Monnaie islamique : mythe et réalité

L’État islamique annonce son intention de frapper monnaie. Est-ce crédible ?

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
dinar-or (image libre de droits)

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Monnaie islamique : mythe et réalité

Publié le 23 novembre 2014
- A +

Par Charles Sannat

dinar-or

Avec la diffusion d’une vidéo de propagande mettant en scène trois djihadistes français, le mouvement islamiste Daesh fait beaucoup parler de lui dans les journaux. Aussi, l’annonce d’instaurer sa propre monnaie officielle en métaux précieux a elle-même été beaucoup relayée dans les médias. Alerte ! L’organisation terroriste va pouvoir se développer en toute indépendance grâce à sa monnaie ! Même pas peur…

Les enjeux d’une monnaie islamique

Il s’agirait d’une version modernisée du dinar d’or qui circulait au VIIe siècle au temps du calife Othman, autant dire la résurrection d’une vieille monnaie. Cette monnaie serait constituée de pièces en or de 1 et de 5 dinars, de pièces en argent de 1, 5 et 10 dirhams et de pièces en cuivre de 10 et 20 « fills ».

En créant sa propre monnaie, l’État islamique souhaite « s’émanciper » du système économique mondial « diabolique », « concurrencer le système tyrannique occidental » selon ses propres termes. Outre la volonté de renforcer le pouvoir et l’indépendance d’un nouveau califat, le fait de posséder sa propre monnaie est un symbole idéologique fort. « En créant sa monnaie, le groupe État islamique veut se donner les attributs d’un vrai État » dit Nicolas Véron dans Les Échos.
« L’État Islamique entend signifier aux yeux du monde qu’il est légitime. Battre sa propre monnaie est un marqueur très fort de souveraineté et donc un moyen de s’affirmer en tant qu’État » explique François Mechy dans L’Orient Le Jour.

La difficulté du projet

  • L’approvisionnement

Quelques articles ont fait une analyse plus poussée de la faisabilité d’un tel projet. France 24 mentionne d’abord un problème de dépendance vis-à-vis des métaux précieux. Comment l’État islamique s’approvisionnerait-il et comment pourrait-il s’affranchir des marchés financiers qui fixent les prix des métaux précieux ? Se pose donc la question de l’approvisionnement. La monnaie se réfère exactement au dinar d’or originel, celui-ci était constitué de 4,3g d’or pur, ce qui nécessiterait de grandes quantités d’or pour frapper la nouvelle monnaie. Même si l’organisation terroriste « gagnerait près de 90 millions de dollars chaque mois en vendant le pétrole provenant des champs irakiens et syriens contrôlés par les djihadistes dans le marché noir », comment peut-elle s’approvisionner en or ? De façon illégale, sur le marché noir ? En tout cas certainement pas au London Market exchange.

  • Pas de taux de change

Dans l’article de France 24, Pascal de Lima, directeur de cabinet de conseil EcoCell et spécialiste du système financier, explique qu’aucun autre État n’utilisant cette monnaie, sans taux de change, point de salut. La valeur des marchandises, de la monnaie serait fixée arbitrairement, « sans qu’il soit possible de faire des comparaisons internationales ».

  • Dur de combattre l’hégémonie du dollar

Il ne faut pas non plus oublier que même si l’État islamique souhaite s’en émanciper, le dollar circule beaucoup dans la région en termes d’échange et de commerce. Selon François Mechy dans Lorientlejour.com, « le billet vert risque de toujours rester la référence en termes de transactions : l’embargo financier décrété par la communauté internationale à l’encontre du mouvement terroriste devrait dissuader tous ses fournisseurs de se faire payer dans une monnaie aussi compromettante que celle de l’EI ».

  • Une charge administrative contre-productive

Enfin, battre sa propre monnaie représente une charge administrative énorme. Comme le rappelle Sébastian Seibt sur France 24, avoir sa propre monnaie entraîne des conséquences administratives et politiques importantes, nécessitant « une économie extrêmement centralisée et autoritaire ».

Au niveau administratif déjà, il faudrait instaurer des contrôles à tous les niveaux, ne serait-ce que pour éviter les risques de fraudes et de circulation de fausses pièces, évidents au lancement d’une nouvelle monnaie. La tentation pourrait être grande pour la population d’aller échanger quelques pièces contre des dollars. Enfin pour que la population ait confiance dans une nouvelle monnaie (l’une des conditions sine qua none pour qu’elle le soit), elle doit avoir la certitude que la monnaie avec laquelle elle paie est bien constituée d’or, d’argent ou de cuivre. Tout ce dispositif nécessite énormément de ressources humaines et d’infrastructures, comme établir des douanes aux frontières par exemple.

L’initiative paraît difficilement réalisable, ne serait-ce que pour sa mise en place, même si l’État islamique dispose de ses propres réserves d’or. Cela tend à prouver que l’or est une monnaie et qu’il constitue toujours un moyen d’échange ; ce que nous ne cautionnons évidemment absolument pas dans ce cas. Ce qui est inquiétant en revanche, c’est que cette annonce peut servir d’autres intérêts, celui des pros dollars. Vous allez peut-être dire que nous sommes un peu parano, mais si cette initiative servait de prétexte pour « abolir » le commerce de l’or, nous pensons que cela arrangerait le système monétaire international qui, je vous le rappelle, repose sur une politique monétaire expansionniste du dollar, une impression infinie de billets (dollars, yens, euros…) que seule peut freiner, gêner, empêcher, une quantité finie d’or.

Même si la conversion dollar/or est abolie depuis le 15 août 1971, force est de constater que l’or, de façon souterraine, continue de circuler et de remplir les coffres des banques centrales.


Sur le web.

Voir les commentaires (20)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (20)
  • Vous oubliez surtout que l’Etat Islamique n’en a plus pour longtemps donc à quoi bon ?
    L’armée irakienne est entraînée par les américains et aidée par des milices chiites financées par l’Iran, elle se renforce et commence déjà à prendre du territoire, elle finira par reprendre la 2ème plus grande ville d’Irak : Mossoul.
    Une monnaie islamique ne servira à rien.

    • Il n’y a aucun risque à échanger du papiers (qu’on est en train d’imprimer aux U.S.A., en U.E. ou en Chine et d’autres encore, sans doute, en préparant une inflation redoutable (quand on rembourse en « ronds de carottes » ce qu’on a emprunté pour acheter au moment utile. (Désolé pour vous, les petits épargnants!).
      Si c’est de l’or, moi, je vais tout de suite en acheter! (Essayez encore d’acheter un lingot!).

  • bonjour, pour confirmer mon très mauvais esprit ,je suggère que figure sur leur monnaie ,recto-verso une immense bouse obscurcissant le monde .

  • « Vous allez peut-être dire que nous sommes un peu parano, mais si cette initiative servait de prétexte pour « abolir » le commerce de l’or, nous pensons que cela arrangerait le système monétaire international qui, je vous le rappelle, repose sur une politique monétaire expansionniste du dollar, une impression infinie de billets (dollars, yens, euros…) que seule peut freiner, gêner, empêcher, une quantité finie d’or. »

    Je ne comprends absolument pas cette partie de votre commentaire en quoi l’introduction d’une monnaie en or aurait-il un impact quelconque sur le système international et abolirait le commerce de l’or ????

    Sinon plus généralement vivement qu’on soit débarrassé de ces fous.

    • C’est très simple: il suffira de décréter que tous ceux qui font commerce d’or cherchent probablement à miner le système monétaire, la preuve, les islamistes font la même chose!

      Interdisons donc le commerce et la détention d’or pour nous protéger du terrorisme islamique! CQFD.

    • Les Etats-Unis se serviraient du prétexte d’une monnaie de l’EI en or pour interdire le commerce de l’or. En vérité, ils renforceraient ainsi la prévalence de leur Dollar.

      • Vous êtes loin dans la théorie du complot …

      • Mon Dieu…Faut se faire soigner là…

      • Il n’y a pas assez d’or en IRAK pour faire une monnaie en or surtout si le dinar pèse 4,3gr d’or (1,3 onces soit 1300 euros au cours actuel) l’état islamique serait a son tour rapidement dévalisé de l’or qu’il a volé. En revanche faire un dinar papier convertible en or (comme le dollar jusqu’en 1971) en ferait une monnaie solide. Pour le commerce extérieur seul le solde de la balance exportations/importations serait payé en or ce qui obligerait a une gestion prudente au niveau budget de l’état. Bien entendu tout ceci n’arrivera pas les puissances abattront l’état islamique. Mais si russie, chine, inde et éventuellement brésil le font, alors ce sera la vraie fin du dollar papier.

    • Il vous suffit, comme simple particulier de tenter d’acheter de l’or physique comme pour le ramener chez vous. Bonne chance!

  • Je suis toujours sidéré de voir ce mot Etat islamique car cela donne presque une légitimité et est une insulte au mot et la fonction d’un Etat par ailleurs sur un plan economique la valeur de cette monaie serait evidement egale a son poids d’or et non disputable Quand au Califat que j’ai mis en scene et imaginé dans mon livre l’Imam Caché écrit il y plus de 20 ans j’avais effectivement prévu que la monaie Or remplacerait toutes autres monaies fiduciaires et mon sentiment c’est que nous n’en avons hélas pas fini avec cette engeance

    • La vérité est qu’ils forment leur Etat avec leurs règles, leur système d’éducation, des sortes d’aides sociales…C’est pour ça qu’il faut les dégager le plus vite possible, il ne faut pas leur laisser le temps.

      • Vous ne les dégagerez efficacement que si vous pouvez apporter aux populations une alternative à ces aides, à cet embrigadement, à cet ordre. Et pour le moment, c’est mal barré.

  • Il y a des contradictions dans cet article:
    Une monnaie fiat a besoin de confiance. Une monnaie marchandise n’a que peu besoin de confiance. La confiance ne se fait plus en la monnaie mais en la marchandise en l’occurrence l’or.
    Refondre de l’or est TRÈS simple. Le point de fusion de l’or s’atteint facilement 1065,18C n’est ps une température très élevée. Convertir des pièces de Daesh en barres peut se réaliser avec un fer à souder oxygène acétylène disponible en GSB. Dès l’or, accepter de se faire payer en monnaie du Daesh ne pose pas vraiment de problème.
    En ce qui concerne l’Etat autoritaire et centralisé je ne vois pas en quoi ça serait un problème pour l’Etat islamique, despotique et totalitaire au possible.
    Le taux de change? Le prix de l’or tout simplement… Donc je vois pas en quoi ca empêcherait vraiment de faire fonctionner le marché.

    Le risque de voir autrui utiliser des dollars pour l’EI serait combattu par de la persécution des réfractaires et par le simple fait que l’or ne subit pas l’inflation

    Au final, pour le califat ou je ne sais trop comment l’appeler je pense que le souci se situe plus dans l’approvisionnement. S’ils veulent avoir une monnaie à cours légal et cours forcé il devront posséder des réserves gigantesques sauf à voir le prix de l’or augmenter massivement dans cette région ce qui est une fois de plus largement possible et même pas forcément négatif pour cet État qui pourrait s’approvisionner à l’extérieur et devenir le seul pourvoyeur dans un pays ou ce média serait le seul accepté pour les transactions commerciales.

    • Je comprends mal cette notion de monnaie marchandise.
      Selon moi, l’or et l’argent sont des monnaies naturelles, ou des monnaies « tout-court », c’est-à-dire des substances réunissant naturellement les propriétés qui définissent une monnaie: pouvoir servir de numéraire, de réserve de valeur et d’unité de compte.

      • Selon votre définition (dont je crois qu’elle est la bonne) il manque aux monnaies fiat (papier) l’un des critères que vous citez: la réserve de valeur. Laquelle est effective en ce qui concerne l’or: au debut du siècle dernier un beau costume coutait une once d’or, c’est encore le cas maintenant, a comparer avec l’évolution du dollar.

  • Je crains que les partisans du standard-or et d’une monnaie saine seron désormais assimillés à des extremistes islamiques…

  • Que le dévoiement du système monétaire actuel soit diabolique, je ne suis pas loin de le croire.
    Cela lui fait un point commun avec l’État islamique !

  • L’or n’a jamais cessé d’être une monnaie, une vraie, une qui permet le stockage de la valeur. Comme je ne pense pas que vous me croyiez j’apelle Greenspan (ancien patron de la FED de 1987 a 2006, avant bernanke) a mon secours:

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

À New York comme au Parlement belge, je rencontre de plus en plus d’interlocuteurs qui se disent convaincus que l’islamisation de Bruxelles — et de Londres, ajoutent-ils fréquemment — est désormais inéluctable et n’est plus qu’une question de temps. C’est un pronostic qui paraît audible, mais qui mérite plus que des nuances.

Commençons par relever, sans nous perdre dans les chiffres, que la progression de la population musulmane, à Bruxelles, est aussi massive que fulgurante. Depuis cinquante ans, le nombre de musulmans ne cesse de cro... Poursuivre la lecture

Le système de protection sociale français se caractérise par une grande et excessive générosité à l'égard des immigrés. Les récents débats sur la loi immigration, qui a abordé plusieurs volets tels que le travail, l’intégration, l’éloignement ou encore l’asile, ont mis en lumière la difficile recherche de consensus sur la question.

Parmi eux figuraient des propositions telles que la révision de l'aide médicale d'État (AME), la régulation des sans-papiers dans les métiers en tension, le durcissement du regroupement familial et de l’accè... Poursuivre la lecture

Les autorités redoutent un attentat d’ici la fin de l’année. Elles l’ont d’ailleurs très médiatiquement fait savoir, tant du côté européen que du côté français, afin que toute la population soit correctement saisie d’inquiétude et de méfiance pour la période des fêtes.

Et donc, que ce soit le résultat d’une action préparée de longue date restée discrète voire secrète au point d’échapper aux renseignements policiers, ou qu’il s’agisse d’un événement quasiment improvisé, selon toute vraisemblance, les prochaines semaines ou, plus probabl... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles