Arnaud Montebourg, le petit Mélenchon du PS [Replay]

Arnaud Montebourg fait illusion au Parti Socialiste : il y défend le même programme que le Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon et cherche à neutraliser le Front National.

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Arnaud Montebourg, le petit Mélenchon du PS [Replay]

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 22 août 2016
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Par T. Matique.

Arnaud Montebourg, un programme économique d'extrême gauche
By: OFFICIAL LEWEB PHOTOSCC BY 2.0

La popularité médiatique d’Emmanuel Macron en symbole d’une social-démocratie décomplexée, résonne comme un glas sur les ruines d’un Parti Socialiste dépourvu d’une doctrine politique de base claire et cohérente. Elle rappelle aux électeurs de Hollande, les promesses électorales enterrées par un quinquennat qu’ils jugent marqué par des compromissions et des alliances avec leurs pires ennemis dont les marchés, la finance, le MEDEF.

Bien des électeurs floués dans leurs attentes d’un État providence, d’une justice sociale propre au système socialiste, pourraient rejoindre le front, qu’il soit de Gauche ou National, dans l’espoir de voir ressusciter la toute puissance et l’autorité d’antan du système socialiste.

Les tensions sociales s’intensifient, mais rien ne bouge au Parti Socialiste. Les trépignements et les postures d’agacement de leurs membres brassent de l’air. Et les cercles de « réflexion » sont envahis de calculatrices vouées au décompte des réservoirs de voix et à l’élaboration de statistiques sur l’impact des slogans tels que « Hé oh la gauche ! », « En marche ! », « Ça va mieux ».

Bien placé pour connaître la signification du redressement improductif, Arnaud Montebourg s’intègre parfaitement au milieu de « candidats sans projet » pour être un socialiste « de projet sans être candidat », autrement dit un socialiste de salon sans être éjectable (voir notre article précédent).

Il permet de tempérer le fantasme d’une primaire tout en servant de paravent face au Front de Gauche et au Front National. Tout dans les formes et rien sur le fond, il apporte au Parti Socialiste sa recette très personnelle pour créer l’illusion d’une disparition du Front de Gauche et d’une neutralisation du Front National.

Arnaud Montebourg utilise la politique du Front de Gauche contre celle du Front National

À défaut d’idées, Arnaud Montebourg s’empare des conceptions du Front de Gauche sur l’organisation des pouvoirs, dont une « révolution citoyenne » pour une « reconquête et l’extension de la souveraineté du peuple » avec la VIe République. Il s’approprie l’élaboration d’un régime qui prévoit notamment un « référendum révocatoire pour donner la possibilité d’écourter le mandat d’un élu » et un « référendum d’initiative populaire ».

Cette organisation du pouvoir sous une « république sociale » et une « protection de la propriété collective des biens publics » constitutionnalisée permet de censurer les libertés individuelles et la propriété privée portant atteinte à la « liberté dans le respect de l’intérêt général ».

Bien que Arnaud Montebourg parvienne à créer des leurres en vue d’amoindrir la portée du Front de Gauche auprès des sympathisants socialistes, il ne peut en faire autant avec le Front National sans s’exposer à des effets boomerang sur sa personne et ses objectifs. Dès lors, il se sert des travaux du Front de Gauche pour présenter une Ve République «  à bout de souffle » défendue par le Front National. De façon implicite, il relègue leur « anti-système » à de l’opportunisme électoraliste.

Bien entendu, le Front National évoque aussi la démocratie et une souveraineté redonnée au peuple, mais il s’en réfère à l’utilisation du référendum, indispensable pour un « franxit » à l’égard de l’Union européenne sans l’obtention des 3/5 du Congrès. La position de ce parti sur la conception de la démocratie ne semble pas avoir évolué depuis janvier 2011, date à laquelle Louis Alliot et David Mascré auraient apporté quelques précisions sur Radio courtoisie, notamment :

« Avant de pouvoir mettre en œuvre un référendum d’initiative citoyenne, c’est la question du rééquilibrage, de la reprise en main des instruments, ce qu’Althusser appelait les appareils idéologiques d’État, c’est-à-dire l’éducation, les médias, la culture. Tant que les termes seront faussés, que ceux qui définissent les concepts, les idées et le langage seront tenus par des personnes qui ont une vision entièrement faussée de l’Histoire de France, il sera très difficile de remettre ce pays d’aplomb. »

Se servir de la doctrine politique du Front de Gauche comme détonateur humain sur celle  du Front National

Opposer deux conceptions du système socialiste en vue de l’autodestruction de leur parti respectif, le tout sans détruire le socialisme, relève de l’acrobatie politicienne. Mais, fort du soutien des deux fronts sur le fond à certains de ses dossiers (Arcelor Mittal, Dailymotion, etc.) et de leur commune aversion du capitalisme, de la mondialisation et du libéralisme, Montebourg parvient à développer des aptitudes de contorsionniste dans l’art de passer au travers, même de ses échecs.

D’un côté, il se  lance dans l’apologie de l’organisation de la vie collective prévue par le Front de Gauche avec un État qui se charge de tout, notamment de :

  • partager les richesses et abolir l’insécurité sociale,
  • reprendre le pouvoir aux banques et aux marchés financiers,
  • instaurer une planification écologique (relocaliser l’économie),
  • produire autrement et promouvoir un progrès humain durable.

De l’autre, il accentue son lyrisme dans l’évocation du rôle de l’État usurpé au Front de Gauche dans l’espoir de faire barrage au joug des mots guerriers et des anaphores martiales du Front National qui pourraient se résumer à ces extraits de leur programme :

  • L’État fort, fer de lance de la réindustrialisation de la France (planification stratégique),
  • L’État fort qui impose son autorité aux féodalités locales,
  • L’État fort pour redresser nos services publics,
  • L’État fort, qui lutte contre les fraudes, les ententes et les abus de position dominante,
  • L’État fort, qui met au pas la finance et la spéculation.

Être une figure du patriotisme pour essayer d’enterrer les deux fronts

Entre « l’humain d’abord » du Front de Gauche et « la préférence nationale » avec des citoyens par le sang du Front National, la conception du comportement du citoyen et des citoyens entre eux, autrement dit l’idéologie politique, ne concerne plus la même catégorie d’individus.

Au Front de Gauche, « les travailleurs n’ont pas de patrie » hormis les Français qui doivent faire preuve d’exemplarité sociale patriote. Ceux-ci pourraient toutefois élargir leur horizon si, et seulement si, il y a une « Europe de l’harmonisation des droits sociaux et politiques » avec « la mise en place d’un Smic européen ».

Quant au Front National, il n’y a de citoyen que par le sang avec de surcroît un comportement conforme aux valeurs institutionnalisées relevant du patriotisme et d’une volonté d’appartenance à une nation  dépourvue de multiculturalisme.

Tandis que les deux fronts s’affrontent sur la définition du citoyen, Montebourg fait défiler les rayures et les clichés pour devenir le symbole consensuel du « patriotisme ».

Et Arnaud Montebourg finit par ressusciter les deux fronts

Dans cette croisade désespérée au service du Parti Socialiste et de ses carriéristes, Montebourg prouve qu’en l’absence du libéralisme en politique et doctrine politique, le plus grand ennemi du Parti Socialiste c’est le socialisme lui-même. Il devient l’ambassadeur de l’affrontement du socialisme et de la social-démocratie au sein du parti et, de facto, le meilleur atout pour les deux fronts.

D’improductif à contre-productif, Montebourg finit en meilleur VRP du Front de Gauche et du Front National quant à leur projet d’offrir aux socialistes un système socialiste qui ne négocie pas avec le capitalisme et qui assure un État providence, un État stratège, un État protecteur, avec d’un côté « l’humain d’abord » et de l’autre les Français par le sang avant tout.

Travestir le moindre désengagement de l’État en libéralisme, ou divertir avec une dichotomie gauche/droite grâce aux étiquettes du « progressisme » et du « conservatisme » n’altèrent en rien la nature de l’organisation du pouvoir (la politique) et de celle de la vie collective (la doctrine politique) proposées par les principaux partis. Elles reposent sur le système socialiste intégré dans le socialisme, le national-socialisme ou socialisme nationaliste, la social-démocratie, et le mouvement communiste (révolution, système socialiste, disparition de l’État étant la spécificité du communisme mais pas de tous les partis dits « communiste »).

Chaque parti en lice aux élections présente son degré de censure des libertés individuelles et de préemption de la propriété au nom de « l’intérêt général », ses modalités pour une justice sociale, son champs d’ingérence de l’État. Tous s’opposent au libéralisme. Et tous considèrent le capitalisme comme un ennemi qu’il faut soumettre ou abattre. Il n’y a qu’un système socialiste à géométrie variable. De quoi aggraver la fuite des cerveaux et des capitaux.

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  • « République sociale », « protection de la propriété collective des biens publics » et « liberté dans le respect de l’intérêt général », ça fleure bon l’autoritarisme national-socialiste ça !!!!
    Ceci étant, cela fait bien écho aux discours de Valls et Cazeneuve comme quoi « la vie privée n’est pas une liberté » ou « la sécurité est la première des libertés, c’est pourquoi d’autres libertés pourront être limitées ».
    Ces fascistes de gauche cachent de moins en moins le fond de leurs pensées. Au moins, on ne pourra pas dire que nous n’avons pas été prévenus mais je trouve hallucinant qu’ils puissent aller aussi loin sans aucune contestation !
    Qu’ils nous foutent la paix tous ces tocards parasites, nous n’avons aucun besoin d’eux, ils ne font que créer des problèmes ou les aggraver. La Belgique ne s’est jamais aussi bien porté depuis 40 ans alors qu’elle n’avait pas de gouvernement !

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