Écotaxe, le monstre qui n’en finit pas de mourir

Au frigo depuis plusieurs années, l’Écotaxe semble enterrée par les députés. La facture finale n'en finit pas moins de gonfler à plus d'un milliard d'euros.
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Portique écotaxe sur une autoroute française (Crédits : Murielle29, licence Creative Commons)

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Écotaxe, le monstre qui n’en finit pas de mourir

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 9 décembre 2016
- A +

D’un quinquennat à l’autre, les présidents français laissent traîner leurs crottes, et charge à leur successeur de rarement les nettoyer ou plus souvent les camoufler ou les refiler à celui qui viendra leur prendre la place. C’est ainsi que Sarkozy avait eu la délicate attention d’en laisser une belle pour Hollande avec l’Écotaxe, qui aura hanté son quinquennat jusqu’au bout.

Et l’Écotaxe, c’est vraiment tout un poème odorant.

On se souvient qu’avec l’approche de son entrée en application fin 2013, la grogne était subitement montée en France et particulièrement en Bretagne où beaucoup d’exploitants et de camionneurs, enfilant un bonnet rouge, avaient décidé de retourner un ou deux portiques afin de ne laisser aucun doute sur le fait que cette taxe, qui devait les toucher en priorité (avant, soyez en sûrs, de choper aussi les automobilistes lambda dans son escarcelle), les condamnait à la faillite.

ecomouv

Comme à son habitude, la presse, pas du tout partisane, avait essentiellement retracé cette colère en faisant passer les grogneurs pour des poujadistes de droite, étant entendu qu’aucune taxe en France ne pouvait déclencher un mouvement réellement populaire, normalement réservé au Camp du Bien.

En mars 2014, je notais que la mise sous cloche de la taxe en question ne résolvait guère le problème et promettait à terme une facture salée, d’une façon ou d’une autre, que le contribuable allait devoir payer. L’incurie d’un gouvernement ne dédouanait pas le suivant de gérer la patate chaude.

Pendant ce temps, ne se laissant pas abattre, la mairie de Paris décidait en septembre 2014 de passer en loucedé quelques petits décrets, histoire de taxer le trafic de camions dans son giron, histoire de trouver quelque argent pour tenter de boucher le trou de trésorerie parisien, profond de plusieurs centaines de millions d’euros, la gestion socialiste aboutissant toujours – pas de bol ? – à des déficits mémorables.

Le mois suivant, Ségolène Royal, toujours au taquet quand il s’agit de débiter de l’ânerie à rythme industriel, tentait de réactiver la taxe en question. Malgré les explications emberlificotées de la ministre écolocomique, rien n’y fit : le vif agacement des transporteurs, et le fait qu’ils menacèrent immédiatement de bloquer le pays doucha quelque peu les espoirs de la Dame aux Caméras.

En août 2015, je continuais à m’interroger sur le retour (ou non) de la taxe, alors que le montant de la facture, que je pressentais salée en mars 2014, devenait plus précis puisque les estimations permettaient de comparer raisonnablement le four de l’Écotaxe avec le scandale du Crédit Lyonnais à cause duquel les orifices des contribuables n’ont pas encore fini de cicatriser.

Tout se déroule donc comme prévu : une société capitaliste a réussi, par connivence, lobbyisme et petites tractations en coulisses, à s’acoquiner avec l’État pour bénéficier d’une rente pépère, à la mesure des radars automatiques. Miam. Sauf qu’une partie du peuple excédé n’a rien voulu entendre et refuse l’instauration du pizzo routier. Zut, flûte et caca boudin, le « business model » de l’entreprise s’effondre. Contractuellement, cependant, l’État – pourtant impécunieux – doit sortir en larguant moult indemnités. Fin 2015, tout le monde se regarde encore en chiens de faïence. Hollande, homme fort de décisions fermes, se tâte.

hollande ceux qui attendent plus rien

Nous sommes en décembre 2016, il est plus que temps de faire un petit point sur la situation.

Sur le plan légal en effet, elle a quelque peu évolué. Profitant sans doute de la poigne de chèvre frais du président Hollande, l’Assemblée a profité d’un mois de novembre un peu plus calme (la presse étant entièrement perdue dans ses pleurs anti-Trump puis ses jérémiades anti-Fillon) pour faire supprimer la taxe urticante par voie d’amendement : les députés ont voté dans la nuit du 17 au 18 novembre cet amendement au projet de loi de finances 2017 qui supprime définitivement cette idée aussi sotte que grenue de taxer les camions sous prétexte d’écologie.

Mais patatras, quelques jours plus tard, le Conseil d’État décide de mettre son grain de sel. Saisi par l’une de ces frétillantes associations lucratives sans but qui entend faire respecter l’environnement surtout lorsqu’il s’agit de prendre l’argent de la poche des autres, le Conseil a en effet estimé que le refus de l’exécutif d’appliquer l’écotaxe est « illégal ».

gifa oh noes facepalm power rangers

Le lecteur goguenard pourra trouver que ce feuilleton devient de plus en plus rigolo à mesure que ce quinquennat s’enfonce dans le n’importe quoi savamment distillé. Goguenardise qui tiendra jusqu’au moment de payer cette taxe, chose qui pourrait bien se produire à en juger l’activisme de certains à vouloir, à tout prix, tabasser l’automobiliste sillonnant les routes de France (parce que le tourisme – au-delà de rassurer sur le régime démocratique – et le transport de marchandises n’ont aucun intérêt dans ce pays, mes braves amis). Si, malgré tout, la taxe est belle est bien enterrée, le petit frisson de LOL qui parcourait le lecteur s’éteindra malgré tout puisque la facture revient encore au galop.

Avec la résiliation du contrat entre Ecomouv’ et le gouvernement, cette facture se chiffrait déjà à 800 millions d’euros (ce qui commence à faire beaucoup d’argent, mine de rien). Rien n’interdit cependant de viser toujours plus haut : on apprend en effet que la facture transmise aux parlementaires est maintenant de 967,6 millions d’euros. Alors que Ségolène Royal, probablement encore mal remise des effluves de rhum, évoquait les bienfaits du castrisme cubain, son entourage évoque avec la même lucidité et la même précision que sa patronne un surcoût lié, par exemple, au remboursement de la TVA (et 167 millions d’euros de remboursement de TVA sur un service qui n’a pas été mis en place, mazette, c’est du lourd).

La Cour des comptes, loin des vapeurs alcooliques, pointe quant à elle l’indemnisation des banques, qui étaient intervenues dans le PPP (partenariat public/privé, ce montage juridico-financier qui termine régulièrement en feu d’artifice pour le contribuable).

On n’en a donc pas fini avec l’Écotaxe, monstruosité pas encore froide. Pire : blessée par tous ces rebondissements, elle saigne abondamment et attire donc tous les charognards qui sentent l’odeur du buffet froid que leur offre un gouvernement largement dépassé par tout ce qui lui arrive, tout le temps, sans arrêt : en effet, après les banques, les sociétés de télépéages qui fournissaient les boîtiers aux routiers se sont mises sur les rangs et demandent à leur tour à être remboursées ce qui, selon un rapport du député PS Olivier Faure, ferait gonfler encore la facture à plus de 1,2 milliard d’euros.

La comparaison avec le scandale du Crédit Lyonnais, déjà valide en août 2015, continue de gagner en solidité.

Pas de doute, le monstre Écotaxe est loin d’être totalement mort.

portique multitaxe Bercy
—-
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  • Ah ah. Ecotaxe ❓ Quoi, on n’a pas encore inventé le mot Bobotaxe ❓
    Ils ne perdent rien pour attendre :mrgreen:

  • on finira malheureusement par la payer cette taxe comme d’autres à venir: la dernière en date exprimé par le fabuleux candidat socialiste benoit hamon, sera de taxer les robots qui sont en quelque sorte pour lui, des travailleurs au noir !…

    • L’industrie a perdu 1000000 d’emplois. La RobotTaxe sera à coup sûr le coup de grâce pour l’industrie française.
      Du coup il demandera, exigera que l’Allemagne fasse la même ânerie.
      On a pas fini de ricaner.

  • Comment font les Suisses?
    Tu abimes tu salis, tu paies. Point barre.
    Si, non contents d’avoir désindustrialisé la France au profit des PECO, on doit raquer pour réparer les routes qui leur permettent de faire fortune encore à nos dépens en important ce qu’on leur a appris à fabriquer, on marche sur la tête!

  • BOF, une taxe de perdue dix taxes ils trouveront pour la remplacer….et une ecotaxe sur les avions et les drones avec de super portiques accrochés dans le ciel…..

  • Quand mon voisin de table au restaurant mange une entrecôte, ce n’est pas moi qui vais payer la note. Il en est de même pour toute autre produit transporté par la route. Chaque personne qui achète une denrée ou autre chose, transportée par route ou rail doit payer le juste prix du transport et non pas le faire payer par la minorité qui paye des impôts. Chaque véhicule qui parcoure le moindre mètre sur une route devrait en acquitter le coût et non pas le faire payer par l’argent public, en clair on paye ce qu’on utilise, et tout le monde !!!.
    Il en est de même pour le stationnement sur la voie publique. Les impôts locaux servent à construire des places de parking en bord de rue, utilisées gratuitement par les riverains. Les utilisateurs de voitures doivent en payer le coût et ne pas le faire payer par les autres, qui eux, n’ont pas forcement de voiture.. S’ils n’ont pas les moyens d’assumer toutes les dépenses liées à leur véhicules, qu’ils prennent les transport en commun et en payant leur billet.

    • Rien n’empêcherait un gouvernement d’expliquer, on va taxer machin chouette pour payer la route et la règlementation antipollution car c’est plus juste, et pour le même montant on va réduire la TVA que chacun payait avant de manière indifférenciée. Clair, net, efficace. Mais cela n’arrive pas. La raison se trouve dans le préfixe « éco ». Eco c’est toujours une taxe de dissuasion. L’idée consiste à faire payer le dîneur et le spectateur dans votre exemple pour que tous deux renoncent finalement à l’idée d’aller au restaurant, et soient forcés de trouver une alternative … ( ou une alternative au transport routier polluant ). C’est une loi « totalitaire », au sens premier.

    • Fail ! Ceux qui utilisent les voies de communication les paient 3 fois à cause des taxes :

      – Coût annuel de la construction et de l’entretien des routes et des infrastructures : 15 milliards
      – Recette des taxes sur les carburants, sur les automobiles (TVA + CG + Assurances) : 48 milliards

      Il n’est donc pas nécessaire de mettre une taxe supplémentaire, vous avez été intoxiqué.

    • S’ils n’ont pas les moyens d’assumer toutes les dépenses liées à leur véhicules, qu’ils prennent les transport en commun et en payant leur billet. »

      En région parisienne le prix du ticket ne représente que 29.9% du coût réel (environ 45% en province)

      http://padambus.com/wp-content/uploads/2016/02/d%C3%A9tail_recettes_d%C3%A9penses_STIF.jpg

      De ces 2 commentaires vous pouvez déduire que l’automobiliste paie 3 fois le coût réel et l’utilisateur des transports en commun 1/3du coût réel…et donc l’un paie 9 fois plus que l’autre… et vous voulez le taxer un peu plus ?

      Effectivement, ne plus payer pour les autres !

    • Cela peut devenir une usine à gaz de vouloir faire payer chacun au plus près de sa consommation et besoin. Celui qui n’a pas de voiture utilise les trottoirs, alors pourquoi ne pas lui faire payer une taxe sur le nombre de pas. Une République c’est faire un choix équilibré entre des besoins divergents et à négociés. Donc restons en à piétons et trottoirs gratuits, et à automobilistes routes et parkings gratuits quand cela reste possible. Cela me paraît plus simple.

    • S’ils n’ont pas les moyens d’assumer toutes les dépenses liées à leur véhicules, qu’ils prennent les transport en commun et en payant leur billet.

      Dans la même logique, que ceux qui prennent les transport en commun payent leur billet en intégralité et non 40% ❗
      Ce n’est pas à moi, piéton, de financer ce genre de luxe.

  • Si vous pensez que les portiques qui restent sont totalement inactifs, vous faites preuve d’une immense candeur …

  • Les commentaires sont fermés.

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