Petit vent de panique à la BCE

Une activiste perturbe une conférence de la BCE. Quelle est la nature de ce mouvement de révolte ?

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5:00 PM - Buzek meets Mario Draghi, the Governor of the Bank of Italy credits european parliament (CC BY-NC-ND 2.0)

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Petit vent de panique à la BCE

Publié le 17 avril 2015
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Une activiste perturbe une conférence de la BCE. Attaque terroriste ? Certainement pas. Un mouvement de révolte plutôt pacifique et clairvoyant ? C’est beaucoup plus probable…

Par Stéphane Montabert.

5:00 PM - Buzek meets Mario Draghi, the Governor of the Bank of Italy credits european parliament (CC BY-NC-ND 2.0)
Buzek meets Mario Draghi, the Governor of the Bank of Italy credits european parliament (CC BY-NC-ND 2.0)

 

Confusion lors de la conférence de la BCE présidée par Mario Draghi : une activiste entra en scène, escaladant l’estrade derrière laquelle officiait le président de la BCE, suscitant un bref moment de panique pure que les nombreux journalistes présents dans la salle n’eurent aucun mal à capter.

Attaque terroriste ? Pas vraiment – juste une pluie de confetti. Arborant un t-shirt « Fuck the BCE Dick-tatorship » (que l’on ne traduira pas ici ; notons juste une certaine morgue à l’égard de l’institution) la jeune femme se contentera juste d’arroser le monsieur d’une pluie de confettis, scandant la fin de la dictature de la BCE alors qu’elle fut expulsée manu militari par le service de sécurité :

« Vous entendrez nos cris plus forts, plus hauts, dans et hors de vos murs, partout, et vous n’aurez pas de repos. »

Mario Draghi reprendra ensuite le fil de son propos comme si l’incident n’avait jamais eu lieu.

D’une certaine manière, cet épisode n’a rien de particulier. Pendant politique des flashmobs, l’omniprésence de manifestants divers et variés agissant soudainement est devenue un lieu commun, de l’entartage à d’autres formes de protestation. Pas plus tard que le même jour aux États-Unis, un manifestant protestant contre la corruption de Washington se posa au Capitole avec un mini-hélicoptère.

Les Femens ont elles-mêmes largement contribué à la banalisation de ces manifestations ; la femme du jour, Joséphine Witt, est d’ailleurs une ancienne membre de ce mouvement féministe. Si elle reçut la formation lui permettant d’organiser ce genre de happening, elle inscrit son action en totale indépendance avec les Ukrainiennes seins nus en couronnes de fleur, mais revendique une posture anti-BCE.

Le tract préparé par l’activiste (récupéré depuis Zerohedge) montre une étonnante clairvoyance de la part de la jeune femme de 21 ans:

« Nous sommes propriétaires de nos vies –
et face à l’environnement de puissance écrasante émanant de la police monétaire de la BCE, il est parfois difficile de le garder à l’esprit.

Nous sommes propriétaires de nos vies –
et elles n’ont pas à être les jetons que la BCE emploie dans ses paris,
n’ont pas à être jouées, vendues, détruites.

Nous sommes propriétaires de nos vies !
sera le cri de ralliement de ceux qui font face à la répression,
quand nous commencerons à voir notre pauvreté comme autre chose qu’une défaite personnelle ou une destinée inéluctable.

BCE,
maîtresse de l’univers,
je viens te rappeler qu’il n’y a pas de dieu,
mais des gens, derrière ces vies,
et que si tu règnes au lieu de servir,
(…) tu ne connaîtras pas de repos.

Et pendant que la BCE ne fait que persister dans son hégémonie autocratique, se reposant sur la surveillance des États et la police,
la violence quotidienne est finalement enracinée ici (…) »

Et encore :

« [Nous] n’accepterons pas l’histoire folle que la BCE veut nous imposer où même la liberté d’expression et la dignité doivent être vendues aux banques pour que nous puissions survivre. »

Toutes les articulations du discours ne sont pas claires mais relèvent du même sentiment : d’une part, la BCE joue avec la vie des gens et, d’autre part, la BCE est désignée comme le centre de décision, et non l’exécutant, des politiques affectant la zone euro toute entière. Une nuance bienvenue alors que la BCE entretient des liens incestueux avec Goldman Sachs et agit sans rendre de compte aux élus.

Si Mario Draghi a gardé son flegme, nul doute que les futures conférences de presse de la BCE seront surveillées d’un peu plus près – des gorilles un peu plus baraqués, un peu plus nombreux et un peu plus vigilants… Cela empêchera peut-être de nouveau débordements du style d’hier, mais rendra aussi encore moins crédible l’illusion d’une BCE œuvrant dans le sens de l’intérêt commun.


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  • elle n’a pas tort dans son tract la gamine ; il y est écrit ce que de plus en plus de gens pensent ; je suis cependant étonnée que cette personne ai pu s’approcher aussi prés de draghi ; il aurait pu se faire tuer , par un  » térroriste  » , ce qui n’aurait pas été une grande perte pour le monde quand bien même il aurait été remplacé illico presto par un clown de même accabit ;

    • Ce n’est pas parce qu’elle pense comme d’autres qu’elle a raison, la gamine. Parce que si sa solution, c’est de confier la monnaie aux Etats obèses, voire de nationaliser les banques dans un élan de collectivisme débridé, le petit Calimero n’a pas fini de jeter des confettis en pensant que ce monde est décidément trop injuste. Elle a peut-être ce genre de vocation où seule l’action compte, peu importe le résultat. Agir aveuglément sans jamais réfléchir conduit habituellement à des résultats non désirés.

      • Ne faites vous pas un procès d’intention à cette charmante demoiselle ? C’était au moins une idée amusante et son slogan « we own our lives » est très bien.

        • Le slogan, on s’en fout. Il doit être jugé au vu des propositions concrètes. Si le projet de la gamine se borne à détruire l’existant pour finalement revenir aux mêmes errements collectivistes, elle ne fera que remplacer le « dictateur » actuel par un autre. La belle affaire ! Autant s’épargner la peine du changement, n’est-ce pas ?

          A la place d’un slogan qui peut tout dire et son contraire, on aurait aimé une vibrante profession de foi à propos des marchés libres, à commencer par la concurrence monétaire (et donc la concurrence bancaire) compte tenu de sa cible. Mais si c’est pour prôner l’AU ou tout autre bullshit parasitaire du même tonneau, l’ex-femen (?) peut aller se rhabiller car elle ne vaut pas mieux que celui qu’elle dénonce.

          Elle est peut-être propriétaire de sa vie, mais qu’elle ne compte pas sur les autres pour la financer : propriété sans responsabilité n’est que ruine des Calimeros.

          • Les propositions concrètes, elles émergent : le monde en open source

            http://www.wedemain.fr/Collaboratif_r10.html

            ces laboratoires ne sont que les garages des années 70, d’ou a émergé l’informatique qui nous révolutionne encore aujourd’hui.

            et ce n’est que le début.

            • Bof, je ne crois pas que remplacer la responsabilité et la liberté individuelles par une coopération bisounoursiste soit la solution. Ce qui a émergé des garages a surtout été quelques génies à la fois de la compréhension du besoin d’autrui, et de l’art de vendre plutôt cher et dans des marchés pas très loyaux ce qui y répondait. Le coopératif revient à remplacer la dictature des états par celle du coopérativement correct. Pour moi, être propriétaire de sa vie consiste à avoir les moyens, légaux, sociaux et intellectuels, d’exercer à tout instant son libre arbitre. Ce qui signifie aussi ne pas attendre des autres de service qu’ils ne soient prêts à offrir sans pression ni contrainte au prix où le paie.

            • La pseudo économie collaborative n’existe qu’à la marge du monde des échanges commerciaux rentables dont elle dépend entièrement. Avant d’échanger, il faut posséder. Et pour posséder, il faut d’abord créer de la valeur, la vraie valeur, celle qu’un tiers accepte de payer volontairement. Ou alors il faut voler la valeur créée par autrui. Les geeks de l’open source, comment mangent-ils ? En échangeant leurs jolis programmes contre des poulets ou des pizzas ? En réalité, soit ils sont salariés d’entreprises rentables, soit ce sont des rentiers étatiques (fonctionnaires ou subventionnés) vivant du pillage des entreprises rentables, soit ils vivent aux crochets de papa/maman, soit ils vivent de trafics douteux.

              Sur la durée, il ne peut y avoir de collaboration sans rentabilité, sans l’échange volontaire source de toute valeur.

            • La monnaie opensource, c’est pas mal ça ? C’est transparent au moins ?

      • Qu’un Etat imprime de la monnaie, ce n’est pas un problème en soi. Le problème vient des lois « accessoires » qui vont souvent de pair avec cette impression, et qui en font un instrument au service de la ponction par l’Etat au lieu d’un instrument au service de l’échange et de la création de valeur.

        • L’Etat, c’est le monopole. La monnaie ne peut relever d’un monopole sans que cela ne crée une infinité de crises que nous connaissons bien. L’Etat (ou la banque centrale) est définitivement incompétent pour imprimer la monnaie.

  • Pour l’incident de la Maison blanche, l’appareil utilisé était un autogyre. Part rapport à un hélicoptère, c’est un peu comme ce qu’une certaine boisson gazeuse est à l’acool. Ce n’est pas la même chose.

  • « centre de décision » plutôt centre de collusion.

  • « Fuck the BCE Dick-tatorship »

    Vous ne traduisez pas, c’est dommage pour les lecteurs non anglophones.
    Dick signifiant en argot anglais Bite, il y a clairement là une dénonciation d’un pouvoir phallocrate.
    Ce qui n’est pas étonnant de la part d’une ex-Femen.

    On en pense ce qu’on veut mais c’est intéressant de traduire.

    • Si la BCE était dirigée par des femmes ça se saurait (1 femme pour 6 membres au board) ici aussi la parité s’impose. Quand il y a aura 3 femmes et 3 hommes on pourra cesser de parler de phallocratie.

      • imposer la parite, parce qu’elle ne s’impose pas d’elle meme? sous-entendez-vous que les femmes sont inferieures aux hommes, ou qu’un complot international vise a les empecher de reussir?

        • Je ne sous-entend pas… il y a un système patriarcal en place empêchant l’émancipation des femmes. C’est même la base du féminisme que de le détruire à tous les niveaux où il se loge.

          • Peut être, mais en êtes vous certaine. Les femmes ne sont elles pas plus sages, statistiquement s’entend, recherchant moins le pouvoir, l’argent et les honneurs en sachant la valeur de la vie, la vraie, celle qu’elles donnent ?

          •  » Je ne sous-entend pas… il y a un système patriarcal en place empêchant l’émancipation des femmes. C’est même la base du féminisme que de le détruire à tous les niveaux où il se loge  »

            Je vous rappellerais quand même que c’est une femme Christine Lagarde qui est à la tête du FMI.

             » Quand il y a aura 3 femmes et 3 hommes on pourra cesser de parler de phallocratie.  »

            La parité c’est juste un décret. C’est histoire d’avoir autant de femmes que d’hommes. Je ne croit pas que c’est un respect pour les femmes de leur confier des postes à hautes responsabilité uniquement parce qu’elle sont femmes et non parce qu’elle sont compétentes.

            D.J

            • Cette histoire de parité c’est bien èvidement pour rappeller que la femme a une approche diffèrente sur beaucoup de sujets . Et du fait que son taux de testostèrone est bien infèrieur, elle doit avoir toujours un pouvoir de conviction supèrieur.. Je dirai que les femmes les plus douées le sont bien plus que leurs homologues masculins, qui par nature tout age confondu se rapellent qu’ils doivent aussi leur vie à une femme. C’est un complexe qui les rendent plus fragiles quand le pouvoir est sous le control des femmes. La descrimination positive pourrait un jour nous liberer de la bètise humaine. Faut*il encore qu’elle devienne universelle…

          • La discrimination positive, induite par la partie, c’est du sexisme, ni plus ni moins: choisir quelqu’un en fonction de son sexe c’est la definition meme du sexisme. Alors de grace ne vous appelez pas ‘feministe’ car les vrais feministes elles se battent contre le sexisme, pour l’egalite en droit.

      • le problème de la bce est sa politique stupide, pas le fait qu’il n’y ait qu’une femme pour 5 hommes.
        pour vous, il vaut mieux de stupides paritaires que des gens efficaces, votre pensée est stupide.

        • +1 Ajoutons à cela le fait que sa cousine la FED est dirigée par une femme, ce qui se traduit concrètement par une résultat strictement identique.
          Les effets dénoncés n’ont aucun rapport avec le sexe, et rien ne permet de le laisser. Rien. Nada. Que dalle.

      • La phallocratie cessera quand tous les hommes auront été émascules ou que toutes les femmes auront eu une greffe de couilles.

        Le féminisme est un drame personnel.

  • L’euro est une création volontairement imparfaite et inefficiente pour fabriquer – de force – une construction socialiste antidémocratique. La preuve : Les fonds de stabilité, le MESF engagent des montants colossaux sans le moindre débat parlementaire et encore moins le moindre référendum. Mes amis centristes qui rêvent d’une Europe fédérale et démocratique se foutent le bras entier dans l’œil : Nous avançons bien vers une forme de fédéralisme mais au pas de charge et il n’y aura aucune démocratie mais que des apparatchiks pour piloter le bordel au mépris des aspirations des peuples.

    Cette spirale catastrophique ne peut (presque) plus être enrayée : Les juges constitutionnels allemands valident ce qui viole pourtant éhontément le droit de peur de la panique que provoquerait une décision claire et négative des dernières innovations pour « sauver » l’euro. Le QE est une infamie économique doublée d’inconstitutionnalité. Peu importe les rodomontades de Varoufakis et de Tsipras, leur pays est mort, ce n’est même plus l’enjeu. L’euro passera 2015, 2016 etc. Mais les conséquences à moyen/long terme du QE balaiera l’euro et risque fort de malheureusement écarter les pays européens les uns des autres.

    La réussite ultime du socialisme? La résurgence de troubles qu’on considérait comme à jamais dépassés. Il faut vite revenir à l’Europe du marché commun et des règles pour harmoniser la zone de libre échange et s’y tenir : C’était le temps de la paix durable, de la confiance, de l’entraide bien aidées par la prospérité qui ne reviendra jamais dans les transferts et par la socialisation extrême du système.

  • Le BCE œuvrant dans le sens de l’intérêt commun…
    Alors là je suis MDR !!!
    La BCE est aux ordres des Politiques : la preuve elle a ouvert en grand les robinets à pognon facile pour faire de la « relance économique »… sur demande des pays du sud et aux grands dams des pays du nord!!!
    La BCE fait une politique d’inflation monétaire et de rachat des dettes publiques. Cela ne pourra conduire qu’à la faillite de tout le système socialo-étatique (ce qui ne sera pas un mal) mais aussi à la ruine de tous les citoyens (ce qui sera une catastrophe !!!).

    Si la BCE était vraiment pour l’intérêt commun elle aurait refusé d’ouvrir les springler à pognon et laisser les états du sud (sur-endettés) se démerder tous seuls !!!

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