La « Sécu » au patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO ?

La sécu pourrait-elle être classée au patrimoine immatériel de l’humanité, et ainsi être protégée ? Le Président du parlement bolivien en a fait la demande.

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La « Sécu » au patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO ?

Publié le 1 avril 2017
- A +

Par Charles Boyer.

Le patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO a pour fonction de mettre en valeur et d’aider à protéger des aspects de la culture humaine au sens large, qui ne sont pas des objets tels des œuvres d’art ou des monuments. Des exemples d’éléments culturels désormais ainsi classés sont :

  • l’espace culturel de la place Jemaa el-Fna à Marrakech ou encore,
  • l’askiya ou l’art de la plaisanterie en Ouzbékistan,
  • l’idée et la pratique d’intérêts communs organisés en coopérative, en Allemagne.

En effet, bien des éléments de culture dans le monde entier sont de riches traditions, souvent anciennes, que nous pourrions perdre pour toujours, et irrémédiablement, du fait de la marche forcée de la technologie, de la marchandisation, de la mondialisation, et d’une certaine uniformisation.

Protéger les cultures traditionnelles

C’est pour tenter d’éviter de telles pertes définitives et irréparables que l’UNESCO a, suite à la Conférence pour la Sauvegarde du Patrimoine Culturel Immatériel de 2003, mis en place des programmes d’inventaires et de sélection. Ceci fit suite aux recommandations de 1989 sur la protection des cultures traditionnelles.

De telles définitions en entrainent d’autres, ou pour le moins un besoin de clarifications. À partir de quel moment des éléments centraux et essentiels de la vie de populations deviennent-ils partie intégrante de la culture ou de traditions ? N’est-ce qu’une question du nombre de générations écoulées, ou bien la force de l’attachement à des éléments de cultures, considérés par un peuple comme incontestables, doit-elle également jouer un rôle ?

Cette question a pris désormais un tour surprenant, par le biais d’une nouvelle demande de classement au patrimoine culturel immatériel. Cette demande émane d’Álvaro Garciá Linera, le Vice Président Bolivien.

Contre la commercialisation de tout

Membre du Mouvement vers le Socialisme – Instrument Politique pour la Souveraineté des Peuples, et particulièrement attaché à donner leurs places proéminentes aux cultures indiennes indigènes de son pays, M. Lina se dit « très attaché à la protection de traditions menacées par la commercialisation de tout, et aux peuples qui résistent malgré tout ».

En ce qui concerne sa toute récente soumission au patrimoine immatériel, il déclare :

Le peuple français vit intensément, comme partie intégrante de son identité traditionnelle, les acquis du Programme du Conseil de la Résistance de 1944. J’ai longuement étudié cet aspect de la culture française car je pense que l’émancipation du peuple par la solidarité est très compatible avec les traditions tribales de nos peuples indiens indigènes boliviens.

À force de réflexion, j’ai fini par être frappé par combien cet aspect de la France correspond à l’idée d’un trésor culturel que nous devons protéger pour l’humanité toute entière et qui malheureusement est sous une menace urgente d’effacement, sous la pression du néolibéralisme qui gagne du terrain à vitesse grand V tous les jours en Europe.

Lina a ajouté : « Et c’est ainsi que l’évidence m’est venue à l’esprit, qu’il me fallait sans tarder proposer le Programme du Conseil National de la Résistance du peuple français au patrimoine culturel immatériel de l’humanité à l’UNESCO. »

Richesse irremplaçable de la Sécu

Le classement au patrimoine immatériel n’est pas une protection absolue, mais permet d’attirer l’attention, voire de sonner l’alarme, sur des richesses irremplaçables quand elles sont en danger.

Le Programme du Conseil National de la Résistance, datant de 1944, au sortir des heures les plus sombres de l’histoire du pays, jouit dans le cœur du peuple français d’un attachement affectif très fort.

Des pans entiers de ce programme ont déjà été sacrifiés sur l’autel de la mondialisation libérale comme la planification quinquennale et la nationalisation des grands moyens de production. La sécurité sociale reste l’unique pilier de cette démocratie économique et sociale rêvée par les forces de la résistance. L’idée de la remise en cause de cette tradition y est une source d’inquiétude et de trouble.

Idée étonnante et bienvenue

Les éléments centraux du besoin de classement à l’UNESCO, selon la soumission préparée par Álvaro Garciá Lina, sont «le rétablissement d’un syndicalisme indépendant et des délégués d’atelier» et « un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se le procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l’État ». Plus simplement, ce qu’on désigne comme les partenaires sociaux et ce que les Français appellent affectueusement « la sécu ». 

Interrogé à ce sujet, Didier Blanqui, porte-parole du RSI de la Haute-Vienne, a déclaré : « C’est une idée étonnante mais vraiment très bienvenue en ce moment. Nous affrontons une menace réelle de groupuscules apparentés à l’extrême droite, avec des noms comme « Les Libérés », qui poussent les gens à se désaffilier. Ils se présentent comme spontanés mais on sent bien les ficelles de grandes multinationales financières de l’assurance, qui aimeraient tant faire main basse à vil prix sur la santé des gens. Il y a une vraie menace contre la solidarité, et ce classement à l’UNESCO aiderait à tirer la sonnette d’alarme sur ce danger imminent. La protection sociale ne doit pas être remise en cause».

Le classement que la Sécu mérite

La demande de M. Garciá Lina porte justement sur une insertion dans la « Liste du patrimoine immatériel nécessitant une sauvegarde urgente ». Selon Cécile Duvelle, responsable de la division du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO : « La Liste représentative ne vise pas à récompenser les meilleures expressions culturelles du monde. La seule chose que l’on prend en compte, c’est l’importance subjective qu’a telle ou telle pratique pour la communauté qui la maintient en vie »

L’inclusion dans cette liste suit son cours et peut prendre quelques années. Gageons que notre « Sécu » obtiendra le plus rapidement possible le classement qu’elle mérite.

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  • lol c est une blague cet article ? la.secu ne mérite qu’une chose : le dépôt de bilan

  • Poisson d’avril très probablement …

  • Ah ah ah … Bien vu !

    • @ Odidole

      C’est en effet possible que ce soit un poisson!

      Mais il ne faut pas confondre la « sécu » à la française, ni comme un modèle (O.von Bismark fut le créateur du système, il y a plus de 120 ans), ni comme le seul modus operandi.

      Il n’empêche que sous une forme ou sous une autre, il est une valeur commune, dans l’Union Européenne, du nord au sud et d’est en ouest, d’établir une solidarité entre tous les citoyens face aux difficultés invalidantes de la vie.

      Il est compréhensible que cette solidarité soit « sans but lucratif », puisqu’elle vient aussi des caisses de solidarité des usines du XIXième siècle, où, exemple-type, la veuve d’un accidenté de l’entreprise était prise en charge par la « cagnotte » des autres ouvriers. D’où le modèle basé sur le revenu du travail qui perdure aujourd’hui.

      À l’exception de la CSG et la CRDS, au statut de mi-impôt-mi-cotisation sociale, qui fut bien classé comme social par la cour de justice européenne, en exonérant les étrangers « socialisés » hors de France du devoir de cotiser dans 2 pays.

      Chaque pays a sa façon d’organiser ces ou cet organe de solidarité. Le modèle français, forcément quasi « généralisé » (CNAM) et bien « centralisé », n’est pas le meilleur ni le plus efficace.

      Par contre, son poids en fait un partenaire obligé sur tous les sujets de médecine et de santé, sans contrôle démocratique (aucun élu!), mais purement administratif, et pourtant ses « points de vue », réellement politiques, sont largement diffusés dans la presse, comme ses règlementations ont quasi force de loi! C’est pour le moins étonnant ou déplorable pour une administration évidemment endettée!

  • Suite à ce Conseil National de la Résistance, amplement noyauté par le puissant Parti Communiste et ses martyrs (souvent en fait des sacrifiés), on a créé, un puissant service public basé sur l’idée de la Solidarité…
    L’idée de base était belle et facteur d’unité Nationale.
    C’est ensuite que les choses ce sont gâtées : peu à peu ce Service Public (SNCF,EDF,RATP), bien à l’abris derrière des monopoles, a obtenu, suite à des grèves itératives (CGT) prenant l’ensemble de la population en otage (monopole…) , des « avantages acquis » de plus en plus importants sur les rémunérations, les horaires de travail, les prestations sociales (centres de vacances etc…) que le reste de la Société leur payait et leur paye encore (cf article Contrepoints à la une sur la SNCF)
    Dans le même temps le mot de « Service » s’est délité pour rejoindre dans certains cas une valeur proche du zéro.
    Ce n’est que par l’influence des lois Européennes sur la concurrence que peu à peu ces Services publics ont été mis en situation progressive de concurrence (bien que cela ne soit pas vraiment acquis dans les faits). Ils ont alors un peu changé en améliorant le Service et souvent les nouvelles personnes embauchées l’ont étées avec un statut moins favorable ! (égalité d’accord mais pas pour tout le monde !).
    C’est donc bien la contrainte et la concurrence qui les a fait progresser.
    Le problème du secteur Santé est que la concurrence est faussée :
    – du point de vue prestations sociales par le « monopole » de la SS
    – du point de vue des établissements de santé par un traitement plus qu’inégalitaire avec un favoritisme budgétaire éhonté et colossal pour le « Public ».
    Alors même que nos moyens financiers sont de plus en plus « minces ».
    Donc pour moi ces Services Publics étaient une belle idée au départ mais tellement dévoyée que ce n’est finalement qu’une utopie…

  • Les commentaires sont fermés.

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