Après Heetch, Flyboard : la France continue sa lutte héroïque contre toute innovation

Si Clément Ader ou Louis Blériot tentaient aujourd’hui en France leurs petites cascades aériennes dans leur coin, il n’y a aucun doute qu’ils se feraient rapidement embastiller pour outrage à la gravité.

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Après Heetch, Flyboard : la France continue sa lutte héroïque contre toute innovation

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 14 mars 2017
- A +

Par h16.

Quand une invention voit le jour, les Américains en font une marchandise, les Chinois la copient, les Européens la règlementent et la France l’interdit.

Récemment, ce petit aphorisme a trouvé son illustration avec l’application Heetch qui facilite le transport entre particuliers en mettant en relation des automobilistes prêts à dépanner des passagers potentiels. Essentiellement utilisée en France par des étudiants et comme petit job d’appoint pour un nombre croissant de jeunes conducteurs, cette dernière application a rencontré l’ire des artisans et grosses sociétés de taxis qui y voient une concurrence déloyale ; pensez donc, des étudiants peu fortunés (le plus gros contingent des clients de Heetch), s’ils n’avaient pas cette application, se précipiteraient évidemment sur les taxis et leurs tarifs abordables, c’est évident.

Cela n’a pas traîné et j’en parlais en décembre dernier : la société a rapidement été assignée en justice. Avec une belle rapidité (pas autant que le Parquet National Financier, mais tout de même), le procès a eu lieu et s’est terminé au début du mois de mars avec la condamnation définitive de la société Heetch.

Les Français face à l’innovation

Le jugement en dit long sur la façon dont fonctionne l’esprit de certains Français (ici, des juges) face à l’innovation et à l’apport d’une nouvelle donne sur un marché qui a été très longtemps sclérosé. Ainsi, pour Heetch, le tribunal a estimé que « les agissements des trois prévenus contribuent à la précarisation et au développement d’un sentiment d’angoisse des taxis », ce qui justifie donc amplement qu’on soit poursuivi et sanctionné, pardi ! Si on contribue à votre précarisation et à un sentiment d’angoisse, c’est forcément qu’il y a préjudice.

À ce titre, n’importe quel Français, sain de corps et d’esprit, devrait sur ces motifs s’empresser d’attaquer le fisc qui contribue tous les jours à sa précarisation et à un clair développement d’angoisse (et je n’évoque pas le cas douloureux de certains parlementaires qui en sont même atteints de phobie administrative). Franchement, lâchez-vous, attaquez !

Après tout, si un tribunal peut se servir de ces motifs vaporeux pour bousiller une innovation franco-française, les emplois y étant attachés, et l’amélioration vécue par les dizaines de milliers d’utilisateurs de l’application, pourquoi ne pas utiliser les mêmes arguments et la même façon de penser pour dénoncer tout ce qui vous précarise et vous angoisse, à commencer par le Trésor Public ?

Ce qui n’intéresse pas les pouvoirs publics

Et puis pendant ce temps, cela évitera de se pencher sur le sort un peu délicat de ceux qui bénéficiaient du petit surplus financier apporté par l’application elle-même : après tout, ce pouvoir d’achat supplémentaire pour les chauffeurs n’intéresse absolument pas les pouvoirs publics, et peu importe dans ce cadre que la justice française contribue clairement à leur précarisation et à leur sentiment d’angoisse.

Pour elle, c’est permis. En tout cas, parions que le souhait de Me Jonathan Bellaiche, représentant des taxis, sera effectivement exaucé, lui qui a espéré que cette condamnation « dissuade des entrepreneurs » de se lancer sur le même créneau que Heetch.

Car il ne s’agit, au final, que de cette préoccupation mesquine de petits jaloux corporatistes : il faut s’assurer que personne ne pourra casser une belle petite rente, quitte à museler et écraser tous les inventeurs qui viendraient par là.

Il n’en va pas autrement pour Franky Zapata.

L’invention du Flyboard

Vous n’avez probablement pas entendu parler de lui, et c’est bien dommage. L’homme est un touche à tout créatif et certainement un peu casse-cou, ancien pilote professionnel français de jet-ski, et surtout inventeur du Flyboard, plateforme qui permet à son utilisateur de léviter au dessus d’un plan d’eau puis, dans son modèle « Air », qui autorise un homme debout à fendre les airs propulsé par des réacteurs : résultat de plusieurs années de recherche et de développement, cet engin se présente comme une planche d’environ 20 kilos équipée de quatre puissants réacteurs sous le plateau et deux sur les côtés pour la stabiliser et la diriger. Le pilote se tient debout pour utiliser son poids afin de guider l’appareil à l’instar d’un segway.

Outre l’aspect sportif et ludique évident que cet engin arbore, l’innovation du Marseillais pourrait trouver des applications dans de nombreux domaines comme les plateformes pétrolières, l’entretien de gratte-ciels et de ponts ou même le domaine militaire.

Nous sommes en France, et cette invention qui attire le regard pose immédiatement autant de souci qu’elle déclenche de jalousies : à la suite de son dernier essai en vol, Franky Zapata a été convoqué à la gendarmerie de l’air où on lui a signifié, après prise d’empreintes et clichés photographiques, que toute tentative de refaire voler son prototype le conduirait directement par la case procès et probablement prison.

Encore un exilé à cause de la règlementation

Il détaille sa réaction (dégoûtée, et on le serait à moins) dans un billet sur Facebook et ne laisse guère de doute sur ce qu’il va entreprendre comme démarche : comme beaucoup d’autres avant lui, Franky Zapata va donc quitter le pays qui a su si brillamment le dégoûter d’y créer des nouveautés, d’y travailler et d’y créer de l’emploi. C’est bien joué : en laissant cet inventeur développer son engin, la France risquait de créer un engouement, un nouveau sport, de nouvelles opportunités de vendre du « Made In France » dans différents domaines à haute valeur ajoutée, et par là, de créer des emplois, d’enrichir aussi bien l’inventeur que tous ceux qui, croyant en son succès, l’auront aidé dans ses démarches et se seront retrouvés employés par la société en charge de la commercialisation du véhicule.

Un tel risque est bien évidemment insupportable : on commence comme ça, et on termine avec un chômage bas, des cotisations sociales qui entrent à gros bouillon, des retraites payées par un nombre croissant de travailleurs et à la fin, des gens bien portants et heureux. Or, malheureux, en France, on ne peut surtout pas prendre ce risque là ! Ouf, le succès a donc été évité de justesse !

Il faut se rendre à l’évidence : si Clément Ader ou Louis Blériot tentaient aujourd’hui en France leurs petites cascades aériennes dans leur coin, il n’y a aucun doute qu’ils se feraient rapidement embastiller pour outrage à la gravité.

De nos jours, l’État français écrase la concurrence, favorise les corporatistes et poursuit ses inventeurs. Ce pays est donc foutu.

—-
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  • Malheureusement h16, vous avez mille fois raison. Encore une fois. Vous n’avez pas cité Carmat, est-ce voulu?

  • et cela ne date pas d’hier ! aux USA Trump est aux prises avec ce que les américains appellent « l’État profond » ici, on n’en parle même pas mais il est mille fois pire qu’en Amérique!
    en fait on est entre les mains d’un système de caste de hauts (et bas) fonctionnaires dont se sert une oligarchie finance/media/politique qui considère la population comme une clientèle captive qui ne doit à aucun prix échapper à ses griffes !
    il est évident que l’outil parfait pour y parvenir est de tenir le pays sous la coupe de l’idéologie socialiste parce qu’on n’a encore jamais trouvé mieux que le socialo-marxisme pour asservir les peuples en leur faisant croire que c’est pour leur bien !!
    si vous y ajoutez la francophonie qui est utilisée comme une autre forme d’enfermement, la population ne dispose plus échappatoire pour aller voir ce qui se passe ailleurs !
    mais ça, c’était avant internet et les traducteurs automatiques !
    devant la menace de « nous le peuple » qui commence à ouvrir les yeux, cette idéologie s’est construit une nouvelle image, plus moderne, plus branchée en la personne de Macron qui n’est là que pour donner le change, comme une vieille putain qui se serait payée de la chirurgie esthétique pour pouvoir continuer à faire le tapin et plumer ses clients !

    • @ sultana

      Vous n’y allez pas de main morte, sauf qu’en France, un politicien en vaut un autre et la « droite » ne vaut pas mieux que « la gauche »! Ils sont quasi tous « faisandés » et vous avez beau chercher « un homme d’État », je n’en vois aucun parmi les candidats: ce sera encore un quinquennat « faible »!, vous laissant sur votre faim! Sauf surprise!

  • excellent article !

    vous auriez pu ajouter un petit topo sur l’absence totale d idée réformatrice a destination des taxis, qui permettrait en douceur et avec une équité acceptable de faire entrer ces nouveaux venus.

    en effet, si la mauvaise réputation des taxis ne s est pas faite toute seule, admettons que le situation de, appelons le « Paul », taxi driver de métier, honnête et serviable, qui a du acheter une plaque hors de prix, n est pas la plus simple !

    mais comme vous le soulignez très bien, en France, on préfère interdite la nouveauté que de corriger les erreurs du passé.

    • À quel racketteur a-t-il payé sa « plaque hors de prix »? À quoi lui est-elle utile, à des places de parking protégées? Au détriment des citoyens automobilistes ordinaires payant pourtant ettoutes ses taxes? Et alors que toutes les autres places, sur la chaussée sont rackettées au temps passé plus un « papillon » en cas de dépassement de ce temps? La « vache à lait » a fini par accepter l’inacceptable, comme tous les rackettés: syndrome de Stockholm finement et progressivement bien programmé alors que le véhicule « roulant » ne dépasse pas une moyenne de 15 à 17 km/h et alors qu’un ticket de métro est au prix prohibitif de 1,9 €, l’unité!

      Il vaut mieux fuir cette capitale, déclarée « sale » par la majorité des touristes étrangers, à l’atmosphère polluée réellement « puante ».

      Par contre, il y a toute la place pour Heetch, en périphérie et à la campagne, là où la prise à domicile vous coûte déjà un pont en taxi estampillé.

    • Mouais. En tant qu’expert-comptable ayant une vue directe sur ce qu’ils gagnent, je peux vous dire que vous avez tort de pleurer sur leur sort. Ce sont des complices très bien rétribués.

  • Malheureusement h16, vous avez mille fois raison! Et Carmat pourrait se rajouter à la liste des entrerprise qui sont bloquées par notre bureaucratie législative.

  • Et que dire de l’exploration du gaz de schiste !

  • De nos jours, même l’inventeur du Minitel se retrouverait muté dans le Cantal avec une promotion de veilleur de nuit… ?

    • Pour le minitel….,on regrettera qu’il ne fut pas interdit…..On aurait sans doute moins de retard sur le haut débit ,Niel n’aurait pas été milliardaire etc

  • Le prochain à être épinglé sera le fondateur de l’appli’ où on peut louer la voiture de son voisin, et être assuré par AXA. Vu dans une pub hier soir. Le fait d’avoir une assurance comme sponsor sera-t-il vu comme une garantie ? En la voyant hier, j’ai ri jaune car je me suis dit que les taxis allaient encore crier à l’aberration.
    Comme vous le dites, il n’y aura plus de Clément Ader, de Louis Blériot, de Louis Renault qui bricolait dans son garage des moteurs et des boîtes de vitesse.

    « A ce titre, n’importe quel Français, sain de corps et d’esprit, devrait sur ces motifs s’empresser d’attaquer le fisc qui contribue tous les jours à sa précarisation et à un clair développement d’angoisse « . C’est tellement clair pour nous, mais tellement opaque pour les autres du « camp du bien ». Quelle tentation tout de même ! Si j’avais plus de ronds pour le buy-in, je me lancerais.

  • Dans un pays qui a le principe de précaution dans sa constitution, il faut s’attendre à tout…..

    • C’est effectivement une première imbécilité d’état écartant tout goût du « risque » alors que l’avenir n’est pas défini: rien n’est pire qu’un chauffeur, le pied proche du frein, première cause de dérapage!

  • MDR hélas…
    Au titre du principe de précaution, on ne sait jamais, je lis cet article depuis l’étranger.
    En France, on pourrait me reprocher de prendre des risques inconsidérés. Genre entorses du doigt en tapant ce commentaire. Décollement de la rétine en lisant … :mrgreen:

    Tout cela finira par être durement réprimé, on y arrivera bien. Cela passera par des taxes dissuasives, puis par un durcissement ultérieur.

    Fuyez ❗

    • @ MichelC

      Moi-même, « étranger » et « ex-travailleur immigré » en France, qui s’est dépêché de rentrer chez lui quand la coupe de clowneries fut pleine, vous avez raison, la taxation est le B,A, BA du politicien dans cette « République » (comme si les autres « républiques » étaient moins nobles ou comme si les Français l’avaient inventée!!) Où tout est fait pour presser le citron de l’économie réelle pour satisfaire l’économie-papiers administratifs artificielle, nouvelles fourches caudines imposées par le pouvoir, mais payantes à chaque étape!

  • Hé oui, je viens de découvrir cette stupidité bien française, entre jalousie et corporatisme…… avec au milieu une administration très en verve quand il faut interdire (au lieu d’âtre au service des administrés).
    Je confirme : on est foutu!

  • Excellent article (comme toujours) ! Et pour lequel on pourrait (malheureusement) multiplier les exemples. Une autre idée qui a démarré en France, le co-avionnage. Dès que c’est apparu, notre bonne DGAC (direction de l’aviation civile), aux ordres du syndicat des pilotes professionnels, a d’abord pondu une note obligeant les nouvelles plate-formes de coavionnage de posséder une licence de tranporteur aérien, puis devant l’absurdité d’une telle mesure, a reculé, pour pondre une circulaire limitant la pratique du coavionnage aux pilotes professionnels (sauf pour faire des ronds de 30 km autour de l’aérodrome). Autant dire a tué l’idée dans l’oeuf.
    Heureusement les WIngly, Coavmi et autres plateformes se développent bien, ailleurs en Europe. Et heureusement, ladite circulaire a été attaquée en Conseil d’Etat. Un peu de patience et espérons qu’elle sera annulée !

  • Sauf que l’économie parallèle en fort développement actuellement permet de ne pas participer au financement de notre onéreux système social : pas de TVA, pas de charges sociales, pas d’impôts sur le revenu… Et qui va compenser ces pertes, les entreprises et salariés qui devront payer plus cher pour que certains ne payent pas… Et oui ! Pourquoi n’encouragez-vous pas aussi le travail au noir tant que vous y êtes ?

    • @Odidole
      Bonjour,
      Vous devez vous tromper : il ne peut pas y avoir de travail au noir dans notre pays, si bien réglementé par l’Administration et son épais Code du travail, ainsi que l’efficacité hors norme de notre FISC. Comment pourrait-il y avoir des gens qui en paieraient d’autres, lesquels seraient moins onéreux que les professionnels taxés à 68% ?

    • Odidole: Et qui va compenser ces pertes

      Pourquoi faire ?
      L’état du pays d’à côté est quasi moitié moins gros, dépense moitié moins et n’a pas de chômage (3.5%) , quasi pas de dette, pas de déserts médicaux, pas de zone de non-droit et une caissière chez Aldi y gagne 4300 euros par mois contre 1308 euros pour la même caissière en France.

      La France est un enfer fiscal sans le bol d’air du travail au noir vous auriez encore plus de chômage et de dépenses sociales.

      Je repose ma question: compenser, pour quoi faire et en quoi est-ce une « perte » ?

      • C’était déjà ainsi du temps de la royauté qui favorisait les corporations et les guildes! Preuve que la France n’a pas évolué depuis!

      • Très juste Ilmryn! La Suisse est l’exemple vivant, et ce pourquoi elle est si calomniée par la gauche et les étatistes, que moins il y a d’état et plus la prospérité augmente. L’absence de politiciens professionnels et la démocratie directe sont les clefs du succès!

  • Son engin intéressant l’US Army, Franky Zapata montera son entreprise aux USA, comme tous les innovateurs en ce moment.

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