Entreprise : les trois impératifs de votre incubateur interne

L’incubateur doit être étroitement associé à la réflexion stratégique de l’entreprise, et notamment de l’analyse des ruptures, et être force de proposition, via de nouveaux projets, pour les réponses à y apporter.

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Entreprise : les trois impératifs de votre incubateur interne

Publié le 21 février 2017
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Par Philippe Silberzahn.

Entreprise : les trois impératifs de votre incubateur interne
By: Julian SantacruzCC BY 2.0

Une des approches très employées en ce moment par les grandes entreprises ayant besoin d’améliorer leur capacité d’innovation est la création d’incubateurs internes et autres usines à startups. Cette création se fait rarement sans douleur.

Mais quelles que soient les les difficultés, il me semble que ces incubateurs doivent répondre à trois impératifs : un impératif « tactique », assurer la réussite des projets entrepreneuriaux, et deux impératifs plus « stratégiques » : faire en sorte que ces projets amènent le groupe sur de vrais marchés nouveaux capables de prendre le relais d’activités potentiellement en déclin, et faire en sorte que ces projets permettent à l’entreprise de se transformer

Assurer la réussite des projets entrepreneuriaux

C’est évidemment la mission de base de l’usine à startups. Elle incube des projets, généralement issus de l’intérieur de l’organisation, que ces projets soient initiés par des collaborateurs ou par la direction. L’enjeu ici va être double : d’une part, il faut soutenir ces projets pour qu’ils aboutissent, c’est la mission la plus évidente et officielle. Cela passe par une activité d’accompagnement, de staffing, de financement bien sûr, de mise en relation, ou encore de formation car souvent les cadres qui prennent ces projets n’ont aucune expérience entrepreneuriale.

D’autre part, il faut protéger ces projets contre les méfaits, voire l’hostilité de l’organisation existante. On le sait, un projet en rupture nécessite un modèle d’affaire différent du modèle de l’activité actuelle de l’entreprise, les deux ne sont pas compatibles et il y a donc un conflit qu’il faut gérer pratiquement au quotidien, notamment au niveau de l’allocation de ressources (financières, humaines et matérielles).

Protéger le projet signifie se battre pour qu’il obtienne les ressources nécessaires, pour que les décisions dont il dépend soient prises rapidement (au sens startup, pas du point de vue de l’organisation qui s’enorgueillit souvent de ne mettre que six mois à trancher une question fiscale) et dévier les milliers de petites flèches que décochent les fonctions dites « support » à un projet qu’elles voient comme une distraction coûteuse, voire un caprice de la direction auquel il faut mettre fin par tous les moyens.

Protéger le projet, c’est aussi faire admettre qu’un projet entrepreneurial ne se gère pas comme un projet mature, qu’il n’a pas les mêmes horizons de temps ni les mêmes critères de performance, et qu’il ne peut être géré par les mêmes personnes. C’est, enfin, faire admettre qu’il peut marcher sur les plates bandes des activités actuelles et qu’il faut accepter les conflits.

L’objectif est donc ici de créer un portefeuille de projets équilibré, gérés de manières ad-hoc, en faisant entrer puis progresser de nouveaux projets sans arrêt.

Faire en sorte que ces projets amènent le groupe sur de vrais marchés nouveaux capables de prendre le relais d’activités potentiellement en déclin

Ce deuxième impératif n’est pas évident, mais il est important parce que la réussite du premier – créer un flux de nouvelles activités – ne garantit en rien que ces projets positionneront l’entreprise sur des marchés vraiment disruptifs, c’est-à-dire sur les vraies sources de croissance de demain. Une réussite en termes de projets peut payer en termes tactiques, c’est-à-dire de chiffre d’affaires, mais laisser l’entreprise fort dépourvue au niveau stratégique.

C’est pour cela qu’il est indispensable que la direction générale reste impliquée dans l’incubateur, qu’elle ne se contente pas de lui déléguer la mission de générer des startups. Au contraire, l’incubateur doit être étroitement associé à la réflexion stratégique de l’entreprise, et notamment de l’analyse des ruptures, et être force de proposition, via de nouveaux projets, pour les réponses à y apporter.

Ainsi, le portefeuille de l’incubateur s’alimentera à la fois de projets émergents, venant des collaborateurs de l’entreprise, et qu’il conviendra de faire aboutir dès lors qu’ils ont un intérêt, et de projets délibérés, résultant d’une analyse stratégique ayant conduit à la décision d’investir un champ nouveau. En ce sens, l’intrapreneuriat ne peut pas être isolé du processus stratégique de l’entreprise et il est essentiel qu’il y ait une relation forte entre les stratèges et les intrapreneurs.

Faire en sorte que ces projets permettent à l’entreprise de se transformer

Réussir à créer un portefeuille de projets entrepreneuriaux et faire en sorte que certains de ces projets servent directement la stratégie de gestion des ruptures en cours est déjà difficile, mais ça ne suffit pas. Il faut également que ces efforts servent à transformer l’entreprise. Le propre des ruptures est en effet de remettre en question les modèles d’affaire.

Il ne suffit pas de développer de nouvelles activités dans le cadre, il faut absolument réinventer celui-ci. Cela signifie que l’incubateur ne doit pas être conçu comme un canot de sauvetage – on crée de nouvelles activités en laissant mourir l’activité traditionnelle. Cela doit aller dans l’autre sens : les projets ainsi créés doivent être mutagènes, ils doivent contribuer à changer l’organisation.

C’est pour cela qu’il faut garder des liens entre les deux. Il y a donc un équilibre difficile à trouver entre une distance nécessaire pour protéger le projet et une proximité pour qu’il contribue au changement. Un des facteurs essentiels de relation va être de choisir comme entrepreneur quelqu’un issu de l’organisation. Ce n’est pas toujours évident. On l’a vu plus haut, il est fréquent que les collaborateurs n’aient pas d’expérience ni de culture entrepreneuriale ; on peut donc être tenté de recruter les pilotes des projets à l’extérieur. À mon sens c’est une erreur.

C’est souvent la passion qui importe plus que les connaissances, car ces dernières peuvent s’acquérir avec un bon suivi, c’est d’ailleurs le rôle premier de l’incubateur. Mais rien ne remplace la passion ni la connaissance de l’organisation qui va permettre de savoir où trouver les ressources dont on a besoin. Quelqu’un issu de l’organisation sera mieux à même de maintenir le lien si nécessaire entre le projet et l’organisation et de contribuer à l’apprentissage nécessaire des autres membres.

Réussir à créer un portefeuille de projets, faire en sorte que certains de ces projets servent la stratégie de rupture de l’organisation, et contribuer au renouveau de celle-ci, voilà trois impératifs pour le moins ambitieux d’un incubateur. La nature très stratégique de son rôle nécessitera qu’il soit rattaché très haut dans la hiérarchie de l’organisation, tout près de la direction générale et qu’il soit parrainé par un de ses membres de poids. Sans cela, le portefeuille de startups risque de ne constituer, au mieux, qu’une collection de canots de sauvetage fuyant un navire en perdition.

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