Les raisons du succès britannique aux JO

Le sport britannique est son apogée. En remportant 67 médailles aux Jeux de Rio, les athlètes britanniques se sont hissés sur la deuxième marche du podium olympique juste derrière les USA. Décryptage d’un succès lié à 20 années de travail.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Les raisons du succès britannique aux JO

Publié le 6 septembre 2016
- A +

Par Imad Châtelain.

La raison du succès britannique aux JO
By: David JonesCC BY 2.0

Atlanta 1996 : les athlètes britanniques viennent de conclure les Jeux sur leur pire bilan de l’histoire moderne. Seulement 15 médailles, une toute petite en or et une 36e place au classement olympique derrière la Belgique et le Kazakhstan entre autres. Suite à ce fiasco, le gouvernement britannique entreprend de réformer en profondeur le sport de haut niveau et crée pour cela, en 1997, un organisme indépendant (UK Sport), chargé de superviser cette refonte.

De l’argent, beaucoup d’argent

Dans la foulée de sa création, UK Sport se voit octroyer par décret royal le droit de puiser dans les immenses fonds de la loterie nationale afin d’investir dans de nombreux programmes. Ainsi, les subventions publiques accordées aux sports de compétition au Royaume-Uni aux alentours de 6 millions d’euros en 1996 se situent désormais à 404 millions d’euros pour la période 2013-2017.

Le cyclisme sur piste illustre le mieux la remontée du sport britannique. Les 22 meilleurs « pistards » du pays s’entraînent tout au long de l’année dans le nec plus ultra des vélodromes à Manchester et ont bénéficié d’un budget de 37 millions d’euros sur 4 ans en prévision des Jeux de Rio ! L’afflux massif d’argent a permis aux Britanniques de recruter les meilleurs spécialistes mondiaux, comme l’Allemand Jean Van Eijden, ancien champion olympique reconverti comme entraîneur, ou encore de faire appel au meilleur scientifique dans le domaine des sports de vitesse, l’Australien Scott Gardner. Ainsi, d’une unique médaille de bronze en cyclisme sur piste aux JO d’Atlanta en 1996, la « Great Britain Cycling Team » est passée à 11 médailles à Rio dont 6 en or. Mieux encore : la Grande-Bretagne a maintenant dépassé la France en tant que nation la plus médaillée de tous les temps en cyclisme sur piste.

Une professionnalisation accrue

Si l’argent a permis de rattraper un certain retard technologique dans les performances sportives ainsi qu’au niveau des infrastructures, il a surtout permis d’étendre la professionnalisation de tous les athlètes de haut niveau dans le pays. En effet, en plus des subventions accordées aux instances dirigeantes, un des éléments fondamentaux de la nouvelle stratégie consiste à rémunérer directement les athlètes britanniques qui figurent en bonne position pour remporter une médaille olympique ou la conserver.

Un médaillé olympique, paralympique ou mondial reçoit ainsi 33 000 euros annuellement et un jeune talent aspirant à être médaillé dans un futur proche peut toucher jusqu’à 18 000 euros. Les compétiteurs britanniques peuvent donc se consacrer exclusivement à la pratique de leur sport. À titre de comparaison, 4 sportifs français de haut niveau sur 10 gagnent moins de 500 euros par mois, vivent sous le seuil de pauvreté et doivent très souvent compléter leurs revenus en travaillant parallèlement.

Des choix drastiques

Toutefois, ces aides ne viennent pas sans contrepartie et UK Sport, pour assurer un niveau de réussite en constance augmentation, a mis au point un système implacable de bonus-malus. En effet, le financement des fédérations est étroitement lié aux résultats des athlètes engagés dans les compétitions olympiques. Une discipline qui ne rapporterait pas son quota de médailles peut voir son budget revu à la baisse ou tout simplement annulé. De même qu’une discipline raflant les médailles se verra octroyer des crédits de fonctionnement supplémentaires en vue des prochains Jeux. Un système qui laisse peu de place au sentiment.

Des sports qui, bien qu’appréciés du public Outre-Manche comme la lutte, le tennis de table ou encore le volley-ball ont déçu au Jeux de Londres et ont dû composer avec des moyens plus limités à Rio. Paradoxalement, Max Whitlock, double médaillé d’or en gymnastique au sol et au cheval d’arçons à Rio, n’a pas seulement mis fin à 116 années de disette olympique pour la Grande-Bretagne dans les épreuves de gymnastique, il a presque tout seul dégagé l’horizon budgétaire de la fédération pour la prochaine décennie.

De nombreux experts estiment que c’est cette stratégie impitoyable qui a permis la remontée spectaculaire de la Grande-Bretagne du 36e rang mondial à Atlanta en 1996 à la seconde place du podium à Rio en 2016. « C’est une approche très rationnelle, froide… mais efficace. »

Le nombre de médailles a augmenté et le sport britannique de haut niveau est en plein essor.« Le rapport entre l’argent investi et le nombre de médailles est positif » explique Borja Garcia, professeur en management du sport à l’Université de Loughborough, dans les pages du Guardian.

Plus fort encore, lors des Jeux de Rio la Team GB a accompli ce qu’aucune autre nation n’avait réussi jusqu’alors : remporter plus de médailles dans l’édition qui suit immédiatement celle organisée sur le sol national. Ainsi, alors que suite au Brexit la Livre sterling poursuit sa dégringolade, que l’économie britannique vacille et risque de rentrer en récession, l’exceptionnelle moisson des athlètes britanniques aux Jeux de Rio a fait figure d’intermède ensoleillé au climat morose que traverse le pays.

Voir les commentaires (8)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (8)
  • Un tel article sur un site libéral fait rêver… Où on apprend qu’en dépensant l’argent du contribuable, on peut gagner quelques breloques (qui reviennent, par un simple calcul, à quelques millions l’unité), et permettre à une armée de patates de canapé de s’extasier devant leur poste de télévision. C’est fantastique, vraiment.

    • Bien d’accord, cet article ressemble à une rétrospective sur les athlètes Soviétiques avec le dopage en moins (petit progrès).

      • S’il y a beaucoup d’argent à gagner en fonction des résultats, ça m’étonnerait qu’on reste longtemps sans trouver du dopage à tous les étages.

    • Je ne lis pas l’article comme ça. Plutôt comme la reconnaissance que le sport n’est pas différent des autres activités : pour avoir des résultat, il faut faire des efforts, et mettre du pognon sur la table pour payer les gens de talent.
      Alors bien sûr, idéalement, un financement direct, « participatif » ou sous forme sociétaire, serait préférable, de façon a ce que ce soit les mêmes patates de canapé qui se réjouissent qui payent aussi leur joie (encore que le recouvrement avec les joueurs de loterie n’est pas mauvais, je pense, donc on en est pas si loin).

      Noter que la France « embauche » 50 000 étudiants STAPS, ce qui, au prix des études « gratuites », lui coute 500 millions par an. Pour rien : seuls 1000 d’entre eux seront prof de sport pour le Mammouth, une autre fraction se trouvera un boulot dans le sport, et le reste … a juste perdu son temps.

      • Certes, nos amis anglais ont sans doute efficacement dépensé l’argent, et de ce point de vue c’est un succès… relatif puisque cela prouve simplement que les autres Etats furent moins bons dans l’exercice. Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois.

        Mais votre deuxième paragraphe pose la bonne question: pourquoi le privé ne le fait-il pas? Puisque le spectacle profite aux chaînes de télé, elles pourraient financer les athlètes qui y participent… les anglais ont dépensé 400 millions pour la période 2013-2017. Est-ce que la BBC est prête à payer ces 400 millions pour diffuser les jeux olympiques, qui ont lieu tous les 4 ans?
        A titre de comparaison, les clubs d Premier League reçoit 7 milliards de droits TV sur 3 ans – mais ce sont les droits que toutes les télés (y compris en Asie) paient pour diffuser ce spectacle qui, quoi qu’anglais, a une diffusion mondiale, et est diffusé presque sans discontinuité, et pas qu’un mois tous les 4 ans. Pour assurer la comparaison, il faudrait donc ajouter ce qu’américains, russes, français, chinois et autres dépensent pour entraîner leurs athlètes pour les JO.
        La conclusion me paraît simple: aucun acteur privé ne dépenserait autant pour les jeux, qui sont donc une subvention déguisée à tous ceux qui profitent du spectacle sans en payer le prix (annonceurs, TV, spectateurs). Le tout pour une utilité sociale pour le moins douteuse.

        • « pourquoi le privé ne le fait-il pas? »
          Mais il le fait ! Les Nike et les autres sont des budgets faramineux, les droits télé des JO se chiffrent en milliards, etc.
          Ce que ces financeurs ne font pas, et ne sauraient pas faire, c’est détecter, former et entrainer des sportifs, et c’est organiser un « sport » à long terme. Même quand le sport a été crée spécialement par et pour un media (exemple : Tour de France), l’organisation est devenue indépendante parce que c’est un tout autre métier.
          Mais ces financeurs et acteurs privés ne recherche que le spectacle « vendeur » (très littéralement !). La nationalité ? c’est juste un outil pour assurer un max d’audience, de marketing et de droits TV dans le pays concerné. Mais pour le reste, plus c’est exotique et bigarré, mieux c’est.

          On pourrait demander : « Combien vaut, pour un pays, un athlète de haut niveau permettant de hisser haut le drapeau et faire résonner l’hymne national ?  »
          il n’y a pas de de réponse objective à cette question. Vous pouvez même dire « zéro » …mais ça ne me semble pas très raisonnable : le sport fait partie des éléments de prestige et de démonstration de force dont les états ont besoin, comme autant de monuments vivant à leur gloire. Les sportifs sont souvent traités comme des militaires en mission, et en fait ils sont même souvent des militaires.

          Donc la question est plutôt : le budget du sport est-il bien dépensé ? le rendement de la dépense à la hauteur ?
          Et là, comme souvent, j’ai l’impression que de ce point de vue, la France n’est pas très performante.

        • Mais enfin, il s’agit d’un exercice a mi chemin entre le marketing et la propagande d’état. C’est du feel good en canettes!

          Mes seules consolations est qu’il ne s’agit pas d’un financement via le contribuable, et que, contrairement a un article CP recent mettant toutes les administrations publiques & para-publiques dans le meme sac, l’argent a été converti en résultats (Merci Maggie, dans les années 70, cela aurait été une toute autre histoire!).

  • Bel exemple des gaspillages orchestrés par l’État pour… d’obscures raisons (se hisser plus haut sur un classement qui apporte essentiellement de la gloriole).

    L’État contribue ainsi directement à la professionnalisation du sport qui, à mon humble avis, perd autant en beauté.

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Voilà maintenant quatre ans que le Royaume-Uni a officiellement quitté l'Union européenne. Depuis le Brexit, la Grande-Bretagne a connu trois Premiers ministres, et d'innombrables crises gouvernementales. Néanmoins, malgré le chaos de Westminster, nous pouvons déjà constater à quel point les régulateurs du Royaume-Uni et de l'Union européenne perçoivent différemment l'industrie technologique. Le Royaume-Uni est un pays mitigé, avec quelques signes encourageants qui émergent pour les amateurs de liberté et d'innovation. L'Union européenne, qua... Poursuivre la lecture

Dès qu’il s’agit du Brexit, cet affront fait à l’Union européenne, la pensée désidérative ou wishful thinking décide dans la plupart des rédactions de l’angle des articles et de la titraille.

Tout se passe comme si la ligne éditoriale dépendait de croyances basées sur ce qui est agréable à imaginer pour un globaliste opposé par principe aux nations libres, plutôt que sur des faits réels, vérifiables ou rationnels. À la moindre occasion, les politiques et les médias mainstream voient poindre la fin du Brexit. Mais la Grande-Bretagne ne ... Poursuivre la lecture

Au début du mois, la ministre britannique aux Affaires et au Commerce, Kemi Badenoch, a signé l'Accord global et progressif pour le partenariat transpacifique (CPTPP), un nouvel accord commercial conclu avec 11 pays d'Asie et du Pacifique, couvrant une zone commerciale d'environ 500 millions de personnes, soit 15 % du PIB mondial. Et ce, avant l'adhésion de la Thaïlande et de la Corée du Sud. Peut-être qu'après tout, à un moment donné, les États-Unis, qui, sous la présidence de Trump, ont décidé d'abandonner l'accord, pourraient également cho... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles