Pensions alimentaires impayées : c’est vous qui allez payer !

Pour lutter contre les impayés de pensions alimentaires, l’État crée une garantie ET un service de recouvrement, parce que les 33 000 employés de la CAF estiment ne pas avoir le temps de s’en occuper.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Pensions alimentaires impayées : c’est vous qui allez payer !

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 22 janvier 2017
- A +

Par Baptiste Créteur

Il y a deux ans, le gouvernement expérimentait l’assurance pension alimentaire gratuite (c’est l’État qui paie), généralisée après un an et demi1. Sans avoir étudié sérieusement la question – les chiffres les plus récents sur les pensions alimentaires impayées datent de 1985 – l’État s’engageait à soutenir les familles ne percevant pas leur pension alimentaire.

En théorie, le recouvrement des pensions alimentaires impayées fait partie des missions de la CAF. Mais en pratique, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige, la CAF ne peut rien faire sans plus de moyens.

Pour Le Monde :

Le recouvrement des pensions alimentaires auprès des mauvais payeurs, afin de les reverser aux bénéficiaires, faisait partie des missions des CAF depuis deux décennies, mais leurs moyens d’action étaient limités.

La CAF occupe 33 000 employés… limités.

Pour pallier l’incompétence de la CAF, la Garantie contre les Impayés de Pension Alimentaire s’imposait. Mais pas seulement. Laurence Rossignol, ministre des Familles, vient de lancer l’ARIPA : l’agence de recouvrement des pensions alimentaires.

Si vous demandez à une personne débrouillarde comment contacter plusieurs dizaines de milliers de personnes chaque mois pour leur rappeler qu’elles doivent s’acquitter de leur pension alimentaire, elle va rapidement mettre au point une mailing list ou un publipostage.

Coût de l’opération : un clic, et le prix du courrier si on est vieux jeu. Si vous demandez la même chose à des parlementaires qui ne savent plus quelle dépense inventer, ils vont mobiliser 300 personnes. Coût de l’opération : les paris sont ouverts. Mais la satisfaction d’avoir créé quelque chose, ça n’a pas de prix.

Le contribuable supportait déjà le coût des indemnités et des 33 000 employés de la CAF. Désormais, ce sera 300 personnes de plus.

Bien sûr, les fins de mois peuvent être difficiles pour un parent qui élève seul ses enfants. Mais la responsabilité en incombe-t-elle au contribuable ?

Est-ce sa faute si cela n’a pas marché entre les parents, si par choix ou par malchance ils se sont séparés ? Est-ce à tous les autres qui connaissent aussi des fins de mois difficiles, y compris à ceux qui choisissent de ne pas faire d’enfants car ils estiment ne pas pouvoir se le permettre, de payer pour ceux qui manquent à leurs obligations2 ?

Et ce n’est pas tout. Le contribuable paie deux fois, pour l’assurance et pour le recouvrement, les deux dimensionnés sur base de chiffres datant de 1985.

Souriez, c’est vous qui payez. Les ministres, eux, se félicitent d’avoir lancé une nouvelle agence pour la famille qui « trouvera sans doute une bonne place dans le bilan social du gouvernement », qui n’a cependant rien fait pour lutter contre les 8 % d’absentéisme à la CAF (deux fois le taux du privé).

Pour aller jusqu’au bout, « leurs moyens d’investigation (auprès des employeurs, de Pôle emploi, des banques du débiteur…) ont été renforcés. » Les plus sensibles à la notion de vie privée seront ravis d’apprendre que l’ARIPA contactera les employeurs des parents séparés :

« Bonjour, c’est au sujet d’une pension alimentaire non versée par votre employé(e)… »

« Le taux de recouvrement est passé de 43 %, fin 2014, à 59 % au premier trimestre 2016. » ! On imagine toute la compassion des employés de la CAF ou de l’ARIPA appelant un parent séparé de ses enfants pour lui enjoindre de payer.

Le Monde nous apprend que même si un(e) autre endosse le maillot de parent,

les femmes qui se remettent en couple pourront faire appel à ses services, ce qui n’était pas le cas auparavant.

Les hommes aussi, on l’espère – à moins qu’il ne s’agisse d’un biais journalistique sans précédent insinuant que les femmes obtiennent le plus souvent la garde des enfants ou que les hommes réussissent mieux financièrement.

Saluons aussi la compassion de la présidente de l’association Abandon de FamilleTolérance zéro (sic) :

Les délais de récupération des pensions sont importants, car il faut d’abord passer par une phase amiable qui peut durer plusieurs mois.

Comment ? On laisse la chance aux parents de dialoguer après une séparation par essence difficile, surtout avec des enfants ?

  1. Garantie contre les Impayés de Pension Alimentaire, à ne pas confondre avec la Garantie Individuelle du Pouvoir d’Achat dont les salariés du public jouissent depuis 2008 : les parlementaires sont moins créatifs avec les acronymes qu’avec la législation.
  2. On peut débattre de ces obligations, mais c’est un autre sujet.
Voir les commentaires (13)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (13)
  • ou comment faire payer à la société les conséquences de la mésentente dans les couples…

  • C’est moins scandaleux qu’il n’y paraît , l’État, nous , payons pour l’insuffisance de l’État, nous……et au train où ça va , on n’a pas fini de payer pour ses carences.

  • Ça se saurait si le mailing permettait de résoudre le problème des mauvais payeurs . Quant au dialogue entre les parents c’est une fumisterie en général c’est plus du temps de gagner pour ne pas payer et justement on s’entend sur la pension quand on se sépare pas après , toutes les séparations ne sont pas difficiles mais au contraires claires et limpides.

    Après d’accord sur le fait que le contribuable va encore passer à la caisse pour des problèmes de couple mais il le fait déjà est pour des choses bien plus graves.

    Et les mauvais payeurs de loyer il suffirait de faire du mailing pour les recouvrer non?

  • Cet article est tout simplement à vomir ! Pourquoi ne pas rendre à César ce qui lui appartient et adresser vos sarcasmes aux véritables responsables de ces situations ubuesques, les parents mauvais payeurs.
    On ne parle pas de problèmes de couples là, mais bel et bien d’abandon de famille, d’abandon d’enfants. Alors il vaut mieux tenter de palier tant bien que mal plutôt que de ne rien faire, non ?

    • Oui, c’est vrai. J’imagine que Juste est volontaire pour aller encaisser l’argent des parents mauvais payeurs ?
      L’article est parfaitement justifié, pourquoi demander à tout le monde de palier à celles et ceux qui ne font pas les bons choix (choix du conjoint(e) ou compagne/compagnon, choix d’enfanter, choix de se séparer). Et pourquoi pas palier aux autres mauvais choix ? Ceux qui n’ont pas choisi la bonne filière d’étude, professionnelle, ceux qui se sont trompés lors de l’achat de leur voiture, de leur lieu de résidence, etc…

      • Parce qu’une pension alimentaire est due par décision de justice, que la justice est un devoir régalien, et que vous ne reprochez pas à la victime d’un vol, d’un viol, d’une escroquerie ou que sais-je encore de se débrouiller toute seule.
        C’est pour cela qu’il y a une police et des tribunaux.

  • Désolé, Baptiste, mais il semble que vous ne maîtrisiez pas du tout le sujet.

    Tout d’abord, les parents qui reçoivent une pension alimentaire -au sens juridique du terme- la reçoive grâce à une décision de justice. La justice étant un des devoirs d’un état régalien, il ne semble pas choquant d’exiger de lui qu’il s’assure de la bonne exécution des décisions de justice.

    Ensuite, il faut aussi savoir que les mauvais payeurs savent souvent se débrouiller pour être difficilement joignables. Vous êtes gentil, avec votre mailing list, mais ces gens ont rarement un email, qu’il peuvent de toute façon de pas lire : aucune loi ne les y oblige. Ces gens ont une adresse physique, souvent, mais elle peut changer, et c’est fréquemment le cas. Comptez sur eux pour n’en informer ni l’administration, ni la justice, ni le parent devant recevoir la pension.
    Mais ce n’est pas tout. Quand, à force de patience on arrive au bout de 18 mois à obtenir un ordre de la justice pour un prélèvement sur salaire, il est aisé -et fréquent- de changer de boulot, pour que le parent lésé doive recommencer le tout depuis le début.
    Et je ne parle même pas des menaces, claires ou latentes, sur le parent ou les enfants, que peut faire subir le parent indélicat.
    Bien sûr, il suffit de recommencer à payer un mois pour que la procédure change de sens : on passe d’un refus de payer à une demande d’aménagement de paiement. Quitte à cesser les paiements deux mois plus tard.
    Et pour couronner le tout, les parents devant payer une pension alimentaire et ne le faisant pas sont souvent eux-mêmes dans des situations économiques assez délicates.

    Tout cela, vous l’ignorez superbement dans votre article.

    Les réponses données par les parlementaires ne sont probablement pas les bonnes, mais vous n’en proposez aucune autre et niez même une part non négligeable du problème.

    J’ai connu ne femme seule avec enfant, vivant avec 800€ par mois, dont les 60€ de pension qu’elle ne recevait que deux ou trois fois par an, le père déménageant, travaillant au noir, etc.

    J’avoue ne pas assez connaître le problème pour proposer des solutions viables et efficaces, mais je sais que le problème existe et qu’il est critique pour de nombreuses personnes.

    • C’est tout à fait louable de tout le temps vouloir réparer les bétises des autres, mais c’est pas non plus interdit de faire appel à leur sens des responsabilités. Si quelqu’un fait le choix personnel de pas ou peu avoir d’enfants quand il peut en avoir, c’est car il estime que sa responsabilité est engagée et qu’il ne pense pas pouvoir assurer. Aussi lui vendre derrière qu’il doit assurer le choix imbécile des autres, c’est gonflé. Bref, atlas shrugged, as always.

      • Là n’est pas la question.Vous faites aussi le choix de ne pas vous faire taper par votre époux, j’imagine. Mais d’autres se font taper. Ont-ils droit à demander justice ou Atlas Shrugged ?

  • Je ne dois pas avoir eu de chance, mais ce que j’ai vécu est très différent de ce que je lis partout. Un exemple parmi d’autres: un jour mon ex me dis être en situation financière difficile. Elle me demande (par écrit) de bien vouloir lui avancer la pension alimentaire sur un an. Je le fais. Un peu plus de six mois plus tard, je me trouve convoqué (et plus tard condamné) pour abandon de famille. Le juge m’explique que même avec une preuve écrite de leur destination, ces sommes étaient requalifiées en libéralité, et que par conséquent j’étais en défaut. Mais comme elle était convaincue de ma bonne foi, elle ne me condamnait qu’à une amende symbolique avec sursis pour la période dépassant les 6 mois de retard…
    Dans toutes ces affaires, il y a d’un côté la mauvaise foi éventuelle du débiteur, mais également un système inique dont les pratiques ne se retrouvent nulle part. Elles sont si systématiques et contre-intuitives que si vous êtes de bonne foi (et donc confiant dans un droit légitime) et que vous ne payez pas un avocat spécialisé, vous n’avez aucune chance.

  • Quel va être le coût de fonctionnement de ce nouvel organisme (Président, directeurs, secrétaires, agents , frais . . . à vie, avec retraite anticipée et autres avantages du genre fonction publique sans en porter les titres pour brouiller les pistes?)

  • C est vraiment grave de publier un article comme ça ! Vous oubliez juste une chose : c est la justice française qui rédige les ordonnances et fixe le montant des pensions alimentaires. Si le debiteur ne paye pas c est bien a l Etat français de faire appliquer coute que coute la décision. Le recouvement des pensions est une priorité si on veut lutter contre la précarité et la pauvreté qui touche les enfants dans notre pays. Felicitons nous de cette avancée.

  • DoM P, je comprends votre raisonnement, mais vos arguments laissent à désirer selon moi. Il existe des situations que vos arguments ignorent totalement – et je connais par avance la réponse (purement pragmatique) que vous me ferez, mais passons. En effet, il existe des gens qui se font taper dessus, ne portent jamais plainte pour x raisons qui les regardent, malgré le fait que leur situation soit connue des services de police qui effectuent une main courante après chaque intervention de ce genre. C’est manifestement le cas des violences conjugales, souvent dénoncées par le voisinage et non par les victimes elles-mêmes. Sans plainte, pas de jugement. En outre, on entend parler de plus en plus de cas de personnes ultra toxiques au sein du couple qui, « contre toute attente », bénéficient de jugement en leur faveur. Enfin, le harcèlement moral étant extrêmement difficile à prouver, il fait le bonheur de personnalités perverses. Pour toutes ces situations profondément injustes (et certainement non désirées), il n’existe pas de solution à proprement parler, c-a-d. pas de décision de justice favorable à la reconstruction/survie de ces personnes. Evidemment ces situations sont accompagnées d’une pauvreté certaine, et de conditions de vie difficiles voire chaotiques. Il n’existe aucun dispositif pour aider financièrement (par un jugement éclairé et non factuel – je sais c’est compliqué mais pas impossible) et a fortiori psychologiquement ces personnes. Un jugement en leur faveur serait déjà une aide puisqu’il reconnaîtrait leur situation. Alors, expliquez-moi quels arguments décents vous pouvez présenter à ce genre de personne pour qu’elles soient solidaires de situations qui leur sont familières, tandis qu’elles ne reçoivent pas la même aide étatique ? C’est quand même la porte ouverte à toutes les fenêtres cette histoire de solidarité pour les pensions alimentaires non payées. Je me suis retrouvée dans chacune des situations citées ci-dessus, et j’ai tout perdu, au sens propre comme au sens figuré, mais sans moufter parce qu’on me l’a interdit, en quelque sorte. J’aimerais avoir des enfants, mais je n’en ai plus les moyens. Je voudrais adopter, mais comme je peux en avoir naturellement, ma candidature est d’office irrecevable, si je veux congeler mes ovocytes, je dois me rendre en Espagne… Je fais face aux impôts seule (je suis propriétaire – pour combien de temps encore ?), à tout un tas de taxes préjudiciables à mon activité d’entrepreneur (notamment le RSI, géré par une boîte privée qui fait ce qu’elle veut, comme elle veut et quand elle veut), je cumule trois boulots pour pouvoir tout honorer… Et je ne m’offre que très rarement les services d’un bon avocat ou encore des vacances ! Alors dites-moi DoM P, vous croyez que j’ai envie d’être solidaire de gens que je qualifie aujourd’hui, après tout ce que j’ai vécu, d’irresponsables, d’immatures et d’égoïstes ? Je n’y peux rien moi, si les gens refusent de se servir de leur cerveau en imposant aux autres les conséquences de leur bêtise ! C’est exactement ce que le système m’a fait comprendre, alors, pourquoi, quand ça l’arrange, ce système vous invite vivement à faire preuve de solidarité alors que vous n’en avez jamais bénéficié ? Parce que « c’est comme ça ». Et tout le monde se contente de répéter ces quelques mots, sans prendre le temps de bien tout poser. Des enfants, je n’en aurai jamais, malheureusement, et je n’ai par conséquent pas envie d’être solidaire de gens qui n’ont pas de respect pour des gens comme moi – ni pour les enfants eux-mêmes. D’ailleurs, j’en viens à penser que l’on devrait contrôler les naissances, et ne permettre qu’à certains de procréer, n’en déplaise à mes concitoyens se prétendant bien-pensants.

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Par Pierre-Guy Veer, depuis le Canada.

La France, pays qui taxe largement au-dessus de la moyenne de la zone euro, vient de trouver une autre idée pour dépenser l’argent des autres. La députée Nathalie Elimas remettra sous peu un rapport contenant une quarantaine de propositions pour moderniser la politique familiale actuelle. Selon son propre aveu, ces politiques plus généreuses (congé de paternité étendu, allocations familiales dès le premier enfant) visent principalement à augmenter le pouvoir d’achat des familles.

Mais si te... Poursuivre la lecture

Voile islamique en Iran (Crédits Asaf Braverman, licence Creative Commons)
0
Sauvegarder cet article

Article paru initialement en 2016

Par H16.

Comme le faisait fort justement remarquer Archimède, tout corps plongé dans un liquide en ressort mouillé. Ce qui est vrai pour un physicien grec l'est tout autant pour des maillots de bain, y compris pour les plus larges d'entre eux, les burkinis. Il n'en fallait pas beaucoup plus pour déclencher une belle polémique humide à la française.

Tout indiquait que ce qui n'aurait pas même fait l'objet d'une ligne dans un pays dignement policé allait en France immédiatement enfler hors ... Poursuivre la lecture

Et c'est encore un nouveau drame qui frappe l'humanité et qui touche les Français, notamment les élu(e)s dans leur chair : on continue de refouler des femmes de certains lieux.

Dissipons un malentendu tout de suite : je ne parle pas ici de la mésaventure de Cécile Duflot qui n'est pas parvenue à rejoindre la Syrie et a été refoulée à la frontière turque. D'une part, interdire l'accès de civils à un territoire en guerre n'est pas absurde même si on peut regretter qu'une Duflot trottinant dans les riantes agglomérations syriennes aurait ... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles