De la pertinence du concept de Novlangue

Le concept de novlangue est-il pertinent pour décrire notre situation linguistique présente ?

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De la pertinence du concept de Novlangue

Publié le 6 juin 2014
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Par Fabien Cappelli

1984_Ingsoc

De Jean-Yves Le Gallou à Baptiste Créteur en passant par Libération, les références à la novlangue d’Orwell sont omniprésentes. Mais ces références sont-elles pertinentes aux yeux d’un sémanticien ?

 

Qu’est-ce que la novlangue ?

Il s’agit d’une langue inventée par l’Ingsoc, le régime totalitaire de 1984, pour manipuler la pensée de la population par le biais du langage.

Il y a trois niveaux de vocabulaire dans la novlangue.

Le vocabulaire C est le plus facile à imaginer étant donné qu’il ne s’agit de rien d’autre qu’une entreprise terminologique concernant les sciences et les techniques, assez proche des desiderata du Cercle de Vienne. Nul totalitarisme ici mais une simple isolation du langage de la vie quotidienne pour éviter les ambiguïtés et les erreurs d’interprétation. Chaque mot ne désigne qu’une seule chose ou qu’un seul concept.

Le caractère important pour nous réside dans le fait que cette rigidité sémantique est présente dans le vocabulaire A, le vocabulaire de la vie quotidienne. Dans la novlangue, ce vocabulaire est en fait presque le même que chez nous mais une destruction lexicale phénoménale est entreprise qui interdit toute subtilité et surtout toute abstraction dans l’expression. Orwell entend par là qu’un nombre massif de mots de notre langage quotidien disparaît mais surtout que les mots restants sont inemployables pour autre chose que ce qu’ils désignent concrètement. Ainsi le verbe cut  (couper) disparaît, remplacé par le nom knife (couteau). En tant que linguiste, cela ne m’effare pas, ce qui est véritablement intriguant est le fait que ce verbe, knife, ne sera pas utilisé en dehors de son contexte concret (n’existeront plus des expressions comme « couper la parole, la route, court », etc.) Une subtilité de l’expression disparaîtrait aussi du fait de la suppression des antonymes. Bad devenant ungood illustre une vue assez prosaïque de l’auteur, ou du moins du régime, quant à la complexité lexicale.

Je vous donne un exemple. Le mot « profond » a plusieurs sens et de là plusieurs antonymes :

  • un trouble profond vs un trouble passager
  • une pensée profonde vs une pensée superficielle
  • une fosse profonde vs une petite fosse

 

L’Ingsoc, en n’admettant qu’undeep comme antonyme de deep fossilise les sens de deep et de undeep , les contraint à ne signifier que la profondeur physique, concrète, ou son absence.

Enfin le vocabulaire B est consacré à la pensée politique, ce qui n’est pas une mince affaire dans le monde de l’Ingsoc. L’auteur s’inspire de manière explicite des lexiques nazis et soviétiques : « Gestapo », « Komintern », sont des contractions qui permettent l’oubli de la signification première de leurs composants, comme le remarque l’auteur, mais aussi Olivier Rebouli.

 

Le concept de novlangue est-il pertinent pour décrire notre situation linguistique présente ?

La novlangue se caractérisant par une sémantique rigide et une destruction lexicale massive du vocabulaire quotidien, la réponse est non.

Le problème réside plutôt dans un phénomène qui va à l’encontre de la sémantique rigide de la novlangue. Ainsi dans la presse ou la politique le mot « racisme » oscille incessamment entre ses deux significations (la première, théorie qui postule une hiérarchie des races et la seconde, hostilité envers un groupe), puisqu’on peut parler de « racisme anti-musulman » (deuxième acception sans aucun doute, puisque l’islam n’est pas une race, même pour les racistes anti-musulman) en y insufflant des éléments de dénotation propres à la première acception (attention, génocide à l’horizon). Il me semble que c’est justement parce que l’humain peut manipuler les mots comme des symboles presque vides de sens, reliés approximativement à une vague impression indicible, qu’il peut entendre et répéter à peu près n’importe quoi sans être le moins du monde déstabilisé.

Plus généralement, cette fixité du sens propre à la novlangue paraît presque « idéale » au sémanticien ou au sémioticien. Si une certaine rigidité est possible voire souhaitable dans le monde scientifique elle est tout bonnement impossible dans la vie quotidienne au vu du biais presque définitoire de la cognition humaine pour l’analogie.

Ainsi, un morphologue maori utilisera, pour parler de suffixes, le mot hiku, qui signifie queue de poisson. L’Occidental se targuera d’être plus abstrait grâce aux mécanismes de formation des mots à partir des racines grecques et latines mais il élaborera tout de même la notion de « champ » magnétique ou sémantique, parlera de « séisme » lorsque le FN grappillera à peine 10 % des votes de l’ensemble de la population ou d’« heures sombres de l’histoire », de « bête immonde », d’« hydres », etc., etc. Ce n’est pas par la rigidité du sens que nous évoluons, dans quelque sens que ce soit, mais par notre capacité presque irrépressible à faire des analogies.

 

Pourquoi parler de novlangue alors que la comparaison ne tient pas  ?

Parce qu’il y a bien usage tordu et volontaire du langage pour embrigader  !

Certes, mais le langage servira certainement toujours à cela. Une des grandes différences entre le langage et les expressions corporelles est que le premier peut notamment servir à mentir et de là à manipuler. Et c’est justement à cause du lien lâche, vague, entre mots abstraits et réalité, que nous pouvons nous faire avoir avec de beaux discours.

Napoléon aurait dit, dans une correspondance privée : « il y a un vocabulaire à attraper, il est facile avec quelques mots talismans comme « liberté » et « indépendance nationale » de se faire écouter des imbéciles. » Et l’Empire napoléonien, malgré tout le mal qu’on peut facilement en penser, ne correspond pas trop à l’Oceania d’Orwell…

Parce que ce n’est pas le seul élément de comparaison possible entre notre situation et celle de 1984  !

Il y a en effet la vidéosurveillance, l’omniprésence de la télévision, je vous l’accorde. Mais sinon, 1984 est clairement une dystopie basée sur l’URSS de Staline (de Goldstein à Bronstein, il n’y a qu’une syllabe…) et ce qui y est décrit va par d’autres aspects à l’encontre de ce que nous voyons. Par exemple, la politique de contrôle sexuel s’accommoderait très mal d’une gay pride ou du mariage pour tous… Enfin, la réécriture de l’histoire n’est heureusement pas la même.

Et parce qu’il faut bien avouer, ma bonne dame, nous sommes en pleine dictature  !

La différence c’est que nous pouvons l’écrire de manière publique, alors que Winston, le héros de 1984, se planque la peur au ventre pour écrire sa haine du régime dans un journal intime. Même en admettant que nous vivons dans une dictature, elle n’est clairement pas du même acabit que celle décrite par Orwell.

Non, la comparaison ne tient pas la route et montre plusieurs biais que notre cognition et notre langage exploitent, justement à des fins propagandistes. L’hyperbole, l’analogie et le gauchissement du sens d’un terme spécifique (ici, Novlangue) sont utilisés pour alerter l’interlocuteur sur des dérives inquiétantes de la situation actuelle, mais au détriment du réalisme.

 

Pourquoi éviter la référence au concept de novlangue ?

Tout d’abord, parce qu’il est certainement diamétralement opposé à la réalité des faits et donc inadéquat à nous faire comprendre d’où et comment vient le danger.

Ensuite, parce qu’en voyant 1984 et la novlangue partout, nous rendons peu d’honneur au livre et aux concepts développés par Orwell, les vidant de leur substance, de leurs particularités.

Mais principalement, parce que le traitement infligé à cette œuvre et à ce concept illustre parfaitement ce qui est dénoncé par ceux qui parlent de novlangue à tout-va.

Enfin j’aimerais souligner que 1984 ou La ferme des animaux sont deux livres omniprésents dans la dite « Éducation nationale » : curieuse dictature qui fournirait de manière obligatoire les clés pour la décrypter…

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  • Malgré tout, il y a un phénomène d’inversion du sens de certaines expressions normatives qui me trouble. Par exemple, les décisions politiques sont présentées comme étant volontaire et contractuelle, alors que les décisions économiques sont présentés comme étant forcés et conditionnés sous le coup d’un rapport de pouvoir. Les échanges sont égoïstes, alors que l’imposition d’une conduite par une foule est un acte de solidarité. Bref, notre langage pour parler de la réalité institutionnelle de nos sociétés est truqué. Je vois la pertinence de l’analogie sous ce sens-là.

  • Gabriel, je ne crois pas que le langage soit truqué.
    Un émetteur dit ou écrit quelque chose : c’est une proposition. Ou mieux, c’est une évaluation d’après sa perception de la réalité. Admettons que cet émetteur n’ait pas conscience de faire une évaluation ou qu’il le fasse à dessein pour tromper le destinataire du message; il faudrait que ce dernier n’ait pas conscience que le message est une évaluation.
    Au travers de la communication, nous prenons tout au tragique, parce que nous croyons que notre discours intérieur (pensée) et extérieur (pour les autres) représente la réalité. Dès que nous pensons en terme de mots, de langage, nous faisons de facto des simplifications et des abstractions de la réalité. Si vous dites « table », ce mot n’est pas l’objet qu’il décrit. C’est un symbole qui s’applique à tout les plans solides horizontaux qui tiennent par des pieds ou d’autres plans verticaux et encore ceci est loin d’être une définition du vocable « table ». On peut écrire une volumineuse encyclopédie pour décrire ce qu’est une table.
    Si vous dites « liberté », vous imaginez bien le degré de complexité de ce mot qui ne décrit rien de solide, ni même de montrable. La « liberté » est une abstraction pure. Ce mot peut être employé à toutes les sauces, dans n’importe quel contexte et des gens sont prêts à s’écharper sur son sens, sa définition et son emploi.
    Si nous avons conscience que le langage n’est pas une description de la réalité, mais un moyen de communiquer nos impressions et notre perception du réel, alors beaucoup de difficultés seront balayées.

    D’autre part, il existe des moyens, des méthodes pour maximiser la signification du langage. Mais c’est une autre histoire…

    • Il n’est pas « truqué » dans le sens d’une volonté de tromper, mais plutôt dans ce qu’ils induisent comme erreur dans leur usage. Je suis d’accord que la solution est dans une conscience accrue de la dimension subjective associée, mais il me semble que peu de gens ont ce regard critique.

  • Enfin j’aimerais souligner que 1984 ou La ferme des animaux sont deux livres omniprésents dans la dite « éducation nationale » : curieuse dictature, qui fournirait de manière obligatoire les clés pour la décrypter…

    Je n’ai jamais entendu parler du livre « La ferme des animaux » lors de mon parcours dans l’éducation nationale.
    J’en ai pris connaissance sur un commentaire de contrepoints, via un lien youtube vers l’adaptation de disney de l’oeuvre. Un oeuvre d’une violence par ailleurs assez rare, qui pousse à comprendre le contexte de son écriture, et qui me parait bien mieux réussie que 1984.

    Pour le reste, il me parait clair que c’est moins de la destruction visible des mots que nous devons nous méfier mais de la perversion ou la perte de leur sens dans le discours commun.

    • Idem, je n’ai jamais entendu parler de ces deux livres « 1984 » et « la ferme des animaux » durant ma scolarité et peut de personne ne les connait dans mon entourage. Je verrais pendant la scolarité de mes enfants mais je ne me fais pas trop d’illusions.

    • FabriceM doit être jeune et l’EducNat a peut être beaucoup changé, parce que ces livres (1984 et La Ferme…) étaient totalement absent de l’enseignement à la fin du XXe siècle. D’ailleurs la littérature non francophone était plutôt absente de l’enseignement à cette époque. Je suppose que l’EducNat considérait qu’il y avait suffisamment de matière avec nos grands auteurs. De grands absents toutefois dans toute ma scolarité : Victor Hugo, Dumas, en revanche surabondance de Zola, Flaubert, Balzac, Mérimée, Camus, que de mauvais souvenir…

      • Visiblement, je ne me suis pas bien fait comprendre.
        On ne m’a pas fait découvrir la ferme des animaux à l’EdNat.
        J’ai juste repris un morceau du texte de l’article.

    • 1984 et « la ferme des animaux » sont connus de mes enfants qui ont terminés le lyçée de plus, avec la philo en terminale pour toute les filières générales, l’edn leur apprend bien à raisonner et ils savent s’en servir, parole de parents.

      • La philo en terminale, c’est une vaste plaisanterie.
        L’ambition délirante des programmes est aussi démesurée que l’inanité de l’enseignement en terme pédagogique.

        • Pour ce qui est de l’ambition des programmes je suis d’accord, mais quoi qu’il en soit, qu’ils connaissent l’allégorie de la caverne de Platon reste une bonne chose.

  • « L’occidental … parlera de « séisme » lorsque le FN grappillera à peine 10% des votes de l’ensemble de la population.
    Toujours ce réflexe de Pavlov de relativiser (à juste titre) le score *populiste* (Novlangue!), en oubliant de relativiser aussi le score des « autres », en estimant que TOUS les abstentionnistes « voteraient » anti-populisme.

  • « Et parce qu’il faut bien avouer, ma bonne dame, qu’on est en pleine dictature ».
    Je crains, cher M. Cappelli, que votre ironie ne tombe à plat: oui, nous sommes en pleine dictature.
    Dictature, non pas celle du « politiquement correct », comme on se plaît à le répéter, mais dictature du faux.
    Etre dégoûté par ceux de même sexe qui font l’amour « par la porte du garage » (expression chinoise, paraît-il!), ce n’est pas être homophobe, c’est être NATUREL.
    La question n’est pas d’être (ou de ne pas être) politiquement correct, la question est de PARLER VRAI.

  • « …curieuse dictature, qui fournirait de manière obligatoire les clés pour la décrypter. »
    Remarque intelligente, mais qui ne touche pas son but.
    Là encore, ironie déplacée: la subtilité de la Dictature actuelle (oui, la Dictature: on risque la XVIIème chambre, la prison, ou la mort économique et sociale pour un mot de travers) consiste à se faire passer pour politiquement incorrect: C’est ce Chirac avait prétendu lors d’une campagne présidentielle. Alors qu’il dégoulinait de politiquement correct (et faux qui plus est).

  • Je tombe sur ce site que vous connaissez sans doute:
    http://www.causeur.fr/natacha-polony-dati-maffesoli-finkielkraut-27895.html
    « …aujourd’hui, tout le monde se pique d’anticonformisme et pousse des clameurs d’indignation en proclamant que « la bien-pensance, c’est les autres » ! »
    Oui, tout le monde… même les dictateurs, CQFD.

  • Jamais entendu parler de La Ferme des Animaux à l’école, pourtant dans le privé.
    Par contre, du Zola et Rousseau, j’en ai soupé !

    • Quel âge avez-vous? L’école change vite.
      Je peux vous assurer que ça fait bel et bien partie des lectures à la mode, particulièrement en troisième ou en seconde. Bien sûr, chaque enseignant reste libre de choisir les oeuvres qu’il fait etudier.

  • Cet article me fait penser à la phrase de Le Clézio :

    « A mon sens, écrire et communiquer, c’est être capable de faire croire n’importe quoi à n’importe qui. »

    • « A mon sens, écrire et communiquer, c’est être capable de faire croire n’importe quoi à n’importe qui. »
      Merci; connaissais pas cette formule! (mais je supprimerais « écrire »).

  • DEMOCRATIE = PEUPLE
    PEUPLE = POPULISME
    POPULISME = FASCISME

    PROGRES = DIVERSITE
    DIVERSITE = INEGALITE
    INEGALITE = BOUH, CACA, PAS DE GAUCHE !

    ETC…..

  • Le novlangueur c’est l’autre…les gauchistes emploient monts et merveilles pour insinuer que les libéraux utilisent la novlangue en permanence…Chomsky en tête. Il serait intéressant de comparer les deux approches (en fait et surtout clouer le bec de Chomsky qui ne se rend pas compte qu’il a déjà gagné dans les faits, et que la novlangue utilisée est celle du crony-capitalism bien plus proche d’un socialisme copain cochon avec les grandes boites que de l’ultralibéralisme spoonerien)

  • Orwell n’était pas un linguiste, et la structure de la langue qu’il décrit n’est pas importante. Le linguiste moderne sait, contrairement à Orwell, qu’une langue agglutinante (comme le japonais) où « mauvais » se dit très littéralement « non-bon », n’empêche nullement la subtilité de langage.

    De même, votre exemple du mot « racisme » manque l’important : le sens du mot n’a rien de flou, il est au contraire, comme dans 1984, à la discrétion du pouvoir et malléable selon ses besoins. Ainsi le FN est-il considéré ontologiquement raciste, pendant qu’un Montebourg développant exactement les même thèmes sera traité comme ontologiquement anti-raciste, et qu’un Hollande pourra impunément, en pleine campagne électorale, faire une déclaration « je n’aime pas les juifs, je l’avoue je n’aime pas les juifs » (*) qui aurait instantanément pulvérisé tout candidat opposé…

    C’est en ce sens que la référence à la novlangue s’impose, en dépit des différences de détail que vous soulignez un peu trop.

    (*) le mot réellement utilisé est « riche », mais la structure de la phrase est identique, et l’équation notoire juif = usurier = riche renforce l’identité de l’expression

  • Bonjour
    Chaque que j’entends un délégué CGT en « lutte » il dit: « Nous défendons notre outil de travail »
    Si c’est pas de la novlang.

  • @auteur de l’article

    Tous les politiciens, personnes médiatiques et journalistes prétendent que l’on est en démocratie. Hors c’est FAUX. Le parlement n’est pas du tout représentatif

    « Art. 6. La Loi est l’expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir PERSONELLEMENT, ou par leurs REPRÉSENTANT, à sa formation. … »

    Donc il y à bel et bien un « usage tordu et volontaire pour embrigader »du mot démocratie.

  • « Enfin j’aimerais souligner que 1984 ou La ferme des animaux sont deux livres omniprésents dans la dite « éducation nationale » : curieuse dictature, qui fournirait de manière obligatoire les clés pour la décrypter… »

    Personnellement, je n’ai jamais entendu parler de ces livres pendant ma scolarité.

    La première fois que j’ai entendu parler de  » La Ferme des animaux » c’était par Pink Floyd  » Aminals »

  • Pour se faire une estimation de la puissance des médias observez le mimétisme ce que j’ appelle des tics de langage par exemple le mot problème était un de ces tics il y a une vingtaine d’ année , moins maintenant , un autre est le mot  » effectivement » !
    Les mots crise et croissance sont très utiles à une diversité de bonimenteurs mais le mot croissance est aussi fort employé par des gens qui ne sont pas des idiots ni des charlatans par ex tel pdg qui use de ce mot 7 fois en 3 minutes dans la vidéo pour présenter les résultats en hausse de la sté et ce n’ est pas par hasard : il sait que ce mot plait et rassure les actionnaires ……

  • J’habite au Japon et d’après la définition que Fabien Cappelli en donne, le japonais correspond assez bien à celle-ci. Je parle donc la novlangue tous les jours.
    Dans le japonais, il y a :
    Peu d’adjectifs pour exprimer des nuances.
    Un très grand nombre de noms, surtout de noms composés. Les nuances s’expriment par les noms qui n’ont en général qu’un sens et qui sont fortement connotés.
    Les verbes sont pratiquement tous dérivés d’un objet et donc à usage limité.
    Une syntaxe et une grammaire très simple. Pas de conjugaison, un présent, un présent progressif, un passé, un passé progressif, un conditionnel.
    Une cinquantaine de morphèmes.

  • Suite :

    Le japonais utilise aussi beaucoup de mot-valise, de néologismes, comme par exemple dans Genpatsu-shinsai 原発震災 qui associe implicitement le mot-valise genpatsu (centrale nucléaire ) à shinsai (séisme catastrophe) alors que c’est en fait la mauvaise gestion humaine de la centrale nucléaire après le séisme qui est à l’origine la catastrophe.

  • Je suis d’accord avec vous. Si mes souvenirs sont bons, le novlangue n’est pas spécifiquement défini dans 1984. Je pense qu’il est important de réfléchir sur le concept plutôt que la forme. Le concept du novlangue est bien de mettre en place un appauvrissement du langage puisque la réflexion se fait par le discours, par la langue. Pour réfléchir sur le racisme, je dois savoir que ce concept 1) existe 2) ce qu’il représente exactement.

    Le racisme est pour moi l’exemple le plus criant. être raciste aujourd’hui, c’est être hostile à un élément allogène. Le problème étant qu’il traîne toujours cette définition première qui est celle hiérarchiser les races au sens biologique ou sociologique.

    Le poids de cette mémoire sémantique falsifie complètement l’emploi de ce mot. A la rigueur, ça ne dérangerait personne si le « racisme » se détachait complètement de son emploi premier, il n’y aurait pas de d’ambiguïté. Or, ce n’est pas le cas.

  • Je ne partage pas l’avis de notre linguiste. La Novlangue existe bel et bien dans l’expression publique en France. En matière d’urbanisme par exemple, « densification » a remplacé « concentration » urbaine, « ville intense » la ville surpeuplée, « mitage » l’habitat dispersé. Beaucoup de champs Un peu technoques sont affectés par cette dérive.

  • La novlangue existe et est utilisée mais est-ce que ça marche? Est-ce que les gens sont dupes?

    En France je ne sais pas, car il ce ne sont que des mots que l’on remplace comme  » mariage homosexuel » par  » mariage pour tous ». Au Japon, par contre ça marche parce que c’est la langue japonaise qui est historiquement conçu de cette façon mais imparfaitement du fait des échanges internationaux.
    Par exemple le concept et donc le mot  » libre » n’existait pas en japonais avant la fin du 19e siècle.

    Mais remplacer et supprimer des mots ne suffit par à décrire la novlangue.
    Il faut aussi parler de la « double pensée » et j’ai l’impression que cette partie est beaucoup plus facile à employer. Il suffit de regarder la façon dont l’Education Nationale s’en sert pour conditionner les enfants.

    • « Il suffit de regarder la façon dont l’Education Nationale s’en sert pour conditionner les enfants. » ???

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