Hollande, président du microcosme parisien

François Hollande ne semble plus mesurer la lassitude des Français devant ses petits calculs…

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François Hollande à Grenoble en 2013 (Crédits : Saly Bechsin, licence CC-BY-ND 2.0), via Flickr.

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Hollande, président du microcosme parisien

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 22 décembre 2015
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Par Éric Verhaeghe.

François Hollande à Grenoble en 2013 (Crédits : Saly Bechsin, licence CC-BY-ND 2.0), via Flickr.
François Hollande à Grenoble en 2013 (Crédits : Saly Bechsin, licence CC-BY-ND 2.0), via Flickr.

Hollande voudrait saper définitivement les institutions de la Vème République qu’il ne s’y prendrait pas autrement. À moins qu’il ne soit complètement aveugle et que, jusqu’au dernier jour, il ne vive dans l’illusion que les détestables pratiques acquises sous Mitterrand puissent continuer indéfiniment comme si rien ne changeait dans le pays.

Hollande et la nationalité

On se souvient qu’à Versailles, le lundi suivant les attentats, François Hollande avait réuni le Parlement en Congrès pour faire un discours qui apparaît aujourd’hui comme un vaste bla-bla. À trois semaines des élections régionales, le Président de la République avait profité de l’émotion suscitée par la Terreur pour endosser des propositions qui faisaient et font frémir la gauche, comme la déchéance de nationalité pour les auteurs binationaux d’actes terroristes.

Il est très probable que ce discours salué par ses opposants ait modifié la donne aux régionales. En reprenant notamment cette proposition du Front National, François Hollande a coupé l’herbe sous le pied de la droite et envoyé un signal fort aux électeurs nationalistes.

Hollande et son petit calcul

Rétrospectivement, on comprend clairement que cette annonce était purement calculée et que François Hollande comptait bien sur le Conseil d’État pour lui faire barrage. Le calcul était simple : convaincu, comme beaucoup à gauche, que la Constitution est l’ennemie des propositions du Front National, il n’avait aucun doute sur le refus que ses fidèles juges administratifs, dont ses cabinets regorgent, bloqueraient la proposition.

Le coup ressemble à un succédané de mitterrandisme : je dis politiquement oui, mais je sais que techniquement ce sera non. Donc je promets de raser gratis.

Hollande ne tient pas le Conseil d’État

Patatras ! Il y a des limites à tout, même à l’instrumentalisation politique du Conseil d’État. Après avoir rendu une réponse à une question prioritaire de constitutionnalité sur les assignations à résidence pleine d’avertissements sur la fin de la plaisanterie, le Conseil d’État s’est rebellé contre le mauvais usage que le Président fait de lui. Ses membres ont en effet considéré, dans le cadre de l’avis qu’ils doivent donner avant tout vote d’une loi, que le déchéance de nationalité était conforme aux principes constitutionnels dès lors qu’elle était inscrite dans la Constitution (ce qui était l’objet même du texte), mais que l’état d’urgence ne pouvait être prolongé automatiquement, comme le proposait le gouvernement.

Le petit calcul de François Hollande a donc échoué : voilà notre Président obligé de faire face à ses responsabilités et contraint à faire ce qu’il a dit.

Hollande et le rétropédalage

En homme d’État, Hollande pourrait expliquer, et il y trouverait un écho populaire, que la déchéance de nationalité pour fait de terrorisme est un symbole fort qu’il envoie aux enfants issus de l’immigration dont une minorité est tentée par un soutien à l’État Islamique, voire par une participation active au Djihad. Il pourrait choisir de dire : on ne peut être Français et combattre la France.

Mais François Hollande n’est pas un homme d’État, c’est un homme de calcul. Il a proposé la déchéance de nationalité pour éviter une déroute aux régionales, légitimer sa candidature à sa propre succession en 2017 et affaiblir la droite traditionnelle à l’approche du scrutin. Face au passage à l’acte, il ne cherche pas à porter le flambeau d’une mesure qui indispose son camp, il rétropédale. Tous les arguments sont désormais utiles pour expliquer que la déchéance de nationalité, ce n’est pas si bien que ça. Vérité le lendemain des attentats, erreur le surlendemain.

Hollande et les mesures efficaces

Le principal argument utilisé pour justifier l’abandon en rase campagne de la déchéance de nationalité est celui de l’efficacité : pas la peine de faire une révision constitutionnelle pour quelques gugusses à peine. Cela ne serait pas convenable. Il faut bien entendu comprendre, derrière cet argument : pas la peine de mettre la majorité parlementaire, qui représente désormais moins de 20% des électeurs réels, à feu et à sang à un an et demi des présidentielles pour quelques terroristes dont tout le monde se tamponne.

Les familles, amis, proches, des 130 victimes du 13 novembre apprécieront. Les 7 millions de Français qui défilaient le 11 janvier aussi, s’ils se souviennent encore du pourquoi de leurs défilés.

Hollande et la fin de la parole politique

Ce que François Hollande, pas plus que son entourage d’ailleurs, ne semble pas mesurer, c’est l’extrême lassitude de l’opinion vis-à-vis de ces petits calculs. Si une leçon est à retenir des élections régionales, c’est que l’opinion est totalement désabusée par la politique, et exaspérée par ces effets d’annonce totalement étrangers à l’intérêt général.

On dit que François Hollande, pour échapper à la solitude du pouvoir, s’invite régulièrement dans des dîners en ville, chez des journalistes du microcosme. C’est probablement son principal problème. François Hollande n’est pas le Président de la République française, il est le Président du microcosme parisien, celui qui peut passer un dîner entier à débattre de choses futiles pour le plaisir du débat, celui qui est obsédé par les principes de la bonne éducation bourgeoise : ne pas parler trop fort, ne pas être trop radical, ne pas être populiste, mépriser les pauvres mais en dire du bien, mépriser les travailleurs manuels mais en dire du bien, mépriser les immigrés mais en dire du bien, toute cette épaisse couche de conventions qui dissimule un immense égoïsme et une rupture profonde, savamment cultivée, avec le pays.

François Hollande est trop coupé des réalités, comme Lionel Jospin le fut en son temps, pour comprendre que ce mal-là lui jouera un vilain tour… un tour qui pourrait bien entraîner des dommages collatéraux pour la parole politique et pour la démocratie elle-même.

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  • hollande , la fosse tranquille…..

  • Hollande et les politiques préparent le futur conflit de Yougoslavie en toutes connaissances.
    Moi qui ait vécu tant d’années dans un pays en paix, j’en suis catastrophé.

  • La farce tranquille conviendrait aussi…

  • Merci pour votre analyse, Monsieur Verhaegne, mais votre idée centrale relève du même genre d’erreur que celle que vous reprochez à Hollande lui-même !
    Les français, l’opinion, les masses (appelez-les comme vous voudrez) ne sont pas las des calculs de Hollande : ils ne les voient et ne les comprennent pas !
    Ils sont las de leur situation qui est de plus en plus difficile, mais ils n’ont pas ni la clairvoyance, ni le recul, ni la conscience politique/cienne pour comprendre les mécanismes qui sous-tendent les prises de position ou les décisions du gouvernement.
    Il suffit d’écouter dans les transports, au café ou ailleurs (même dans les vrais lieux où on trouve de vrais gens) pour le réaliser.
    En prétendant le contraire, vous démontrez que vous faites partie, vous aussi, de ce « microcosme parisien » qui a du mal à ne pas croire qu’il est la France….

    • L’important serait que le « microcosme » comprenne que Hollande est en train de scier la branche sur laquelle ils sont assis.

    • En partie d’accord avec vous.

      Il me semble effectivement que les « vrais gens » (pour reprendre votre expression) ne voient pas les calculs et/ou s’en tamponnent, confrontés qu’ils sont à leurs difficultés.

      Il n’en reste pas moins qu’au bout du compte, ils perçoivent l’agitation du landerneau politique et voient son inefficacité.

      De plus il me semble qu’il y a une sorte de « deuxième cercle ». Ceux qui ne font pas partie du microcosme et ne sont pas invités aux dîners en ville. Mais qui suivent de près l’actualité.
      Les lecteurs de ce site par exemple.
      Et chez ceux là l’exaspération monte (il suffit de lire les commentaires).

  • Il serait souhaitable que l’opinion publique passe de la lassitude à la lucidité et sanctionne fermement le calculateur!

  • Je voulais dire : qui a du mal à croire qu’il n’est PAS la France… 🙂

  • Il ne doit pas être 100% tranquille tout de même.
    Rien qu’en regardant le nombre de gendarmes qui accompagnent notre « fraise des bois » lors de ses déplacements de campagne électorale.

  • Analyse très lucide de cette caste d’hommes politiques qui prétendent incarner l’Etat…
    Ils ne représentent qu’eux-mêmes, assoiffés de pouvoir et de leurs prébendes, Mitterand à ouvert la voie suivi de tous ces personnages qui se gonfle d’importance. Le logiciel socialiste est complètement dépassé et n’a jamais apporté que misère et désolation.
    Notre pays sombre dans le déclin et la presse de « gôche » est complice de ces usurpateurs.
    Qui se lèvera pour virer tous ces petits « mecs » et proposer un vrai projet pour relever notre beau pays ?
    Dans deux jours, c’est Noël ! Cela permet de rêver et d’espérer …

  • il s’invite dans des dîners avec des journalistes qui ne sont plus lus par personne

    son éphémère popularité s’effondre déjà …

    • il les invite aussi les journalistes à l’Elysée .Au début du mois il a invité Gilles Bouleau et la remplaçante de Chazal à dîner.
      Maintenant que France 2 est totalement gérée par des « amis » de gauche (le dernier en date étant Michel Field à la direction de l’information) il se met à ratisser large afin qu’il n’y ait plus aucune voix discordante dans le monde des media. L’URSS et la Chine de MAO ne faisaient pas mieux.

  • Notre père, délivrez nous du mal.
    Amen.

  • La photo est ancienne, car, désormais, la bouffissure a envahi le visage, à force de manger comme les « riches ». Quant à la bonne bedaine, patiemment remplie de soles et d’écrevisses (sa gourmandise), n’en parlons pas!
    En fait, c’est son seul idéal: vivre comme ceux qu’il n’aime et à leur dépens. Et il représente fort bien la poignée de nihilistes qui ont réussi à le faire élire: des minables qui tentent, par tous les moyens, de se persuader qu’ils valent beaucoup plus que ce qu’ils sont, des escrocs de la morale.

    • « des minables qui tentent, par tous les moyens, de se persuader qu’ils valent beaucoup plus que ce qu’ils sont »

      C’est le lot de chacun, mais chez les politiciens c’est pathologique. Il faudrait intégrer ce concept dans la constitution pour établir des garde-fous. On se focalise sur la pure malhonnêteté ou les conflits d’intérêts. Mais n’importe qui accède au pouvoir devient dangereux par l’idéologie et le fait d’adapter plus ou moins consciemment ses idées à son intérêt personnel.

      Je n’ai pas le sentiment qu’on ait fait de gros progrès depuis la 3e République, faute d’intégrer le facteur humain dans la constitution.

  • des microcosmes existent par millions, le parisien n’est pas pire que le toulousain ou le lyonnais , leur pouvoir est d’avoir le droit de nous ignorer…et ils nous ignorent sauf lors des festivités électives , le gros nonosse jeté en parure au bon peuple pour lui faire croire qu’il existe mais a part leur personnel de maison (qu’ils méprisent) , ils ne vous voient pas sauf lorsque vous descendez hurler dans la rue ..et ce n’est pas demain la veille !.

  • Est-on bien dans une démocratie ? La démocratie a-t-elle déjà existé en France ? Nous avons plutôt en fait l’illustration du fonctionnement de l’énarchie … l’ancien régime était le pouvoir absolu, les institutions d’aujourd’hui repose sur le pouvoir relatif… mais le fait d’avoir des élections à scrutin majoritaire donnant des pouvoirs démesurés à un individu n’a jamais été le symbole de la démocratie …

    • Nous somme dans une oligarchie, et depuis bien longtemps.

      • Et les gens pensent toujours qu’on est dans une démocratie juste parce qu’ils peuvent glisser un bout de papier pour réélire leurs maîtres.
        On est resté dans une sorte de monarchie élue, une oligarchie, véritable berceau des républiques bananières qui ont tôt fait de copier-coller ce régime de dupes (et qui est pourtant accepté par la masse, sinon imposée soit par la force, soit par l’étranglement économique mafieux).

  • « François Hollande est trop coupé des réalités […] pour comprendre que ce mal-là lui jouera un vilain tour »
    Effectivement, il pourrait être contraint de profiter de sa retraite mensuelle à 40k€ et tous les avantages offerts par son ancienne fonction de président … j’imagine qu’il doit trembler pour son avenir !
    Quant aux dommages collatéraux « pour la parole politique et pour la démocratie », il m’est avis qu’il s’en moque comme de sa 1ere concubine …
    @marie hollande la fosse tranquille, j’adore :’-D

  • Un politicien chevronné une erreur de le sous estimer
    Ce qu’ a retenu ma récente correspondante qui habite loin de Paris c’ est que ces derniers temps il s’ est beaucoup remué si je l » ai bien comprise au four et au moulin c’ est ça qu’ elle a retenu et je ne l’ ai pas contrarié , la propagande sera plus forte que mes raisonnements pas d’ illusions pour moi

  • Les commentaires sont fermés.

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