Sécu et mutuelles : les vertus de la concurrence

Si le système français continue à fournir des services de qualité au plus grand nombre, ce n’est pas en dépit des mutualistes et des prestataires de santé en concurrence, mais grâce à eux.

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Sécu et mutuelles : les vertus de la concurrence

Publié le 2 mars 2017
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Par Cécile Philippe.
Un article de l’Institut économique Molinari

Voilà plus d’un siècle que dure la bataille qui oppose les différents acteurs de la santé. Cette bataille – marquée par la victoire majeure de la Sécurité sociale en 1947 – n’en continue pas moins d’opposer notamment les mutualistes à la Sécurité sociale.

Opposants de longue date, le combat est souvent silencieux. Parfois, un coup porte davantage, comme cet article remarqué de Martin Hirsch et René Tabuteau publié récemment dans le journal Le Monde. Les auteurs n’y proposent rien de moins que la création d’une Sécurité sociale universelle, et donc la suppression de ces quelques 500 complémentaires, dont le nombre à lui tout seul indiquerait une mauvaise allocation des ressources.

Or c’est tout l’inverse qu’il faudrait envisager. Les mutualistes sont peut-être nombreux en France, mais leur existence révèle un élément fondamental : l’existence d’une concurrence institutionnelle dont il y a tout lieu de penser qu’elle est créatrice de valeur.

Des fusions qui coûtent souvent cher

C’est bien connu, en cette période prolongée de déficits et de rationalisation des dépenses, il y a lieu de faire des économies d’échelle, de fusionner, de supprimer, de créer des entités uniques susceptibles de faire des économies dans les frais de gestion. Hirsch et Tabuteau ne promettent-ils ainsi pas des économies de l’ordre de 6 milliards d’euros par an si on supprimait toutes ces ­complémentaires ?

Il est certain que les fusions peuvent avoir une raison d’être. Il n’en demeure pas moins que, dans nombre de cas, celles orchestrées par les pouvoirs publics ont généré beaucoup de déceptions voire de surcoûts (fusion ANPE-Unédic, RSI…). Cela n’est pas le fruit du hasard, les différences que l’administration cherche à gommer ont souvent une utilité. Elles sont le garant institutionnel que l’expérimentation pourra se poursuivre.

Car, sauf à croire que nous vivons dans un monde simple, certain et sans surprise, il n’existe pas de meilleur système que la concurrence pour faire émerger des solutions adaptées aux nombreux problèmes que la vie en société crée.

Prendre en compte la dynamique des institutions

Comme l’explique Douglass North, lauréat du prix Nobel d’économie en 1993, dans son ouvrage Comprendre le processus du changement économique (2005), « la diversité institutionnelle est une question de survie ». Dans la mesure où personne ne sait quel est le meilleur moyen de survivre, il est essentiel de bénéficier de structures institutionnelles capables d’innover.

L’argument des frais de gestion est un argument comptable, statique, ne prenant pas en compte la dimension dynamique des institutions. Or c’est elle qui compte. Et si on juge la Sécurité sociale à l’aune de cette dynamique, le résultat n’est pas en sa faveur.

En effet, le premier plan de lutte contre le déficit de l’assurance-maladie date de ses débuts, dès 1951. Il sera suivi d’une multitude d’autres, pour la bonne raison que la Sécurité sociale en tant que monopole se révèle incapable de créer et de traiter l’information nécessaire à la bonne gestion de systèmes sociaux complexes tels que l’assurance-maladie ou les accidents du travail.

Peu d’expérimentations en monopole

Avancer l’argument de la fusion a le mérite d’être simple et facile à comprendre. Mais, dans le cas présent, la simplicité n’est pas un atout. Nous n’avons pas besoin de simplisme en santé mais de dynamisme, de capacité à s’adapter aux nouveaux défis que représentent une population vieillissante, l’augmentation du nombre de cancers, les révolutions technologiques.

Pour cela, il ne faut pas seulement de bonnes capacités de traiter l’information, mais aussi des systèmes capables de la créer. Seul un processus d’essai et erreur peut y parvenir et l’expérimentation n’est pas le point fort d’un monopole. En tant que patients, nous voulons être bien soignés.

Si le système français continue à fournir des services de qualité au plus grand nombre, ce n’est pas en dépit des mutualistes et des prestataires de santé en concurrence, mais grâce à eux. La maîtrise comptable des coûts dont Hirsch et Tabuteau se font les fers de lance oublie que, à la clef, il y aura des listes d’attente pour tous faute d’avoir su générer des solutions innovantes et accessibles en santé.

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  • Les vertus de la concurrence , EDF est un bon exemple à ne pas suivre. La concurrence n’a de vertus qu’entre sociétés privées et seulement si l’État ne s’en occupe pas sauf pour faire respecter les règles…Autre exemple ,les télécoms,passées d’un monopole d’état à un monopole de banquiers…Et nous sommes toujours en retard sur les autres pays parce-que l’état ne fait pas respecter la réglementation.
    Dans un pays comme le nôtre , la concurrence n’existe pas,nous ne sommes pas un pays libéral mais un pays de copains/coquins

    • Au niveau des télécoms la concurrence française a quand même eu du bon. J’ai été élevé dans les centraux téléphoniques, j’ai vu les changements de l’intérieur et franchement pourvoir passer du monopole de France Télécom sur le filaire à plusieurs acteurs sur le mobile, sur Internet, sur le dégroupage ou la téléphonie sur IP a été largement bénéfique aux consommateurs : meilleure qualité de service (de télécom, pas de relation client), et prix parmi les plus bas d’Europe.

  • Bonjour,
    J ai failli mourir de rire en lisant votre article, même si sur le fond vous avez raison, ( les monopoles c’est pas bien, la sécu ça ne fonctionne pas, la concurrence est une bonne chose etc…), vous faites preuve d’aveuglement idéologique concernant les mutuelles.
    les mutuelles n’en ont rien à cirer de la qualité des soins dans le système actuel en France, elle favorisent les réseaux de soins qui ne servent que des soins low cost en faisant confiance aveuglément aux praticiens les plus mauvais qui ont besoin de faire partie des ces réseaux pour pouvoir avoir une patientele
    J ose espérer que la fin de la sécu pourrait changer les choses, mais quand je vois le système de santé américain j’ai des gros doutes.
    je suis médecin, libéral dans l’âme, pour l instauration d’une vrai concurrence dans la medecine, mais malheureusement je suis très sceptique concernant les mutuelles, surtout en France où elle sont dirigées par des adeptes du capitalisme de connivence qui copinent avec nos politicard socialistes.
    la solution ne se trouve pas la, et je réfléchis tous les jours mais je ne ai pas encore trouvé…
    bien à vous

    • La solution n’est pas dans les mutuelles mais dans la mise en concurrence ouverte des systèmes d’assurance. Assureurs privés ou mutualistes, peu importe leur structure capitalistique.
      Et surtout, surtout, aucune ingerence de l’Etat dans la tarification des primes ou des prestations.

  • Pukura , entièrement d’accord avec vous, néanmoins la santé est un domaine particulier dont le business model peut difficilement être calqué sur celui du commerce en général.
    je me vois mal imposer à mes patients les choix de son assureur pour ses traitements. (a moins que l assureur devienne responsable de mes actes à ma place, et si je met mon éthique de côté pour gagner plus de pognon)
    Vous me direz « mais vous avez le choix de vous aqcoquiner avec les assureurs qui ont une éthique similaire à la vôtre » oui, mais en pratique, ils ne cherchent qu à réduire les coûts et donc la qualité des traitements, aucun n’ a véritablement d’objectifs qualitatifs.
    à la limite il faudrait interdire aux assureurs de passer des accords avec les soignants mais interdire n’est pas libéral…
    bref, c est plus compliqué que ça en à l air

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