de sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron a promis qu’il mettrait en oeuvre une véritable révolution visant à ce que l’administration soit dorénavant là « pour conseiller avant de sanctionner » ; cette révolution devrait notamment se traduire par l’instauration d’un droit à l’erreur pour tous.

Une promesse traditionnelle

Cette promesse a assurément pour objet d’améliorer les relations entre l’administration et les administrés. Bien que louable, celle-ci n’a cependant rien d’original ou de surprenant dès lors que, sous la Vème République, l’amélioration de des relations entre l’administration et ses administrés s’inscrit comme une constante des politiques publiques.

Plusieurs Présidents ont d’ailleurs été amenés à en faire l’un des points d’orgue de leur quinquennat ; à l’instar de François Hollande avec son « choc de simplification » et de Nicolas Sarkozy avec son « plan de simplification des 1.000 procédures administratives jugées les plus lourdes ou les plus irritantes ».

Le « droit à l’erreur » reste encore flou

Selon les dernières informations transmises, le droit à l’erreur devrait être intégré dans le projet de loi « relatif à la transformation des relations entre l’administration et le public », lequel sera présenté le 19 juillet au Conseil des ministres et débattu au Parlement à l’automne prochain.

Aux dires d’Emmanuel Macron, le droit à l’erreur devrait s’appliquer à l’ensemble des contrôles, qu’ils soient fiscaux ou administratifs et à l’ensemble des administrés, à savoir aux entrepreneurs et aux particuliers. En pratique, il devrait permettre à ces derniers, lorsqu’ils sont de bonne foi, de régulariser leur situation sans sanction en cas d’infraction constatée lors d’un premier contrôle. Autrement dit, seuls les « manquements délibérés, répétés ou particulièrement graves » devraient entraîner à l’avenir une sanction, selon le nouveau Président. Autant dire que le droit à l’erreur reste encore bien flou.

Le droit à l’erreur pourrait s’appliquer restrictivement

Par ailleurs, le nouveau Président a d’ores et déjà apporté deux restrictions notables au droit à l’erreur puisque celui-ci ne devrait pas concerner ce qui relève, d’une part, de la « violation des règles de sécurité » et, d’autre part, du « pénal ». Or, les sanctions administratives en matière de droit de la Sécurité sociale, de droit fiscal et de droit douanier ont généralement un caractère pénal1. Par suite, on peut légitimement s’interroger sur la portée pratique de ce nouveau droit à l’erreur.

Le droit à l’erreur ne s’inscrit pas comme une nouveauté

Au reste, force est de constater que le concept de droit à l’erreur existe déjà, sous d’autres formes, dans plusieurs domaines.

À titre d’exemple, pour les cotisations sociales relevant des Urssaf, un décret supprime d’ores et déjà les majorations de retard et les pénalités sous certaines conditions de régularisation et pour autant qu’il ne s’agisse pas d’« omissions répétées ».

Pour les impôts relevant de l’administration fiscale, le droit à l’erreur existe également déjà sous d’autres formes, notamment sous celle des remises gracieuses de sanctions. Les contribuables ont en effet la possibilité de solliciter directement l’administration fiscale pour obtenir la remise de certaines sanctions fiscales. À cela s’ajoutent différentes procédures qui ont été mises en œuvre pour aider et décharger les contribuables de bonne foi.

En somme, plusieurs éléments laissent suggérer que l’introduction d’un droit à l’erreur ne devrait pas constituer une grande révolution administrative, mais plutôt une simple réforme cosmétique.

Plutôt qu’une réforme cosmétique, il faudrait une réelle simplification administrative

Pendant le dernier quinquennat, François Hollande a entrepris d’accélérer le processus de simplification administrative. Avec, certes, un succès indéniable pour certaines mesures, mais avec un succès bien plus contestable pour d’autres.

On peut en effet s’interroger sur les effets simplificateurs de certaines mesures, à l’instar de celle visant le renversement du principe selon lequel « le silence gardé par l’administration vaut rejet2 ». Plus précisément, celle-ci prévoyait que toute demande d’une entreprise n’ayant pas reçu de réponse de l’administration sous deux mois devait être réputée acceptée. Autrement dit, le silence de l’administration devait désormais valoir accord, et non plus rejet.

Malheureusement, cette mesure salutaire a été laminée par la publication, juste avant son entrée en vigueur, de 41 décrets d’exception et près de 1300 dérogations ! Résultat, personne ne sait aujourd’hui à quelle demande s’applique la règle de deux mois ni quel délai (quatre, six, huit mois ou plus) correspond à sa situation. À cet égard, on peut donc évoquer un véritable choc de complexification. Espérons que le droit à l’erreur proposé par Emmanuel Macron ne prendra pas la même tournure et qu’il ne deviendra pas un énième principe souffrant d’une multitude d’exceptions.

S’agissant des nouvelles mesures de simplification administrative intégrées dans le projet de loi d’Emmanuel Macron, on trouve l’allègement des modalités de contrôle des comptes des TPE, la possibilité de publier sous forme électronique les annonces légales ou la propagande électorale, la tenue dématérialisée des assemblées générales des sociétés, etc. Il va sans dire que ces mesures doivent êtres saluées ; pour autant, celles-ci apparaissent encore bien insuffisantes pour endiguer le fléau administratif français.

Sur le web

  1. Selon les juridictions.
  2. loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens.
Voir les commentaires (8)

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  • Le droit à l’erreur n’est pas un Droit. Il peut éventuellement être un droit acquis, mais on voit bien que cela reste flou à définir. Que des règles et règlements administratifs – en particulier quant à celui qui régissent les déclarations d’impôts, la recevabilité et l’examen des recours, soient moins léonin, qu’une certaine bienveillance accompagne l’application de celles-ci, en particulier celles qui conduisent à des pénalités, est sans doute souhaitable ou souhaité par la population, mais ces aménagements réglementaires ne devraient pas sortir de ce cadre et en aucun cas être l’interprétation d’un « Droit » des individus.
    Les discours de Macron sont pavés de bonnes intentions… Espérons donc que ce chemin ainsi tracé par notre président de patronage ne soit pas celui qui nous mène tout droit vers l’enfer socialiste.
    Pour le moment toutefois, cette logorrhée présidentielle, abondement déversée durant la compagne me paraît nous conduire dans la mer des Sargasses ou cabotait en rond le petit capitaine de pédalo. Après le président des bisous, voici venu celui des bonbons ?

    • (…)en particulier quant à ceux qui régissent les déclarations d’impôts, la recevabilité et l’examen des recours, soient moins léonins, qu’une certaine bienveillance accompagne leur application,(…)

      Désolé !

  • Les 41 décrets et les 1300 exceptions, ce serait un grand moment de rigolade si ça ne démontrait pas le coté hors-sol de l’administration et des politiques qui ne doivent pas vivre sur la même planète que nous !

    • c’est simplement que eux ont le droit d’avoir une « phobie administrative », ils s’en tirent avec une petite tape sur les doigts. Et quand leurs PV impayés pourraient remplir une Bible on se contente de leur dire qu’ils ont pas assuré. Il est évident que ça n’a rien à voir avec le con tribuable moyen…

  • Promesse facile à tenir, il suffit de privatisé, on est toujours a l’écoute de ses clients.

  • La seule réforme qui pourrait changer quelque chose est de dégraisser tout le troupeau de mammouth.

  • Il va se mettre derrière chaque fonctionnaire le petit Jupiter? Encore une promesse frivole de plus!

  • Ce n’est pas un problème de droit à l’erreur mais de la stricte et neutre application des textes (accueil, information, explication, conseil, respect des délais…). D’abord, enfin, nos fonctionnaires finiraient par s’apercevoir que la palanquée de textes est aussi indigeste pour eux que pour nous et finiraient par obtenir, en interne, ce que les citoyens en externe s’époumonent à demander. Ensuite, cela les obligerait à se mouiller, ce qui est la moindre des choses pour un représentant de l’Etat et de sa rhétorique. Enfin, cela permettrait qu’ils arrivent à se sentir responsables de leurs actes au lieu d’incriminer le quémandeur/citoyen tel un « délinquant » permanent.

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