Le pétrole au plus haut depuis janvier

La stratégie saoudienne marche !

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pétrole credits Mark Rain (licence creative commons)

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Le pétrole au plus haut depuis janvier

Publié le 6 mai 2015
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Par Aymeric de Villaret.

Pétrole Prix du baril - Contrepoints438

Eh oui ! Alors qu’en début d’année certains prévoyaient la fin d’un pétrole cher et l’impossibilité de revenir à 100$/baril, force est de constater que le baril a vu en avril sa plus forte hausse mensuelle depuis 6 ans… La remontée du baril depuis le début d’année ressemble beaucoup à celle de 2009.

Bien sûr une hirondelle ne fait pas le printemps, mais cela montre bien que le marché du pétrole reste un marché volatil et que la prudence doit être de mise avant de prédire un baril « durablement » élevé ou « durablement modéré »…

La stratégie saoudienne marche !

Cours du brut janvier avril 2015 (Crédits Aymeric de Villaret, tous droits réservés)
Cours du brut janvier avril 2015 (Crédits Aymeric de Villaret, tous droits réservés)

 

Depuis le début 2015, le Brent a augmenté de 20% et c’est le mois d’avril qui aura été le mois le plus élevé avec une progression de 19,3%.

Prévoir l’avenir est si difficile !

Rappelons-nous, il y a un an, mai 2014… Depuis 3 ans, nous avions un baril « durablement » installé dans la zone – voire au-dessus – des 100$ !

Cours du brut 2010 2015 (Crédits Aymeric de Villaret, tous droits réservés)
Cours du brut 2010 2015 (Crédits Aymeric de Villaret, tous droits réservés)

Et suite à la décision de l’Arabie Saoudite de ne pas couper la production de l’OPEP, et à la guerre des prix de facto résultant de cette décision, les prix du baril se sont effondrés pour chuter pour le Brent jusqu’à atteindre près de 45$/baril mi-janvier !

Que n’a-t-on pas lu alors sur :

  • la fin de l’OPEP,
  • un monde nouveau,
  • une nouvelle ère.

Et un baril qui restera bas pour très longtemps et n’est pas prêt de rebondir… Deux ans à minima vu les niveaux de stocks etc. Nous ne ferons que reprendre les propos de Goldman Sachs qui, alors que le baril était aux plus bas mi-janvier, le voyait tomber encore plus bas et ne voyait pas de rebond avant six mois.

« To accommodate the substantial expected first half inventory build and using the storage arbitrage to the one-year ahead swap, we are revising down our 3-, 6- and 12-month price forecasts for Brent to $42, $43 and $70 respectively, from $80, $85 and $90 »,écrivait Goldman Sachs mi-janvier.

Ainsi si Goldman Sachs qui est très présent sur le marché des matières premières avait raison, nous devrions avoir en ce moment un baril entre 40 et 45$, et non 65 $ ! C’est 42-43$ qu’il prévoyait pour le printemps !

Mais il n’y a pas que les brokers à avoir été prudents sur les cours du baril et surtout sur le temps qu’il restera bas. Nous ne ferons que reprendre par exemple ce que disait IFP Énergies Nouvelles lors de sa réunion annuelle Panorama 2015 début février :

Prévision prix du pétrole 2015 (Crédits IFP Energies nouvelles, tous droits réservés)
Prévision prix du pétrole 2015 (Crédits IFP Energies nouvelles, tous droits réservés)

L’IFP était moins entier que Goldman Sachs, dans ses prévisions mais avait bien montré qu’il fallait un prix bas (cours de 50 à 70 $) pour éliminer les excédents et permettre une remontée du baril.

À la lecture de son graphe, on pouvait comprendre qu’une nouvelle zone d’équilibre temporaire risquait de se trouver entre 50-70 $, contre 100-120$ auparavant.

Comme souvent, les marchés sont plus rapides et la remontée a eu lieu au deuxième trimestre.

L’État des lieux 

La chute du nombre de rigs de forage de pétrole aux États-Unis ne s’arrête pas. Le parapétrolier américain Baker Hughes publie hebdomadairement le nombre de rigs de forage aux États-Unis. Ainsi, quand les prix du gaz avaient chuté, suite à la montée en production du gaz de schiste, leur nombre pour le gaz s’était effondré. Et depuis la tendance ne s’est pas inversée… avec une nouvelle baisse récente avec des cours du gaz très déprimés (2,5$/Mbtu)

Nombre de rigs de forage gaz & pétrole aux Etats Unis 1987 2015 (Crédits Aymeric de Villaret, tous droits réservés)
Nombre de rigs de forage gaz & pétrole aux Etats Unis 1987 2015 (Crédits Aymeric de Villaret, tous droits réservés)

 

Pour le pétrole, la tendance a été, jusqu’à mi-octobre 2014, complètement opposée avec une formidable hausse accompagnant la croissance de l’huile de schiste. Depuis les cours du baril se sont effondrés, et la chute des rigs de forage d’exploration a été vertigineuse, puisque de 1 609 au 10 octobre 2014, leur nombre est tombé à 825 au 20 mars 2015 (-48,7%)… pour atteindre 679 au 1er mai 2015 (-57,8%).

Et même si les rigs de forage d’exploration chutaient, les productions ne baissaient pas pour autant dans la mesure où une grande partie de la production était couverte (hedging) à des cours du pétrole supérieurs au point mort. C’est en mai 2015, selon l’EIA, que la production d’huile de schiste commencera à baisser, ce qui est un point majeur dans l’inflexion américaine :

Production de gaz de schiste américain (Source EIA, tous droits réservés)
Production de gaz de schiste américain (Source EIA, tous droits réservés)

À noter que seule la production du bassin « Permian » devrait croître en mai, alors que tous les autres bassins verront la leur faiblir Et les chiffres d’avril 2015 de l’EIA montrent que la production commence à baisser :

Production de gaz de schiste américain (Crédits Aymeric de Villaret, tous droits réservés)
Production de gaz de schiste américain (Crédits Aymeric de Villaret, tous droits réservés)

Conclusion

Une hirondelle ne fait pas le printemps et une grande part des éléments baissiers qui ont provoqué la chute des cours du baril est encore là, notamment des stocks de pétrole encore élevés, et l’Arabie Saoudite n’a jamais autant produit de pétrole qu’en avril.

Il n’en demeure pas moins vrai que les marchés, face à hausse du baril d’avril, ont en mémoire la remontée de 2009. Après la chute de 2008, nous étions début 2009 vers les 40$ pour atteindre les 70$ fin juin, avant de revenir à 100$ en 2010 :

Cours du brent 2008 2009 (Crédits Aymeric de Villaret, tous droits réservés)
Cours du brent 2008 2009 (Crédits Aymeric de Villaret, tous droits réservés)

Force est de constater que l’évolution des cours de ce début d’année ressemble beaucoup à celle de 2009 avec même une hausse plus rapide. Cela présage-t-il d’une remontée à 100 $ ?
Certains diront que la production d’huile de schiste américaine repartira si les cours du baril remontent, limitant d’autant la hausse des prix. Mais la production ne repartira que si les producteurs ont la conviction que le baril restera élevé pendant un certain temps. En attendant, l’Arabie a maintenu ses parts de marchés et sa stratégie fonctionne puisque la production américaine stagne et que, de facto, les cours du baril remontent.

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  • Wow, $60!! ça ne sauvera personne vu que la majorité des pays a besoin de plus que ça pour financer ses dépenses, la Russie a besoin de $100 et le Venezuela $130..

    « Force est de constater que l’évolution des cours de ce début d’année ressemble beaucoup à celle de 2009 avec même une hausse plus rapide. Cela présage-t-il d’une remontée à 100 $ ?
    Certains diront que la production d’huile de schiste américaine repartira si les cours du baril remontent, limitant d’autant la hausse des prix. Mais la production ne repartira que si les producteurs ont la conviction que le baril restera élevé pendant un certain temps.  »

    Vous avez oublié un gros détail : certains n’ont pas arrêté de produire et ont juste stocké la production au lieu de la vendre en attendant des prix plus élevés, donc si : la production US se retrouvera à nouveau sur les marchés en cas de prix suffisants, même sans assurance que cela durera.

    • Encore faut-il avoir le fond de roulement pour pouvoir stocker.

    • 100$ insuffisant pour la Russie ? Oui, en tant qu’exportateur de pétrole brut.
      Le contexte actuel (pétrole bon marché, optimisme russe) est au contraire la meilleure des médecines pour la guérir du mal hollandais. La Russie doit investir dans les productions lui permettant d’exploiter son propre pétrole !

  • C’est marrant comme la première courbe (Evolution des cours du Brent depuis 1er Janvier 2015) ressemble à la courbe des températures sur le XXe siécle.

  • Quand le pétrole baisse, il faut attendre 3 mois pour voir les effets à la pompe (les pétroliers nous disent, qu’il faut le stocker, l’acheminer par bateau, le purifier, le stocker et le distribuer-= 3 mois), par contre quand il monte, le lendemain le prix a la pompe augmente (dans ce cas, ils doivent utiliser la téléportation !)

  • « Certains disent que… »

    Facile de se moquer quand soit même…
    Mais cet article manque vraiment d’arguments de fond. Les tendances agrégées, c’est bon pour les historiens ou les joueurs.

    Quid :
    – des retours à terme de la Lybie ou de l’Iran ?
    – de la politique très dispendieuses de l’Europe d’économies et des EnR ?
    – des stratégies de politiques régionales telle que le Brésil ou la Russie pour consommer leur propre pétrole ?
    – de l’investissement faible des producteurs de pétroles ou de gaz de schistes, qui donc peuvent repartir assez vite ?
    – du changement même de la nature du pétrole, qui redevient simple vecteur vers une activité plus rentable encore ? Exemple : on ne brule plus le pétrole dans les voitures, on le brule pour extraire les métaux des batteries qui seront dans les voitures. Les spéculateur changent de cheval…

  • Juste une question, pourquoi le prix à la pompe est le même que lorsque le baril était 2 fois plus cher ?
    il faut s’attendre à une remontée des prix au second semestre, pour avoir une essence plus chère que quand le baril était au même prix 1 an plus tot ?

  • Vu la pâleur du $, perte de +- 5% ces derniers jours, le baril peut bien remonter à 70$, juste au dessus des coûts US les plus bas.

    Le choc, pour l’UE, ce sera quand le $ se redressera, si le baril ne plie alors pas un peu.

  • L’Arabie peut elle tenir longtemps le rythme ? that is the question….
    Etant assez vieux pour avoir connu les prédictions apocalyptiques des verts des années 70 savoir qu’en 1998 il n’y aurait plus de pétrole sur terre et que le refroidissement serait dramatique , vu l’annonce des Cassandre vert nous ayant annoncé ,claironné que le peak oil était largement dépassé et l’horreur du réchauffement en cours… et vu l’effondrement des cours par excès de produits sur le marché , je me garderai bien de faire des pronostics. Cependant ,il me semble que les producteurs du golfe ne pourront pas à moyen terme tenir la cadence .Les producteurs de pétrole et gaz non conventionnels, eux ,ne sont pas des majors , chacun prendra sa décision de refournir en fonction de son intérêt personnel…. bien malin avec également les accidents géopolitiques toujours possible de déterminer quand les cours repartiront à la hausse vers les 80/100 le baril ;Cela dépendra de la bonne ou mauvaise santé économique mondiale….essentiellement
    A propos d’accidents géopolitiques je lance un appel sur Contrepoints /Quelqu’un a t il une info sur le sort du Porte container de la MAERSK arraisonné par l’Iran la semaine dernière .Que deviennent les marins? tout le monde s’en fout?ce qu’il y avait à bord était si important pour expliquer ce silence médiatique universel ?

  • Oui, la stratégie saoudienne marche. mais suelement jusqu’à un certain prix. La boite de pandore (avancé technologie en matière de fracturation) étant ouverte, il y a maintenant des acteurs supplémentaire dans le jeu qui ne coopèrent pas avec l’OPEP, et qui peuvent même profiter de la stratégie de l’Arabie saoudienne.

  • Une partie de cette remontée peut-être imputable à la baisse du $

  • a part dieu qui peut prévoir le prix du pétrole ?

    le prix des matières premières n’est qu’ impure spéculation , personne a part 2 ou 3 types en haut d’une tour londonienne peut vous prédire le prix dans 6 mois parce que ce sont eux qui décident pas vous pauvre consommateur ni vous pauvre producteur.

  • Article argumenté et très intéressant. Super panorama sur le sujet.

  • Le plancher de 40 précédemment anticipé ayant été quasiment réalisé, on assiste à une splendide reprise en W, double point bas d’anthologie dessiné sous la première résistance vers 55. Que c’est beau, on en pleurerait !

    http://stockcharts.com/h-sc/ui?s=$WTIC&p=W&b=3&g=0&i=t64664583319&a=309540155&r=1391796418201

    Le niveau de 60 semble un peu compliqué à passer, avant de rejoindre l’objectif de rebond du baril vers 70. Y aurait-il déjà quelques doutes ? A suivre…

    Le plus amusant serait que le pétrole remonte au-delà de 70, vers 90, mais que l’euro contre dollar reste planté sous 1,2. Alors, les Français auraient la joie de payer leur plein largement plus de 2 euros le litre, en n’oubliant pas que le gouvernement s’est dépêché d’augmenter les taxes quand le prix du baril était au plus bas. Les Français pourront ainsi apprécier l’effet véritable de l’alignement des planètes tant vanté par le gouvernement et ses affidés, à savoir la longue et douloureuse éclipse de leur pouvoir d’achat.

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