Genre et liberté

Le décloisonnement des rôles sociaux attribués à chaque sexe doit pouvoir conduire à la liberté de s’en émanciper.

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femmes au travail credits state library of virgina collections (licence creative commons)

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Genre et liberté

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 4 octobre 2014
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L’heure est peut-être venue, pour contrer ou, à tout le moins, dissiper certains malentendus, de promouvoir, au côté de l’égalité, le premier principe de notre triptyque républicain : la liberté.

Par Jimmy Charruau.

femmes au travail credits state library of virgina collections (licence creative commons)

La question des femmes se réduit le plus souvent aujourd’hui à la problématique de l’égalité des sexes.

C’est d’ailleurs en ce sens que les féministes ont mobilisé la notion de genre dans les années 1970. Puisque ce concept interroge l’origine naturelle des sexes pour les projeter dans le social et rendre compte du caractère construit de leurs rôles respectifs, il leur a permis de contester l’institutionnalisation des différences de positions et de rôles sociaux attribués aux femmes et aux hommes. Cette dénaturalisation des rapports sociaux a en effet conduit à la délégitimation de certaines inégalités sociales jugées patriarcales et faussement expliquées par des considérations d’ordre biologique. Autrement dit, ce que la nature avait traditionnellement permis de masquer, le genre a permis de le dévoiler pour mieux le combattre. Dès lors, le genre n’a été mobilisé que pour promouvoir l’idée d’égalité des sexes.

Si cette démarche a le mérite de rendre lisible l’action menée et le but qu’elle poursuit, l’utilisation de la notion de genre a néanmoins cristallisé nombre de tensions qu’ont su récemment exprimer les virulentes polémiques autour des ABCD de l’égalité expérimentés à l’école.

L’égalité des sexes, souhaitée, est aussitôt assimilée au gender condamné. Et l’on assiste alors aux critiques les plus curieuses visant à brouiller le message porté initialement par les études de genre : ce concept conduirait insidieusement à l’indifférenciation des sexes. Honnis petits garçons et petites filles, chéris individus asexués ! Le genre, envisagé uniquement sous le prisme de l’égalité, sert alors de vecteur à une critique qui amalgame allègrement « égalité » et « identité ».

Liberté c. Égalité

Si elles sont contestables, ces invectives présentent néanmoins l’intérêt de soulever la limite principale et largement indécelable (car paradoxalement trop évidente) des études de genre : celle de ne s’être axé que sur l’idée d’égalité.

L’heure est peut-être venue, pour contrer ou, à tout le moins, dissiper certains malentendus, de promouvoir, au côté de l’égalité, le premier principe de notre triptyque républicain : la liberté. Car c’est bien la liberté que le genre entend avant tout consacrer : la liberté d’exercer toute profession, la liberté d’occuper l’espace public, la liberté de jouir d’une pleine appartenance à la société… bref, la liberté de trouver son identité sociale et politique sans que cette entreprise ne soit dictée par une quelconque norme sociale oppressante. Le décloisonnement des rôles sociaux attribués à chaque sexe doit pouvoir conduire à la liberté de s’en émanciper (ou non, là se trouve la réelle liberté).

Ce changement de paradigme opéré, la critique de l’indifférenciation des sexes ne pourra qu’être moins virulente, voire inexistante car privée d’objet. L’exigence de liberté ne fait que rendre compte de la dualité des sexes et de leurs différences. C’est parce que la femme enfante qu’elle doit être libre de pouvoir avorter. C’est bien parce qu’elle est susceptible de tomber enceinte qu’elle doit pouvoir accéder librement à la contraception. Ce n’est qu’une fois cette marge de liberté ouverte, que l’égalité pourra alors jouer.

Plus que jamais les études de genre doivent donc axer leur analyse sur la liberté et laisser de côté, pour un temps, l’égalité trop longtemps et ostensiblement affichée. Retournement principiel qui ne pourra que conduire à la réhabilitation sociétale du concept de « genre » lorsque l’on sait que les Français acceptent davantage la protection de la liberté (48%) à celle de l’égalité (34%) (sondage Ifop du 6 mai 2014). De la division à la mobilisation, il pourrait n’y avoir qu’un mot.

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  • « …Car c’est bien la liberté que le genre entend avant tout consacrer : la liberté d’exercer toute profession, la liberté d’occuper l’espace public, la liberté de jouir d’une pleine appartenance à la société,… bref, la liberté de trouver son identité sociale et politique sans que cette entreprise ne soit dictée par une quelconque norme sociale oppressante.  »

    Voilà un bon moment que la « norme sociale oppressante » est en voie de disparition en France grâce à l’accès des femmes à l’instruction.
    Après cela, la seule intervention tolérable de la société est de veiller à ce que les droits reconnus des individus dans un groupe soient respectés de façon indifférenciée quel que soit le sexe ( avec le particularisme lié à la procréation qui rend les femmes quasi toutes puissantes )
    Il n’y a pas d’égalité entre homme et femme, le genre est une fumisterie et son apparition au sein du système scolaire un abus.
    Aussi longtemps que les relations humaines seront construites sur la loi du plus fort, les femmes seront dominées par les hommes.
    L’évolution en marche n’est pas liée à une illusoire égalité des sexes ou à une illusoire liberté grandissante ( alors que les lois contraignantes, les interdictions liberticides, les censures de l’expression sont en augmentation constante ) mais à l’instruction pour tous et à l’abandon progressif de la force comme argument essentiel de domination au sein d’un groupe, à l’abandon progressif de l’idée de domination dans les relations humaines.
    L’évolution est en cours, elle n’est pas achevée et elle n’est pas universelle, loin de là…

    • la dominance n’est pas forcément une fatalité, mais le modère patriarcale nous en pêche de le voir.

      la majorité des femems compense leur puissance massique réduite par un usage différent de leur compétences, et un priorité à la communication…
      la bataille pour le pouvoir est plus subtile, même si le 18-19e siècle a bien castré les femmes de leur dominance discrète

      ya des exception et la liberté est pour ces homes ou femme qui sortent du modèle.
      le crime actuel est que l’égalité de force devient une discrimination des hommes féminisés (moins ambitieux par exemple, plus papa poule) qui payent la double peine.

      le nombre de remarques misandre deviennent oppressant, surtout quand on n’est pas une brute patriarcale et que sa femme est une fine politicienne

  • « norme sociale oppressante », « brute patriarcale » oui mais quand il fallait aller pousser la charrue à bras d’homme, sous la pluie, dans la boue, en Mars quand la température n’excède pas 5 à 10 °C, après un hiver où la faim avait un peu rongé… et ce n’est il y a si longtemps 150-200 ans au plus, en certains endroits moins.

  • la propriété gouverne la liberté, par exemple la liberté d’expression :
    propriété > liberté > sûreté > résistance oppression

    • A quoi ça rime de posséder quelque chose si on n’est pas libre dans user comme on veut ?

      La liberté est le principe ultime. Tout le reste en découle.

  • je doute que cette question soit purement idéologique, je pense que la liberté des gens à s’affranchir et des sociétés à évoluer repose aussi sur la prospérité et des petits détails comme le progrès technologique.

  • La théorie du genre est attentatoire au droit de la pouf’ a le rester.

    Ce dont nous ne manquons pas c’est de théoriciens duement subventionnés par nous mêmes pour venir nous faire la lecon sur l’égalitarisme necessaire entre les moulins a vent.

    • Il faut bien que ces gens la trouvent de l’emploi. Vu qu’en plus d’être des inutiles ils ne veulent rien faire de salissant.

  • Un article très éclairant, merci !

  • Les commentaires sont fermés.

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