Quand le patron baisse son salaire, l’entreprise trinque

Un chef d’entreprise baisse son salaire pour assurer un revenu minimum à ses employés : résultat catastrophique.

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Verre de vin (crédits Jonathan Malboeuf, licence Creative Commons)

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Quand le patron baisse son salaire, l’entreprise trinque

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 11 août 2015
- A +

Par Michel Kelly-Gagnon, depuis le Québec.
Un article de l’Institut économique de Montréal

Verre de vin (crédits Jonathan Malboeuf, licence Creative Commons)
Verre de vin (crédits Jonathan Malboeuf, licence Creative Commons)

Dan Price est le patron de Gravity Payments, un processeur de cartes de crédit établi à Seattle. En avril dernier, il annonçait qu’il diminuait son propre salaire de 90 % afin d’offrir un revenu minimum de 70 000 dollars à tous ses employés.

Du coup, il est devenu la coqueluche d’une certaine « bonne gauche » éprise d’égalité. Il a été invité dans les talk-shows, son cas a été étudié par des professeurs d’université, et des femmes ont voulu sortir avec lui. Sauf que c’est connu : l’enfer économique est souvent pavé de bonnes intentions.

Trois mois plus tard, Dan Price doit maintenant louer sa maison pour pouvoir boucler ses fins de mois. Deux de ses meilleurs employés ont quitté l’entreprise suite à son geste. L’entreprise n’est pas devenue plus productive ni profitable, et le climat à l’intérieur s’est détérioré. Au point où le frère de M. Price, cofondateur de l’entreprise, le traîne en justice pour avoir dilapidé les bénéfices. On peut le comprendre : entre 75 % et 80 % des profits de 2014 ont été consacrés à l’établissement de ce « revenu minimum ».

Plusieurs raisons peuvent probablement expliquer les déboires de l’entreprise, mais une chose demeure : on ne peut suspendre la loi de la gravité, ni certains principes économiques de base.

Les incitations comptent

Les employés productifs, ou avec plus d’ancienneté, n’étaient pas de ceux qui applaudissaient à tout rompre lorsque le patron a annoncé son plan. Après tout, pourquoi un nouvel employé, sans expérience ni la même productivité, gagnerait autant qu’eux ? Les différences de salaire, de façon générale, reflètent la productivité d’un travailleur – ce qu’il peut amener à l’entreprise. Si un travailleur productif voit chaque employé (même improductif) gagner le même salaire que lui, il risque de partir chez un concurrent qui saura, lui, l’apprécier à sa juste valeur.

L’un des employés qui a quitté a d’ailleurs dit aux médias (traduction libre) : « Maintenant, les employés qui se contentent seulement de ‘’puncher’’ au début et à la fin de la journée gagnent autant que moi. Cette mesure place tout le monde sur un pied d’égalité, les employés performants comme les moins motivés ».

Notons que les mêmes « conséquences inattendues » se manifestent aujourd’hui dans les magasins Wal-Mart aux États-Unis, où la direction a annoncé une hausse du salaire minimum au sein de l’entreprise.

Les profits comptent, surtout pour les investisseurs

La politique d’« égalité salariale » de M. Price, même si bien intentionnée, n’a pas augmenté la rentabilité de l’entreprise. Au contraire, ce dernier n’aurait jamais travaillé aussi dur de sa vie pour faire fonctionner l’entreprise.

Mais surtout, en dilapidant les profits, il s’est aliéné un investisseur de longue date (son propre frère), et probablement de futurs investisseurs, pour qui la profitabilité d’une entreprise – qui permettra éventuellement de faire fructifier leur investissement – est généralement la raison première qui les pousse à risquer leur épargne.

Finalement, on pourrait aussi ajouter une leçon : celle que la publicité, ça coûte cher. En effet, certains estiment que  cette décision de M. Price aurait été motivée par l’idée de se faire un peu de publicité « gratuite »…

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  • « incentives work » : les incitations comptent n’est qu’une vision partielle. Le point important est qu’il n’y pas moyen de faire autrement, parce que l’absence d' »incentives », de carottes, marche aussi mais dans l’autre sens. Pour preuve la fonction publique française…

  • « incentives work » it’s an understatement…
    Les employés fonctionnent comme des investisseurs: chaque décision significative (à l’échelle individuelle) induit sa part de risque, et un retour sur cette prise de risque est donc nécessaire pour que chacun s’investisse. Faute de quoi, l’organisation se fonctionnarise, chacun cherchant à s’exposer le moins possible, ce qui est strictement rationnel.

  • L’expérience de Dan Price est très intéressante car elle met au jour de nombreuses contradictions chez ses détracteurs, notamment les libertariens.

    1. Les mêmes qui justifient les rémunérations pharaoniques de certains cadres et dirigeants d’entreprise aujourd’hui critiquent violemment l’initiative de ce jeune patron. Mais s’ils étaient cohérents ils devraient au contraire nous expliquer que cette initiative permet à l’entreprise d’attirer les meilleurs en offrant une rémunération plus importante, ou alors ils devraient admettre que leur raisonnement était faux. C’est de la logique élémentaire.

    2. Ce sont les mêmes qui nous expliquent que les égalitaristes sont mués par l’envie, la jalousie et favorisent la pauvreté car disent-ils les inégalités permettent une augmentation du niveau de vie absolu des individus. Au lieu de regarder les différences de rémunération, les idividus devraient regarder l’évolution de la leur. Mais ici, ils nous expliquent que certains employés sont mécontents parce qu’ils trouvent injustes que certains de leur collègues soient augmentés et cela même si leur salaire à eux augmente aussi ! C’est exactement le même reproche de jalousie, d’envie qu’on peut leur faire….

    3. Contrairement à ce que prétendent certains, on voit bien que l’idéologie et la politique ont une très grande influence sur l’économie. Les clients qui ont quitté Gravity Payments l’ont fait en grande partie pour des raisons idéologiques. Les clients de Gravity Payments ne sont pas des particuliers, mais bien des entreprises. Gageons que de nombreux dirigeants n’ont pas apprécié l’initiative de Dan Price, une initiative qui ne devait surtout pas se diffuser, donner des idées à d’autres… Croire que business et politique aux USA sont étanches c’est à la fois être naïf et ignorant.

    • 1 : c’est tout le contraire l’entreprise attire ou fait de bons travailleurs des feignants puisque tout effort est vain.

      2 : certains salariés voient comme une injustice le fait que des individus moins capables qu’eux et faisant un mauvais travail gagnent autant qu’eux et savent que cela est mauvais pour l’évolution future de leur salaire et que le gain à court terme est un trompe l’oeil.

      3 : les clients sont parties parce qu’il n’ont perdu confiance dans une entreprise dont ils considèrent qu’elle dilapident ses profits et donc ses investissements et qu’il faut mieux aller voir ailleurs car plus bénéfiques à long terme.

      • 1. Cela s’applique donc aussi aux rémunérations pharaoniques des cadres et dirigeants de certaines entreprises (ce qu’on avait pu constater étant donné le « brillant » bilan de certains….). Vous confirmez donc ce que je pensais.

        2. Ces salariés devraient voir l’augmentation de leur salaire et ne pas s’occuper de celui de leur voisin. C’est en général l’argument des libertariens ou des anti-égalitaristes.

        3. Non, non ce sont bien pour des raisons idéologiques et politiques, pas besoin de couper les cheveux en 4 en invoquant les « anticipations rationnelles », concepts économiques bien fumeux.

        • 1 Prière de définir rémunération pharaonique.

          2 Les salariés n’ont pas votre vision de cour-terme des choses et savent que leurs augmentations futures sont compromises et c’est pour ça que certains sont partis parce que leur perspective étaient meilleure ailleurs.

          3 C’est vrai que l’économie ça ne consiste pas à anticiper.

          • 1. Pas de définition précise, cela correspond aux rémunérations qui font scandale médiatiquement, à partir de quel niveau c’est pharaonique, je ne saurais trop vous le dire, c’est comme si vous me demandiez à partir de combien de grains de sable on peut parler de tas.

            2. Dans ce cas les salaréis ont toujours intérêt à travailler même en étant rémunérés davantage, vous vous contredisez en somme, ou plutôt vous invoquez deux arguments contradictoires selon comme ça vous arrange.

            3. Les anticipations rationnelles sont un concept fumeux car elles permettent d’expliquer pourquoi un agent économique n’agit pas comme il devrait agir selon la théorie, c’est d’ailleurs un peu pour cela qu’elles ont été inventées par Lucas. Cela revient un peu à ce que j’explique au point 2.

            • 1 problème régler!

              2 Vous n’avez jamais quitté une entreprise parce que vous aviez le sentiment à tort ou à raison de ne pas être suffisamment payé et que vos perspectives futures ne reflétaient pas votre valeur et que ceux sont vos collègues qui tiraient plus de profit que vous de vos efforts?

              3 C’est vous qui trouvez que les raisons du départ de certains clients ou investisseurs sont politiques alors qu’elles sont parfaitement rationnelles vu qu’il y a un conflit à la tête de l’entreprise qui va obérer ses perspectives en plus du fait que les profits ne serviront pas à faire croître l’entreprise et que par conséquent ils vos mieux aller chez les concurrents.

              • 1. en effet problème réglé, on ne peut en même temps prétendre que les rémunérations pharaoniques sont justifiées et en même temps critiquer le fait que Dan Price augmente les salaires ! Nous sommes biens d’accord c’est incohérent. Mais vous auriez dû vous en apercevoir plus tôt. Maintenant si vous voulez un ordre de grandeur, on pourrait parler du million par an.

                2. Vous n’avez pas bien compris. Bien entendu qu’il est vraisemblable qu’un individu quitte ‘entreprise si on le paie mieux ailleurs. mais si on le paie plus dans son entreprise, il serait un peu bête de quitter cet endroit tout simplement parce qu’on estime que le balayeur est trop payé, ne croyez-vous pas ? En tout cas, c’est ce que penseraient les libertariens comme Nozick ou les anti-égalitaristes.

                3. Vous avez raison et tort à la fois. D’abord, en effet, pour les clients d’une certaine manière ils font des anticipations, ils ne veulent pas qu’une telle idée puisse se diffuser, donc ils changent de fournisseurs. Rationnel. Ensuite, vous avez tort car si on admet votre hypothèse, les problèmes sont liés à l’anticipation de problèmes, on est là en pleine prophétie auto-réalisatrice ! UNe auto-justification, bref, un monstre logique !

                2.

                • 1 : Pourquoi toute rémunération de 1M ou plus serait toujours injustifié?
                  Le problème de ce qu’a fait Dan Price c’est que ça ne fonctionne pas de toute évidence pas et que ça politique de rémunération ne semble pas tenable sur le long terme.

                  2 : Non il est parfaitement rationnel de quitter un emploi pour un emploi même moins bien rémunéré si les perspectives de rémunération à long terme sont meilleures, et c’est le cas pour les salariés les plus productifs de l’entreprise et c’est pourquoi il ne restera que les moins productifs.
                  Vous avez un gros problème avec la temporalité et le bénéfice que l’on peut obtenir à long terme en prenant une décision qui vous paraisse aberrante à l’instant T.
                  Eviter de citer des auteurs que vous n’avez pas lu ou si vous les avez lu ne citer que ceux que vous avez compris ça vous évitera de passer pour une truffe.

                  3: Les problèmes sont déjà là il y a un conflit à la tête de l’entreprise, et de toute façon anticiper les problèmes engendrés par de mauvaises décisions c’est le role des gents économiques.

                  • Ne vous cassez pas la tête Arno, vous parlez à un troll qui pourrit tous les forums de discussion et qui change de pseudo dès qu’il est banni.
                    Don’t feed the troll !

                    • Surtout vu les betises qu’il annone… un enfant de 10 ans comprendrait!

                    • Ses raisonnement finissent systématiquement en débilités mais c’est toujours surprenant.
                      Seul but poursuivi: remettre une pièce dans le nourrain, diagnostique: troll.

                  • 1. Ai-je dit « injustifié » ?

                    2. Mais oui, mais oui, il y a les anticipations rationnelles qui vous l’explique, le problème c’est que votre raisonnement peut servir à démontrer n’importe quoi. Vous vous en rendez compte ?

                    3. idem.

                • 1. ce que disent les libéraux c’est qu’un patron est libre de fixer les salaires qu’il souhaite aussi délirant soit il. La question ici n’est pas. M. Price a-t-il raison de faire ce qu’il a fait mais son choix est il judicieux? M. Price avait ses « raisons » qui lui semblait probablement rationnelle au moment ou il a pris sa décision. L’avenir nous dira si son « pari » était viable.

                  2. Les employés qui partent pensent peut être tout simplement que leur patron est en train de dilapider l’argent de la boite et que donc celle ci sera bientôt en faillite, autant profiter d’un opportunité qui se présente maintenant de quitter le navire en perdition. Si demain, dans ma boite, tous les salaires passent à 5000 € je ne partirais peut être pas immédiatement mais il est certain que je chercherais du boulot ailleurs car l’issu ne ferai aucun doute.

                  3.La rationalité pour un individu ne consiste pas à faire des choix rationnels dans l’absolu (le concept même est idiot d’ailleurs puisque la rationalité d’un choix ne peut être évalué qu’après coup) mais de prendre des décisions en fonction des éléments de réflexions en sa possession à l’instant t. Par essence tout choix est rationnel à un moment donné même si, après coup, on peut s’apercevoir qu’il s’agissait d’une erreur. C’est l’une des erreur fondamentale des socialo étatiste qui regarde le marché et les individus en essayant de leur appliquer une rationalité « parfaite » alors qu’il s’agit d’un mythe LA rationalité n’existe pas.

                  • 1. Vous ne comprenez rien au libéralisme.

                    2. Vous donnez donc réalité à une autoprophétie, vous comprenez le problème de justiication ?

                    3. Vous avez raison. Les clients ont bien anticipé, ils ont préféré coulé une entreprise qui aurait pu diffusé ses idées, sommes-nous d’accord ?

      • Je ne sais pas si on peut partir du principe de base que les gens veulent en faire le moins possible. Ce n’est pas ce que je constate en tous cas.
        Il y a des gens qui ne travaillent pas bien, ni même beaucoup, mais ce n’est pas forcément de l’arnaque et on n’arrive pas tant que ça à les faire travailler plus ou mieux, que ce soit avec la carotte ou le bâton… des méthodes de management ante-dilluviennes en passant.
        Souvent les gens essayent d’avoir des tâches intéressantes, de se projeter et de collaborer. L’absence de telles gratifications à travers des boucles de rétroaction sociales est un signe très bien compris, et il est tout à fait possible de s’en servir… d’après mon expérience c’est même plutôt efficace. Évidemment pour que ça fonctionne il faut avoir un dynamisme économique important, une assez grande flexibilité des acteurs, avec une sécurité suffisante pour vouloir prendre des risques.

        Pour ce qui est de la clientèle… encore une fois on est dans des réactions tout à fait classiques si il s’agit de calculs sur les éventuels coûts à venir. Les arbitrages relatifs à des changements d’organisation des partenaires sont monnaie courante. Après il y a aussi la question de la politique interne : les systèmes hiérarchiques ne sont jamais neutres, les décideurs ont le droit de ne pas adhérer et de ne pas vouloir avoir à se justifier auprès de leurs propres employés. Mais bon, après, ce sont des actions qui vont avoir des impacts, et il faudra être attentif pour comprendre le sens de la chaîne de causalité dans ce qui va se passer pour cette entreprise. Ensuite, si les choses se stabilisent, les clients devraient essayer surtout de s’intéresser à leurs propres intérêts (ce qui n’est pas toujours le cas encore une fois, il n’est pas rare que l’incertitude et la peur du changement compromettent la mesure de ces intérêts… c’est un phénomène habituel).

    • Personne ne nie que les individus sont tous (égalitaristes ou pas) muent par la comparaison sociale. Ils utilisent la comparaison pour s’évaluer et donc évaluer leur valeur. Va lire ne serait-ce que Festinger (1954), cela te fera un bon début.

      Dans cette évaluation, les comparaisons relatives du rapport entre les efforts (ou l’apport personnel) et l »outcome » ou le gain déterminent des sentiments de privation relative. La théorie de l’équité de Adams (1965) tu connais?

      La question de fond c’est a) qu’est ce que l’on est légitimé à faire ou pas (notamment en terme de contrainte sur les autres) lorsqu’on fonctionne de cette façon et b) quels sont les impacts de ce fonctionnement sur les choix des individus.

      Pour ton point 1:

      Personne ne défend une rémunération en fonction de son niveau, ce qui est défendu c’est la liberté d’une entreprise (patron, actionnaires, etc, c’est selon la forme légale de l’entreprise et donc qui est l’ayant droit) de payer des salaires même « pharaoniques » (il faudrait encore définir le niveau de ce qui est pharaonique ou pas et me donner le critère).

      Un libertarien te dira que lorsque le conseil d’administration ou le CEO ont détourné l’entreprise à leur profit et se votent parmi des salaires pour des raisons qui n’ont rien à voir avec la « willingness to pay » des ayants droit, c’est inadmissible.

      Ce n’est pas le niveau de salaire qui est défendu ou contesté, ce qui est défendu c’est la mécanique au travers de laquelle celui qui décide de payer le salaire est l’ayant droit ou pas ou représente correctement ses intérêts et ses volontés, ce qui est contesté c’est celle ou un groupe de personnes se votent parmi des salaires par conseils d’administrations interposés. Ce qui est défendu c’est la liberté de celui qui paye à décider combien il paye et à payer cher s’il estime que ça le vaut. Ce qui est contesté c’est la détermination du salaire par des réseaux de copinages et de politique, qui font que la décision sur les salaires échappe à l’ayant droit propriétaire de l’entreprise et donc que leur niveau est détachée de l’utilité apportée à celui-ci.

      Ensuite, l’entreprise attire les meilleurs en offrant pour certaines fonctions des salaires (avantages compris) ou des bonus plus élevés que ses concurrents et plus élevés que ceux qui sont offerts à des gens qui apportent moins d’utilité. La raison c’est la tendance à la comparaison sociale relative et les sentiments de justice ou d’injustice que ces comparaisons impliquent.

      L’entreprise n’attire pas les meilleurs en offrant le même salaire à celui qui ne travaille pas qu’à celui qui est brillant. C’est à celui qui est brillant qu’il faut proposer quelque chose de plus, de plus qu’ailleurs et de plus qu’aux autres. En anglais, cela s’appelle un incentive ».

      Et il en va de même entre fonctions ou professions. Si une entreprise veut attirer les meilleurs ingénieurs, elle leur offre de meilleurs salaires que ce qui est offert ailleurs aux ingénieurs. Elle n’attire pas les meilleurs ingénieurs en offrant les mêmes salaires aux balayeurs qu’aux ingénieurs. Au mieux elle aura attiré les meilleurs balayeurs, au pire elle aura découragé tous les ingénieurs.

      Ici l’employeur n’offre pas un meilleur salaire, il offre à peu près le même salaire à tous. Je te laisse tirer toi-même la conclusion. C’est aussi de la logique élémentaire comme tu dis. La différence entre ta logique élémentaire et celle que j’évoque ici, c’est que cette dernière se base sur ce qu’on sait en psychologie sociale du fonctionnement humain (mon point b en exergue), tandis que ta logique élémentaire est fondée sur ton ignorance en la matière.

      Pour ton point 2:

      Ici c’est la réponse à mon point (a) qui lève la contradiction apparente que tu soulèves de façon très malhabile.

      En raison du fait que nous nous évaluons par comparaison relative, ces comparaisons produisent un impact sur notre image et notre estime. En effet, ces comparaisons lorsqu’elles impliquent la supériorité des tiers avec lesquels on se compare impactent négativement notre estime de nous-même.

      En d’autres termes, nous sommes tous jaloux. C’est la raison pour laquelle nombre de gens se prétendent socialistes, ils veulent une redistribution des biens des autres en leur faveur pour réduire la différence. C’est aussi la raison pour laquelle les employés de l’entreprise dont il est question sont mécontents. A l’aune du différentiel de salaire que leur employeur leur paye à eux et à d’autres qui font le même type de travail,m ils ont développé une image d’eux-mêmes (à tort ou à raison peu importe) comme étant supérieurs. C’est cela qui est maintenant challengé par l’égalité salariale, d’où leur décision de partir.

      Personne ne dit ici que les socialistes fonctionnent d’une façon et ces employés d’une autre relativement à ces comparaisons et à leurs effets.

      La vraie différence, c’est de savoir ce qu’on est légitimé à faire pour réduire ces effets quand ils ne nous plaisent pas. Les socialistes veulent exercer une contrainte sur les autres en les forçant à travailler pour eux. Ces employés disposent simplement d’eux-mêmes en quittant un rapport contractuel. Tu vois la différence?

      Le reproche que l’on fait aux socialistes, n’est pas d’être jaloux, c’est de prétendre à user de coercition sur la base d’idéaux, alors que la vrai cause de la coercition c’est leur jalousie. Personne ne reproche aux socialistes d’être jaloux. Nous leur reprochons d’une part de vouloir contraindre les gens, et d’autre part de prétendre que c’est pour leur bien et pour satisfaire de nobles idéaux.

      Il n’y a donc aucune contradiction.

      Ce que les libertariens comme les libéraux conséquentialistes disent, c’est qu’il y a des fonctionnements généraux humains et des lois d’économie qui en découlent, et qu’il est erronée de tenter de construire un système dans lequel on fait fi de cela en pensant que par décret on va changer l’homme et les lois économiques. La jalousie est un de ces fonctionnements inhérents à l’homme (cela ne veut pas dire que nous sommes tous jaloux avec la même intensité, cela veut dire qu’en moyenne nous sommes quelque peu jaloux des autres). Et ce que les liberariens et les libéraux disent c’est qu’elle ne légitime pas la contrainte exercée sur autrui pour la réduire. Par contre, rien n’empêche quelqu’un mue par elle de disposer de lui-même.

      Plus généralement, les libéraux ont compris que dans l’ensemble les humains (en tant qu’animaux sociaux ayant subi une sélection naturelle durant des millions d’année) ont des fonctionnements personnels qui renvoient à ce qu’on appelle communément l’égoïsme. Non pas que la coopération soit impossible, au contraire, dès lors qu’elle permet d’améliorer son sort et donc satisfaire ses propres besoins égoïstes elle sera l’option choisie.

      Les socialistes veulent une société basée sur d’autres principes que ceux qui muent les hommes et veulent de ce fait changer la nature de l’homme. Leurs plans prévoient en effet toujours l’avènement d’un homme nouveau une fois libéré des mauvaises influences sociétales qui le rendraient égoïste. Ils veulent une coopération basée sur l’altruisme qu’ils veulent mettre dans les hommes nouveaux qu’ils entendent façonner de force.

      Les libéraux ont pris acte de ce que l’homme est globalement égoïste par nature et veulent une société qui nous protègent chacun des actes de contraintes exercés par d’autres pour satisfaire leurs besoins égoïstes. Ils veulent une société ou la satisfaction de ces besoins passe par n’importe quel moyen, sauf la contraire des autres. Ainsi, les libéraux ne voient aucun inconvénient à ce que les gens satisfassent leur égoïsme en disposant d’eux-mêmes comme les salariés dont on parle ici (ou en coopérant volontairement, comme ce qu’on observe massivement par les échanges économiques).

      Finalement, pour ton point 3, personne ne dit que politique et idéologie n’affectent pas l’économie. Au contraire, tout le monde l’admet. Le fondement même de toute la théorie économique moderne repose la théorie marginaliste. C’est l’idée que les individus tentent de maximiser une utilité qui est éminemment subjective et donc que les échanges économiques sont hautement affectée par le psychologique des individus, que ce soit leur psychologie individuelle (comme leurs préférences) ou leur perception du système institutionnel dans lequel ils évoluent.

      Ce que nous disons par contre, c’est que dans la plupart des cas plus tu mets de politiques et d’idéologie dans le système pour essayer de faire faire aux gens ce que tu veux qu’ils fassent au lieu de les laisser faire ce qu’ils veulent faire eux-mêmes, et plus le résultat en économie sera mauvais, si ton critère c’est la prospérité économique d’une société et de ses membres,

      Conclusion?

      En fait, Honkol c’est le prototype du gars assez ignorant en économie, en biologie, en psychologie, en sociologie, etc, qui dès lors a de la peine à comprendre ce que disent les libéraux, puisqu’il ne dispose pas des outils de connaissance ou intellectuels pour les comprendre.

      Résultat, il leur fait dire ce qu’ils ne disent pas et voit des contradictions là où il n’y en a pas.

      • De ce que j’ai compris de l’expérience, il reste toujours des différences de salaire. En revanche ce patron prend en compte le résultat d’une étude, peut-être à des fins expérimentales, et je trouverais l’idée très bonne de mettre un peu à l’épreuve les idées, qui dit que la gratification par le salaire fonctionne dans un certain intervalle et qu’en dehors de celui-ci il ne joue plus sur la motivation et l’investissement, voire il peut avoir des effets négatifs. Si personnellement j’ai du mal à généraliser par rapport à mes propres expériences, j’ai pu remarquer ces effets négatifs à plusieurs reprises.
        A côté de ça le salaire n’est pas le seul levier possible pour motiver/remotiver les gens.

        Pour ce qui est de la politique… je ne suis pas d’accord dans le cas présent. Cette entreprise n’a pas d’impact global et l’expérience entreprise n’a pas de visée universelle. Ce n’est pas mettre plus ou moins de politique qui compte, c’est d’être plus ou moins original, ce n’est pas pareil. Il y a des entreprises qui ont des méthodes de management et des modèles économiques originaux qui, quand elle deviennent trop grosses, se retrouvent à être freinées et contrecarrées par les politiques justement parce qu’elles sont trop efficaces, et sous la pression des entreprises plus habituelles. La reproduction d’un fonctionnement traditionnel n’est pas particulièrement apolitique.

  • L’expérience est très récente et inhabituelle. On sait parfaitement que les degrés de libertés sont limités, relativement au système social dans lequel on est, aux contingences matérielles… etc.
    Dans cette expérience les résultats sont multiples, mais je dirais que les réactions rencontrées sont classiques à tout changement, ni plus ni moins. Il y a bel et bien un changement assez profond qui peut avoir des conséquences dans beaucoup de dimensions, ce qui fait que les impacts se retrouvent un peu partout : c’est très classique, on retrouve un peu les mêmes choses quand on met en place un processus qualité au sein de l’entreprise par exemple.
    A plus petite échelle quand on met en place des ateliers de travail pour des décisions stratégiques et qu’on ne se contente pas de l’habituel appareil hiérarchique pyramidal, on se retrouve aussi avec des gens qui quittent les espaces de négociation… ce ne sont souvent pas les plus innovants ni les plus agiles.

    A titre scientifique, tout le monde ne mesure pas sa propre tâche par rapport aux autres et le niveau de rémunération ne semble plus très incitatif à partir d’un seuil (c’est en tous cas un résultat, comme tous les résultats scientifiques il faut rester prudent et sceptique). On sait aussi, ça a été mis en œuvre par le Vietcong pour retourner des américains et la méthode a bien été prouvé à travers divers dispositifs cliniques par la suite, que rémunérer moins quelqu’un permet d’avoir une plus grande adhésion… pas forcément une très grande créativité par contre. Je pense que c’est là que ça se joue.
    Mais de toutes façons ce sont bien les structures hiérarchiques qui sont en jeu dans l’histoire, et les réorganisations actuelles ne semblent pas vraiment du domaine de la volonté : le laisser-faire n’entraîne plus du tout la reproduction du même comme autrefois.

  • « Si un travailleur productif voit chaque employé (même improductif) gagner le même salaire que lui, il risque de partir chez un concurrent qui saura, lui, l’apprécier à sa juste valeur. »

    Il devrait vouloir aller ailleurs si on lui propose mieux ailleurs et pas simplement si son collègue moins productif est soudainement mieux payé (je ne nie pas que les deux peuvent être lié, mais cela reste deux choses différentes).

    • Si vous êtes productif vous savez qu’au moment de l’instauration d’un tel système vos efforts ne seront plus justement récompensés donc il faut partir parce que sinon ce sont les improductifs qui tireront bénéfice de votre travail et plus vous.

      Donc si on vous offre un poste même moins rémunéré mais avec une bien meilleure perspective à moyen et long terme et ou en plus vous vous sentirez reconnu à votre juste valeur, il ne faut pas hésiter trop longtemps, et c’est pourquoi à moyen long terme il ne restera que des improductifs dans l’entreprise (si elle conserve son mode de rémunération actuel).

  • Vouloir augmenter le salaire de ses salariés revient-il à verser le même salaire ? C’est ce que sous-entend cet article dont l’auteur, lui-même patron, ne veut manifestement pas suivre le même chemin et préfère garder tous ses sous pour lui. A partir de là son témoignage doit être pris avec circonspection.

  • Le chapeau de l’article est faux et orienté, ce qui mène à ce que l’article soit faux et orienté.

    Dan Price n’a pas « baissé son salaire pour assurer un revenu minimum à ses employés ». Il a drastiquement augmenté les salaires de tous ses employés vers une somme plus ou moins arbitrairement déterminée comme idéale ou optimale, ce qui a posé les conditions parfaites de mise en oeuvre des travers humains comme la jalousie, l’envie ou l’avidité, et déclenché toutes sortes de conflits, notamment de la part de ceux qui restaient bloquées dans des convictions antagonistes, et chez ceux qui ne bénéficiaient pas de cet avantage.

    Ironie de la chose, c’est donc le facteur humain qui a fait échouer cela, comme il fait échouer les idéologies gauchistes ou libérales appliquant à la lettre leurs propres principes.

    Ici, on saute sur l’occasion de « casser » une initiative qui n’était pas assez libérale-orthodoxe dans ses fondements, pour se conforter dans ses illusions. Toujours voir la paille chez l’autre, et la scruter attentivement, en détailler tous les effets et défauts, mais jamais considérer ni apercevoir la poutre chez soi.

    • Ce qu’on lit dans les liens c’est que Dan Price a mis le salaire minimum dans son entreprise à $70,000 et que pour compenser il a baissé son salaire qui était de plus d’$1million et tapé dans les bénéfices… et qu’il dit lui-même que maintenant il loue sa maison pour s’en sortir. Il dit lui-même que 2 de ses meilleurs employés sont partis : entre parenthèse ce n’est pas très malin de dire cela car ça ne peut faire que peur aux clients.

      On en tire la conclusion que l’on veut mais certainement pas que c’était une bonne idée.

      PS: à moins que Dieu existe, tous les problèmes viennent de facteurs humains.

      • « Il loue sa maison »

        Ca dépend, à crédit ou propriétaire ?
        S’il a pris sa maison avec son salaire de 1M et qu’il descend à 70k ensuite, tu m’étonnes qu’il galère et qu’ils doivent la louer. C’est même naturel, un principe économique simple comme qui dirait notre cher Môssieur Kelly-Gagnon.

    • Loxosceles: « Ironie de la chose, c’est donc le facteur humain qui a fait échouer cela »

      Une évidence peut-elle être ironique ?

      Loxosceles:: « Ici, on saute sur l’occasion de « casser » une initiative qui n’était pas assez libérale-orthodoxe dans ses fondements »

      Ce n’est pas du tout la démonstration.

  • Tout ça n’est pas très clair (je n’ai pas suivi les liens, mais si je dois le faire pour comprendre, alors l’article fait mal son boulot…)

    Si je comprends, le patron a baissé son salaire + pris dans les réserves, pour augmenter les plus petits salaires, mais n’a pas touché en proportion aux autres d’où un rétrécissement de la fourchette des salaires et frustration chez les employés les mieux payés (= les meilleurs, en théorie) qui a provoqué le départ de deux employés. Ensuite on parle d’égalisation des salaires : il a instauré un salaire unique ? Ce sont deux choses différentes…

    Baisser son salaire de 90%, c’est énorme… ou il était bien ‘trop’ payé ou sa mesure n’a pas été réfléchie… Il ne peut pas se réaugmenter un peu pour équilibrer ? Bref s’est-il trompé sur les proportions, dans ses mesures (erreur de degrés) ou sa mesure en tant que telle était-elle mauvaise (erreur de nature) ? Si c’est le deuxième cas, il faut dire pourquoi…

    Sa stratégie a marché au niveau com’ mais a-t-il eu des nouveaux clients, ce qui lui permettrait de compenser les pertes effectuées à court terme ?

    Il loue sa maison, mais a-t-il tiré son coup avec les femmes attirées par sa philanthropie ? Vu qu’on gagne de l’argent pas pour le fait-même, mais pour assouvir des besoins, dont le sexe fait partie, il s’est peut-être rémunéré en nature, et donc n’aurait pas perdu tant que ça… surtout s’il est moche et n’aurait pas pu faire ces conquêtes autrement…

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