La sieste au travail, une solution d’avenir !

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Le Sommeil de Gustave Courbet

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

La sieste au travail, une solution d’avenir !

Publié le 10 août 2014
- A +

Même en pleines vacances, il faut se rendre à l’évidence : le travail fatigue. Heureusement, les Français, dont la productivité légendaire ne fait qu’augmenter (d’autant plus que le chômage s’étend) ne sont jamais à court d’idées lumineuses pour atténuer la souffrance que fait subir le Capitalisme Triomphant sur les Classes Laborieuses Exploitées. Et parmi celles-ci, l’une tient actuellement la tête : la sieste au travail.

Or, si l’article du Figaro explique bien les avantages d’un petit roupillon postprandial pour accroître la productivité de l’après-midi, un de mes lecteurs réguliers (que je remercie au passage) me fait remarquer que le petit articulet n’en oublie pas moins quelques avantages évidents qui seront les bienvenus en ces temps de détresse économique française. À bien y réfléchir, la sieste constitue peut-être la bonne solution pour relancer une croissance en panne, inverser la courbe du chômage, guérir les écrouelles et garantir une place au second tour des présidentielles d’un président de plus en plus transparent.

Par exemple, il est difficile de ne pas noter qu’une petite sieste dans le cours de la journée réduit de fait le temps de travail, mais dans la douceur ouatée d’un petit dodo confortable au contraire des lois Aubry qui furent de nombreux et coûteux casse-têtes pour les entreprises françaises. Pour le coup, cette sieste sera sans aucun doute bien plus facile à faire passer dans certains services qu’une réduction hasardeuse et arbitraire des horaires de travail…

sieste - nap

Et puis, rappelez-vous : le travail n’est qu’un gros gâteau dont la taille, fixe, est déterminée par la loi et le Ministre de l’Économie et du Redressement Productif. Pour que tout le monde en ait, il faudra bien le découper en tranches plus fines, quitte à s’endormir un peu sur le couteau. Par voie de conséquence, on peut s’attendre enfin à une diminution du chômage suite à l’introduction généralisée de la sieste dans les entreprises françaises. Pour le coup, difficile de ne pas louanger ensuite l’entregent et la finesse d’analyse de nos élites lorsqu’enfin la courbe du chômage s’inversera.

La sieste installée définitivement dans les mœurs, la productivité s’en trouvera améliorée, les travailleurs, frais et dispos, pouvant se consacrer d’autant mieux à leurs tâches d’après-midi. Du reste, avec le réchauffement climatique dont on sait pertinemment que rien ne pourra plus jamais l’arrêter, la France entre de toute façon dans le rang des pays méditerranéens surchauffés qui ont déjà pris l’habitude de ne pas travailler du tout entre midi et 15h. L’instauration officielle de la sieste ne fera qu’entériner un état de fait.

On peut aussi s’attendre à une amélioration notoire de la santé des travailleurs. Entre les accidents du travail évités par une meilleure concentration et une meilleure immunité, un peps plus vitaminé et des humeurs plus contrôlées, le travailleur-siesteur français va faire des jaloux dans le monde. Et diminuera les trous de la Sécurité Sociale que le monde nous enviera d’autant plus.

oh filocheJe passe rapidement sur les effets de bords évidents en matière de relance de l’activité des mobiliers spécialisés (lits, canapés, divans, gros poufs moelleux et autres coussins) pour rappeler de surcroît, que l’obligation légale de la sieste en entreprise entraînera inévitablement la création d’une administration apte à vérifier que la pause est effective, bien organisée et correctement appliquée dans les entreprises. On imagine sans mal une petite larme d’émotion heureuse au coin d’un œil déjà pétillant de bonheur, les armées de petits inspecteurs Filoche vérifiant, outils de mesure précis en main, le moelleux des oreillers norme NF, l’épaisseur réglementaire des coussins de canapés, les temps légaux de pause, pour s’assurer que l’entreprise ne contrevient pas aux obligations légales en la matière.

En tout cas, voilà qui donnera l’occasion d’alléger les listes d’inscrits à Pôle Emploi d’un bon millier d’individus qui seront heureux d’aller écumer les sociétés françaises pour s’assurer que tout le monde y fait dodo comme il faut. Accessoirement, les contrevenants s’exposeront à des amendes lourdes (mais justes, hein, on est en République Française, n’est-ce-pas) qui viendront aider au renflouement des caisses de l’État.

Décidément, cette histoire de sieste, c’est vraiment génial quand on y réfléchit deux minutes. Si l’on y réfléchit encore un peu plus, on peut même se dire qu’en étendant le principe sur plusieurs heures, on devrait arriver à la fois à une productivité de folie, un taux de chômage rikiki, une santé flamboyante de la population et de vigoureuses rentrées de fonds pour l’État. Et si on y réfléchit encore un peu plus, on se dit que tout ceci est bel et bon, mais il semble bien que cette histoire de sieste serve surtout à compenser un manque de sommeil de plus en plus chronique dans nos sociétés.

Bizarrement, et d’autant plus que la solution « sieste » semble si géniale, personne ne semble s’occuper réellement du problème initial, le manque chronique de sommeil. Plusieurs études montrent pourtant son ampleur : en France, le temps passé à dormir a diminué de 18 minutes en 25 ans. Or, pendant le même temps, la biologie humaine n’a pas évolué pour justifier cette diminution, ce qui veut dire que le phénomène a un impact durablement négatif sur les individus. Cette diminution n’est pas la même partout, mais elle suit assez bien l’augmentation du temps passé devant la télé et, plus insidieusement, celui dans les transports.

Or, si le temps passé devant la télévision (ou, plus généralement, les écrans) tient sans doute d’une mode technologique contre laquelle il semble difficile de lutter, l’augmentation parfois alarmante des temps de transport doit, elle, bien plus à la mauvaise gestion publique de l’aménagement urbain qu’à une mode passagère. Autrement dit, l’introduction de la sieste revient, pour ceux qui la pratiquent, à récupérer du temps de sommeil sur ce qui a été rogné par suite des choix politiques souvent discutables et parfois calamiteux en matière d’organisation des transports en commun, des infrastructures routières et des lois immobilières.

Mieux : la sieste est aussi vantée pour ses bénéfices contre le stress, stress souvent induit par des contraintes entrepreneuriales directement liées, là encore, à des choix politiques douteux (la proverbiale productivité française doit beaucoup à son code du travail momifiant les zacquis sociaux et imposant, par ricochet, les fameuses « cadences infernales » à ceux qui n’ont pas le privilège d’être en CDI, par exemple).

Il est finalement assez éclairant de constater que l’introduction de la sieste au travail pourrait bien apporter, outre les nombreux avantages décrits plus hauts, un peu de cette liberté qui a été grignotée par ailleurs. Et puis, comment ne pas voir dans un pays qui se réfugie dans le petit roupillon plutôt que résoudre ses problèmes un aboutissement logique de 40 ans de fuite devant ceux-ci ?

must not sleep
—-
Sur le web

Voir les commentaires (19)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (19)
  • « Heureusement, les Français, dont la productivité légendaire ne fait qu’augmenter »

    Alors là je vous trouve injuste, les français sont parmi les plus productifs d’Europe! D’ailleurs, il suffit de voir le nombre d’enteprises encore en vie malgré un taux de prélèvements dantesques… Je peux vous dire que dans beaucoup d’enteprises, c’est la course en permanence, surtout les « peu qualifiés » qui sont en général systématiquement en sous effectif (ces postes n’étant plus rentables du fait de leur cout faramineux).

    Tout le monde n’est pas fonctionnaire ou syndicaliste…

    • La croissance de la productivité a été plus faible que celle de l’Europe en général ces dernières années, et bien plus basse qu’aux USA.

      Concernant l’article je ne me vois pas faire la sieste à midi, j’en serais bien incapable, mes 6-7h de sommeil me suffisent, je pourrais pas dormir plus même si j’essayais.
      Enfin bon, en France on aime bien les excuses pour flemmarder ^^ » Pour les travailleurs au McDo et à l’usine ça serait probablement bénéfique, mais ailleurs je vois pas l’intérêt.

    • Le travailleur français est productif parce que les moins productifs n’ont pas le droit de travailler en France.

      • N’ont pas le droit ou n’ont pas l’occasion de travailler ?

        • Souvent pas l’occasion, surtout les jeunes à qui on donne trop rarement d’opportunités car ils n’ont pas d’expérience..Et sans emploi ils ne peuvent acquérir l’expérience nécessaire.
          Bien sûr l’origine de cela est la rigidité du marché du travail et le coût des licenciements, obligeant les entreprises à être très prudents dans leurs embauches.

        • Le droit, souvent. Cette interdiction de travailler pour les moins productifs s’appelle « SMIC » en France.

  • Il faut rendre l’heure quotidienne de sieste obligatoire. Ca créera un demi-million d’emplois de contrôleurs chargés de vérifier que les employés ne font pas seulement semblant de dormir, et ça diminuera la consommation d’énergie par les usines de près d’un huitième, un grand pas vers les 50% de Ségolène.

    • Ca créera un demi-million d’emplois de contrôleurs

      Plus si on considère que ces contrôleurs auront aussi droit à une sieste, cela devrait être bien plus.
      Pour résoudre le problème du chômage, il suffirait de pousser la durée de la sieste à 2 heures … 😉
      Plein emploi assuré 🙂

      • on pourrait aussi augmenter la durée de la sièste jusqu’à 7 heures, comme cela, on éviterait de dormir la nuit , pour le coup , la productivité s’envolerait…

        surtout si on mange essentiellement du tapioca … avec un peu de sucre .

  • je connais des petits entrepreneurs qui bossent jusqu’à 60 heures par semaine pour s’en sortir ; ça ne dure qu’un temps , et quand je vois les cernes noires du à la fatigue , au stress , je pense que ces gens courageux mettent leur santé en danger ; est ce que ça vaut la peine de se crever au boulot , pour voir la plus grande partie de ces revenus finir dans les poches des glands d’en haut ? NON ! partant du principe que nos zélés dirigeants , de par leurs débiles politiques nous offrent un avenir noir comme un four , j’ai choisi l’option de travailler peu , juste ce qu’il faut , de vivre de fait chichement mais sans manquer du principal , de faire en sorte de ne pas payer d’impots puisque cet argent ne sert pas à la france , et du coup , pas trop fatigué , pas riche , mais heureuse et libre ; c’est un choix ;

  • En attendant, une petite sieste de temps en temps au boulot c’est vrai que ça fait du bien, mais il y a toujours le stress de se faire gauler, et c’est dommage car franchement c’est vrai que ça relance bien l’après midi. Mon père me disait qu’il entendait souvent des ronflements venant des toilettes à son bureau, et que lui même s’y est abandonné une ou deux fois..

  • Moi qui suis très libéral, je ne vois pas en quoi « l’idée » de la sieste au bureau choque. Au contraire, beaucoup de gens en ont naturellement besoin, c’est un fait. Plutôt que d’encourager les gens au zèle (très français ?), et finalement à traîner à 30% de leurs capacités toute l’après midi, autant admettre franchement la possibilité d’une coupure de 15 minutes. Cette coupure (autant ne pas l’appeler sieste si le terme choque) est bénéfique pour l’organisme, et ses effets s’en ressentent nettement sur la productivité de chacun.
    En conclusion, je dirais que la sieste (utilisée avec modération et de manière responsable évidemment) peut servir les intérêts de l’entreprise, POINT.
    PS : rappelez vous que Marissa Mayer, la CEO de Yahoo!, ne s’est pas cachée d’avoir recours à la sieste (certes, elle doit travailler légèrement plus de 35h dans la semaine…).

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

À moins que vous n’ayez vécu sur Mars ces derniers mois, vous n’avez pu ignorer l’énorme écho médiatique autour du développement de l’intelligence artificielle (IA).

Ce développement est fulgurant, chaque exploit succédant au précédent, avec des réalisations qui auraient semblé impossibles il n’y a pas si longtemps. Il est vrai que le monde de la technologie a tendance à exagérer l’importance de ses inventions, et certaines ne durent que le temps d’un matin, mais on peut dire avec une assez grande assurance que ce ... Poursuivre la lecture

Cet article fait partie d'une série. Dans les premier, second et troisième articles nous avons couvert les points suivants :

L'IA va-t-elle augmenter notre productivité ? L'IA va-t-elle conduire à un chômage de masse ? L'IA va-t-elle accentuer les inégalités entre une élite surpayée et le reste des actifs sous-payés ? L'IA sera-t-elle monopolisée par Google et OpenAI ?

 

Quid du jour où l'IA et les machines pourront faire tout ce que savent faire les humains ?

Et peut-être qu'un beau jour l'IA et les machines feron... Poursuivre la lecture

Cet article fait partie d'une série. Dans le premier et le second article nous avons couvert les points suivants :

L'IA va-t-elle augmenter notre productivité ? L'IA va-t-elle conduire à un chômage de masse ? L'IA va-t-elle accentuer les inégalités entre une élite surpayée et le reste des actifs sous-payés ? Dans le dernier article, nous nous pencherons sur cette question : Et quid du jour où l'IA et les machines pourront faire tout ce que savent faire les humains ?

Retournons à la question du jour : l'IA sera-t-elle monopolisée pa... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles