Croissance nulle, attitude négative, enfumage positif

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Croissance nulle, attitude négative, enfumage positif

Publié le 19 mai 2014
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Ça y est, la synchronisation du gouvernement avec la croissance du pays est achevée : tout est nul. Rassurez-vous, ce n’est ni grave, ni une surprise. C’est même parfaitement en ligne avec ce qui était attendu. C’est Michel Sapin, le ministre en charge des finances, qui l’a clairement annoncé.

Eh non ! N’allez pas croire qu’une telle annonce et de tels chiffres soient mauvais : en réalité, sans les précieux coups de boutoirs d’Arnaud Montebourg contre le capitalisme apatride sans foi ni loi, elle aurait probablement été négative. On peut donc dire que cette croissance nulle est, finalement, une excellente nouvelle qui n’a certainement pas coupé l’appétit à Michel Sapin.

sapin reprend des frites

Certes, on pourrait regarder un peu autour de la France et constater que d’autres pays, malgré une conjoncture mondiale pas toujours simple, s’en sortent pourtant. L’Allemagne, qui n’est pas exempte de problèmes, donne pourtant une indication de ce qu’il est possible de faire. Et la baisse d’impôts a tout de même eu quelques effets bénéfiques en Angleterre qui n’affiche pas le même taux de chômage que la France. Le fait est que le gouvernement de Cameron a lâché la bride aux entreprises qui créent maintenant 100.000 emplois chaque mois à tel point que le 5 mai, l’OCDE rehaussait ses prévisions de croissance pour 2014, à 2.7%, la plus forte d’Europe.

De toute façon, on peut toujours mâtiner ces observations de la nécessaire prudence liée à des marchés boursiers et monétaires suspects, on peut largement admettre que les finances publiques des pays qui s’en sortent encore à peu près ne sont pas, loin s’en faut, en pleine forme. Mais les petites lignes au bilan, en bas de tableau, ne laissent guère de doute : après une France sous Sarkozy en plein marasme, la France de Hollande s’enfonce.

Devant ce constat, on doit s’interroger pour comprendre pourquoi ces chiffres sont présentés comme – je cite Sapin – « pas grave ».

Une raison se dégage d’abord : toute autre chose qu’un déni de réalité obligera de façon certaine l’exécutif à inscrire de nouvelles prévisions de PIB et, surtout, de recettes fiscales dans la future loi de finances rectificative de juin, ce qui, vis-à-vis de l’étranger (FMI et Commission Européenne notamment), serait catastrophique. Et en terme de politique intérieure, admettre que la croissance a pris ses valises pour aller s’installer durablement outre-Rhin et outre-Manche revient à expliquer que le Pacte de Croissance, péniblement signé il y a deux semaines avec force dissensions dans la majorité, était basé sur des prévisions de PIB fausses. Autrement dit, l’encre n’a pas eu le temps de sécher que le pacte serait déjà caduc. Voilà qui n’aiderait pas à conserver une majorité rassemblée…

Tout ceci est ennuyeux, parce qu’à mesure qu’augmentera l’écart entre les prévisions et la réalité, tant les institutions étrangères que françaises seront obligées de demander un réalignement de la politique économique pour tenir compte des nouveaux chiffres. Bien sûr, on peut, comme le chef de l’État, s’entêter bizarrement sur la certitude d’un prochain retournement, dans six mois, un an, deux ans (allez savoir), mais c’est un pari risqué, surtout avec les données macro-économiques actuelles, et les problèmes structurels français.

Bon, OK, les espoirs du candidat Hollande (0.5% en 2012, 1.7% en 2013, et 2 à 2.5% à la fin du mandat) paraissent particulièrement décalés deux ans après le début de son mandat, mais on peut accorder au candidat Hollande une ignorance de l’ampleur de la crise à laquelle le président, maintenant, ne peut plus et ne doit plus faire référence : non seulement, il a eu le temps de prendre la mesure des dégâts, autant liés à la conjoncture très défavorable qu’aux imbécillités politiques d’une droite économiquement à la rue, mais il a aussi largement eu le temps d’agir pour corriger le tir.

montebourg régule googleOr, ni lui ni la fine équipe en place ne l’ont fait. Montebourg continue d’agonir les entreprises de son mépris (la dernière en date étant Google, au sujet de la recherche) et le dernier décret pondu dans l’urgence, même s’il restera probablement inapplicable, montre de façon assez symptomatique l’idéologie qui agite le ministre et, par extension, le gouvernement : le repli sur soi, le protectionnisme le plus agressif, et une attaque brouillonne et répétitive des valeurs entrepreneuriales… On voit mal dans cette attitude ce qui va relancer le moteur économique français.

Quant à la dernière manœuvre de Valls, elle laisse songeur. À quelques jours des élections européennes, le Premier ministre se rend compte, ingénu, que la pression fiscale serait un tantinet trop forte, notamment par l’arrivée récente et pas du tout voulue d’1,8 million de nouveaux ménages (soit 3 millions de Français) dont, statistiquement, une partie avait le bon goût de voter pour les socialistes et qui risquent bien, avec le petit rappel citoyen et fiscal, de ne plus adouber le parti de leurs votes. On comprend bien qu’ici, il s’agit de calmer le jeu avec les européennes qui approchent, même si la proposition semble délicieusement parfumée de panique.

Et pour rattraper le coup, Manuel propose donc d’ajouter une réduction calculée sur le revenu fiscal de référence. Si, bien sûr, cette réduction d’impôts est toujours bonne à prendre, l’aspect « simplification fiscale » est encore une fois oublié. Et comme d’habitude, l’option « On annule ce qui avait créé le problème en premier lieu » n’a pas été choisie.

En outre, cela revient à constater une baisse d’un milliard d’euros dans les caisses de l’État, fort dépourvues. Si la mesure est effectivement appliquée, et atteint ses objectifs, il va donc falloir trouver un milliard supplémentaire ailleurs… Ou faire des coupes.

Or, la solution proposée par Valls pour dégoter ce milliard n’est pas, justement, d’adapter le périmètre de l’État pour compenser cette perte de revenus. Pour lui, il suffira d’intensifier la lutte contre la fraude fiscale.

La situation est donc la suivante : la croissance est nulle, les perspective économiques sont médiocres, mais le gouvernement, refusant de prendre en compte les exemples pourtant éclairants autour de la France, continue à déployer un enfumage positivement grandiose pour camoufler son absence de toute coupe budgétaire pourtant nécessaire, et d’afficher une attitude négative, voire hostile, aux entreprises.

Forcément, ça va marcher.

valls : c'est pas gagné
—-
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  • Sapin a raison : c’est pas grave.

    La politique économique de Hollande, c’est d’attendre que les autres aillent mieux pour nous soutenir plus. L’Allemagne et le Royaume UNI vont mieux donc tout va bien car on va pouvoir leur demander de soutenir plus la France. Ils ont inventé le socialisme et la redistribution entre états. (Ils ont seulement oublié de les prévenir et de leur demander s’ils étaient d’accord – mais c’est un détail).

    La France est le trou du cul de l’Europe, et elle va finir par se faire botter le train.

  • Il ne faut oublier le coût des banlieues .

    Les chiffres de l’INSEE démontrent que dans les villes où l’immigration extra-européenne est très importante, l’impôt sur le revenu par foyer fiscal est de 2 à 5 fois inférieur à la moyenne nationale.

    Impôts sur le revenu par an par foyer fiscal (chiffres 2009).

    Moyenne nationale : 1240 euros.

    Sevran : 640 euros
    Saint-Denis : 600 euros
    Aubervilliers : 420 euros.
    Villiers-le-Bel : 420 euros.
    Clichy-sous-Bois : 380 euros.
    Grigny : 310 euros.
    Vaulx-en-Velin : 260 euros.

    Quartiers nord Marseille.
    3ème Arrondissement : 220 euros.
    14ème Arrondissement : 350 euros.
    15ème Arrondissement : 260 euros.

    Pendant ce temps, la France continue de verser des fortunes dans les banlieues.

    Depuis 1989, la seule politique de la Ville a coûté 90 milliards d’euros.

    Source
    INSEE Revenus imposables et montant des impôts – Années 2010, 2006 à 2009

  • Oui, pour ceux qui croyaient que le gouvernement marche à voiles et à vapeur, il faut se faire à l’idée qu’il ne marche qu’au vent. Le capitaine et et ses premiers couteaux attendent la brise qui viendra outre Atlantique pour redémarrer. Mais c’est sans compter avec un ou deux petits détails, le France est en train de couler et il n’y a plus de voile. Les rameurs se font rares et il y en a même qui font des trous dans la coque pour s’amuser…

  • Et les médias qui continuent de nous enfumer de stats partielles…

    Aujourd’hui apitoiement sur les stations de ski, la fréquentation a été en baisse.
    Il est sous-entendus que la baisse est liée à la TVA, aux vacances scolaires et au mauvais temps et les skieurs manquants sont restés chez eux. Peut etre pour certaine personne, mais pas pas pour d’autre.

    Serait t-il possible de savoir de combien les fréquentations des stations frontalières ont augmentés ?

    Moi même comme certains autres, on va au ski exclusivement en Espagne maintenant, pour 50km de plus le service est autre et pour pas plus cher, voire moins.
    Je ne suis pas le seul dans ce cas, et nous participons à cette baisse de fréquentation qui est imputable à tout sauf ce qu’ils avancent.

  • Je pense pas que Sapin soit du genre à prendre des frites à la cantoche, ni à boire l’eau du robinet dans une carafe en inox.

  • Aurions changé le pédalo pour un sous-marin ❓ 🙄

  • Information indispensable pour commenter les derniers chiffres du PIB : non seulement ils sont mauvais, mais ils sont mauvais meme apres avoit ete bidonnes. Si vous allez sur le site de l’INSEE, vous verrez un bel avertissement avant chaque statistique de croissance : changement de methode, les amis ! Entre autres, les depenses de r&d sont (combien, comment, pas trouve l’info) desormais des produits contribuant positivement au PIB.
    pour ceux qui se demandent d’ou ca vient : des USA.

    • La politique de gouvernance globale venant des US, normal qu’on applique des méthodes US.
      Inclure la R&D dans le PIB n’est pas forcement un mal, il y a des sociétés qui consacrent une somme importante à la R&D, et ces sommes ne sont pas comptabilisées dans le PIB alors qu’elles participent à l’économie du pays.
      Cette méthode ne me choque pas, je serais meme heureux de constater que la R&D est bien présente dnas le socle économique, si tant est qu’on ait encore des créatifs et autres chercheurs pas encore pourris par l’éducation nationale pour aboutir à quelque chose à la fin.

  • Les commentaires sont fermés.

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