Loi Travail : un coup pour rien [Replay]

N’en déplaise à ses adversaires qui défilent aujourd’hui, la loi Travail est très largement insuffisante.

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Loi Travail : un coup pour rien [Replay]

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 31 mars 2016
- A +

Par H16.

Peu importe ce qu’on pense de l’actuelle ministre du Chômage, force est d’admettre qu’elle n’a laissé personne de marbre avec la loi qui, si elle est un jour votée, portera peut-être son nom. Je dis « si », parce qu’à mesure que la polémique enfle, on peut légitimement se demander dans quel état la loi et la ministre se présenteront dans les prochaines semaines devant l’Assemblée pour le vote.

Tout avait pourtant commencé … mollement. On se souvient de l’arrivée d’un Emmanuel Macron présenté comme turbolibéral par les incultes habituels, et le vote d’une loi à son nom qui, tout compte fait, réussissait la prouesse de libérer un peu la desserte de cars dans les régions. Il est assez peu probable que les 1300 emplois créés dans la foulée soient responsables du petit ralentissement observé dernièrement dans la hausse du chômage, mais reconnaissons à l’initiative d’avoir, malgré sa grande timidité, donné une indication claire pour le pays : oui, retirer des contraintes, libérer des secteurs de l’emprise étatique ou monopolistique permet bien de créer des emplois, n’en déplaise à Gérard Filoche.

Filoche ou l'enfer du bus

Lorsqu’El Khomri a débarqué avec son projet de loi, on pouvait donc raisonnablement s’attendre à deux choses : d’une part, compte-tenu de l’expérience Macron, un petit pas pouvait être fait dans la bonne direction. D’autre part, on savait que tout ce que le pays compte de tenants d’un immobilisme d’airain se lèverait comme un seul homme pour la combattre, de la même façon qu’on eut le droit à toutes les manœuvres possibles pour saboter la loi Macron et la dissoudre dans le corps syndical français (avec un certain succès, il faut dire).

Bien sûr, la notion même de « petit pas en avant » est hautement débattable, et le débat est d’ailleurs largement ouvert ; citons au passage la tribune dans le Monde d’un collectif composé d’économistes inexplicablement pas issus des sérails habituels où régulièrement la fine fleur trotskiste branlouille de la rhétorique pour casser des briques, collectif qui se permet le toupet de noter quelques points positifs au projet d’El Khomri, ce qui démontre au passage une belle inconscience pour la carrière de ses membres. Concernant Tirole, qui en fait partie et qui est maintenant vilipendé par une presse outrée de sa position favorable, on pourra penser que son Nobel lui accorde un certain détachement, je présume…

Et bien évidemment, ce petit « pas en avant » s’entend pour un gouvernement qui n’a jamais fait la preuve de la moindre initiative réelle, et qu’en termes de réforme, tous ses efforts se sont toujours traduits par une réduction palpable des libertés et une augmentation (parfois explosive) de la paperasserie, de la complexité bureaucratique et, bien sûr, de la ponction fiscale.

Autrement dit, on se doit d’observer la plus grande prudence au sujet de cette loi, tant son parcours apparaît déjà complètement miné.

parcours institutionnel en République du Bisounoursland

En outre, et c’est encore plus symptomatique de l’état du pays, la polémique qui s’est installée ressemble de plus en plus à une magnifique bataille d’infirmes où une impressionnante brochette de collectivistes, c’est-à-dire des gens pas équipés pour réfléchir, tentent d’expliquer ce qu’il faudrait faire (ou ne pas faire) au gouvernement, c’est-à-dire des gens pas outillés pour écouter. Des idiots qui crient à des sourds, voilà qui promet quelques moments décibels.

Il n’y a en effet aucun doute à avoir : comme l’évoque Nathalie MP en conclusion d’un récent billet, la liste de ceux qui s’opposent au projet en dit très long sur la bataille avant tout idéologique qui se livre ici. Bien qu’étant au XXIème siècle, tout indique en effet que cette loi a été conçue dans le cadre de la lutte des classes, qu’elle a été analysée par les syndicats, les politiciens et une partie des salariés dans le cadre de la lutte des classes, et elle est donc combattue dans le cadre de la lutte des classes.

Pas étonnant, dès lors, d’entendre de tels cris d’orfraie de la part de toute une partie de la société, à commencer par celle qui a toujours été en pointe dans la lutte pour un accroissement de la collectivisation du pays. Pas étonnant de trouver la joyeuse troupe de l’UNEF embringuée dans cette nouvelle lutte, de Caroline de Haas et sa pétition aux millions d’e-mails non vérifiés (ah, le bonheur simple d’utiliser des e-mails « jetables » sur yopmail.com ou jetable.org !) jusqu’aux éternels étudiants à l’instar de William Martinet qui fait absolument tout pour suivre les traces baveuses de Bruno Julliard (ou tant d’autres avant lui), exfiltré sans mal de l’UNEF pour pouvoir grenouiller sous les ors de la République à la Mairie de Paris.

william martinet - loi travail

Au passage, on ne pourra s’empêcher d’avoir une pensée émue (ou au moins, amusée) pour ces étudiants, ces salariés, ces syndiqués « conscientisés » qui défileront, banderoles en main, pour être sûrs que rien ne change et qui, quelques années plus tard dans une France devenue le Venezuela de l’Europe, pleureront parce qu’effectivement, rien n’a changé.

Car oui, grâce à une fuite en avant forcenée dans la déresponsabilisation des individus, par un capitalisme de connivence galopant qui infuse maintenant toute la société, par l’inscription autoritaire de chaque salarié et de chaque patron dans une lutte des classes aussi artificielle qu’obligatoire, on a depuis bien longtemps troqué le Code de l’Honneur contre celui du Travail. Tout y semble mieux défini, plus proprement rangé dans une myriade de petites cases dans laquelle chacun sait qu’il doit tomber pour répondre aux exigences du législateur, des syndicats, des administrations et des politiciens. Au passage, cela explique très bien pourquoi, au pays des Droits de l’Homme et de la « Liberté guidant le Peuple », les Français sont les salariés les moins heureux au travail.

J’ai écrit il y a plusieurs mois déjà, lorsqu’El Khomri abordait le sujet de cette loi, qu’elle présentait déjà tous les signes du renoncement total à toute réforme. Je l’ai réécrit au moment où la polémique à commencé à enfler, les premiers jets de cette loi fuitant « inopinément » dans la presse. Et finalement, peu importe la valeur de cette loi : elle est devenue, presqu’instantanément, ce qu’il faut abattre dans la partie jacassante de l’opinion.

Dès lors, soyons lucide et rendormons-nous : il n’y aura pas de réforme. Le cirque continue exactement comme prévu, et la France, définitivement calcifiée, va donc inexorablement continuer à produire assistanat, chômage et misère.

Ce pays est foutu.
—-
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  • Mais n’est ce pas la politique de mollande, un pas en avant suivi de deux en arrière, juste pour faire plaisir à la CE.
    Quant au peuple des sans dents, avec un type qui touchera plus de 35k€ par mois de retraite au commande, voyons ce n’est pas son affaire. Seul son ego compte.

    • Comme disait De Gaulle à propos d’Albert Lebrun, le dernier président de la III ème République, pour être un chef d’État, il manque deux choses à mollande: « qu’il fût un chef et qu’il y eut un État »

  • IL n ‘y a que la création d’entreprise qui puisse créer des emplois, en favorisant l’innovation…

    La loi el khomri ne touche pas à la simplification de la charge et des risques administratifs de l’employeur.
    La loi El khomri par du CPA comme d’un graal, alors que ce dispositif sensé sécuriser le parcours du salariés est une coquille aussi vide qu’une usine à gaz administrative.

  • « un Emmanuel Macron présenté comme turbolibéral par les incultes habituels … »

    Si je ne m’abuse, il n’y a pas de terme officiel pour qualifier un socialiste avec une inflexion libérale. Notre intelligentsia journalistique et les politiques considèrent donc manifestement cette association impossible. Il en résulte que Macron ou Valls sont des illuminés bons pour l’asile.

    Il est dès lors impossible, même pour un affreux néo-turbo-libéral bouffeur de chatons de prendre de tels illuminés au sérieux : chacun doit choisir son camp, Castro ou Batista. Peut-être que notre intelligentsia est un peu obsolète quand même.

  • « un Emmanuel Macron présenté comme turbolibéral par les incultes habituels »

    Et pourtant, selon les articles récents de Nathalie MP, c’est un libéral puisqu’il est contre la loi sur la déchéance de nationalité.
    Et toujours selon la même, un réformateur tel que Schröder ne serait pas un libéral compte tenu de ses liens avec Poutine.

    Alors si je suis tout à fait pour un libéralisme qui « retire des contraintes, libère des secteurs de l’emprise étatique ou monopolistique », il ne faut pas faire prendre une tendance à l’équilibre avec tout le reste de l’idéologie, version libertaire !

    Trop facile d’ôter le cachet d’authenticité sur l’étatisme de l’un ou le conservatisme de l’autre, mais s’accorder tout le succès du développement mondial des échanges, en fermant les yeux sur les pays à chaque bout (la Chine, le protectionnisme variable de l’Allemagne, l’emprise américaine, la connivence avec les pays du Golf,…)

  • « Des idiots qui crient à des sourds, voilà qui promet quelques moments décibels. »
    C’est une phrase qui pourrait être dans un film d’Audiard ou un livre de Frédéric Dard. Du grand h16.

  • Quelle legitimite, cette reforme, a un an des elections? Quelle legitimite, cette reforme, apres avoir passe 4 ans a nier la crise et la banqueroute? C’est de l’amateurisme politique, purement et simplement, et le revelateur du niveau catastrophiquement mediocre de Flamby et consort. Certains lui prêtent une intelligence politique. C’est fort charitable.

  • D’ici là que les négociations amènent à aggraver le sort des entreprises. Les anencéphales syndicaux sont venus pour ça…

  • des tapis de prière dans des salles de prière, voilà le projet sociétal de cette loi qui portera bien le nom EL KHOMRI.
    C’est ce qui en restera si elle est votée après les marchandages faussement réformateurs habituels.
    Ce coin sournoisement inséré dans le code du travail nous promet d’intéressant développement. Assez curieusement ce fait est très peu relevé !

  • La gangrène n’est plus soignable, on va amputé la jambe et vous verrez tous ira mieux.

    Moi je dis bravo, il va reussir à mettre tous les gauchos et les droitos dans la rue ensemble.

    Bon concernant la loi, elle est mort né dans un pays ou le travail est synonyme de , je cherche mon mot bah rien, puisque le travail il n’existe plus, ah mais la ruse c’est ca pourquoi faire une loi du travail puisqu’il y en a pas. donc on emprunte pour nourrir la population moi je dis c’est du bonheur. 40 ans de communisme faut attendre encore un peu avant que ça s’écroule, on est à la moitié du train de vie de la France, ca vient tous doucement mais ca vient alors profitons en avant l’écroulement massif et rapide à dans 30 ans.

  • Un court moment de lucidité dans ce billet face au tourbillon médiatique. Un résumé clair et l’opportunité de me préoccuper de mon petit déjeuner au lieu de cette loi qui n’a couchera de rien

  • Fastoche de cracher sur la gauche qui ne sait pas faire une loi que la droite aurait du faire lorsqu’elle était au pouvoir. Au moins peut on dire que Hollande, Vals, Macron et El Khomri ont le courage d’aller à contre-courant des idées de leur camp politique, alors que la droite, qui n’a rien fait dans le sens de cette loi, a capitulé en refusant d’engager le bras de fer contre ses adversaires. Drôle de jeu de dupes…

  • Le pays est foutu.

    C’est vrai à quoi bon continuer à publier des articles. Soyons courageux comme des lemmings et suicidons-nous!

  • Les commentaires sont fermés.

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