Espagne : l’effondrement de la transition énergétique ?

Des poursuites judiciaires pourraient forcer l’Espagne à cesser son expérience des énergies renouvelables.

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Espagne : l’effondrement de la transition énergétique ?

Publié le 4 juin 2014
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Les poursuites judiciaires pourraient forcer l’Espagne à cesser son expérience des énergies renouvelables. C’est un fiasco de la politique verte qui a très mal tourné en raison des coûts astronomiques. C’est une leçon pour la Maison Blanche qui a souvent cité en exemple le modèle espagnol.

Par Ute Müller, depuis Madrid.

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Même encore récemment, l’Espagne a été largement saluée comme le champion de l’énergie éolienne en Europe. Qui plus est, dans tout le pays, de nouveaux parcs solaires ont été construits et les énergies renouvelables sont devenues la principale source d’approvisionnement en énergie de la péninsule ibérique. Cependant ces jours sont peut-être du passé. Car le ministère de l’industrie de l’Espagne a l’intention de réduire drastiquement les subventions pour « l’énergie propre. » Le pays tout entier doit se serrer la ceinture comme l’affirme sèchement le ministère de l’Industrie, et les producteurs d’énergie également.

Cet argument semble irréfutable puisque les chiffres qui sont maintenant en cours d’évaluation par le gouvernement sont en effet astronomiques. Les subventions qui sont en cours d’injection dans des projets d’énergie verte sur la péninsule ibérique sont époustouflantes à 200 milliards d’euros. Environ 56 milliards d’euros ont déjà été versés. La part du lion est allée dans les tarifs de rachat, plutôt généreux, de l’énergie éolienne et de l’énergie solaire qui, depuis 1995, ont attiré de nombreux investisseurs locaux et étrangers.

Les 143 milliards d’euros restants doivent être versés dans les 20 prochaines années pour des unités d’énergie verte déjà raccordées au réseau, pour les fermes solaires principalement.

Compte tenu de ces sommes, il semblerait que le ministre de l’Industrie, José Manuel Soria soit arrivé à la conclusion que la seule solution est d’être très ferme. Il envisage maintenant de réduire les subventions vertes pour le secteur de l’énergie d’environ 20%, à 7,5 milliards d’euros par an. Le ministre n’a toutefois pas pris en compte les investisseurs verts concernés qui sont vent debout pour combattre les réductions de subventions prévues.

Moratoire sur les nouvelles fermes solaires

Ce n’est pas la première fois que l’Espagne a l’intention de profiter rétrospectivement des investisseurs solaires. De nombreux fonds d’investissement étrangers, en particulier des États-Unis, ont misé massivement dans les énergies renouvelables en Espagne au cours des dernières années, augmentant ainsi de manière significative la production d’énergie solaire. Ils ont été attirés par les promesses du ministre de l’Industrie, alors socialiste, qui avait accepté un taux fixe de rendement de 14% par an pour les investissements dans les parcs solaires.

« Le soleil peut être à vous » s’inscrivait sur d’’immenses panneaux publicitaires. Également des milliers d’investisseurs espagnols furent soucieux de ne pas rater cette occasion en or. En conséquence, la production de l’énergie solaire dans la péninsule ibérique ensoleillée a bondi de 53 à 313 gigawatts-heure (GWh) entre 2007 et 2010.

Surpris par l’énorme demande, le gouvernement du Premier ministre socialiste José Luis Rodríguez Zapatero a introduit un moratoire pour les nouveaux parcs solaires, le tarif de rachat garanti a été réduit à 25 ans et les primes n’ont été versées que pour un certain nombre d’heures d’ensoleillement par an. Après un changement de gouvernement à la fin de 2012, la nouvelle administration conservatrice a fait monter les enchères et a introduit une nouvelle taxe sur l’électricité de 7,5%, entraînant les bénéfices de l’industrie solaire vers une chute d’environ 30%.

Une bonne occasion pour l’énergie nucléaire ?

Cette semaine, la société américaine Nextera Energy a assigné l’Espagne devant le Centre International pour le Règlement des Différends relatifs aux Investissements (CIRDI) pour demander réparation. La société américaine considère les nouvelles règles comme une modification rétroactive des garanties d’origine. Nextera Energy a fortement investi dans Termosol, une centrale solaire espagnole.

D’autres grands investisseurs, comme un fonds d’investissement de la Deutsche Bank, qui sont impliqués dans la centrale andalouse Andasol, ainsi que la BNP, une banque française, ont demandé un arbitrage à un organisme de la Banque mondiale, le CIRDI (Centre International de Règlement des Différends sur l’Investissement). Un autre groupe d’investisseurs étrangers avait déjà lancé les premiers procès en 2011, sur la base de la Charte Européenne de l’Énergie qui promet la protection des investissements et interdit l’expropriation.

Si les investisseurs gagnent leur procès, l’Espagne peut s’attendre à des dommages et intérêts s’élevant à des milliards d’euros. Dans un tel cas, la poursuite de l’expansion des énergies renouvelables en Espagne serait alors rapidement abandonnée. Le ministre de l’industrie n’est pas seul à être conscient des conséquences possibles. Deux groupes traditionnels producteurs d’énergie, Endesa et Iberdrola, y voient même une bonne occasion pour de nouvelles ententes avec l’énergie nucléaire. Ils ont demandé une prolongation de la licence d’exploitation de la centrale nucléaire de Garoña qui avait déjà été mise hors service. Il est maintenant prévu que Garoña fournisse de l’électricité jusqu’en 2031. L’investisseur croit que, malgré de nouveaux investissements en matière de sécurité, la centrale nucléaire sera rentable.  Après le boom puis la faillite de ces dernières années, il est prévisible que la part des énergies renouvelables entame son déclin.

Source : Die Welt. Traduction : Jean-Pierre Cousty pour Contrepoints.

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  • Le rendement d’une éolienne est voisin de celui d’un ventilateur.

  • 313 gwh en 2010 ? vous êtes sûr ?
    cela me semble vraiment ridicule une très petite quantité.

    • Juste pour le solaire ? Je ne sais pas quel est le facteur de charge du solaire, mais avec 16%, je calcule que ça fait 223 MW de puissance installée.

    • http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nergie_en_Espagne#.C3.89nergies_renouvelables
      ici, on parle de 10 twh, ce qui n’est pas du tout la même chose.
      à mon sens, il est important d’être irréprochable sur les chiffres si l’on veut rester crédible.

      • dans les comparaisons internationales de l’article, pour éviter de lire tout l’article.

      • « il est important d’être irréprochable sur les chiffres si l’on veut rester crédible »

        Vous avez raison. Pour ma part, je n’ai pas le courrage de vérifier la cohérence des chiffres et je regrette que l’article n’évoque pas le problème des investissement espagnols dans les centrales à gaz.

        Mais d’une façon générale, sachant que le solaire est la moins rentable des EnR, je serais plutot inquiet pour les espagnols qui n’ont vraiment pas besoin de ça vu leurs problèmes économiques.

  • il y a une autre energie renouvelable qui devraut faire choux blanc en espagne , c’est la biomasse :
    pays de déprise agricole , pays longtemps arrièré en europe , et donc peut-etre plus enclin à accepter n’importe quel modernité , l’espagne a installé notement en andanlousie , des plantations forestières destinées non pas a produire du bois d’oeuvre ou de service ( papier ) , ce que l’on devrait attendre d’une telle activité , mais à etre brulées dans de gigantesque générateur d’electricité.
    une des espèces retenues, pour sa capacité à croitre trés vite, est le paulownia , venant de chine, pour le plus grand bénéfice de firmes qui ont  » volé  » les meilleurs variétés aux asiatiques , avant de mettre un brevet dessus pour que les gens n’est pas le droit de les multiplier eux-mème …
    quand on sait que sous le climat de l’andalousie , le paulownia a besoin d’etre irrigué pour bien pousser, que c’est une espèce exigeante en fertilisant et en soins , et que les plantations pour la biomasse necessite souvent plusieurs milliers de plants à l’hectare , on se demande quelle peut -etre la rentabilité de tels projets pharaoniques ?

  • Je me suis arrêté à « les énergies renouvelables sont devenues la principale source d’énergie ». Ca suffit à démontrer que la journaleuse qui a commis cet article n’a pas la moindre idée de ce qu’elle raconte.

    • Qu’est ce qui vous gène là-dedans ? On a absolument pas besoin de produire des chiffres exacts dans un article de journal !!! Vous découvrez le journalisme ? vous êtes un perdreau de l’année !

      Sachez Monsieur qu’un chiffre totalement faux ou invérifiable dans un article c’est comme une fausse note dans un joli morceau : si vous la jouez avec hésitation c’est une fausse note, si vous la jouez avec assurance, c’est une interprétation.

      Donc, l’essentiel c’est d’annoncer la chiffres de manière péremptoire, le reste on s’en fout complètement.

      D’autres questions ?

  • Il faut hélas constater que les socialistes sont les hyper champions des « bulles renouvelables » …

    En Espagne, acoquinés aux escrolos, ils ont mis le pays sur le flanc avec leur bulle immobilière et leur bulle énergétique, dont les effets dramatiques sont programmés pour des décennies.

  • L’ énergie du taureau est renouvelable mais est durable si tu chope la corne dans la poitrine

  • Déjà, on parle de quoi?

    D’énergie? d’énergie motrice? d’énergie calorique?

    Ou alors on mélange tout?

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