Ukraine : faites du commerce, pas la guerre

Quelle est la bonne approche à mettre en œuvre face à la situation en Ukraine ?

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Libre échange commerce

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Ukraine : faites du commerce, pas la guerre

Publié le 12 mai 2014
- A +

Par Patrick de Casanove.

Libre échange commerceChacun connaît les événements dramatiques qui se déroulent en Ukraine depuis plusieurs mois.

Malheureusement, personne ne cherche vraiment à calmer le jeu. Le pouvoir de Kiev envoie l’armée, les milices prorusses étendent leurs actions, les Russes attendent que le fruit soit mûr, les États-Unis, plus ou moins bien suivis pas les Européens, se lancent dans les sanctions économiques.

Les hommes politiques occidentaux sont devant un dilemme : comment exister aux yeux de l’opinion publique en tant que champions de la liberté, sans en avoir les moyens et sans y laisser de plumes. Les sanctions économiques sont le moyen de coercition utilisé par ceux qui ne veulent pas y aller parce que personne n’est prêt à en supporter le coût, tout en donnant l’impression d’agir mais à moindre frais. Le but de ces sanctions est que la partie des élites russes très impliquée dans les échanges internationaux fasse pression sur leur gouvernement pour que celui-ci se couche. Résumer de cette manière met en évidence toute la difficulté de cette attitude et tout ce qu’elle a d’aléatoire quant aux résultats.

L’histoire montre que les sanctions économiques atteignent rarement leurs objectifs. Comme toutes les prohibitions, elles sont contournées. Elles encouragent la coopération entre États parias qui, pour cela, peuvent oublier leurs désaccords  idéologiques. Elles détournent les flux commerciaux vers des pays qui n’appliquent pas de sanctions. Elles sont à double tranchant quand elles visent un pays puissant. Si elles font toujours souffrir les habitants des pays cibles, les dirigeants restent en place.

C’est le cas par exemple en Iran, en Corée du Nord ou à Cuba. Les gouvernements en sont parfois renforcés parce que les populations rendent les sanctions responsables de leurs malheurs. Dans ce cas l’effet est inverse à celui attendu. C’est flagrant pour Cuba où il est intéressant de remarquer que l’embargo américain est présenté par les « progressistes » de tout poil comme un blocus et comme responsable de la ruine de Cuba. Cet embargo a détérioré l’image des États-Unis. Il apporte encore aujourd‘hui de l’eau au moulin de tous ceux qui, de par le monde, combattent « l’impérialisme yankee ».  Le régime cubain gagne ses galons de victime résistant à l’oppression. Le communisme mortifère est dédouané.

Enfin et c’est le plus paradoxal, les sanctions économiques laissent le champ libre à la force et mettent au premier plan l’action violente terroriste ou militaire. En excluant la concurrence économique la confrontation peut devenir facilement guerrière. Un concurrent devient un adversaire, il faut peu de choses pour en faire un ennemi.

Dans le cas de l’Ukraine, force est de constater que la Russie est mieux préparée au rapport de force que les Occidentaux. Son point faible n’est pas le soldat, ni même « l’arrière ». Le point faible est le politicien occidental. Ce dernier est beaucoup plus pusillanime et manque de ténacité dans les conflits qu’il décide pourtant fréquemment. L’Irak et l’Afghanistan, pour ne citer qu’eux, sont là pour en témoigner. Qui plus est, qu’on le veuille ou non, Vladimir Poutine défend son pays. C’est un avantage. Il est impossible de faire fi de l’histoire et de la géographie. Les Occidentaux ne défendent pas les leurs, mais un principe. Le sacrifice doit avoir un sens. Les soldats russes sont prêts à mourir pour la Russie. Les Occidentaux ne sont pas prêts à mourir pour l’Ukraine. Les rodomontades sur l’absence d’armée européenne n’y changeront rien. La faiblesse des armées nationales en Europe étant d’ailleurs de mauvais augure.

Ce que craignent les régimes dictatoriaux ou totalitaires, ce n’est pas l’épreuve de force qui est leur terrain de prédilection, c’est le libre-échange incluant la libre circulation des personnes. C’est pour cela qu’ils construisent des murs. L’histoire nous apporte de nombreux exemples de concurrence entre systèmes économiquement libres et moins libres. Il suffit de citer l’Allemagne de l’Ouest et de l’Est, la Corée du Sud et du Nord, La Chine continentale et Taïwan, la Chine communiste avant et après son ouverture au marché, sans oublier les États-Unis et l’URSS. Le système capitaliste a montré qu’il est plus juste et plus efficace.

Il est plus malin d’affronter un adversaire sur un terrain qui ne lui est pas favorable.

Historiquement, ce qui a fait la spécificité de l’Occident c’est l’émergence de la philosophie libérale qui repose sur les Droits naturels individuels : la Propriété, la Liberté, la Personnalité. Ce sont ces valeurs qui lui ont permis d’accéder à la puissance et à l’abondance. C’est son terrain favorable, celui de la liberté économique, du libre choix et de la concurrence. Sur ce terrain, la ténacité de l’Occident ne fait pas défaut.

Frédéric Bastiat écrit dans Échange :

« Simplicité dans les gouvernements, respect de la dignité individuelle, liberté du travail et de l’échange, paix entre les nations, sécurité pour les personnes et les propriétés, tout cela est contenu dans cette vérité: les intérêts sont harmoniques. » 

La liberté économique et le libre-échange sont facteurs de paix. Le protectionnisme et la coercition économique sont causes de conflits. Pour sortir de la crise par le haut, la voie de la sagesse impose la liberté économique comme moyen de paix et de stabilité.

Une partie de l’Ukraine est attirée par l’Europe, une autre par la Russie. Les Occidentaux soutiennent les uns, les Russes les autres. L’intérêt de tous est que les parties concurrentes échangent, y compris les Occidentaux et Russes. Ouvrons la compétition économique.

Que les Occidentaux influencent leur poulain pour qu’il donne la liberté économique à ceux vivant sur les territoires qu’il contrôle. Que la Russie agisse comme elle l’entend dans les siens. La partie la plus économiquement libre sera vite la plus prospère. Bien sûr, une liberté même médiocre comme celle qui prévaut en France (70e rang mondial avec une note de 63,5 au classement 2014 de l’Index of economic freedom que publie chaque année Heritage Foudation.) serait quand même efficace. Mais le succès sera d’autant plus net et rapide que la liberté économique sera  grande. Il faut donc une véritable liberté économique de combat qui mérite une note de plus de 80, note difficile puisque seuls six pays l’ont obtenue en 2014, et sont donc économiquement libres.

À la longue, la liberté finit par triompher et par s’étendre sans effusion de sang. Elle met également fin à la corruption. Il n’y a personne à corrompre parce qu’il n’y a pas de faveur ou de passe-droit à acheter. La liberté économique stimule. La partie la moins libre devra à un moment ou à un autre s’y convertir sous peine de se retrouver marginalisée et de passer à côté du train de la prospérité.

Il vaut donc mieux faire du commerce que la guerre. Le libre-échange engendre des intérêts croisés qui induisent des relations pacifiques parce que mutuellement avantageuses. La liberté économique fait d’un adversaire un concurrent. Plus personne n’a intérêt au conflit. Dans ce contexte, la confrontation physique n’a plus de raison d’être.

Tout le monde y gagne.

Les Russes sont maîtres des fonctions régaliennes sur les territoires où s’exerce historiquement leur souveraineté. Il en est de même pour le gouvernement ukrainien sur le reste du territoire, ce qui ne gêne en rien les habitants quels qu’ils soient. Ils sont individuellement libres et maîtres de leur vie car les États ont des pouvoirs limités à la protection des libertés individuelles. Les Occidentaux ont atteint leur objectif d’extension des libertés. Russes et Occidentaux ont sauvé la face. L’Ukraine est sortie de la crise et a retrouvé la prospérité, fruit de la liberté économique.

Le point délicat est que cette solution dépend de la sagesse des hommes politiques. Ce n’est pas la chose la mieux partagée.

Voir les commentaires (6)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (6)
  • Votre article ne fait que reprendre les idées de Jean Monet à la base de la fondation du traité de Rome.
    Une piqure de rappel des bases de la fondation de l’Europe ne fait jamais de mal

  • Voilà ce que donne la propagande UEiste répêté à outrance.

    Un Ukrainiens qui se lève contre une junte (il ne devrait pas sous prétexte que ce sont comme dirait Kennedy « nos salauds ») est forcement une marionnette de la Russie et aspire forcement à moins de liberté qu’un Galicien banderiste.

    Vous commencez aux sanctions, pourquoi ne pas commencer aux manœuvres occidentales pour évincer un président élu mais non compatible avec le projet de gouvernement mondial qui est le bute finale de presque toutes les élites de l’occident.

  • Nouveau commendement des pseudos-libéral:

    Avec ceux qui ne sont pas dans l’OMC, du commerce tu ne ferras pas.

    Ridicule.

  • Il y a bien de choses à reprocher aux russes, en particulier celle d’avoir soutenu un régime socialiste, de souffler sur les braises et d’avoir truqué le referendum en Crimée, mais les européens ont le tort d’imposer des sanctions et de ne pas accepter la réalité: une partie de l’Ukraine veut faire sécession.
    En revanche je ne suis pas d’accord avec l’article quand il minimise la puissance des armées européennes.

    • Ianoukovitctch, socialiste, lui qui a instauré la flat tax?!

      Truqué le référundum en Crimée vous tenez cela d’où de CNN c’est cela?

      Et bien tout organisme était invité à assister et même à filmé, ceux qui n’ont pas voulue venir n’ont rien à dire.

      C’est amusant mais si je caricature à peine sur les TV de l’Ouest les seules Criméens interrogés qui ne voulaient pas quitter la Crimée en cas de rattachement c’étaient ceux qui affirmaient vouloir prendre les armes. Et bien évidement les soldats Ukrainiens s’ils sont certain du rattachement serait prêt à être mit en pièce ex…

      Finalement comme ont pouvait s’y attendre, la poppulation a légèrement augmenté et non diminué, personne n’a prit les armes contre la Russie et les miliaires n’ont pas obéit à la junte de Kiev qui ordonné de faire feu, plus encore la plupart se sont engager dans l’Armée Russe.

      Ce que beaucoup ne comprenne pas c’est que s’il y a toujours eu une minorité de rattachiste un peu partout en Ukraine, le coup d’Etat a complètement changé la donne.

      C’est un peu comme comme Pearl Harbor qui réveil les américains et il faut bien dire que l’Ouest à pousser au coup d’Etat.

      Pour la Russie qui soufflerait sur les braises, rappelons, que le Président élu est constitutionnellement président, que tel est l’avis de la cour constitutionnel et que le parlement de l’Est et du Sud n’a pas attendu l’avis de Moscou pour dire que Kiev n’avait aucune légitimité de quelque ordre que ce soit.

      Après libre à vous de vous persuadé dans le scénario à la CNN d’une Ukraine uni et de séparatiste qui serait des soldats Russes.

      Mais si vous voulez un jour visité l’Ukraine, vous aurez bien des surprises.

      • « Truqué le référundum en Crimée vous tenez cela d’où de CNN c’est cela? » dans les années 90, il y eu un référundum sur l’ukraine (référundum que personne ne peut contester qu’il était libre).partout le oui à l’ukraine a été nettement majoritaire y compris en crimée. aujourd’hui, il y a un référendum sansaucun controle extérieur et le oui est nettement majoritaire. c’est super crédible

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Nicolas Tenzer est enseignant à Sciences Po Paris, non resident senior fellow au Center for European Policy Analysis (CEPA) et blogueur de politique internationale sur Tenzer Strategics. Son dernier livre Notre guerre. Le crime et l’oubli : pour une pensée stratégique, vient de sortir aux Éditions de l’Observatoire. Ce grand entretien a été publié pour la première fois dans nos colonnes le 29 janvier dernier. Nous le republions pour donner une lumière nouvelles aux déclarations du président Macron, lequel n’a « pas exclu » l’envoi de troupes ... Poursuivre la lecture

Les Gilets verts ont bloqué le pays avec leurs tracteurs en demandant notamment que l'on n’importe pas ce que l’on interdit en France. Leurs revendications ont également porté sur l’accès à l’eau et sur la rigueur des normes environnementales françaises, qui seraient plus exigeantes que celles de leurs concurrents.

C'est la hausse du prix du gazole agricole qui a mis le feu aux poudres, en reproduisant les mêmes effets que la taxe carbone sur tous les carburants, qui avait initié le mouvement des Gilets jaunes cinq ans plus tôt.

Poursuivre la lecture
Ukraine : inquiétude sur le front et à l’arrière

Le mois de février aura vu s’accumuler les mauvaises nouvelles pour l’Ukraine. Son armée est confrontée à une pénurie grave de munitions qui amène désormais en maints endroits de ce front de 1000 km le « rapport de feu » (nombre d’obus tirés par l’ennemi vs nombre d’obus qu’on tire soi-même) à près de dix contre un. Ce qui a contribué, après deux mois d’intenses combats et de pertes élevées, jusqu’à 240 chars russes, selon Kyiv, à la chute d’Adviivka, vendredi dernier. La conquête de cette vill... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles