Prélèvement à la source : les objectifs cachés du gouvernement

Pour contourner le problème de la complexité du système fiscal français, le gouvernement a trouvé LA solution.

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Prélèvement à la source : les objectifs cachés du gouvernement

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 1 avril 2016
- A +

Par Vincent Bénard.

Illuminati crédits John Urch (CC BY-NC-ND 2.0)
Illuminati crédits John Urch (CC BY-NC-ND 2.0)

Les discussions sur le prélèvement à la source vont bon train, mais un détail non évoqué par la presse avant ce matin pourrait faire l’effet d’une bombe pour le gouvernement.

C’est le quotidien suisse Le Temps qui dévoile ce matin le pot aux roses (liens en fin d’article). Selon une note confidentielle de l’Inspection des finances de Bercy qu’une équipe du journal helvétique a réussi à se procurer, les services du ministère des Finances avaient prévenu depuis plus d’un an qu’en l’état actuel de la complexité du calcul de l’imposition de chaque foyer, avec moult exemptions et niches fiscales, le système d’attribution d’un coefficient à chaque salarié, communiqué à l’employeur pour qu’il l’applique à chaque feuille de paie, était impraticable.

Pourtant, dans ses dernières déclarations, Michel Sapin semble indiquer que le problème a trouvé sa solution. Et pour cause : Selon Le Temps, la note prévoit que pour résoudre le problème, les services de Bercy ont imaginé une solution très simple : les employeurs verseront l’intégralité du salaire, charges comprises, à Bercy, et c’est l’État qui reversera la somme due à chaque contribuable en fonction des données figurant dans ses ordinateurs. Autrement dit, le lien entre employeur et salarié sera encombré d’un nouvel intermédiaire : l’État. Bercy avait prévu d’annoncer le plus tard possible cette disposition, pendant les congés du mois d’août, pour éviter qu’elle ne suscite par trop d’agitation.

On comprend sans peine l’émotion que va susciter la révélation du journal suisse.

En effet, pour mener à bien l’opération, les entreprises devront payer l’intégralité des sommes dues le 21 du mois (ou le premier jour ouvrable suivant le 21, si il tombe un week-end), de façon à ce que Bercy puisse abonder les sommes dues aux ménages avant le 28, afin que les comptes soient provisionnés avant la date de prélèvement par les banques des soldes de cartes de crédit à débit différé ; cela oblige donc les entreprises à avancer de 7 jours le paiement de tous les salaires et charges, ce qui, en termes de trésorerie, ne sera pas sans incidence.

Déjà, la twittosphère entrepreneuriale se déchaîne contre la mesure.

L’Union Française des Artisans et Commerçants estime que l’avance de trésorerie demandée est équivalente à une charge supplémentaire de 3,5 milliards d’euros d’intérêts sur facilités de caisse sur les entreprises », et encore ces montants sont ils amenés à exploser si, d’aventure, une remontée des taux d’intérêts des banques centrales venait à se produire.

 

Vers le paiement au bon vouloir de l’État !

Mais il y a pire : selon Le Temps, Michel Sapin envisagerait d’utiliser ce système de paiement intégral par l’État comme un moyen de contrôle social des populations. Dans un premier temps, l’État s’octroierait le droit de prélever automatiquement des sommes à verser le montant des amendes ou pénalités fiscales réclamées au contribuable. En cas de contestation sur le montant ou la réalité de l’amende réclamée, la somme serait mise sous séquestre via la Caisse des dépôts, mais ne serait de toute façon pas versée aux récipiendaires avant décision de justice. Pire encore, la même procédure pourrait être appliquée en cas de redressement fiscal ou de litige avec l’administration : en cas de litige, les versements de salaires pourraient être tout simplement… bloqués par Bercy !

On imagine sans peine qu’un gouvernement pourrait utiliser l’arme du blocage du virement pour pousser à la ruine des opposants ou des personnes en conflit avec l’État. Ainsi, Bercy envisagerait de pouvoir, au titre de l’état d’urgence, faire bloquer les versements aux personnes suspectées soit de participation à des opérations de terrorisme, mais aussi à des individus jugés dangereux pour l’ordre financier public, tel que par exemple « des personnes appelant ouvertement à remettre en cause le monopole de la Sécurité sociale et incitant les particuliers à se désaffilier ».

Enfin, la note de Bercy ajoute cyniquement que « si les conditions financières de financement de la dette française venaient à se détériorer, le dispositif permettra à Bercy d’opérer des prélèvements exceptionnels sur les revenus individuels pour faire face à ses échéances ». En toute décontraction, Bercy envisage donc d’utiliser le système de prélèvement fiscal comme un moyen de spoliation des ménages si d’aventure les finances de l’État venaient à se détériorer.

Interrogés par Le Temps, ni Manuel Valls, ni Michel Sapin ni le porte-parole de Bercy n’ont souhaité faire de commentaires. Le quotidien suisse a également voulu interroger des députés de droite sur ce qu’ils pensaient de cette disposition, et a été très surpris par l’absence de réaction. Aucun ténor n’a accepté de répondre pour l’instant, mais plusieurs députés LR auraient en “off” approuvé l’esprit de la mesure, semblant accorder plus d’importance à ce que le dispositif rendrait possible pour l’État (lutte contre les terroristes et les fraudeurs) que le danger pour les libertés publiques, qu’ils tendent à minimiser.

En revanche, le ministère des Finances suisse et le président de la confédération patronale d’outre Rhône ont fait savoir qu’ils refuseraient, quoi qu’il arrive, d’appliquer ce système aux frontaliers français travaillant en Suisse. Karl Habrunni, actuel ministre des Finances et ancien président de la confédération, a déclaré au journal que si la France, fidèle à ses mauvaises habitudes, faisait pression sur la confédération pour la forcer à adopter cette façon de procéder, alors « tous les accords fiscaux passés entre les deux pays seraient suspendus. La confédération ne peut accepter de se rendre complice d’une telle décision ».

Le président du Parti Libéral Démocrate, Aurélien Véron, est vent debout contre ce qu’il qualifie d’infamie :

« Cela revient à décréter que tout ce que vous gagnez par votre travail appartient en fait à l’État, et que celui-ci choisira la part qu’il daignera vous laisser. La relation de dépendance des Français à l’État sera telle que toute velléité de contester ses abus de pouvoir sera étouffée dans l’oeuf. Si cette réforme se met en place, la France deviendra officiellement une dictature ».

Le président du PLD a promis des actions très dures contre ce coup d’État, et a d’ores et déjà annoncé une action en justice auprès de la Cour Européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg.

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Et bien sur… c’était le poisson d’avril de Contrepoints !

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  • quel jour est on déjà ?

  • Ok, c’est un beau poisson, mais de grâce, ne leur donnez pas ce genre d’idée svp.

  • Bonjour,

    Le pire, c’est que c’est plausible. Beau poisson bien amené.

  • Superbe et crédible, donc terrifiant 😉

  • Poisson d’avril 🙂

  • Je connais des poissons d’avril de meilleur gout… Parce que fournir ainsi à Bercy de pareilles idées auxquelles ils sont bien capables de les concevoir par eux mêmes!!!

    • @ Aristarkke

      Oui et non! Le poisson n’est pas drôle, clairement, mais de plus il entrerait bien dans la politique actuelle qui continue à « claquer » 57,5 % de PIB, pour l’état, tout en ne parvenant pas vraiment à boucler le budget sans déficit quand le concurrent allemand est à 45 %, avec un budget proche de l’équilibre et une balance commerciale autrement plus favorable: relativement, la France s’appauvrit donc consciencieusement, jour après jour! C’est pas très malin!.

      J’ai du mal à comprendre comment on peut rester dans un pays aussi liberticide!

  • C’est un excellent poisson parce qu’ il est tellement crédible vu le gouvernement qu’on a. Là où ça devient incroyable, c’est quand l’ article dit que les Suisses vont porter plainte à la Cour des droits de l’homme pour défendre les Français

  • En fait, ça fait froid dans le dos, et si ça n’ était pas un poisson d’ avril ?

    • Le lien dirigeant faussement vers l’article suisse aboutit sur la rubrique Wikipédia du poisson d’avril: on ne peur être plus clair!

  • Joli poisson. Mais:
    « Cela revient à décréter que tout ce que vous gagnez par votre travail appartient en fait à l’État »

    C’est deja le cas, c’est l’Etat qui decide de ce qui vous revient ou pas. Seul le prelevement est differe.

  • Vincent ,

    C’est un beau poisson d’avril , mais qui est tout à fait imaginable dans notre pays en pleine déshérence…

    Félicitations pour ce petit texte bien travaillé…

  • Je ris, je ris…. jaune.

  • Le Temps n’a rien inventé! Ce système existe dans la dictature cubaine! Le salaire des employés des hôtels de tourisme est versé par l’hôtel à l’Etat qui n’en redonne qu’une très faible partie à l’employé, qui ne vit en réalité que par les pourboires généreux des touristes étrangers ! L’hôtelier reste libre d’embaucher et débaucher le personnel.Un tel système est tentant dans l’état où se trouve notre pays et faciliterait grandement l’installation d’une dictature en France….

  • La seule façon de contrer cet étatisme dictateur est de travailler en qualité d’indépendant, donc plus de fiche de paye, d’heures, sup, de limite aux 35H00
    de prélèvements abusifs ! Votre avis ?

    • Les indépendants ne sont pas gâtés, ni en France ni ailleurs. Mais avec le « black » ou des frais professionnels élevés, il y a moyen de s’en tirer. (Éviter quand-même d’avoir des salariés et une « épouse-aidante » peut devenir une « arme à double tranchant »!

      • Gardez bien des comptes plausibles car un jour ou l’autre, un contrôle fiscal est probable et ces gens-là ne se déplacent pas pour rien donc prévoir « un os à ronger », dû à votre naïve et plausible ignorance de la complexité fiscale vous vaudra sans doute la correction de l’erreur, sans amende ni autre suite et tout le monde sera satisfait!

  • Superbe et génial de lire cela ce matin, belle tranche de rigolade mème si cela a fait grincer des dents dans mon entourage….Mais donner des idées pareil a Sapin, c’est malsain…Beau poisson en tout cas ..

  • excellent poisson parce que pas totalement absurde
    Vincent nous fait de beau poisson chaque année, celui-ci est particulièrement bon

  • On voit tout de suite que c’est un poisson, à cette phrase :

    « les entreprises devront payer l’intégralité des sommes dues le 21 du mois (ou le premier jour ouvrable suivant le 21, si il tombe un week-end),  »

    C’est idiot, il est évident que ça serait « le dernier jour ouvrable précédent le 21 », si c’était vrai.

    • Non car payer les impôts le premier jour ouvré suivant la date d’échéance normale est la pratique en vigueur aujourd’hui

      Ex : Pour ceux qui sont mensualisés pour l’IRPP le prélèvement ne s’effectue pas le 15 du mois d’Aout mais le 16 si c’est un jour ouvré.
      En 2016 le 15 octobre date limite de paiement pour la Taxe Foncière tombe un samedi vous aurez jusqu’au Lundi 17 pour payer.

  • Selon Robin Rivaton, la retenue à la source de l’impôt, telle qu’elle existe dans de nombreux pays développés (États-Unis, Allemagne, Royaume-Uni, Espagne…) permet de mettre fin à la complexité d’une imposition avec un an de retard et aux nécessaires ajustements issus de l’évolution de la situation des contribuables d’une année sur l’autre, écarts appelés à se renforcer du fait de trajectoires salariales moins linéaires. Retrouvez ses analyses dans sa note pour la Fondation pour l’innovation politique intitulée « Taxer mieux, gagner plus » https://lc.cx/4PbC

    • Que la principale complexité de l’IR serait en France qu’il est prélevé avec un an de retard est un autre poisson d’avril.

      • Ça dépend si vos 1/3 provisionnels sont suffisants ou pas.

        Il est de bon ton, dans les autres pays où ce système se pratique, que l’impôt prélevé à la source jouisse d’une réduction par rapport à l’impôt dû après déclaration sur les revenus de l’année précédente.

        Cela parait strictement logique. En fait, c’est pour l’état que c’est nuisible: touchant « son » argent plus tôt, il va anticiper de nouvelles dépenses (on les connait!) qu’il sera évidemment impatient d’annoncer et de commencer … prématurément!

        Une simple baisse de l’endettement constitue pour les politiciens, un encouragement à imaginer de nouvelles dépenses: ces gens sont des malades sinon ils ne rêverait pas d’un tel pouvoir sur leurs égaux, évidemment. Et d’ailleurs, très vite, ils ne se voient plus comme des citoyens ordinaires, ni même, parfois, soumis aux mêmes lois et règles.

  • J’ai eu une de ces peurs ! Le plus incroyable c’est que c’est exactement le genre de mesure que ces guignols seraient capable de prendre !
    Excellent poisson, franchement jusqu’au bout je me disais « mais enfin c’est pas possible, ils peuvent pas faire ça !!!! »

  • Il est normal que la droite ne réagisse pas, si ca passe, ca fera un bon argument pour les élections de 2017

  • on voit tout de suite le coup quand il est question d’un transfert de charge vers BERCY, alors que tout les porte à faire l’inverse vers les employeurs !

  • Ça va leur donner des idées, car ils sont capables de tout et pourquoi pas vider les comptes d’épargne.

    • Alors ca vous fait quoi de vous sentir dans la peau d’un professionnel de santé qui va passer au tiers payant généralisé. Parceque ca c’est pas un poisson d’avril !

      • Si mes confrères français (je ne le suis pas) acceptent cette mesure, tant pis pour eux!

        Par contre si ils la refusent, qu’ils refusent simplement de jouer le jeu en demandant toujours l’entièreté du prix des actes: après tout, c’est bien au malade de s’arranger avec SON « assureur » qui n’a qu’à lui faire un chèque d’avance, si il considère que le patient n’a pas à avancer le prix de sa consommation.

        En justice, cela s’appelle l’inversion de la charge de la preuve! Heureusement, on ne doit pas encore prouver qu’on est innocent!

  • En l’état actuel de la complexité du calcul de l’imposition de chaque foyer, avec moult exemptions et niches fiscales, le système d’attribution d’un coefficient à chaque salarié, communiqué à l’employeur pour qu’il l’applique à chaque feuille de paie, était impraticable.
    Il y a au moins cette phrase qui n’est pas un poisson d’avril!!!

  • « Cela revient à décréter que tout ce que vous gagnez par votre travail appartient en fait à l’État » Poisson ou pas, c’est déjà le cas, au moins dans les mentalités puisqu’a Bercy l’argent que l’état ne vous prend pas est considéré come une ‘dépense fiscale’.

    • Oui ,enfin tout ce qui est considéré comme une niche fiscale est une dépense. Mais effectivement tout ce qui est au dessus des minima sociaux en poussant le raisonnement est une niche fiscale. -)

  • La vache j’y ai cru, je me suis dit ça y est je fais mes valises

  • J’y ai cru tout du long, jusqu’à ce que je lise le nom « Karl Habrunni »…. Karlha brunni, hahaha! Poisson d’avril! Mais à peine rassuré pour autant, et si….? Je veux même pas y penser! L’apéro continue! Bon week-end!

  • certains de vos poissons d’avril se sont réalisé ou vont se réaliser, je pense que vous avez donné une idée de génie (diabolique) à nos socialauds pour taxer autant que faire se peut sous couvert :
    -> de lutte contre les différence de salaire
    -> de simplification administratives bienveillante (c’est l’état français, donc, c’est bienveillant)
    -> de lutte contre la fraude (ça passera si on ajoute des riche)
    -> de solidarité national (pour faire vivre les politiciens)
    -> lutte contre ce que vous voulez, plus c’est gros, plus ça passe.

    typiquement, excepté les noms de vos députés et les suisses qui défendent la France, le reste est abominablement plausible,

  • Les commentaires sont fermés.

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