Pourquoi sauver l’or de la Suisse ?

La Suisse va-t-elle suivre la voie sans issue de la monnaie papier et le mariage absurde du franc suisse à un euro en perdition ?

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Pourquoi sauver l’or de la Suisse ?

Publié le 9 novembre 2014
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La Suisse tire une grande partie de sa réputation de l’excellence de ses compétences financières et de la sagesse de son peuple. Il serait vraiment dommage que le 30 novembre on découvre qu’il n’en est rien et qu’elle a choisi, sciemment, la voie sans issue de la monnaie papier et le mariage absurde du franc suisse à un euro en perdition.

Par Stéphane Montabert.

« La campagne s’anime », lança Darius Rochebin à l’antenne du journal du 23 octobre en annonçant un reportage sur l’initiative sur l’or qui fut dans son genre un modèle de désinformation. Promoteurs de l’initiative coupés pour ne retenir de leur discours que les références au passé, adversaires du texte s’étalant complaisamment en mentionnant l’inévitable conservatisme des premiers et bien sûr, condamnation sans appel, leur volonté d’isoler la Suisse…

Voilà la faible introduction à laquelle eut droit le téléspectateur helvétique, elle-même préalable à une campagne particulièrement fade depuis. En temps de parole ou surface d’affichage, l’or de la Suisse ne semble guère passionner les foules. Un tel manque d’engouement est d’autant plus regrettable que l’initiative sur l’or est sans doute l’un des objets les plus importants soumis au peuple ces vingt dernières années, un des trois défis de la Suisse.

Elle définit rien de moins que la prospérité future du pays.

Alors, la BNS doit-elle comme nous l’explique-t-on acheter massivement de l’or pour atteindre 20 % de fonds propres en métal jaune? Doit-elle rester prisonnière de ce poids de métal sans jamais pouvoir le vendre? Des absolutistes de l’or mettent-ils en jeu l’indépendance de l’institution, érigée au rang de sacré ?

Pour quiconque a une vague connaissance du système des banques centrales et de l’histoire récente de la BNS en particulier, ces questions révèlent de l’absurde. Mais pour le comprendre, il faut revenir un peu en arrière sur un système devenu fou.

 

Échange relique barbare contre inflation

« Durant des milliers d’année, l’or était synonyme de prospérité et de force, de confiance et de fiabilité. La loyauté de la Banque nationale envers l’or soutient incontestablement sa bonne réputation et sa crédibilité. » — Jean Zwahlen, directeur de la BNS, juin 1965

Le XXe siècle vit deux guerres mondiales et la ruine de nombre de nations petit à petit incapables d’honorer leurs promesses d’une monnaie nationale convertible contre de l’or. En imprimant plus que de raison, elles avaient menti, entraînant de nombreuses dévaluations. Les États-Unis entérinèrent pour de bon l’abandon du dollar-or sous Nixon en 1971, propulsant officiellement la monnaie américaine dans le monde évanescent de la monnaie-papier, encore appelée monnaie-fiat. Ils furent imités par nombre de gouvernements, et tous se retranchèrent derrière des théories monétaristes pour justifier leur abandon de la relique barbare.

La monnaie-papier a un avantage énorme par rapport à une monnaie adossée à du métal précieux : on peut la créer ex-nihilo en se contentant de l’imprimer. Évidemment, la richesse monétaire ainsi créée est parfaitement illusoire ; si par un coup de baguette magique tous les montants des comptes en banques, des prix et des libellés des billets de banques étaient instantanément multipliés par deux, personne ne serait réellement plus riche. En termes de pouvoir d’achat ou comparée à l’or, la valeur de la monnaie aurait simplement été réduite de moitié.

Toutefois, dans le monde réel, les choses ne se passent pas ainsi. La transposition de la nouvelle valeur – affaiblie – d’une monnaie n’est pas instantanée, et se diffuse à travers le phénomène de l’inflation. Les prix montent, de l’immobilier à la baguette de pain, alors qu’en réalité c’est simplement la puissance de la monnaie dans laquelle les prix sont exprimés qui diminue.

À travers l’inflation, le dollar a ainsi perdu en un siècle 95 % de sa valeur.

Contrairement à leurs discours convenus, les politiciens de toute sorte adorent l’inflation. Pour eux l’inflation n’a que des avantages. Les banquiers centraux, fonctionnaires et politiciens, proches de l’intarissable source de monnaie, voient leur pouvoir d’achat augmenter puisqu’ils disposent de plus de numéraire, alors que les prix dans le pays n’ont pas encore été ajustés.

L’inflation a d’autres avantages pour la classe dirigeante : elle rend moins étouffantes des dettes publiques colossales, puisque leur montant s’étiole avec la valeur de la monnaie. Et les rentrées fiscales augmentent, puisque, par le truchement de l’inflation et la progressivité de l’impôt les contribuables sont peu à peu poussés vers des tranches d’impositions de plus en plus élevées.

Finalement, l’existence de la monnaie fiduciaire – et l’inflation qui s’ensuit – justifient une politique monétaire avec forces experts du cénacle se réunissant dans le plus grand sérieux pour savoir quelle quantité de monnaie il faut inévitablement injecter encore dans les circuits économiques, décréter la valeur que doivent avoir les taux d’intérêt, établir des politiques de relance, et ainsi de suite. La monnaie fiduciaire implique un interventionnisme de tous les instants.

Pour le reste de la société civile, évidemment, l’inflation est moins rose. L’épargne est découragée, donc la création de capital, et ensuite la croissance et l’emploi. Le secteur privé ne bénéficie d’un réajustement de la valeur de la monnaie – à travers des augmentations de salaire par exemple – qu’en toute fin de chaîne, bien plus lentement et plus tardivement que la hausse des prix subie dans l’intervalle. Comme on l’a vu, il est aussi pénalisé par une fiscalité plus élevée.

La Suisse refusa de se livrer au jeu de la monnaie papier. Contrairement à la doxa martelée aujourd’hui sur la nécessité d’une monnaie faible, elle profita à plein de plusieurs décennies de croissance avec un franc suisse adossé à l’or. Entre 1970 et 2008, la force du franc était légendaire – bien qu’illusoire sur ses dernières années – et il s’apprécia de 330 % contre le dollar et de 57 % contre le deutsche mark et l’euro.

Les graines de l’effondrement du franc suisse étaient pourtant semées depuis longtemps.

 

Or en solde

Si on se souvient de 1992 comme de l’année où la Suisse refusa de peu l’adhésion à l’Union européenne, se rappelle-t-on que c’est aussi l’année où elle rejoignit, discrètement, le Fonds Monétaire International (FMI) ? Même si les élites se désolaient du refus populaire sur la question européenne, il fallait préparer l’avenir. La disparité entre la monnaie forte et convertible-or de la Suisse et les monnaies flottantes des pays qui l’entouraient était un obstacle à l’adhésion ; les choses commencèrent donc à changer.

En novembre 1996, le Conseil Fédéral publia le projet d’une réforme de Constitution établissant au travers de son article 89 une position radicalement nouvelle sur la politique monétaire. Elle rompait le lien entre franc suisse et or et affirmait l’indépendance constitutionnelle de la BNS. La BNS devenait une société anonyme chargée de gérer la monnaie et de distribuer ses bénéfices à l’Etat.

En mars 1997, le Conseiller Fédéral PDC Arnold Koller proposa – à la surprise générale – que la BNS vende pour sept milliards de francs de réserves d’or excédentaire pour alimenter un fonds de solidarité.

En avril 1999 la nouvelle Constitution fut approuvée en votation populaire et prit effet le 1er janvier 2000. Dès lors, trois membres du directoire de la BNS avaient désormais tout pouvoir de gestion sur les stocks d’or de la Suisse et l’impression de monnaie, sans aucune limite, sans devoir rendre de compte à quiconque.

Si le peuple refusa le fonds de solidarité proposé quelques années auparavant, l’or de la BNS fut vendu quand même. Celle-ci avait en effet estimé qu’il n’était plus nécessaire pour conduire sa politique monétaire. Dès mai 2000 la BNS commença donc à se débarrasser de ses stocks d’or au rythme d’une tonne par jour, alors même que les cours du métal jaune subissaient un plus bas historique.

Une fois la moitié de ce trésor accumulé sur des siècles écoulé sur les marchés, la BNS liquida encore 250 tonnes d’un coup pour faire bonne mesure. Le produit de la vente – en monnaie-papier désormais – fut alloué aux différents acteurs institutionnels du pays, achetant leur silence selon la clé de répartition constitutionnellement prévue : un tiers pour la Confédération, deux tiers pour les Cantons.

Le trésor du peuple suisse fut ainsi dilapidé en quelques mois alors que le produit de la vente servait à payer les dépenses courantes des administrations. 1550 tonnes d’or disparurent sur les 2590 qu’avait jamais possédées le pays.

Mais le pire était encore à venir.

 

Quand la Suisse cherche par tous les moyens à embarquer dans le train fou de la crise

Depuis l’application de la nouvelle Constitution, le franc suisse était désormais devenu une monnaie-papier, mais ce caractère n’avait pas encore été pleinement exploité. Le franc était encore sujet à une certaine réputation, en quelque sorte. Même si la BNS ne se gênait plus d’en imprimer il n’y avait pas vraiment de raison de se lancer dans une dévaluation massive. La crise financière de 2007 donna cette excuse, tout en permettant de lier durablement le franc suisse à la monnaie unique de l’Union Européenne, entérinant une quasi-adhésion monétaire de fait.

Le point d’orgue de la manœuvre fut évidemment atteint lors de l’été 2011 avec la déclaration solennelle de la BNS de s’engager pour les exportations à maintenir une parité fixe de 1,20 franc suisse pour un euro, sous les applaudissements des gogos. La quantité de francs suisses créée pour l’occasion était si énorme que la monnaie dévalua de 9 % en une seule journée.

Mais même avant cela la BNS avait commencé à massivement imprimer du franc suisse pour venir au secours des pays amis de l’eurozone.

Le bilan de la BNS ne montre rien d’autre que la quantité de francs suisses existant dans le monde à un moment donné. Pas besoin d’être devin pour comprendre que plus des francs suisses sont créés, plus la sa valeur s’affaiblit.

Depuis 2009 la BNS a fait quintupler la masse de francs suisses en circulation. Même depuis le taux plancher avec l’euro sensé calmer le jeu et apaiser la situation, la BNS a encore dû doubler la masse de francs suisses en circulation. Pareille multiplication de la monnaie est inédite dans l’histoire récente, et soigneusement cachée au grand public.

Si vous avez suivi jusque-là vous devriez poser deux questions :

Où passe cet argent ? Où est l’inflation ?

L’argent créé par la BNS est essentiellement placé en zone euro, soit en achetant directement de l’euro dans l’espoir de faire monter son cours, soit en souscrivant à de la dette publique de pays de la zone euro. On pense naturellement à l’Allemagne mais elle n’émet même pas assez de dette pour absorber tout le flot de francs suisses imprimés par la BNS… Celle-ci a donc probablement souscrit également à la dette publique de pays moins reluisants. Enfin, la BNS s’autorise jusqu’à 15 % de son bilan (soit, compte tenu du boursouflement monstrueux de celui-ci, autant que tous les francs suisses en circulation à une époque aussi lointaine que 1996) en… placements boursiers. Oui, la BNS joue en bourse, comme d’autres banques centrales d’ailleurs. Vous ne vous étiez jamais demandé comment les bourses du monde volaient de record en record alors que les perspectives économiques n’ont jamais été aussi moroses?

Et l’inflation, demanderiez-vous ? Celle-ci n’est pas encore au rendez-vous, puisque l’argent généré n’a pas encore atteint les circuits économiques normaux. Pour l’instant, il sert à gonfler autant de bulles un peu partout – bulle immobilière, bulle de la dette, bulle des marchés boursiers, bulle de l’art… Bulles petites et grosses dont l’éclatement finira avec des conséquences qui feront certainement passer la crise économique de 1929 pour une aimable plaisanterie.

Tout cela ne peut que très mal finir.

L’initiative UDC pour sauver l’or de la Suisse intervient à point nommé pour que la BNS lâche le train fou de la monnaie fiduciaire alors que le précipice est en vue.

L’initiative demande trois choses simples et aisément compréhensible s:

  1. Le rapatriement en Suisse de l’or helvétique stocké sur territoire étranger
  2. L’interdiction de vendre de l’or
  3. La reconstitution de 20% du bilan de la BNS sous forme d’or

 

Examinons-les, ainsi que les arguments que leurs opposent les adversaires du texte.

 

Rapatrier l’or suisse… En Suisse

La première des exigences de l’initiative est tellement évidente qu’il est difficile d’y trouver à redire. Aujourd’hui, 300 des 1040 tonnes d’or encore aux mains du pays sont en fait stockées à l’étranger – deux tiers en Grande-Bretagne, un tiers au Canada.

La Suisse est jugée assez sûre par des pays tiers pour qu’ils y stockent leurs propres réserves d’or, pourquoi ne pourrait-elle pas y entreposer l’intégralité du sien ?

Les excuses avancées par les adversaires de l’initiative pour rejeter cette demande sont pétries de mauvaise foi – ils prétendent ainsi que ces réserves restent plus facilement disponibles pour être vendues par exemple. Mais le Canada n’est absolument pas une plateforme du commerce d’or, et si l’argument a à la limite un peu plus de vraisemblance pour Londres, c’est oublier un peu vite que la principale place d’échange financière sur l’or est… la Suisse !

Encore aujourd’hui, les deux tiers de l’or mondial transitent par la Suisse et, dans une année moyenne, le pays raffine à peu près 70 % de l’or mondial. Six des raffineurs d’or de la liste LBMA Good Delivery représentent 90 % du volume mondial, et quatre d’entre eux sont basés en Suisse.

Depuis la disparition de la menace posée par l’Armée Rouge du bloc soviétique, il n’y a pas vraiment de justification rationnelle à stocker de l’or hors des frontières du pays. La réalité, c’est que personne ne sait si ces trois cent tonnes d’or existent encore ailleurs que sur les listings d’inventaire.

Certains préfèrent prétendre en effet que le coffre est toujours plein que de l’ouvrir et de constater ce qu’il contient, ce qui ne manquerait pas, en cas de mauvaise surprise, de provoquer de graves troubles internationaux. Mais est-ce une attitude responsable ?

 

Ne pas vendre d’or

Brandie comme l’expression de l’absolutisme le plus rigide par les adversaires de l’initiative, cette demande n’est que le retour d’un contrôle démocratique qui a prévalu jusqu’à l’adhésion de la Suisse au FMI en 1992 : pour vendre de l’or, il fallait passer par une votation populaire.

Ce que la Constitution interdit, un amendement à la Constitution peut l’autoriser. On est dans le cadre d’une réforme législative cohérente. Le refus de vendre de l’or n’est donc pas une interdiction absolue de vendre de l’or mais l’obligation, pour vendre de l’or, de permettre cette vente par un amendement de la Constitution – et donc, obligatoirement, un vote populaire.

Cette interdiction aurait donc surtout pour effet de mettre un terme au pouvoir illimité de la petite coterie de banquiers actuellement placés par leurs pairs à la tête de la BNS. On comprend leur rejet du texte. Le dernier mot quant au commerce de l’or de la Suisse, patrimoine des Suisses, reviendrait à ces derniers, ce qui semble tout de même la moindre des choses.

 

20% d’or au bilan

Le dernier point est le plus intéressant. En obligeant la BNS à porter 20 % d’or à son bilan, l’initiative pour sauver l’or de la Suisse ne ferait rien de moins que de rendre à nouveau le franc suisse (faiblement) convertible-or.

Autrement dit, le franc suisse cesserait d’être une monnaie papier, refermant la parenthèse ouverte depuis vingt ans.

L’inscription d’un montant fixe d’or à porter au bilan de la BNS est un frein efficace à la création illimitée de monnaie papier. Il faut en effet avoir d’abord acquis une certaine quantité d’or au prix du marché avant de créer le moindre nouveau billet, métal précieux qu’il n’est pas possible de contrefaire. La convertibilité-or est ainsi le préalable indispensable à la saine gestion d’une devise, ce qui en fait en contrepartie une monnaie réputée et digne de confiance.

20 % est-il un taux intenable, comme le présentent les adversaires de l’initiative? Tout dépend du point de vue d’où l’on se place, en particulier selon une approche historique.

Rappelons que jusqu’en 1992 la BNS le taux de conversion en or du franc suisse était de 40 %. En 2009, malgré les ventes d’or et la tempête financière utilisée comme excuse pour imprimer du papier, il était encore à 18 %. Aujourd’hui, la masse de francs suisses en circulation a encore tellement augmenté que la couverture en or du franc suisse n’est plus que de 7,6 %. Notez bien que la Suisse n’a pas vendu d’or, mais s’est simplement contentée de créer du franc suisse sans acquérir aucune contrepartie métallique.

Le ratio auquel les initiants souhaitent revenir, dénoncé comme intenable par les adversaires du texte, avait encore cours en 2008.

Si l’initiative passait, revenir à 20 % de couverture en or-métal n’aurait rien d’impossible malgré la quantité de francs suisses créés par la BNS depuis. La BNS n’aurait qu’à réduire son bilan en se désengageant de ses aventures boursières, ou en revendant quelques-uns des milliards de devise étrangère qu’elle stocke, à moins qu’elle ne revende les dettes de pays de la zone euro qu’elle détient. Les francs suisses revenus dans le giron de la BNS étant détruit (on parle de démonétisation) son bilan se dégonflerait et la proportion de couverture-or remonterait mécaniquement. La BNS pourrait théoriquement revenir à un niveau de couverture-or de 20 % de son bilan sans même en acheter un seul gramme!

Les adversaires de l’initiative affirment que le texte obligerait la BNS à acheter pour 63 milliards d’or au cours actuel ; cette possibilité – impraticable – n’est à envisager que si la BNS tenait mordicus à maintenir toutes ses positions actuelles sans rien changer, ce qui n’a guère de sens. Ne nous le cachons pas, le retour du franc suisse au sein des monnaies convertibles impliquerait d’abandonner le taux plancher maintenu à grands frais entre le franc suisse et l’euro, et qui tire notre monnaie vers le bas.

 

Conclusion

Nos élites sont expertes en communication – il en va, après tout, de leur position dans la hiérarchie sociale. Elles rabâchent sans cesse que l’or n’est pas important, que l’or est en sécurité hors de Suisse, que la situation monétaire internationale est sous contrôle et qu’une monnaie de singe est une monnaie de prospérité. Et quand elles ne le font pas, elles invoquent alors la liberté d’action d’une BNS quasi-divine, à l’indépendance aussi sacro-sainte que si elle était un des trois pouvoirs de l’État définis par Voltaire et Montesquieu.

Pourtant, personne n’oserait proposer que tout l’or de la BNS soit vendu. Nul besoin impératif de s’y livrer, certes, mais si l’or est aussi inutile et désuet qu’ils le prétendent, pourquoi hésiter ? En plus les cours sont bien plus élevés qu’en 2003 ! Bonne affaire !

On devine bien pourtant que malgré toutes les dénégations, personne au sein des adversaires de l’initiative ne souhaiterait réellement parvenir à cette extrémité. C’est ainsi, au pied du mur, qu’on voit rejaillir toute l’hypocrisie du mépris de façade affiché pour l’or. Chacun sait bien au fond de lui-même qu’en cas de crise majeure seul l’or comptera, et rien d’autre.

« L’or de la Suisse est un bien de famille inaliénable. » — Conseil Fédéral, 1997

Les 1040 tonnes d’or dont dispose encore la Suisse – sur le papier tout au moins – suffiront-elles à préserver la prospérité du pays lorsque la vraie crise éclatera ?

Chacun aura sa propre opinion à ce sujet. Mais indépendamment de cet avis, la vraie question est ailleurs. Si crise prochaine il y aura, pourquoi ne pas préparer dès maintenant le pays à y faire face ?

De nombreuses nations estiment aujourd’hui que nous quittons l’ère des échanges internationaux libellés en dollar – trop manipulé et trop politique – en faveur d’un nouveau système qui reste à inventer. Mais il adviendra, et divers projets sont en marche. Comme il y a peu de chances qu’un nouveau pays puisse un jour exercer une hégémonie financière sur le monde pareille à celle du dollar depuis la seconde moitié du XXe siècle, beaucoup parient sur le retour de l’or dans un monde multipolaire. La Chine et la Russie, par exemple, se positionnent en conséquence.

La Suisse tire une grande partie de sa réputation de l’excellence de ses compétences financières et de la sagesse de son peuple. Il serait vraiment dommage que le 30 novembre on découvre qu’il n’en est rien et qu’elle a choisi sciemment la voie sans issue de la monnaie papier, et le mariage absurde du franc suisse à un euro en perdition.

Dans tous les cas, ce choix et ses conséquences auront été sa pleine responsabilité.

Les lecteurs décidés à en connaître davantage pourront se référer à l’excellent article de Grant Williams sur Mauldin Economics, détaillé mais malheureusement en anglais.

Sur le web

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  • Bonjour,
    Je me permets de souligner quelques incohérences/oublis, comme le fait que la BNS ait supposément fait quintupler la masse monétaire depuis 2009. Si on s’intéresse aux chiffres de la banque mondiale, cette masse monétaire augmente de 4.1% par an depuis 2009, ce qui nous donne une augmentation d’environ 17%, relativement loin des 400% d’augmentation que vous mentionnez, ce qui m’amène à penser que votre argument est assez curieux. (http://donnees.banquemondiale.org/indicateur/FM.LBL.BMNY.ZG)

    L’autre point m’ayant quelque peu étonné, est la description du bilan de la banque nationale suisse, comme quantité de francs suisses en circulation dans le monde. Loin d’être comptable chevronné, je fais peut-être erreur et vous m’en excuserez, mais un bilan décrit les actifs moins les passifs d’une entreprise, ici la banque nationale suisse, société anonyme comme vous le mentionnez. Le bilan, positif dans notre cas, et heureusement, signifie donc que la BNS possède plus d’actifs que de passifs, représentés par de l’or, des francs suisses, mais aussi des monnaies étrangères, des titres, etc. en quantité non négligeable me semble-t-il. (http://www.snb.ch/ext/stats/balsnb/pdf/defr/A3_1_Waehrungsreserven_der_CH.pdf)

    Très bon article en tout cas, qui explique bien le travail de la banque nationale suisse, même si certains points sont discutables, comme le fait de ne plus soutenir le taux plancher avec l’euro, qui reste une véritable controverse pour les exportations suisses, car comme vous le savez, notre petit marché interne n’est pas forcément idéal pour un repli sur lui-même, et qui malheureusement est obligé de commercer avec une zone économiquement malade pour la plupart de ses débouchés.

  • Comme d’habitude et pour reprendre l’expression de « Juncker L’Optimiseur Fiscal »… « quand cela devient sérieux, il faut mentir ».

    http://tinyurl.com/q4mzn4p

    Ainsi tous les référendums « sérieux » en Suisse (Immigration par exemple, Sécu) font l’objet de grosses campagnes de propagande.

    Mais les Suisses ont la mauvaise habitude de demeurer les pieds sur Terre, et généralement ils ne suivent pas (plus) les avis officiels.

    Espérons donc que le 30 novembre, ils votent en faveur de l’or, histoire de donner un formidable bras d’honneur à tous les menteurs, et les tricheurs.

    Pour le reste, vous avez très bien résumé le problème. Depuis le stupide et mortifère « peg » du franc suisse à l’Euro (1,20), oui, il faut le dire et le répéter : La Suisse a acheté de la dette française.

    Elle se retrouve ainsi coincée…. Si le peg lâche, elle enregistrerait immédiatement des pertes massives.

    Et double effet kiss kool, elle aura aussi des pertes lorsque les taux remonteront sur les OAT françaises.

    Il est terrible de voir un si beau pays, si sain, rejoindre le concert de la démence financière collective et se vendre littéralement aux bruxellois, aux fédéralistes obsessionnels, et aux immigrationnistes fanatiques.

    Vive la Suisse libre !

  • Il faut être idiot pour penser qu’en cas de grave crise de l’UE, la Suisse, parce qu’elle n’en fait pas partie, ne serait pas touchée gravement, elle aussi.

  • Je me pose toujours une question quand je lis vos articles. Vous avez l’air de quelqu’un d’assez libéral et plutôt ouvert. Que faites-vous à l’UDC ?
    Sinon, je constate que la désinformation bat son plein en Suisse, notamment dans la Tribune De Gauche : http://www.tdg.ch/economie/argentfinances/rassure-sert/story/11875751?comments=1

    • Je défends le libéralisme par l’UDC parce que c’est à l’UDC qu’il se trouve selon moi.

      L’initiative pour sauver l’or de la Suisse a ainsi été lancée par l’UDC et est combattue entre autre par le PLR, le parti « libéral » officiel. Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.

  • « Pour le reste de la société civile, évidemment, l’inflation est moins rose. L’épargne est découragée, donc la création de capital, et ensuite la croissance et l’emploi. »

    est ce vrai ? je pensais pourtant que l’épargne était de l’investissement , et l’inflation impose d’avoir une épargne mieux investie que sans inflation !

    • L’épargne permet de constituer un investissement en effet. L’inflation ne la rend pas impossible, mais la projection des rendements dans l’avenir devient immensément difficile, car il faut évidemment que le rendement batte l’inflation.

      En fait l’inflation FORCE à avoir un rendement pour son épargne faute de quoi l’argent économisé s’évapore ; malheureusement pour les gouvernements locaux, ce rendement s’obtient en général bien plus facilement en choisissant l’investissement dans des monnaies étrangères stables qu’en essayant de surfer la vague locale de l’inflation. On peut aussi opter tout simplement pour de l’or ou de l’argent, sans aucun rendement mais avec une sécurité maximale.

  • J’aimerais avoir votre avis: quand le « peg 1.20 » va t-il lacher ?
    – peu après la votation sur l’or si elle est acceptée ?
    – lorsque les US vont commencer relever leurs taux et que le BNS va devoir choisir entre s’arrimer au USD ou rester sur l’EUR ?
    – autre ?

    • Si on met entre parenthèse la victoire (très peu probable) de l’initiative sur l’or le 30 novembre, alors la réponse vient d’une autre question:

      Le bilan d’une banque nationale peut-il être illimité?

      • C’est quoi ce défaitisme ??
        Allez Stéphane on y croit et puis le dernier sondage n’était pas si mauvais que ça.
        Petite question, y a t-il à l’UDC, une task force concernant la LAMAL ?
        Il faut vraiment sortir de cette saloperie sinon, à la prochaine votation, ce sera la sécu.

        • Je ne sais pas, et si une telle task force existe je n’en fais pas partie.

          Je me souviens que la dernière offensive anti-LAMAL lancée il y a quelques années déjà était une intiative sur la liberté de contracter. Autrement dit les gens auraient pu souscrire à la LAMal sans y être légalement obligés (pouvant recourir à d’autres prestataires voire à rien du tout!)

          Le rejet de cette initiative fut si massif que plus d’un en furent découragés. La Suisse aime bien le collectivisme, mais mâtiné de paternalisme au lieu de la sauce révolutionnaire que souhaitent les socialistes.

  • Les commentaires sont fermés.

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