Russie-Ukraine : les enjeux du gaz pour l’Europe

Peut-on supprimer du jour au lendemain la dépendance européenne au gaz russe ?

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Poutine (Crédits : Platon, CC-BY-NC-SA 2.0)

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Russie-Ukraine : les enjeux du gaz pour l’Europe

Publié le 4 septembre 2014
- A +

Par Aymeric de Villaret.

Poutine credits Platon (licence creative commons)

Que n’a-t-on parlé ces derniers mois de la Russie, de son gaz, de ses exportations vers l’Europe, vers la Chine, du lobbying qu’elle exercerait pour éviter le développement du gaz de schiste en Europe…

Et si l’on y ajoute le désir d’indépendance des européens à la Russie notamment à la lumière de la crise ukrainienne, qui serait même, selon certains, encouragée par les États-Unis, il n’y a presque pas de jours où l’on ne parle des conséquences de la domination actuelle de la Russie.

Quelles peuvent être les conséquences des sanctions prises par les pays occidentaux et des mesures de rétorsions des russes ? Comment (et surtout peut-on ?) du jour au lendemain supprimer une dépendance si forte au premier exportateur mondial de gaz qui se situe à l’est de l’Europe ?

Pas évident de remplacer la Russie car, même si la montée du GNL (Gaz Naturel Liquéfié) peut apparaître comme une alternative, son coût est très supérieur, et ce que pourra exporter les États-Unis ne constitue qu’une goutte d’eau par rapport au marché européen. En outre, une grande partie des sources alternatives provient d’États susceptibles d’être politiquement sensibles un jour.

Oui, le gaz russe est un véritable enjeu… avec un besoin immense d’investissements pour continuer à le développer voir l’étendre.

Un arrêt même temporaire des investissements tel qu’on le perçoit peut engendrer des conséquences non négligeables (retards, pertes de marchés) : les commentaires des compagnies pétrolières et parapétrolières occidentales impliquées dans le pays à l’occasion de leurs résultats du deuxième trimestre sont là pour le confirmer… Ainsi Total, suite à la destruction de l’avion malaysien MH 17, a indiqué avoir arrêté de monter sa participation au capital du gazier russe Novatek.

Les marchés ne s’y sont pas trompés et ont déjà commencé à sanctionner sévèrement certaines sociétés du fait justement du manque de visibilité (Technip près de -9% le 24 juillet, Total de l’ordre de -4% le 30 juillet). BP, de son côté, actionnaire à 20% de la société publique russe Rosneft, a souligné que de nouvelles sanctions occidentales pourraient avoir un impact négatif sur son activité et ses résultats à venir, “sur ses relations avec Rosneft et son investissement dans l’entreprise”.

Conclusion

Business as usual, mais les affaires continuent et on le voit bien avec ExxonMobil commençant en août à forer dans l’Arctique russe avec ce même Rosneft et de son côté, Rosneft se portant acquéreur de 30 % de la compagnie de services pétroliers North Atlantic Drilling (même si l’actionnaire majoritaire en demeure le norvégien Seadrill).

En juillet, le PDG de Total Christophe de Margerie résumait bien l’avis des pétroliers occidentaux : « Peut-on se passer du gaz russe en Europe ? La réponse est non. Et est-ce qu’on a des raisons de s’en passer ? À mon avis, et je ne défends pas les intérêts de Total en Russie, c’est non ».
Force aussi est de constater que si les groupes pétroliers arrêtaient d’investir dans des pays sensibles géopolitiquement, où trouverions-nous le pétrole et le gaz que nous utilisons tous les jours ?

C’est pourquoi, il nous semble raisonnable de penser que, quel que soit la suite des évènements, la Russie continuera pendant des décennies d’être un très grand fournisseur d’hydrocarbures (pétrole et gaz) mondial et que les Occidentaux continueront de se servir auprès d’eux.

À Lire aussi : Mearsheimer, Poutine et les autres, « La Tragédie de la Politique des Grandes Puissances ».

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  • et la domination actuelle des états unis , vous en pensez quoi ?jusqu’à ce que les américains mettent la pagaille en ukraine , tout se passait à peu prés correctement avec la russie et les pays européens ; maintenant que l’on est à la botte des usa via nos élus sans cervelle , on se retrouve énnemi avec la russie avec tout les inconvénients que cela suppose ;

    • +1
      quand je lis « le désir d’indépendance des européens à la Russie notamment à la lumière de la crise ukrainienne, qui serait même, selon certains, encouragée par les États-Unis », je bondis.

      Pas « selon certains », l’influence américaine est avérée. Les Européens après la chute du mur ont loupé une occasion historique avec les Russes.

      Il est vrai qu’il faut tenir compte de l’opinion des ex pays de l’Est qui ont une histoire douloureuse avec ce pays.

      Mais, notamment sous l’impulsion Bush/Obama, l’élargissement de l’Otan aux frontières russes est une erreur dramatique.
      L’indépendance « forcée » du Kosovo a également été une erreur colossale qui a créé un précédent dont Poutine peut se réclamer à bon droit.
      etc.
      Et effectivement, les Etats-Unis ont joué un rôle majeur dans la déstabilisation de l’Ukraine.

      Dommage que la France n’ait pas joué un autre rôle, elle qui a une relation historique forte avec la Russie.

      • « l’élargissement de l’Otan aux frontières russes est une erreur dramatique. »

        en quoi?

        • En ce que les Russes ont un « complexe d’encerclement » qui date au moins de Catherine II. Que ce complexe soit justifié ou non est un autre débat.

          Quoiqu’il en soit, l’Otan à leurs frontières est donc vécu comme une quasi déclaration de guerre (ou du moins comme une preuve flagrante d’hostilité).

          Or, je le répète, à braquer ainsi les Russes, on les « force » à se tourner vers l’Asie. Ce qui aura des conséquences désastreuses pour nous.
          A commencer par les sanctions économiques qui vont (sont en train de) nous pénaliser gravement.

  • §

     » le développement du gaz de schiste  » En France. Tout est dit. Tout est là.

  • Les américains ont réussi une fois de plus à éloigner l’Europe de l’ouest à celui de l’est. Quand est-ce-qu’ils vont comprendre qu’une Europe unie à la Russie serait la plus grande puissance du monde? (Les USA l’ont déjà compris eux)
    Même les américains se mettraient à genoux devant une telle union.
    Mais il n’y a rien a faire, ils ne comprennent pas…ils préfèrent jouer au gentil toutou des U.S.A: une puissance en faillite, et qui va entrainer l’Europe dans sa chute. Eh bien ainsi soit-il, puisque tel est leur choix.

  • C’est « je te tiens, tu me tiens, par la barbichette… » : les Européens dépendent du gaz russe et (la France surtout) des préteurs US.
    On est squeezés, mes braves, et le niveau de matière fécale continue de monter, on n’est pas encore à l’étiage…
    Bon courage à vous.

  • Vous avez tous raison, il est bien évident que les Américains font tout pour déstabiliser l’Europe et les relations avec la Russie.
    Je communique régulièrement avec des Ukrainiens par Skype, et puis vous informer qu’aussi bien à la première révolution ukrainienne qu’à la deuxième, il y avait un financement américain, par fourniture de tentes et de matériel, et même en payant directement les manifestants. Cela se faisait par l’intermédiaire des missions de l’Eglise évangélique.
    Quand je dis « les Américains », je ne pense pas obligatoirement à une volonté délibérée du gouvernement Obama, mais il existe là-bas un Etat dans l’Etat, la CIA.

  • Quand va-t-on cesser de faire ch… les Russes ? Nos cousins en ont bavé pendant 70 ans et la guerre froide est finie. Nous ferions mieux de leur apporter notre aide, ou de tout simplement commercer avec eux. Qu’avons-nous besoin de les agresser en portant l’OTAN à leur porte ? C’est parce que leur président ne plait pas aux nôtres ? La belle affaire ! Comme s’ils valaient mieux. Quand à Obama, au vu des résultats brillantissimes de la politique US en Irak, qu’il retourne jouer avec sa Sécu et foute la paix au monde.

  • L’Europe n’a pas besoin d’importer du gaz naturel.

    L’Europe importe pour 100 milliards d’euros de gaz naturel par an, 100 milliards d’euros partis principalement vers la Russie et le Moyen Orient.

    100 milliards d’euros financent les guerres qui ont lieu aux portes de l’Europe.

    Les 4 technologies, qui permettraient à la France et à l’Europe ne plus avoir à importer du gaz naturel jusqu’à la fin des temps, sont disponibles depuis presque 200 ans.

    – Au 15ème siècle, l’architecte Leon Battista Alberti a décrit la technologie permettant de construire des maisons isolées.
    – Le premier four solaire a été fabriqué en 1767 par Horace Bénédict de Saussure.
    – La gazéification de la biomasse a été découverte vers 1786 par Philippe Lebon.
    – L’utilisation de la géothermie dans l’industrie a commencé vers 1818 avec François de Larderel.

    Comment financer une telle politique? En réorientant une partie du budget de la Politique agricole commune car l’énergie est une affaire de sécurité nationale.

    Au lieu d’essayer de concurrencer le poulet brésilien ou de vendre du blé à crédit à l’Egypte, un crédit qui ne sera jamais remboursé, on pourrait produire du chanvre pour fabriquer des isolants ou du saule pour produire des granulés de biomasse.

    La Politique Agricole Commune représente 40% du budget européen soit 363 milliards d’euros pour 2014-2020

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