L’atonie française incomprise par le FMI

Quelle est la véritable cause de la faible productivité française ?

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L’atonie française incomprise par le FMI

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 28 avril 2015
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On ne peut que constater à nouveau à quel point les économistes français peuvent être un peu « courts » sur les maux qui sont la cause de notre faible croissance. D’après Olivier Blanchard, conseiller économique du FMI, la faible croissance française vient de notre faible productivité. Mais il ne semble pas avoir perçu l’origine de cette faible productivité. Comme réforme essentielle, il propose une réforme du code du travail, mais oublie la réforme essentielle : libérer l’investissement et la prise de risque.

Par Dominique d’Emploi 2017.

Sick Man credits Erich Ferdinand  (CC BY 2.0)
Sick Man credits Erich Ferdinand (CC BY 2.0)

 

D’après une interview d’Olivier Blanchard donnée récemment au Figaro1, il y a des raisons cycliques mais aussi des raisons structurelles à la faible croissance française. Parmi les raisons structurelles, il cite que « Depuis le début des années 2000, la croissance de la productivité des facteurs en France a été très faible, presque égale a zéro. Nos estimations sont que la croissance potentielle française, c’est-à-dire la progression des capacités de production du pays est inférieure actuellement de 0,4 point par an à ce qu’elle est en Allemagne. »

Si l’on consulte les chiffres de l’OCDE, ce sont effectivement ces ordres de grandeur que l’on constate. Ainsi sur la période 2001-2012, la productivité multifactorielle (efficience globale avec laquelle les facteurs travail et capital sont conjointement utilisés) a crû en moyenne de 0,4% par an en France contre 0,7% en Allemagne et 0,6% au Royaume-Uni2.

Mais il convient tout d’abord de remarquer que croissance ne veut pas dire emploi et que si la corrélation entre productivité et croissance est bien positive, on peut se demander si c’est nécessairement le cas pour l’emploi. La productivité, cela signifie en effet être capable de produire plus avec autant ou de produire autant avec moins. Si une entreprise peut produire plus mais qu’elle ne trouve pas de débouchés supplémentaires, elle produira autant en licenciant le personnel devenu inutile.

Il convient ensuite de regarder d’où viennent les gains de productivité. Qu’il s’agisse de l’OCDE, de la Banque Centrale de Chicago ou de la Kauffman Foundation, les instituts de recherche s’accordent à dire qu’en réalité, les gains de productivité sont directement corrélés à la turbulence d’une économie et au dynamisme de l’entrepreneuriat :

« Un nombre croissant d’éléments laissent à penser que le processus de créations et de fermetures d’entreprises, de même que la réallocation des ressources des entreprises en déclin vers celles en expansion, contribuent pour une grande part à la hausse de la productivité et de la production » (Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2009, Faire face à la crise de l’emploi)

« Des mesures soigneuses révèlent que la plupart des gains de productivité dans une économie surviennent lorsque les vieilles entreprises sont remplacées par de nouvelles ». (Chicago Fed Letter de septembre 2014 : What is the economic impact of the slowdown in new business formation)

« L’importance de l’entrepreneuriat pour la création d’emplois et la croissance de la productivité est établie » (Kauffman Foundation, The return of business creation, juillet 2013)

« Les nouvelles entreprises créent des emplois, mais les caractéristiques de ces emplois […] compte pour la productivité, les salaires et la croissance économique » (Kauffman Foundation, State of Entrepreneurship adresse 2014)

Ces constats majeurs ne sont malheureusement pas mentionnés par Olivier Blanchard dans son interview.

Afin de fluidifier le marché du travail, Olivier Blanchard précise ensuite qu’ « une réforme du marché du travail parait fondamentale ». Une telle réforme serait effectivement positive, permettant justement une meilleure turbulence de l’économie et encourageant les dirigeants d’entreprises à embaucher. Les différentes études montrent que la suppression de « la cause réelle et sérieuse » pour pouvoir se séparer d’un salarié donnerait 2 millions d’emplois marchands supplémentaires

productivité rené le honzecCependant, il faut rappeler qu’il nous manque, non pas 2 millions, mais 5 millions d’emplois marchands à population égale avec nos principaux compétiteurs3. Ainsi, pour rattraper notre retard, une réforme du marché du travail restera insuffisante. Il faudrait également remédier à un terrible déficit de financement des entreprises de croissance, dû à une fiscalité qui décourage les business angels potentiels de risquer leur argent dans les start-ups à risque, où ni les banques ni les aides publiques n’ont vocation à aller.

Les études de l’Irdeme montrent en effet que nous possédons deux fois moins de jeunes entreprises à forte croissance que le Royaume-Uni (1.500 contre 3.000) et qu’elles créent quatre fois moins d’emplois (50.000 contre 200.000). Ces études montrent également une corrélation directe entre la création d’emplois et le montant des capitaux levés par ces entreprises, trois fois moins importants en France qu’au Royaume-Uni (2 milliards d’euros contre 7).

Ce retard explique en grande partie le faible dynamisme entrepreneurial français et donc la faible productivité et le faible emploi en France4. Olivier Blanchard ne semble malheureusement pas en avoir pris la mesure.

  1. Olivier Blanchard « Une réforme du marché du travail est fondamentale », Le Figaro du 16 avril, page 4.
  2. Royaume-Uni : chiffres 2001-2011.
  3. À population égale, nous avons eu seulement 20 millions d’emplois marchands en France, contre 25 millions en Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis. L’emploi partiel légèrement plus développé en France n’explique pas ce retard : la comparaison du total des heures travaillées dans chaque pays donne un retard du même ordre. Voir : http://www.irdeme.org/Un-lourd-deficit-d-emplois.html
  4. Les études concordent pour dire que ce sont justement ces entreprises à forte croissance qui créent l’essentiel de l’emploi ; voir notamment les études suivantes : Direction des Études et Synthèses Économiques, Les gazelles en France, Claude PICART, février 2006. http://www.insee.fr/fr/publications-et-services/docs_doc_travail/g2006-02.pdf ; The vital 6 per cent, How high-growth innovative businesses generate prosperity and jobs, Nesta, octobre 2009 : http://www.nesta.org.uk/sites/default/files/vital-six-per-cent.pdf ; Kauffman Foundation Research Series : Firm Formation and Economic Growth High-Growth Firms and the Future of the American Economy, Dane Stangler, mars 2010.
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  • quand on sait qu apres tous les efforts accomplis l etat vas te prendre 80% des benefs ,on reste au lit et on attend les aides sociales comme en ex urss…!!!

  • Encore un article qui passe à côté du véritable sujet: la gabegie de la dépense publique française qui explique à elle seule 70% des problèmes du pays.
    La baisse du chômage passe par la suppression d’un million de postes de fonctionnaires qui engendrerait la création de deux millions de postes dans le privé (loi démontrée).
    Ensuite les économies engendrées par la baisse de la dépense publique permettraient une forte relance de l’investissement des entreprises source de croissance et de création d’emplois.

    • D’accord à un « détail » près. La France a 70% de fonctionnaires de plus qu’en Allemagne (en proportion de la population, 5% en Allemagne contre 8,5% en France). Le nombre de fonctionnaires excédentaires serait donc plus proche de 2 millions.

    • Sa…ds de fonctionnaires ?! … Privilégiés ?! …
      Allez-y, dans la fonction publique
      Il y a plein de postes de privilégiés à prendre chaque année !
      Ah, vous préférez rester dans le privé ? Pourquoi ?
      Ah … on est pas obligé de tout déclarer …
      Sa…ds du Privé ! … Privilégiés !

      • Emploi à vie, retraite 10 ans avant le privé, indemnités « maladie » sans aucun jour de carence, 20% de profs qui n’enseignent pas, etc, etc. Et d’où vient l’argent gratuit ? Du privé !

  • dans le secteur agricole, la productivité per capita , a belle et bien augmenté depuis 30 ans : fermes plus grosses , tracteurs plus puissant et outils plus large …. mais ! cela a été contrebalancé par et même au-dela , par un effondrement du nombre d’actifs , une perte importante de surface agricole utile, et est du notamment dans le secteur de l’élevage , au fait que de manière totalement anachronique , la génération actuelle travaille plus que celle de ses parents !

    l’effondrement du nombre d’actif commence lors de la réforme de la PAC de 1992 ou l’agrandissement est systématiquement privilégié par rapport à l’instalation et se poursuit avec l’obligation de mise aux normes environnementales : cela entraîne un vieillissement de la population agricole, et une émulation négative allant dans le sens d’un conservatisme accru. toute idée qui n’est pas mise en avant par le syndicat ou l’état ( qui se fout royalement de l’agriculture mais pousse vers un respect de plus en plus tatillon de l’environnement sous l’influence de groupes de pression bien connus ) ou les pages publicitaires de la france agricole est refusée … par exemple l’agronome claude bourgignon , qui tenta de populariser les techniques de semis-direct en france, en vint à traiter les agriculteurs d’abbrutis.
    en 2014 , l’agriculteur moyen en france , est un vieux con borné et endetté qui a trés peu de chance de trouver un repreneur pour sa ferme …
    les gains effectif de productivité obtenu grace à un endettement record ( un tracteur de 150 ch avec electronique coûte 3 fois plus cher qu’un de 75 sans électronique et une stabulation aux norme coûte 5 fois plus cher que la même fait maison dans les années 70 … ) ont été enseveli et au delà , par la burocratie qu’il fallait remplir semaine aprés semaine , et par l’absence d’acceptation des méthodes innovantes.

    le cancer qui ronge la france est une hypertrophie du secteur public lui même gangrèné par les théories écologiques régressionniste .

    • L’effondrement du nombre d’actifs agricole commence à la révolution industrielle, avec l’apparition des batteuses à vapeur, des moissonneuses mécaniques, etc.
      Mais pour le reste : +1

      • je l’entend bien que l’effondrement du nombre d’actif agricole commence à la révolution industrielle … mais je pointe la baisse du nombre d’actif depuis les années 80 , ou il n’y a eu aucune rupture technologique qui explique cela . il faut savoir que dans les années 80 , encore , les services d’installation des jeunes agriculteurs étaient submergé par les demande de dotation JA , dotation qui avait probablement était obtenu par la FNSEA , grand manitou du monde agricole français.

        une filière qui perd ses jeunes a du soucis à ce faire … une filière que l’on submerge sous des règles de plus en plus draconienne a également du soucis à ce faire … une filière ou l’on nie l’interet d’avoir un coût de production au taquet va immanquablement ce faire bouffer par l’etranger …

  • Comment espérer d’un keynésien qu’il propose des solutions ? L’ancien conseiller de Jospin est quand même un de ces hurluberlus qui n’a pas hésité à proposer de taxer les licenciements. Avec un sens admirable de la cohérence, il propose une décennie plus tard de réformer le marché du travail. N’en soyez pas surpris. Ses convictions politico-économiques paraissent ici pour ce qu’elles sont, postures plutôt que convictions. Blanchard est l’archétype du thuriféraire des Etats obèses. Les Obèses doivent survivre à tout prix, peu importe qui ni combien leur seront sacrifiés. C’est ainsi que les Obèses contemporains s’effondreront, minés par leur féroce avidité, comme n’importe quelle institution immorale avant eux. Toujours se souvenir que « L’État, c’est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s’efforce de vivre aux dépens de tout le monde. »

  • Dans tous les cas le constat est toujours le même, les entreprises qui embauchent sont pris à la gorge et c’est pas demain qu’elles vont embauchés compte tenu des images renvoyé depuis des décennies par Bercy.

    Je caricature : embauchés -> bénéfices -> impôts -> plus d’investissement -> licenciement … , donc pourquoi on embaucherai aucun intérêt.

    La seule et unique solution sont les réformes de structure pour pouvoir baisser les charges qu’on puisse investir et a terme payé autant d’impôts que maintenant mais avec des bénéfices autre mais évidement pour ça il faut avoir des corrones et c’est pas pour demain .

  • C’est assez facile de démontrer que tel ou tel paramètre tue l’économie. Le problème est que d’une part chacun va rejeter la conclusion concernant chaque facteur pris individuellement en le jugeant comme un mal nécessaire et que c’est l’effet global qui est catastrophique. La vérité est donc que trop de socialisme tue l’économie.

    C’est donc un problème des socialistes de trouver un compromis pour éviter le chaos, ce dont ils sont bien incapables en particulier en France. Les chiffres macro-économiques sont suffisamment éloquents mais nous sommes coincés par un système démocratique en faillite et un électorat pourvu d’œillères, avec d’une part des bobos déconnectés de la réalité qui dominent les media et d’autre part une population qui se cherche dans des solutions faciles mais irréalistes parce que les bobos font tout pour noyer les vrais problèmes et les vrais solutions dans un écran de fumée.

    • Le « compromis pour éviter le chaos » est possible dans la mesure où l’hôte (l’économie productive + l’Etat régalien) ignore le parasite (l’Etat obèse socialiste), trop petit pour être perçu ou, s’il le perçoit du fait de son obésité, s’en accommode encore quelque temps. Dès que l’hôte ne supporte plus le parasite, notamment parce que ce dernier a trop grossi et menace l’ensemble, le compromis ne peut plus être trouvé.

      Evidemment, le parasite paniqué à l’idée de sa fin prochaine va proposer à l’hôte de se sacrifier pour gagner un peu de temps de survie, ce qui est parfaitement idiot puisque le parasite mourra quand même lorsque son hôte aura disparu. La solution collective optimale consiste à anticiper, à précipiter la mort du parasite, puisque il est de toute façon condamné.

      • Encore faudrait-il localiser la Tok’Ra capable de nous débarrasser des Goa’uld proprement ?

        • Fuyez, pauvre fou ! Ne savez-vous donc pas que la consultation non autorisée de Stargate est désormais assimilée à une agression criminelle et, à ce titre, sévèrement réprimée ? L’usage de certains mots clés immédiatement repérés par la surveillance généralisée de toute vie privée vous expose à une descente des Forces de Sauvegarde du Camp du Bien et à une rééducation aux Principes Républicains à coups de crosse de fusil dans la tronche. Aha, non mais, on ne plaisante plus avec l’Intérêt Général Collectiviste défini par le Sérénissime Culbuto, Grand Régulateur du Climat Mondial, Pourfendeur des Courbes Rétives du Chômage, Divin Saprophyte de la Dette Publique.

          • Désolé, je ne comprends pas votre commentaire. J’ai l’esprit un peu vague depuis que j’ai reçu la visite de 2 hommes en noir qui m’ont photographié avec un drôle d’appareil.

  • De quoi nous parle, que répète cet article ? De faible productivité française ?
    Ah bon ! C’est nouveau

    Même Le Figaro NOV2014 : « La France est quatrième en termes de productivité horaire du travail »

    La croissance de la productivité semble plus faible qu’ailleurs, ça oui

    Ce qui se conçoit bien …

  • Les commentaires sont fermés.

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