Venezuela : le régime fait les yeux doux à Donald Trump

À l’époque où Trump semblait n’avoir guère de chances de remporter les élections présidentielles américaines de novembre dernier, Maduro vitupérait contre lui. Depuis l’élection du milliardaire à la Maison-Blanche, Maduro a radicalement changé.

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Venezuela : le régime fait les yeux doux à Donald Trump

Publié le 10 février 2017
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Par Fabio Rafael Fiallo.

Venezuela : le régime fait les yeux doux à Donald Trump
By: kl801CC BY 2.0

Le président du Venezuela, Nicolas Maduro, n’en est pas à une incohérence près. On l’a souvent vu à la manœuvre. Par exemple à l’égard du président du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy. Avant les élections parlementaires qui se sont déroulées en Espagne en décembre 2015 et à nouveau en juin 2016, alors que personne ne donnait cher pour le maintien de celui-ci aux manettes de l’État espagnol, Maduro n’arrêtait pas de l’insulter, lui prédisant qu’il se transformerait bientôt en « poussière cosmique ». Or, lorsque Rajoy parvint à garder le pouvoir, Maduro changea inopinément de discours, cessa de lui adresser des insultes et souligna son désir de relancer les relations entre les gouvernements des deux pays.

Plus récemment, le président vénézuélien donna une nouvelle preuve de son penchant pour l’incohérence. En janvier 2015, il proposa au président Obama un troc : la libération du dirigeant politique vénézuélien Leopoldo Lopez (en prison dans les geôles du chavisme) en échange de celle du militant pour l’indépendance de Porto Rico, Oscar Lopez (en prison aux États-Unis pour usage de la force et transport d’armes à feu et d’explosifs). Or voilà qu’en janvier 2017, juste avant de quitter le Bureau Ovale, Obama octroie à ce dernier la grâce présidentielle. Que fait alors Maduro ? Remplit-il sa promesse de libérer Leopoldo Lopez ? Que dalle ! Il affirme, éhonté, que sa proposition d’échange était une blague, et rien de plus. Maintenant c’est sur Donald Trump que s’investit l’incohérence de Maduro.

Trump, un « bandit » et un « voleur »

À l’époque où Trump semblait n’avoir guère de chances de remporter les élections présidentielles américaines de novembre dernier, Maduro vitupérait contre lui, le qualifiait de bandit et voleur, condamnait ses prises de positions hostiles aux immigrés et aux importations en provenance du Mexique et ajoutait, en signe de solidarité, que quiconque touchait au Mexique aurait maille à partir avec le Venezuela.

Mais voilà que Trump remporte les élections présidentielles américaines. Depuis lors, Maduro et son équipe s’évertuent à lui faire les yeux doux.

Devenu président des États-Unis, Donald Trump poursuit les menaces qu’il avait proférées contre le Mexique pendant la campagne électorale ; mais maintenant, le régime vénézuélien ne fait rien ni ne dit rien.

Le premier signal de la volte-face du chavisme à l’égard de Donald Trump provint de Diosdado Cabello, vice-président du parti au pouvoir au Venezuela et considéré de facto le numéro deux du régime. En effet, une fois que Trump eût gagné l’élection présidentielle, et avant même son entrée en fonction, Cabello fit cause commune avec lui, prétendant que Trump et le chavisme avaient tous deux subi des attaques des grands médias.

Trump désormais en odeur de sainteté auprès de Maduro

Ce fut ensuite le tour de Maduro de monter au créneau pour s’attirer les bonnes grâces du président des Etats-Unis. Il dénonça la « campagne de haine » dont, selon lui, aurait été victime Donald Trump, et affirma que celui-ci « ne pourra pas être pire qu’Obama » (sous-entendu, pour le chavisme). Puis, entonnant une cantilène qui ne peut que plaire à Trump, il accusa Obama d’avoir dirigé « le gouvernement le plus néfaste » de l’histoire des États-Unis.

À l’origine de ce remarquable tournant du chavisme envers Trump, pourraient se trouver deux considérations différentes :

Primo, le régime vénézuélien ne peut que voir d’un bon œil le refus de Trump de placer la défense des droits de l’homme parmi les priorités de la politique extérieure des États-Unis ; cela amène le pouvoir chaviste à en déduire qu’il pourra continuer à réprimer la population et à incarcérer les membres de l’opposition sans susciter une réaction négative de la nouvelle Administration américaine. Secundo, comme Trump cherche un rapprochement avec Vladimir Poutine, le président Maduro pourrait espérer que le nouveau czar de Russie sera en mesure d’intercéder en faveur du président vénézuélien auprès de Donald Trump.

Ce qui éloigne le Venezuela de la Maison-Blanche

 Bien sûr, s’agissant d’un personnage comme Donald Trump, qui cultive l’imprévisibilité, tous les paris sont ouverts. En même temps, pourtant, plusieurs facteurs militent contre une entente entre le gouvernement vénézuélien et le sulfureux nouveau locataire de la Maison Blanche.

À  commencer par le fait que Vladimir Poutine raisonne en termes de sphères d’influence et n’a guère d’intérêt objectif, à l’heure actuelle, à se quereller avec Trump sur tel ou tel dossier concernant l’Amérique latine.

Un signe avant-coureur de la retenue de Poutine à l’égard de l’Amérique latine a trait à son absence lors des funérailles de Fidel Castro. Plus d’un analyste politique interpréta cette absence comme étant le reflet de l’intention de Poutine de ne pas froisser ses bonnes relations avec Trump, lequel venait d’annoncer une attitude de fermeture envers le castrisme. Et si telle fut la véritable raison pour laquelle Poutine ne se déplaça pas à La Havane pour les obsèques de Castro, pourquoi, alors, voudrait-il jouer ses cartes en faveur de Maduro ?

Il est vrai que le Kremlin a dernièrement publié plusieurs notes de soutien au régime vénézuélien, ainsi qu’une critique contre l’opposition vénézuélienne. Ces notes, cependant, peuvent être perçues comme un geste de remerciement de Poutine pour avoir reçu tout récemment le « Prix Hugo Chavez de la Paix », mais ne préjugent en rien la posture que Poutine assumera auprès de Donald Trump au sujet du Venezuela.

Puis, intercéder pour intercéder, Poutine sera plus enclin à jouer ses cartes auprès de Trump en faveur du régime iranien (allié clé de Poutine au Moyen-Orient) plutôt que pour un régime vénézuélien essoufflé.

Trump bienveillant envers les dictatures

 D’autre part, des membres du Congrès des États-Unis – aussi bien démocrates que républicains – montrent un malaise certain à propos de la bienveillance dont fait preuve le nouveau président américain envers des régimes dictatoriaux ou arbitraires, notamment celui de Vladimir Poutine. Dans ces circonstances, pour Trump il serait politiquement utile et peu risqué, dans le but de dissiper un tel malaise, de s’en prendre à un régime arbitraire qui fait pratiquement l’unanimité contre lui dans le Congrès des États-Unis, comme l’est celui du Président Maduro.

Ajoutons à cela que le nouveau Secrétaire d’État américain, Rex Tillerson, était le PDG de la société pétrolière ExxonMobil quand les avoirs au Venezuela de cette société transnationale furent expropriés par Hugo Chavez. Cela n’a rien de rassurant pour le président vénézuélien.

Dans la déclaration qu’il soumit à la commission du Sénat américain chargée d’évaluer sa candidature au poste de Secrétaire d’État, Tillerson laissa entrevoir l’attitude qu’il compte assumer envers le régime vénézuélien, le qualifiant d’incompétent et dysfonctionnel et soulignant la nécessité de « continuer à dénoncer les pratiques antidémocratiques du gouvernement de Maduro, exiger la libération des prisonniers politiques et appliquer les sanctions contre les responsables de violations des droits de l’homme au Venezuela de même que contre les narcotrafiquants [de ce pays] ».

Tillerson manifesta en outre son intention de rechercher, avec d’autres acteurs internationaux, une « transition négociée » vers la démocratie au Venezuela.

Trump et la lutte anti-drogues

Le chavisme a une raison supplémentaire, et non des moindres, de s’inquiéter de l’assomption de Donald Trump à la présidence des États-Unis. Il s’agit de la priorité qu’accorde le nouveau Secrétaire à la Sécurité Intérieure (Homeland Security), John Kelly, à la lutte contre le narcotrafic. Et il est connu qu’avec l’implication réelle ou supposée d’un groupe de militaires vénézuéliens de haut rang, appelé le Cartel de los Soles (« Cartel des Soleils »), le Venezuela est devenu une des plaques tournantes du trafic de drogue sur le continent américain.

Le fait que l’ex président Obama ait obtenu l’extradition depuis le Mexique de « El Chapo Guzman », grand caïd de la drogue, peut pousser Donald Trump à ne pas être en reste et à tenter d’attraper un gibier de la même envergure. Aussi le Cartel de los Soles pourrait-il devenir une cible privilégiée de l’administration Trump, d’autant que des personnages de haut rang du chavisme feraient déjà l’objet d’investigation des autorités judiciaires américaines dans le cadre de la lutte contre le narcotrafic.

Dans un éventuel bras-de-fer entre le régime vénézuélien et Donald Trump, ce dernier – féru de l’art du marchandage (art of the deal) – pourrait exiger un prix fort : par exemple, des compensations aux entreprises américaines expropriées au Venezuela, extradition aux États-Unis d’un ou plusieurs caïds du Cartel de los Soles, libération des principaux prisonniers politiques (ne serait-ce que pour montrer que lui, Trump, aurait arraché au régime vénézuélien ce qu’Obama ne put obtenir). Il n’est pas sûr que Maduro soit en mesure d’accéder à de telles exigences.

Voilà autant de raisons qui risquent d’amener le président vénézuélien à stopper, désabusé, ses clins d’œil à Donald Trump. Et si tel devait être le cas, il est fort à parier que Maduro reprendrait ses insultes contre le président de « l’Empire » (lisez : les États-Unis) et prétendrait que ses tentatives de rapprochement avec Donald Trump – à l’instar de son offre d’échange de Leopoldo Lopez pour Oscar Lopez Rivera, formulée à Barack Obama – n’étaient rien d’autre qu’une blague de plus.

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