3 mythes sur l’entrepreneuriat

La Kauffman Foundation rappelle quels sont les mythes tenaces qui faussent notre vision de la dynamique entrepreneuriale.

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3 petits cochons credits davidd (licence creative commons)

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3 mythes sur l’entrepreneuriat

Publié le 21 octobre 2014
- A +

Par Dominique d’Emploi 2017.

3 petits cochons credits davidd (licence creative commons)

La Kauffman Foundation, organisme américain spécialiste de l’entrepreneuriat, rappelle tout d’abord que ce ne sont pas les petites entreprises mais bien les jeunes entreprises qui sont le moteur d’une économie. La différence entre ces deux assertions peut paraître faible mais en réalité elle est de taille. S’il est évident qu’une entreprise est en général petite avant d’être grosse, nombreuses sont les entreprises qui naissent petites et qui le restent définitivement, n’ayant ni l’ambition ni l’idée nouvelle innovante qui leur permettrait de grossir et de tirer véritablement vers le haut la croissance économique de leur pays.

Ce point est important car il a des conséquences considérables en termes de type de politiques économiques à mettre en œuvre. En effet si l’on admet que les entreprises déterminantes pour l’emploi sont les entreprises qui n’existent pas encore ou qui existent tout juste, on constate tout l’illogisme du pacte de responsabilité : celui-ci prétend faire s’engager le Medef – représentant bien davantage les entreprises existantes et anciennes – à créer de l’emploi.

Le graphique ci-dessous, tiré de la Kauffman Foundation à partir des données américaines, montre bien la corrélation entre la jeunesse et la création d’emploi par une entreprise :
emploi

La Kauffman Foundation rappelle ensuite une autre vérité importante, à savoir que les États doivent renoncer à vouloir créer leur nouvelle Silicon Valley. Beaucoup d’hommes politiques en ont rêvé, il existe une littérature abondante donnant les recettes pour y parvenir mais la Silicon Valley est de fait un lieu unique au monde qu’il serait illusoire de vouloir reproduire.

La volonté du gouvernement français de faire du plateau de Saclay1 la nouvelle Silicon Valley apparaît donc en totale contradiction avec ce constat. Sur son site Internet, la Kauffman Foundation rappelle en outre les ingrédients indispensables pour un écosystème entrepreneurial : des véritables entrepreneurs d’un côté et des business angels et capitaux risqueurs de l’autre. Rappelons que la Silicon Valley originelle ne s’est pas créée par volonté étatique mais au contraire par le jeu des acteurs privés. Or la nouvelle Silicon Valley telle qu’imaginée dans la pensée française comprendra essentiellement des grandes écoles et universités publiques ainsi que des centres de recherche publics. On y trouvera semble-t-il davantage d’étudiants que d’entrepreneurs, davantage de chercheurs que de capitaux risqueurs. Ce qui manque en France, ce n’est pas le « Paris-Saclay » mais un environnement favorable pour les entrepreneurs et les investisseurs grâce à une fiscalité attractive et un droit du travail plus souple.

La Kauffman Foundation dénonce enfin un dernier mythe, celui des vertus miraculeuses qu’auraient les incubateurs d’entreprises. La région Île-de-France se targue du nombre d’entreprises aidées par son réseau d’incubateurs, soit 200 startups accompagnées chaque année pour des levées de fonds totales d’environ 50 millions d’euros. Ces incubateurs sont des structures où les startups en phase d’amorçage et de décollage reçoivent « un accompagnement personnalisé, un programme d’animations et de formations sur-mesure, une offre d’hébergement adaptée, l’accès au fonds Paris Innovation Amorçage ainsi qu’à un réseau unique de jeunes entreprises, d’investisseurs, d’experts de la création d’entreprises et de grands comptes. »

Si les montants levés de 50 millions d’euros sont d’une part loin d’être à la hauteur de l’enjeu – il faudrait en lever 4 milliards annuellement pour redresser notre dynamique entrepreneuriale – il existe d’autre part de sérieux doutes sur la pertinence de telles structures, par comparaison avec un accompagnement « classique » par des business angels ou investisseurs providentiels. Cette question a fait l’objet d’une étude d’ampleur par un professeur d’entrepreneuriat à la Syracuse University, plus précisément sur plus de 20.000 startups et sur une durée de plus de vingt ans. L’auteur a trouvé qu’au total le taux d’échec parmi les entreprises en incubateurs était « beaucoup plus élevé que pour les entreprises n’étant pas passées par un incubateur ».

Outre ces réserves d’ordre général, l’examen plus détaillé de l’initiative francilienne d’incubateurs laisse encore plus dubitatif. L’accompagnement individuel est en effet assuré par « un chef de projet dédié ». Ce chef de projet a pour rôle de mettre l’entrepreneur en relation avec des « intervenants nécessaires à la croissance de son entreprise », c’est-à-dire des « experts », des « grands comptes », des « organismes financiers » et des « prestataires ». Le site internet ne mentionne donc à aucun moment des anciens entrepreneurs ou investisseurs providentiels. L’entrepreneur a accès, il est vrai, à plus de soixante animations annuelles : si les modules proposés semblent pertinents, il en est un qui semble remarquablement attester des déficiences françaises : « Réussir sa levée de fonds aux USA ».


Sur le web 

  1. Le coût total du projet Paris-Saclay avoisinerait les 5 milliards d’euros, dont environ 2,5 milliards pour la création d’une nouvelle ligne de métro qui serait la moins fréquentée d’Île de France.
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  • Et allons jusqu’au bout de la demonstration: si en plus un entrepreneur a des ambitions « worldwide » alors il a tout interet a se positionner en priorité aux USA dont la taille et la maturité du marché permettent d’atteindre une taille rentable beaucoup plus facilement et rapidement… la France n’est pas le bon « substrat », le gouvernement peut toujours chercher la graine rare, a quoi cela sert-il si on ne lui donne pas les conditions de s’ epanouir? Autant la planter ailleur cette graine…

  • Le premier frein à la création d’emploi en France est financier : monter une startup ou une entreprise ne peut se faire qu’au prix de sacrifices personnels énormes et une prise de risque gigantesque : il est quasiment impossible d’emprunter sans 3 années de bilan positif et sans cash flow minimum, il est impossible de survivre au premier coup de vent, idem pour louer ou acheter un logement, une voiture etc… exercice qui devient quasiment impossible quand on n’est pas salarié.

    L’état est largement responsable de cet état de fait : la législation de protection mutuelle (les banques demandent des garanties en contre partie des droits qui protègent l’emprunteur) qui a du sens pour les salariés, est un frein majeur à la création et à l’expansion des petites entreprises.

    Quand on ajoute à cela le manque total de protection sociale (le RSI profession libérale couvre absolument rien à part les frais médicaux) qui oblige les entrepreneurs à laisser une fortune en mutuelles, assurances et plus de payer des charges sans valeur, on se rend compte qu’en fin de compte monter une boite et encore plus embaucher les premiers salariés est une aventure que seuls quelques chercheurs en disponibilité, licenciés de grosses boites et étudiants peuvent se permettre.

    Rien ne sert de créer des incubateurs et de subventionner des CCI, alors que les entreprises sont destinées à sucer des cailloux.

  • § Selon moi il y a deux sorte de personnes qui se mettent à leur compte.

    ☺ Ceux qui veulent une promotion sociale que l’entreprise qui les emploie ne peut pas permettre et qui se sentent compétent pour y accéder.

    ☻ Ceux dont les entreprises ne veulent pas ou plus et qui n’ont que cette solution pour vivre.

  • http://www.moovjee.fr/les-mentores/

    Je regardais les fameuses entreprises qui sortent des incubateurs et au final c’est pitoyable.

    TOUTE ont exactement le même profil, étudiant en école de commerce qui veux créer une site web ou une application mobile pour faire le rôle d’intermédiaire, et je comprend mieux pourquoi 90% se cassent la gueule.

    Sauf que au final ils sont pas des lumières, ils embauchent des stagiaires venant principalement d’école en informatique, j’en fais partie et j’ai 15 demandes chaque année de petit con qui me demande une application mobile pour un stage et que c’est une chance pour moi que leur idée est révolutionnaire, sans comprendre que des projets comme eux j’en fait gratuitement tous les mois pour des associations et que c’est juste une perte de temps de travailler pour 430€ ( si tu es rémunérée ) dans une start-up sans avoir de part dans le capital car ils se pensent tous être des génies avec leur idées innovantes et sont persuadé que le commercial est bien plus important que le technique donc hors de question de partagé le gâteau.

    Au final ils ne sont que le reflet de leur pseudos projets, des futurs intermédiaires totalement inutile qui compenseront cela par une arrogance et finiront chef de service/projet dans des boites à licencier du personnel, geler les salaires, et vendre des projets à perte juste car ils sont payé à la commission sur la marge brute …

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Les auteurs : Miruna Radu-Lefebvre est Professeur en Entrepreneuriat à Audencia. Raina Homai est Research Analyst à Audencia.

 

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