Chômage, croissance et principe de précaution

Certains principes présentent l’inconvénient de bloquer toute innovation.

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Chômage, croissance et principe de précaution

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 11 octobre 2015
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Par Yves Buchsenschutz

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Le président Chirac en son temps prit la peine de faire inscrire le principe de précaution dans la Constitution. Le président Sarkozy, lui, fit voter une loi interdisant ne serait-ce que la recherche de gaz de schiste en France ; les écologistes encouragés par les socialistes, refusent eux, au nom du développement durable, toute modification, serait-elle infime, de notre environnement, congelé brusquement dans un état ectoplasmique, depuis qu’ils sont arrivés, car ils oscillent invariablement entre : « ne touchez à rien » et « revenez à un âge d’or où l’homme n’était pas encore intervenu » soit, revenons à la nature « vierge ».

Ces positions de principe, interprétées soigneusement par les associations idoines, voire par les tribunaux et accompagnées par les politiques de manière quasi unanime car gagnante sur un plan électoraliste (maire bâtisseur, maire battu !) ont tout de même un inconvénient majeur, c’est qu’elles bloquent toute innovation. En effet, qui dit innovation, dit changement, et qui dit changement dit risque potentiel donc conflit avec le principe de précaution, surtout si l’on exige de l’inventeur la preuve qu’il n’y aura aucune conséquence possiblement néfaste avant expérimentation.

On rétorquera, pourquoi changer ? Tout simplement parce que simultanément à ce gel décrété de notre situation, nos concitoyens veulent, eux, voir leur situation s’améliorer. Rappelez-vous le nombre intolérable de pauvres et d’inégaux que notre société génère chaque jour : comment en sortir ? Par la croissance, car il est simple de calculer que la répartition n’y suffira pas (divisez la fortune de Madame Bettencourt par 65 millions de Français : vous obtiendrez un billet de 500 euros et ceci une seule fois !).

Or la croissance est par essence changement, évolution, innovation, et… risque. Une étude de l’IRDEME a révélé récemment que la croissance, en particulier de l’emploi, dans les grands pays développés, est le fait quasi exclusif d’entreprises nouvelles et innovantes, celles très exactement que le principe de précaution écarte, voire interdit – largement accompagné par une politique fiscale et administrative confiscatoire et paralysante (à côté du gaz de schiste, pensons aux OGM, au foisonnement exponentiel des normes, à l’hypertrophie du Code du travail, etc.).

Au passage, il ne faut pas se faire trop d’illusions sur la croissance dite « verte ». Si celle-ci consiste en une augmentation ou une aggravation de normes diverses, elle va, non seulement avoir beaucoup de mal à se réaliser, mais encore augmenter l’insatisfaction des consommateurs puisqu’en face d’efforts supplémentaires demandés, je n’aurai que peu d’effets positifs perçus. Examinons par exemple le cas de la construction dont le coût a dérapé de près de 30% en 10 ans par prise en compte de contraintes « vertes » ou sociales : la prestation perçue par le consommateur n’a évolué que dans son prix ! Il n’est pas facile de constater chaque jour l’avantage d’un double-vitrage ou d’une isolation. Par contre la hausse du prix des logements ou des loyers est immédiate et concrète. La plupart des prestations « vertes » sont chères et peu sensibles pour le consommateur qui ne retrouvera pas l’amélioration visible de sa situation attendue. S’il s’agit de nouveaux produits ou services, le principe de précaution va freiner leur développement. La prudence généralisée ou le développement durable va aller de fait dans le même sens.

Un faible espoir s’était fait jour, début 2015 : de plus en plus de personnes commençaient à comprendre le caractère anti-croissance et anti-emploi du principe de précaution. Peut-être allait-on l’aménager ? La réponse – intégrée de mémoire dans la loi sur la transition énergétique – est pour le moins curieuse : c’est la nouvelle réglementation sur « l’obsolescence programmée des produits » 1 cette prétendue dérive systématique des industriels qui consiste à fournir des produits délibérément fragiles ou irréparables pour en vendre plus souvent. Cette infraction, plutôt durement réprimée – 300 000 euros d’amende et/ou 4 ans de prison – va de fait de nouveau à l’encontre de l’innovation. Qui désormais va prendre le risque de lancer, d’améliorer ou de modifier un produit avec une telle épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête ? (Sachant que des règles existent déjà : un fabricant d’automobiles doit fournir des pièces de rechange pendant 10 ans par exemple, ou la garantie décennale dans la construction.)

À noter qu’avec ce principe, on aurait dû garder en service les charrues de nos grands-pères puisqu’elles ne sont pas encore usées ! Nous devrions réparer des ordinateurs ou des téléphones portables d’il y a 10 ans alors que les technologies ont multiplié leur puissance par 10 ou 100 et divisé leur coût dans les mêmes proportions ? Stupide. Au demeurant, un industriel qui fournit ce type de prestation risque fort d’être vite repéré et de perdre ses clients car non fiable.

La cerise sur le gâteau vient de la récente loi « anti-gaspillage », heureusement bloquée pour le moment par le Conseil Constitutionnel. Il est bien connu que l’objectif d’un commerçant ou d’un supermarché est de générer de la marchandise invendable et de la détruire ensuite… comme celui d’un industriel d’ailleurs ! Les invendus sont bien évidemment l’objet d’une recherche d’élimination permanente dans les circuits de production et de distribution et quand on ne peut les éviter, on cherche a minima des solutions pour en diminuer le coût : soldes, réutilisation, recyclage, etc. Alors faisons une loi et interdisons le gaspillage, donc l’essai, donc l’erreur ! Donc quelque part l’innovation et la croissance.

Les problèmes du chômage et des réformes nécessaires à son recul, en particulier celui de l’innovation, ne sont pas encore près de commencer à se régler.

  1. L’obsolescence programmée des produits consiste, pour un industriel, à introduire délibérément dans un produit une panne irréparable et à délai connu pour provoquer son ré-achat au lieu de sa réparation et donc ainsi d’augmenter ses ventes. À noter que des politiques telles que les DLUO par exemple, introduites à l’origine pour des raisons de sécurité, peuvent devenir dans certains cas des facteurs d’obsolescence programmée des produits de fait ! Je jette mon fromage parce qu’il a dépassé la date « de consommation » !
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  • Les Verts, qui bien entendu ne sont pas des gauchistes, mais depuis la naissance de leur premier parti politique, s’affichent régulièrement avec précisément des partis de gauche pour pouvoir exister sur la scène politique et s’approcher du pouvoir, sont l’antithèse du progrès.

    En effet, ils préconisent de rejeter quasi systématiquement les nombreuses évolutions technologiques, au prétexte qu’elles sont, selon eux, susceptibles de polluer notre environnement.

    Je dirai, les concernant :

    1) Que cette idéologie, car c’est bien de cela dont il s’agit, sont avec leurs idées déphasées, hors du temps des nuisances, telle la pollution qu’ils combattent.
    2) Comme les gens de gauche auxquels ils se rattachent, ce sont contrairement à ce qu’ils prétendent, des réactionnaires. En effet être réactionnaire, c’est refuser les changements.

    C’est bien le spectacle auquel on assiste avec leur démarche « ennaphtalinée » aux côtés de leurs alliés de gauche, eux aussi, confits de bondieuseries socialo communistes.

    Vive le progrès en dehors de ces gens dépassés, accrochés à leurs avantages acquis auxquels il ne faut surtout pas toucher, sinon gare…de nouvelles lois propres à contraindre encore plus pourraient nous tomber sur le nez pour nous apprendre…à vivre selon leurs bons préceptes…

    • « Les Verts, qui bien entendu ne sont pas des gauchistes »

      Faux, ce sont des gauchistes qui ont mûri à l’envers.

      • Noel MAMERE a écrit un jour : « l’écologie, c’est la solidarité et la solidarité, c’est la gauche » !

      • Je crois que vous n’avez pas apprécié à sa juste valeur mon ironie lorsque je dis que les verts ne sont pas des gauchistes…Par contre merci de m’expliquer ce que veut dire « gauchistes qui ont mûri à l’envers », j’avoue que e ne comprends pas.

  • Article: « revenez à un âge d’or où l’homme n’était pas encore intervenu »

    Les bobo-verts sont la définition même des réactionnaires.

    « réactionnaires:
    Une réaction désigne la politique prônant et mettant en œuvre un retour à une situation passée réelle ou fictive, selon le point de vue, révoquant une série de changements sociaux, moraux, économiques et politiques. Un partisan de la réaction est nommé « réactionnaire » »

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