École : 4 grandes libertés à reconquérir

Réclamons la liberté pour l’école d’échapper à la montée de l’insignifiance.

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École : 4 grandes libertés à reconquérir

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 9 janvier 2014
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Par Lionel Devic, président de la Fondation pour l’école.

école

Les libertés sont en recul dans notre société, et en particulier à l’école. Chacun le ressent, mais pas question de s’y résoudre !

La première liberté de l’école est… d’être une école, c’est-à-dire un lieu consacré avant tout à l’instruction des enfants. Ce qui nous semble une lapalissade ne va plus de soi pour ceux qui nous gouvernent : le ministre Peillon affirme ainsi vouloir se servir de l’école pour changer les mentalités, rééduquer les consciences en brisant les stéréotypes culturels, bref instrumentaliser l’école à des fins politiques. Cette dérive de l’institution scolaire n’est bien sûr pas neuve : la transformation en 1932 du ministère de l’ « Instruction publique » en celui de l’ « Éducation nationale » le prouve. Cette ingérence étatique dans l’éducation des consciences a eu pour conséquence malheureuse une perte d’efficacité de l’école dans sa mission constitutive qui est d’instruire. C’est en chargeant l’école de missions étrangères à sa nature qu’on a enclenché son déclin : depuis qu’elle est priée de casser les mécanismes de reproduction sociale, elle est devenue un accélérateur d’inégalités. Les tests PISA de l’OCDE montrent que la France est le pays où les origines sociales pèsent le plus dans les différences de résultats académiques des enfants, et où les disparités de niveau entre élèves sont les plus fortes. Bref, l’obsession égalitariste de l’école n’a su que conduire au creusement des inégalités sociales par l’école. C’est en instruisant sans faire de politique que l’école redeviendra un outil de justice sociale.

La deuxième liberté fondamentale dans une école est la liberté d’enseigner des professeurs : ces derniers doivent pouvoir choisir leur établissement puis sélectionner eux-mêmes les œuvres qu’ils étudieront et les méthodes qu’ils emploieront, au regard des besoins de leurs élèves.Cela se fera bien sûr dans le cadre fixé par la loi et par la charte éducative de l’établissement, mais ce cadre doit être clair, stable dans le temps, et limité à l’essentiel. Le détail de la progression, le choix des œuvres à étudier doivent relever de la liberté des maîtres. Dès lors que le professeur se pense en exécutant, en petit fonctionnaire docile aux ordres de la dernière circulaire, tremblant à l’idée d’une possible inspection académique, il perd la liberté intérieure et la dignité nécessaires pour fournir un enseignement véritable.La liberté d’enseignement, la liberté pédagogique, la liberté de conscience des professeurs ne sont pas négociables, même dans un établissement public.

La troisième liberté de l’école est la liberté d’entreprise. Que les âmes sensibles qui défaillent lorsqu’elles entendent les mots marché, entreprise, concurrence, efficacité ne tournent pas de l’œil : il ne s’agit pas de cela ici mais simplement de la liberté d’entreprendre, c’est-à-dire de la faculté qui est laissée au directeur d’une école de pouvoir s’organiser librement (en fixant lui-même les moyens éducatifs à mettre en œuvre pour atteindre les fins qu’il s’est fixées) et de recruter une équipe professorale en harmonie avec le projet pédagogique de son école – ce qui n’est le cas aujourd’hui ni dans le public ni dans le sous-contrat pour les titulaires. Comment s’étonner que les établissements scolaires publics actuels, dont le chef ne peut choisir ni ce qu’il fait ni avec qui ni comment, rencontrent de graves difficultés ?

La quatrième liberté de l’école est celle d’alimenter suffisamment l’intelligence des enfants : nous réclamons la liberté pour l’école de pouvoir nourrir l’enfant dans sa recherche de la vérité, dans sa quête de sens. Il ne s’agit pas de l’endoctriner, mais simplement de répondre à sa soif d’absolu, de grandeur, d’exemplarité, de proposer à son admiration de grands hommes et des œuvres géniales. Aujourd’hui, les programmes scolaires imposés condamnent trop souvent nos enfants et leurs professeurs à s’escrimer sur des textes médiocres par leur fond comme par leur forme. Les anti-héros sont préférés aux héros.Tout ce qui pourrait édifier fait horreur. Pourquoi ne leur donner que des anti-modèles ? On voudrait les déprimer que l’on ne s’y prendrait pas autrement.

Bref, réclamons la liberté de choisir des œuvres touchant à l’universalité de l’homme. Réclamons la liberté pour l’école d’échapper à la montée de l’insignifiance.


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  • Je suis en accord avec ces 4 libertés essentielles à reconquérir pour l’instruction de nos enfants. ( l’éducation, c’est le rôle des parents)

    Mais ne vous méprenez pas : la neutralité idéologique ou philosophique n’existe pas… n’a même JAMAIS existée…
    – chaque professeur « influencera » selon sa conscience la réflexion des élèves, ni plus ni moins qu’aujourd’hui.
    – la disparition d’une « doctrine » d’état, par d’autres « doctrines » individuelles ou communautaires n’y changera rien.
    – l’éducation familiale elle même est porteuse de ces influences « partisanes »…

    est ce grave docteur ?

    L’important pour l’instruction est de fournir les bases et la méthode pour pouvoir questionner ses vérités. ( celles transmises par le milieu familial comme celles transmises par l’état, la religion, le syndicat, les media etc.. )

    • Quand on remplace une doctrine d’État par des doctrines individuelles ou communautaire, on ouvre au moins des portes de sortie. Ce n’est déjà pas si mal.
      Aucun père de famille ne peut empêcher ses enfants de se trouver en contact avec des idées autres que les siennes. Les déterminismes familiaux, dont les socialistes veulent protéger les enfants, sont beaucoup moins dangereux que les manipulations étatiques.

  • Entièrement d’accord avec cet article. Quand allons-nous faire confiance aux gens et cesser des les enfermer dans des « protocoles » et des « programmes » rarement adaptés à la réalité du terrain ?

  • « La liberté d’enseignement, la liberté pédagogique, la liberté de conscience des professeurs ne sont pas négociables, même dans un établissement public. »
    Allons y les charted schools!

  • 1. Même si les tests PISA pour quiconque s’y connaît un peu sont à prendre avec des pincettes, d’autres études montrent le poids important de l’origine sociale sur les résultats scolaires. On remarquera d’ailleurs que cela a augmenté depuis le passage de la droite, la fin de la carte scolaire ainsi que la suppression de postes dans les quartiers les plus défavorisés sans même parler des RASED pour les élèves en difficulté.
    2. je suis entièrement d’accord avec vous, mais le problème c’est que le point 3. vient en contradiction avec celui qui précède. En effet, lorsqu’on observe une plus grande autonomie accordée aux chefs d’établissement, sur le recrutement, l’évaluation, on constate une uniformisation de l’enseignement, les enseignants n’enseignent plus pour transmettre des savoirs mais pour avoir de bons résultats aux tests très codifiés (donc risque de bachotage). C’est ce qu’on a pu observer en Suède après les réformes des années 90.

    4. je suis entièrement d’accord avec le début, mais la suite ressemble surtout à une mauvaise diatribe idéologique sans fondement.

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