Simplification administrative : la grande illusion

Pour le moment, simplification, rationalisation et optimisation riment surtout avec pléthore de tables rondes, commissions, rapports…

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François Rebsamen (Crédits Philippe Grangeaud-Solfé Communications, licence Creative Commons)

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Simplification administrative : la grande illusion

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 27 juin 2014
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Par Gilles Rebibo

Ces derniers mois, nos gouvernants ne cessent de nous parler de simplification, de rationalisation et d’optimisation, censées donner un nouveau souffle à notre dynamique économique qui en manque singulièrement. En nouveaux apôtres de la compétitivité, ils multiplient les tables rondes, les commissions et les rapports indispensables à faire jaillir la lumière.

rebsamen

Normes, procédures, réglementations, rien n’échappe à leur sagacité. Bref, une révolution est en marche et l’avenir s’annonce radieux. Mais au-delà des mots et des effets de manche, les décisions prises vont bien souvent à l’encontre de ce discours enchanteur. Quelques exemples puisés dans l’actualité récente démontrent en effet que la machine à complexifier et brider l’action entrepreneuriale n’a jamais cessé d’œuvrer.

Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

Exemple le plus édifiant, l’instauration du compte pénibilité issu de la réforme des retraites. Cette mesure d’une extrême complexité qui fait figure d’exception en Europe, se révèle être une usine à gaz ingérable pour les petits patrons. D’ici au 1er janvier 2015, ils sont censés assimiler la nouvelle réglementation, attribuer des points à leurs salariés lorsqu’ils dépassent des seuils d’exposition à certaines conditions de travail jugées pénibles, établir des fiches de prévention, préparer les déclarations administratives et revoir les logiciels de paye afin qu’ils tiennent compte de cette nouvelle donne. Et comme en France tout finit par une taxe, la mesure est entièrement financée par les entreprises qui devront acquitter une cotisation composée d’une part fixe et d’une part variable qui dépendra du nombre de salariés exposés, soit une facture de 500 millions d’euros en 2020 et de 2 milliards en 2030, excusez du peu !

Un marché du travail toujours plus rigide

Autre disposition révélatrice de cette sombre réalité, l’entrée en vigueur d’une durée minimale de 24 heures par semaine pour les salariés à temps partiel, qui va fragiliser nos entreprises en rigidifiant encore un peu plus le marché du travail. Comment en effet répondre aux fluctuations de la demande avec ce carcan supplémentaire ? Comment être plus compétitif avec moins de souplesse ? Qui dit rigidité, dit souvent moins d’emploi et plus de chômage, notre pays n’en a vraiment pas besoin. D’autant qu’une fois de plus le diable est dans les détails. Pour s’affranchir de ce seuil, les entreprises pourront en effet avoir recours soit à un salarié de moins de 26 ans poursuivant ses études, soit à un salarié souhaitant travailler moins pour faire face à des contraintes personnelles ou pour cumuler plusieurs activités correspondant à un temps plein, avec tous les risques de contentieux que cela comporte. La loi prévoit également que toute heure complémentaire effectuée par un salarié à temps partiel, sera payée à 110 %, ce qui va entraîner une hausse de la masse salariale que les trésoreries déjà exsangues de nos PME pourront bien sûr absorber sans aucune difficulté …

Une administration toute puissante

On le voit, les sujets de crispation ne manquent pas. Dernier en date, la réforme de l’Inspection du Travail qui dote les inspecteurs de nouveaux pouvoirs de sanction immédiats qui vont renforcer leur action en dehors des voies judiciaires classiques. Des sanctions administratives et financières, dont le montant sera supérieur ou égal à celui prévu actuellement au pénal. Une voie ouverte à tous les risques de dérapage et d’interprétation. La législation est si compliquée que les inspecteurs seront placés en position d’arbitre sur des textes parfois ambigus. Une véritable agression, créant un sentiment d’insécurité juridique sans précédent, au moment où le gouvernement dit vouloir rétablir un climat de confiance avec les entreprises.

En fait de confiance, son administration fiscale multiplie les contrôles, se livrant à un véritable harcèlement marqué par des redressements aux montants souvent injustifiés, pour renflouer les caisses d’un Etat dispendieux qui, malgré des engagements d’économies, achète la paix sociale à coup de subventions et autres renoncements à des réformes structurelles pourtant indispensables, dont il ne manquera pas cependant de nous présenter la facture le moment venu.

N’en déplaise à Monsieur Rebsamen, les dirigeants d’entreprise n’ont pas pour habitude de se plaindre sans raison. Les faits sont têtus, plus de complexité c’est moins de croissance. Aussi nous ne cesserons de dénoncer toutes les décisions qui mettent à mal notre compétitivité et les chances de redressement de notre pays.

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  • Pas de pot avec la culture ce ministère du travail. Du temps de Titine de Lille on entendait des fenêtres « L’International » et aujourd’hui « Heidi, Heido, Heida » comme quoi c’est bien la même idéologie.

  • La Françe est paralysée par la bureaucratie, les entrepreneurs qui baissent les bras, le plus triste c’est que les technocrates a l’origine du mal ne s’en rendent même pas compte…

    •  » le plus triste c’est que les technocrates a l’origine du mal ne s’en rendent même pas compte… »

      Je ne suis pas d’accord. Ils sont rendent compte car is protégent les intérêts de leurs clients électoraux.

      Ce n’est pas un simple aveuglement. La nuance est très importante. Ces gens sont des criminels.

    • Je ne suis pas certaine que le fait de continuer à enfoncer tout un pays dans la m.rde en foutant des carcans partout soit une manœuvre très subtile, ni sur le plan tactique, et encore moins sur le plan électoral… A mon sens, les parasites humains qui tuent leurs hôtes ne sont pas les plus brillants, question intellect.
      (En tout cas, on va avoir une rafale de nouveaux dépôts de bilan sous peu, donc. Super.)

  • A se demander si ils ont pour objectif de faire élire Mme le Pen en 2017…

  • Si on ne veut pas s’attaquer aux problèmes structurels, inhérents à une mauvaise législation, que ce soit concernant le marché du travail, sécurité sociale ou autre, rien de mieux que de parler de simplification administrative. Comme si les administrations prendraient isolément des décisions allant à l’encontre de ce que le pouvoir politique désire faire.

  • Monsieur Rebsamen ministre du travail est occupé à rédiger un livre sur de subtils parallèles entre le foot et la politique ( la gauche, c’est le beau jeu etc… ) il ne peut pas tout faire, d’autant que ce qui compte semble-t-il ce n’est pas de faire, mais de dire, sans hésiter à se contredire au besoin.
    Non seulement la courbe du chômage ne s’inverse pas, mais elle s’accentue, qu’importe… le ministre ne commente pas les chiffres, il a besoin de plus de recul quant au président, il préfère commenter la coupe du monde de foot…

    L’extrait de la préface de Aldous Huxley à son livre  » Le meilleur des mondes » ci-dessous est d’une modernité et d’une actualité totales :

    « A mesure que diminue la liberté économique et politique, la liberté sexuelle a tendance à s’accroître en compensation. Et le dictateur (à moins qu’il n’ait besoin de chair à canon et de familles pour coloniser les territoires vides ou conquis) fera bien d’encourager cette liberté-là. Conjointement avec la liberté de se livrer aux songes en plein jour sous l’influence des drogues, du cinéma et de la radio, elle contribuera à réconcilier ses sujets avec la servitude qui sera leur sort ».

    Aldous Huxley, Le Meilleur des mondes, préface de l’édition de 1946 (via Fortune)

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