Le marché, cette vraie démocratie

Chaque consommateur “vote” en permanence à travers l’achat ou le refus d’acheter. Riche et pauvre ont tous deux leur mot sur ce qui doit être produit, dans quelles quantités et de quelles qualités.

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Le marché, cette vraie démocratie

Publié le 12 janvier 2017
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Par Matthew McCaffrey.

Une vraie démocratie : le marché
By: Dan MoyleCC BY 2.0

La désillusion du processus démocratique est un thème récurrent dans la politique actuelle. La plainte cachée derrière cette tendance est l’idée que “nos” institutions politiques ont été détournées par de puissants intérêts qui dénient aux électeurs un apport significatif aux processus de décision. Aussi, on s’inquiète que les choix démocratiques protègent peu les droits des minorités électorales.

Ces critiques ont des parts de vérité, bien qu’elles soient souvent utilisées par des partis perdants pour justifier des résultats qu’ils n’approuvent pas. Mais il est vrai que les peuples sont de plus en plus fâchés avec un processus qui les exclut à chaque fois qu’ils sont comptés parmi les 49% de malchanceux.

Ah ! s’il existait un système démocratique de prise de décision dans lequel tous les membres de la société auraient le droit à la parole — un système qui ne peut être contrôlé par les riches et les puissants !

Ah ! s’il y avait un système dans lequel tous les gens pouvaient choisir de distribuer leurs richesses à ceux qu’ils pensent être les meilleurs, en vue d’améliorer leurs vies et celles de leurs semblables.

Le marché, la démocratie sans les inconvénients

Un tel système existe : le marché. Le marché libre est une démocratie qui offre tous les bénéfices supposément trouvés dans les systèmes politiques démocratiques — sans leurs inconvénients.

L’analogie entre marchés et démocratie a une longue histoire dans l’école d’économie autrichienne. Par exemple, l’économiste américain Frank Fetter défendait que le marché est “une démocratie où chaque centime donne droit à un vote” (Fetter, 1905, p. 394). Quand les marchés sont libres des privilèges monopolistiques, les valeurs des consommateurs déterminent le déroulement de la production.

« Il y a sans aucun doute une grande force économique qu’une opinion publique éclairée, même sans association formelle, peut en grande partie mettre en marche. Chaque individu peut former une association de consommateurs… Il a un dollar ; ira-t-il au théâtre ou acheter dix glaces ? Il décide d’acheter un bouquin et plus de papiers seront fabriqués, plus d’imprimeries tourneront… Chaque achat a des conséquences, de grandes portées… Vous ne pouvez pas échapper à ce choix même en enterrant votre monnaie, car cela représente une demande en or ou un cadeau à l’émetteur de monnaie fiduciaire. »

(Fetter, 1905, pp. 394–395)

Chaque consommateur “vote” en permanence à travers l’achat ou le refus d’acheter. Riche et pauvre ont tous deux leur mot sur ce qui doit être produit, dans quelles quantités et de quelles qualités.

Le consommateur souverain

Ludwig Von Mises adopte l’analogie de Fetter dans son œuvre, mais met en avant qu’il est trompeur de penser que les marchés essayent d’imiter les méthodes démocratiques. La relation est plutôt en sens inverse :

« Il serait plus exact de dire qu’une constitution démocratique est une combinaison qui cherche à donner au citoyen, dans la conduite du gouvernement, la même souveraineté que l’économie de marché leur donne en leur qualité de consommateurs. Néanmoins, la comparaison est imparfaite. En démocratie politique, seuls les votes émis en faveur du candidat ou du programme qui a obtenu la majorité ont une influence sur le cours des événements politiques. Les votes de la minorité n’influent pas directement sur les politiques suivies. Tandis que sur le marché aucun vote n’est émis en vain. Chaque franc dépensé a le pouvoir d’agir sur les processus de production. »

Mises, 1949, chapitre 15 de L’Action humaine

Si les entrepreneurs veulent survivre sur le marché, ils n’ont pas d’autre choix que de fournir de meilleurs biens et services à de meilleurs prix. Ils ne peuvent pas se permettre d’ignorer les opinions de même 5% des électeurs, encore moins celles des 49%. S’ils le font, leurs clientèles vont vite trouver d’autres candidats et partis à fréquenter. Selon les propres mots de Mises, “les entrepreneurs sont virtuellement les mandataires ou les fiduciaires des consommateurs, nommés de façon révocable dans une élection répétée au quotidien”. Plutôt que de céder aux intérêts spécifiques de quelques-uns, les entrepreneurs répondent aux besoins des individus et des marchés de niche, en plus de ceux de la production de masse.

Fetter et Mises se sont rendus compte que les marchés économiques offrent un type de prise de décision “démocratique” dans lequel les valeurs concurrentes de nombreux individus sont réconciliées. Cette méthode compétitive fait pâle figure comparée à l’organisation planifiée d’une économie socialiste.

« Des concours d’éloquence et des compétitions littéraires se déroulent grâce à un ensemble de juges aux opinions bien-fondées qui attribuent la récompense… Pourtant il y a aussi des concours tranchés différemment. Si quelqu’un s’affiche comme orateur et fait payer l’entrée de sa conférence cinquante centimes, toute personne qui viendra l’écouter votera qu’il est un orateur, toute personne à l’écart votera qu’il n’a pas cette qualité. La première forme de jugement est autoritaire, la seconde compétitive. La méthode de distribution par l’autorité repose sur le principe qu’un individu (ou un groupe d’individus) est seul juge des mérites de l’autre et décrète en conséquence ce qui lui est dû, pas ce que lui individuellement est prêt à payer. […] L’essence du socialisme est de généraliser ce type de méthodes. »

(Fetter, 1905, pp. 407–408)

La démocratie de libre-marché est précieuse précisément parce qu’elle place le pouvoir dans les mains de ces entrepreneurs qui montrent leur capacité d’utiliser ce pouvoir pour le bénéfice des masses. Ce mandat peut être révoqué à tout moment si les consommateurs n’ont plus confiance ;  ainsi les entrepreneurs se battent constamment pour essayer de conserver cette confiance et ce mandat. Cependant, ce que Fetter appelle la méthode autoritaire ignore ce mandat, le remplaçant par des décisions arbitraires d’organismes de réglementations et des intérêts privés qu’ils soutiennent. Que ce soit démocratique ou socialiste, les organisations politiques ne peuvent survivre aux standards avancés par les marchés compétitifs.

Un bulletin de vote ne pourra jamais remplacer un simple ticket de caisse.

Traduction Antoine Dornstetter pour Contrepoints de The Market is True Democracy.

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  • La fonction régalienne et QUE la fonction régalienne suffit en ce qui concerne l’état

  • La démocratie de libre-marché est précieuse parce que c’est la seule à être réellement fonctionnelle, contrairement à la parodie de démocratie fonctionnant à base de partis et de médias corrompus et d’élections et de sondages truqués.

    A titre d’illustration, il convient de ne jamais oublier que le peuple russe, alors qu’il subissait le crime soviétique, a été le peuple qui a le plus voté de toute l’histoire humaine. Pour le résultat qu’on connaît…

    Au-delà des fonctions régaliennes, chaque fois que l’Etat remplace le marché libre dans un domaine ou un autre, la démocratie recule tandis que l’arbitraire progresse inexorablement.

    • L’état n’a non seulement aucun droit de se mêler du marché mais ce faisant il commettrait un crime contre la liberté de ses citoyens d’autant plus grave qu’il dispose de pouvoirs exorbitants, il se doit conséquemment ne jamais se départir de son rôle arbitral de justice assorti de force armée si besoin était..

      UN ARBITRE VIOLE SON STATUT LORSQU’IL SE MET A JOUER LA PARTIE, SÉPARATION DES POUVOIRS OBLIGE.

    • La démocratie des 50% n’est pas une démocratie. C’est juste une dictature de 51% sur les 49 autres. Cela n’a aucun sens, c’est immoral et sous optimal.

      La vraie démocratie serait un système ou pour qu’une loi soit applicable au peuple dans son ensemble, le peuple dans son ensemble vote pour elle. Ou tout au moins une énorme majorité (par exemple 90%). Seules les lois de base seraient votées comme l’interdiction de la violence, le droit du contrat, le régalien. etc … Un monde libéral en somme…

      La démocratie actuelle ne fonctionne pas car 51% votent pour un représentant qui va créer des lois qui ne représentent même plus ces 51%.

      Toutes les lois votées qui n’ont l’adhésion que de moins de 90% du peuple ne sont que de mauvaises lois, du vol pur et simple, maquillé d’une fausse morale.

      • D’accord avec vous. Toutefois,
        – les 51% ne sont jamais atteints en pratique du fait de l’abstention. Donc, la prétendue majorité de 51% n’est jamais qu’une minorité en réalité.
        – 90% est aussi injuste pour les 10% restants que les 51% pour les 49% restants. Le nombre ne change rien à l’affaire.

        Au-delà d’une démocratie qui donne manifestement le pouvoir à une minorité et non à la majorité, le problème de la démocratie élective est de demander leur avis à des gens sur des sujets qui ne les regardent pas et pour lesquels, par définition, ils sont parfaitement incompétents, tout autant d’ailleurs que les politiciens censés les représenter.

        Notamment, lorsque des gens votent pour des impôts qu’ils ne payent pas, forcément ça se termine mal. Ce type de vote a autant de pertinence que demander à des Brésiliens jamais sortis de leur pays de donner leur avis « éclairé » sur la gestion de la ville de Hong-Kong par exemple. C’est tout bonnement ridicule.

        • Je partage votre constat.
          Mais a part la dictature éclairée libérale, il ne reste plus grand chose..
          La « pirouette » de demander 90% des voix pour voter une loi, permet d’arriver a la même finalité sans en arriver a la dictature éclairée.
          Sinon, améliorer la constitution pour maximiser la garantie totale de la propriété privée et verrouiller le système au maximal pour éviter qu’une majorité de gens puissent spolier les autres via les lois.

          • Aucun élu ne peut être considéré comme absolument fiable y compris et surtout dans le futur (y compris proche) Il est nécessaire d’envisager un contrôle (aide, conseil, assistance) d’iceux-là par exemple par un collège de retraités en bonne santé issus de la variété de toute la société civile de leurs circonscription s respectives (des « questeurs ») désignés par le sort (comme en procès d’assise) au nombre d’une vingtaine par député (par ex.), en alternance mensuelle en considérant une division par 6 de leur nombre (comme pour tous les élus de quelque sorte qu’ils soient, en France).. (résumé)

          • Ce que vous désignez sous le terme de dictature libérale n’en est pas une. Votre terminologie me semble bien trop pessimiste. Puis-je vous conseiller de relire la DDHC, cette merveille d’intelligence et de concision, qui nous éclaire sur les limites nécessaires et suffisantes du champ de la politique en son article 2 ?

            Aucune dictature là-dedans. Juste la raison et le bon sens. Ce n’est pas le marché qui a besoin de réglementation, c’est au contraire la politique qui doit être fermement et définitivement réglementée, limitée au strict domaine régalien, pour que surtout elle ne s’en échappe jamais, provoquant alors le malheur de l’immense majorité au profit d’une minorité de parasites cyniques.

            Le marché étant la forme la plus aboutie de la démocratie, tout simplement indépassable par aucun autre système, et certainement pas par un système électif si aisément corruptible, toute atteinte au marché est une dictature, la dictature de l’arbitraire des réglementations forcément illégitimes et immorales. Tocqueville avait raison de s’inquiéter de la pseudo-démocratie en roue libre, parce qu’il avait bien perçu, sans toutefois l’expliquer clairement, qu’il ne s’agissait pas du tout de la véritable démocratie. Enfin, ce n’est pas un hasard si les dictatures de l’ancien Bloc de l’Est étaient toutes affublées du qualificatif « démocratique ». Il est des signes qui ne trompent pas.

  • La liberté de l’acheteur finit où commence l’influence des publicitaires de toutes espèces . La liberté de la sardine devant une flottille de requins .
    Certes il existe des associations de consommateurs , mais qui lit leurs test ? Les plus éclairés de nos concitoyens ,la grande masse subit le lavage de cerveau .

    • Je me demande si vous percevez l’incroyable prétention de votre propos vis-à-vis de vos contemporains. Pourtant, vous faites partie de cette population que vous vilipendez pour son manque de jugement. De fait, par quel miracle seriez-vous plus aptes qu’eux à percevoir d’éventuels requins cachés derrière les pauvres petites sardines ? Mystère…

    • Vous exagérez, comme les gens de gauche, l’influence de la publicité. Si vous vous faites avoir une fois en achetant un produit car influencé par une pub, vous aurez compris et ne l’achèterez plus. Donc le marché est toujours le maître! Mais peu de gens se laisse influencer par la publicité.

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