Le futur appartiendra aux inventifs

Faites quelque chose que les étrangers ne peuvent pas réaliser pour moins cher et que les ordinateurs ne peuvent pas faire plus rapidement.

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Le futur appartiendra aux inventifs

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 9 novembre 2015
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Par Chris Campbell

TZA-brain(CC BY-NC 2.0)
TZA-brain(CC BY-NC 2.0)

 

Reprenons le fil de notre conversation. Nous vous expliquions que le futur n’appartient plus à ceux qui ont des aptitudes logiques. L’avenir appartiendra à ceux qui ont des aptitudes liées à l’empathie et à l’inventivité.

Nous vous expliquions que l’ère de l’information et de cerveau gauche, laissait le pas à une ère conceptuelle qui s’appuie sur le cerveau droit. Selon Daniel Pink, il existe trois tendances de fond qui le prouvent : l’Asie, l’automatisation et l’abondance.

L’Asie : le monde se rétrécit

Aujourd’hui, il est possible d’engager en un clic des personnes hautement qualifiées d’un bout à l’autre de la planète.

« L’une des questions les plus controversées, actuellement, c’est la délocalisation », nous dit Daniel Pink. « Ces escadrons de cols blancs en Inde, aux Philippines et en Chine terrifient les petits génies de la programmation en Amérique du Nord et en Europe.

Et il ne s’agit pas uniquement de tâches technologiques. Si vous vous promenez dans des quartiers de bureaux en Inde, vous verrez des experts comptables en train de préparer des déclarations fiscales américaines, des avocats faisant des recherches sur de la jurisprudence européenne, et des radiologues interpréter des scanners pour le compte d’hôpitaux américains. 

La réalité à l’origine de ces inquiétudes est la suivante : à mesure que le coût permettant de communiquer d’un bout à l’autre du monde deviendra presque nul, que l’Inde deviendra le pays comptant le plus d’anglophones au monde, et que les pays en voie de développement continueront de produire des millions de travailleurs aux capacités intellectuelles élevées, la vie professionnelle des occidentaux va changer du tout au tout.

Si l’on peut mouliner des chiffres, interpréter des graphiques et écrire des lignes de code pour moins cher à l’étranger, et satisfaire le client instantanément via la fibre optique, c’est là-bas que partira l’emploi.

Mais cela ne fera disparaître que certains emplois de type col blanc : ceux que l’on peut réduire à un ensemble de règles, de procédures et d’instructions. C’est pourquoi les tâches restreintes à l’hémisphère gauche du cerveau, telles que la programmation, la comptabilité, les recherches juridiques et l’analyse financière migrent de l’autre côté de l’océan.

Mais c’est également pourquoi énormément d’opportunités demeurent, pour les gens et les sociétés effectuant moins de tâches routinières : les programmateurs capables de concevoir l’intégralité de systèmes, des comptables qui font du conseil personnalisé à forte valeur ajoutée, et des banquiers plus experts en affaires qu’en tableur Excel.

À présent que les étrangers peuvent accomplir ce travail de l’hémisphère gauche du cerveau pour moins cher, nous, les Américains et Européens, nous devons mieux faire fonctionner l’hémisphère droit de notre cerveau. »

L’automatisation : plus la technologie progressera, plus vite nos anciens types d’emplois disparaîtront

avenir inventifs rené le honzecHeureusement les ordinateurs sont limités. Ils ne peuvent rien créer de nouveau. Seuls les humains savent le faire.

Daniel Pink explique ce qui suit :

« Au siècle dernier, les machines ont prouvé qu’elles pouvaient remplacer les muscles des hommes.

Aujourd’hui, les technologies prouvent qu’elles peuvent surpasser l’hémisphère gauche du cerveau humain : elles sont capables d’effectuer des tâches séquentielles, réductrices et de mieux calculer, plus rapidement et de façon plus précise, que les individus dotés des QI les plus élevés.

Prenons les emplois au sein des services financiers. Les courtiers qui ne faisaient qu’exécuter des transactions sont finis. Les services de trading en ligne et les faiseurs de marché réalisent ce travail bien plus efficacement. Les courtiers qui ont survécu se sont métamorphosés de preneurs d’ordre routiniers en conseillers nettement moins faciles à imiter, capables de comprendre les objectifs financiers globaux d’un client, voire même ses émotions et ses rêves.

Ou bien prenons les avocats. Des services en ligne bon marché, procurant conseils et informations, transforment la pratique du droit. Vous pouvez aujourd’hui vous passer d’un avocat ou juriste dans bien des cas et procéder par Internet. Internet est en train d’ébranler le monopole de l’information que détenaient depuis longtemps de nombreux avocats aux honoraires très élevés et à la pratique professionnelle mystérieuse.

Au lieu d’engager un avocat coûteux, vous pouvez télécharger des formulaires à compléter représentant des contrats, des testaments, et des articles de statuts d’entreprise qui coûtaient une fortune, autrefois, lorsqu’ils étaient « rédigés » par des avocats.

Tout emploi se réduisant à un ensemble de règles est en danger. Si un comptable installé en Inde, à 500 $ par mois, ne vous fauche pas votre boulot, alors Turbo Tax s’en charge. À présent que les ordinateurs peuvent accomplir ce travail de l’hémisphère gauche, nous devons plus que jamais nous fier à l’hémisphère droit de notre cerveau. »

L’abondance force ceux qui conçoivent les produits à se concentrer sur la beauté et l’émotion, en plus de la fonctionnalité

« La production de masse », écrit Sam Brinsom, « c’est de trouver facilement et à un coût abordable n’importe quel produit dont vous avez besoin, ce qui revient à satisfaire des besoins qui étaient auparavant trop chers ou hors de portée. Cette abondance force ceux qui conçoivent les produits à se concentrer sur la beauté et l’émotion, en plus de la fonctionnalité. »

Daniel Pink rappelle que :

« L’économie de l’information a produit un niveau de vie que nos grands-parents n’auraient jamais pu imaginer dans leur jeunesse.

Ce qui définissait leur vie, c’était la pénurie. La nôtre est forgée par l’abondance. Vous voulez des preuves ? Passez cinq minutes dans un magasin Fnac. Ou alors regardez dans votre garage. Autrefois, tout un chacun aspirait à posséder une voiture. Aujourd’hui, il y a plus de voitures que de conducteurs titulaires du permis de conduire. Cela signifie qu’en moyenne, chaque personne en mesure de conduire possède sa propre voiture.

Et si votre garage est également encombré de biens de consommation, alors vous n’êtes pas le seul. »

En 2014, aux États-Unis, le secteur du rangement a généré à lui seul 27,2 milliards de dollars.

Mais cette tendance est en train de se modifier. Actuellement, les consommateurs commencent à dépenser plus sur des expériences que sur des choses. À un stade de cette course folle vers l’accumulation de plus en plus de choses, les Occidentaux ont commencé à remarquer qu’il est futile de ne consommer que pour consommer. Progressivement, les choses que nous achetons ont plus de sens.

Daniel Pink explique que « l’Ère de l’Information a débridé une certaine prospérité qui, à son tour, valorise aujourd’hui des sensibilités moins rationnelles : la beauté, la spiritualité, l’émotion. »

Et nous y voilà.

Ces forces issues de l’Asie, l’automatisation et l’abondance contribuent à nous faire passer à l’Ère Conceptuelle. Nous progressons vers une société de créateurs, d’individus doués d’empathie et producteurs de sens.

« Si l’Ère Industrielle s’est construite sur le dos des gens », écrit Daniel Pink, « et l’Ère de l’Information sur l’hémisphère gauche du cerveau, l’Ère Conceptuelle se construit sur notre hémisphère droit.

Nous avons progressé d’une société paysanne à une société ouvrière puis à une société de travailleurs intellectuels. Et à présent, nous progressons vers une société de créateurs et d’individus doués d’empathie, capables de cerner des schémas de représentation et producteurs de sens.

Mais que ce soit clair. Le futur n’est pas une sorte de paysage manichéen dans lequel les individus seront soit une espèce éteinte dotée d’un hémisphère gauche, soit une espèce pleinement épanouie dotée d’un hémisphère droit. Un pays où les professeurs de yoga millionnaires conduiront des BMW, où les programmeurs essuieront les comptoirs dans des chaînes de fast-food… Non. La pensée logique, linéaire et analytique demeure indispensable.

Mais, désormais, la pensée logique ne suffit plus. Pour prospérer dans cette ère, nous devrons compléter nos aptitudes technologiques très développées avec d’autres, orientées high concept et high touch.

Le high concept, c’est la capacité de créer une beauté artistique et émotionnelle, de cerner les représentations et les opportunités, d’élaborer un récit satisfaisant, et de trouver des inventions.

Le high touch, c’est la capacité à éprouver de l’empathie, à comprendre les subtilités des interactions humaines, à trouver une certaine joie en soi et à se projeter au-delà du quotidien, à la recherche d’un objectif et d’un sens. »

Vous voulez avancer ? Alors c’est simple…

Faites quelque chose que les étrangers ne peuvent pas réaliser pour moins cher… que les ordinateurs ne peuvent pas faire plus rapidement… et, nous dit Daniel Pink, « quelque chose qui comble l’un des désirs transcendants et non matériels de notre nouvelle ère. »

En d’autres termes, Daniel Pink nous dit de nous servir de notre hémisphère droit.
Tribord toutes !


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  • L’avenir a toujours appartenu à ceux qui savaient concilier l’attrait pour l’utilisateur avec la faisabilité technologique. Les doux rêveurs proposant de privilégier l’empathie et la beauté conceptuelle en laissant les ordinateurs se charger du reste dont ils sont théoriquement capables se rendent vite compte que comme disait Yogi Berra, «En théorie, il n’y a pas de différence entre la théorie et la pratique. En pratique, il y en a une.» Si vous avez un rêve et que vous comptez sur d’autres, machines ou humains, pour vous le réaliser, ça restera un rêve.
    Pire, on constate que livrées à elles-mêmes, les technologies, informatique en particulier, s’auto-entretiennent et s’étendent jusqu’à utiliser la totalité des ressources disponibles au lieu de se mettre au service de l’Homme : on dirait des administrations publiques. Quelle que soit la moitié de cerveau qui se développe, elle n’arrivera à rien si elle ne développe pas sa contre-partie de l’autre côté en proportion.

    • Il y a 25 ans, Aérospatiale et Airbus se rendaient compte que la spécification hyper-détaillée de leur logiciel – pour contrainte de qualité – les conduisait à payer un cout élevé pour faire écrire des programmes par des sous-traitants alors qu’ils avaient fait eux même tout le boulot et donc déjà supporté les couts.

      Simplement, il n’avaient pas réalisé que c’était un problème hémisphérique.

  • Par exemple sur le site http://www.bbc.com/news/technology-34066941, l’architecte est quasi-irremplaçable par des robots. Mais le chômage en France de cette profession est d’au moins 10%, d’où le problème.

    C’est sûrement une question idiote mais pourriez-vous me donner des exemples de métiers à la fois difficilement reproductible par des cols blancs indiens/ordinateurs et épargnés par le chômage?
    Cela me parait utopique comme métier 🙂

    Merci

    • Le paramédical en général… Mais c’est loin d’être un métier utopique, car coûteux physiquement et psychiquement. De plus avec les prévisions sur le budget santé et l’immobilisme de la France, le revers de la médaille arrive à grand pas.
      Une partie de l’avenir se retrouvera pour certains vers une reconversion pour la médecine douce (je vais m’y lancer aussi pour compléter ma formation initiale), qui justement demande plus de sollicitation de l’hémisphère droit…

  • Avec des si, on mettra Paris en bouteille. Il est gentillet ce Daniel Pink mais il ne s’agit pas que d’ inventer dans l’absolu. Plutôt d’inventer un truc qui paraisse utile au moins suffisamment pour que des quidams aient envie de remplacer de beaux billets par le truc tout beau tout neuf. Et que leur essuyage de plâtres ne coupent l’ envie aux suivants…

  • C’est impossible de globaliser l’évolution de l’humanité.
    Deux milliards de personnes n’ont pas accès à l’électricité.
    Deux autres milliards ont l’électricité, mais juste pour quelques ampoules, un frigidaire et une pompe à eau ou un outil.
    Cet article pour eux n’a aucun sens.

    Il y aura de plus en plus une fracture entre les sociétés industrialisées, nous. Et celles qui ne le sont pas, sociétés traditionnelles, principalement dans l’hémisphère sud.

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